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C) Chez l’adulte

III- Dyssocialisation primaire

La dyssocialisation primaire est un trouble de l’acquisition à la fois des autocontrôles, mais aussi, des codes de communications canins pourtant indispensables à la vie en groupe social. C’est une affection peu fréquente, qui entraîne la formation de véritables « délinquants canins » (MULLER 2000).

1- Etiopathogénie

L’acquisition des conduites sociales se déroule normalement entre la cinquième et la douzième semaine. On rappelle que la hiérarchisation réelle chez le chiot, débute au sevrage, avec la hiérarchisation alimentaire et est concomitante avec l’apprentissage des règles de communication. Elle constitue la base qui permettra ensuite au chiot d’intégrer la hiérarchie du groupe ou de la meute à la puberté.

L’origine de cette affection correspond à un défaut d’acquisition des conduites sociales.

Pour des chiens atteints, il semble que la notion de contrainte soit intolérable et, dès la plus petite contrariété, ces animaux vont agresser la source d’opposition. Tout se passe en fait comme si les voies nerveuses qui permettent d’accepter les contraintes n’avaient pas été initialisées (PAGEAT 1998).

2- Facteurs de risque

Les chiots à risque sont des animaux qui ont été séparés trop précocement de leur mère, c’est-à-dire, vers quatre semaines au moment du sevrage. Ils n’ont pas eu le temps d’acquérir l’ensemble des règles hiérarchiques (PAGEAT 1998; BEATA 2005).

De même, le fait de mettre les chiots en lots et de les confier à des éducateurs inexpérimentés, semble engendrer plus fréquemment des chiots dyssocialisés. Le défaut notamment, de l’apprentissage des règles de hiérarchie alimentaire, est le plus pathogène et entraîne des troubles profonds (PAGEAT 1998; BEATA 2005). De tels déficit éducatifs ne peuvent faire suite qu’à de graves erreurs, la principale étant la séparation totale du jeune de tout éducateur adulte dès la fin de l'allaitement (MULLER 2000). Nombre d’éleveurs savent qu’il faut ne pas le faire mais pensent que la race qu’ils élèvent est différente et constitue une exception. Parce que cette coutume a la vie dure, ils pensent qu’une race est associée à un caractère et qu’il faut pratiquer cette séparation ou cette technique d’élevage particulière, uniquement dans cette race qu’ils produisent. L’éthologie nous indique que le comportement canin est particulièrement homogène. Traiter tel ou tel groupe en particulier est à coup sûr une erreur.

3- Manifestation clinique

Il s’agit de chiens âgés de plus de trois mois, chez lesquels on observe des comportements d’agression par irritation, et parfois, d’agression hiérarchique lorsque les propriétaires tentent de contrôler leurs activités. Les principales caractéristiques de ces animaux sont d’une part leur absence de capacité à se soumettre, même si visiblement, ils sont en train de perdre le conflit. Le chien est décrit comme « préférant être assommé plutôt que de céder ». D’autre part, les conduites sociales hiérarchisées, qu’elles soient, alimentaires ou sexuelles, sont totalement absentes. Cette anomalie de développement s’accompagne régulièrement d’un déficit des auto-contrôles moteurs : lors des agressions, les morsures sont, par conséquent, violentes, tenues et sans aucun contrôle de l’intensité. Des signaux de menace sont généralement émis en même temps que la morsure et se poursuivent pendant l’acte. Ces

chiens se rendent également coupables de vols de nourriture auxquels ils associent des comportements d’agression (PAGEAT 1998).

4- Epidémiologie

Il ne semble pas possible de mettre en évidence la moindre corrélation avec le sexe ou la race. Toutefois, les chiens dont la croissance est réputée difficile, comme les lévriers ou les races géantes sont plus prédisposés que les autres. Il semble également que les chiots malades qui présentent de l’anorexie, au moment de leur adoption dans la famille humaine, soient plus exposés à la dyssocialisation primaire, du fait de l’intérêt que portent les maîtres à la quantité de nourriture ingérée. La hiérarchisation alimentaire ne se fait pas correctement et l’acquisition du reste des conduites sociales est compromise.

Enfin, l’arrivée d’un chiot dans une famille avant l’âge de huit semaines est un facteur de risque important (PAGEAT 1998).

5- Evolution

L’évolution la plus souvent rencontrée, se manifeste par une hyperagressivité secondaire, lorsque les comportements d’agression s’instrumentalisent. On remarque que les troubles semblent évoluer assez différemment selon la taille des chiens. Les animaux de grande et moyenne taille ont tendance à effectivement développer une hyperagressivité secondaire ; l’instrumentalisation étant facile, compte tenu du fait que les maîtres ont peur de se faire mordre. Chez les petits chiens toutefois, la crainte des morsures étant plus faibles, les chiens auront plutôt tendance à développer de l’anxiété intermittente (PAGEAT 1998).

L’utilisation comme reproducteur d’un animal dyssocialisé a toute les chances de conduire à des chiots ayant un comportement dangereux à leur tour (APPLEBY 2002).

Heureusement, le plus souvent, ces animaux sont incapables de se comporter normalement avec leurs congénères et la saillie est quasi impossible. Le comportement de la femelle ne permet pas un maternage correct et elle est souvent incapable de mener une portée jusqu’au sevrage, même avec l’aide de l’éleveur (MULLER 2000).

6- Pronostic

Le pronostic est généralement bon. Cependant, face à un grand chien, il ne faut pas négliger le danger potentiel. On est, en effet, face à un animal, qui est incapable de se contrôler et qui ne supporte pas la moindre limitation à l’assouvissement de ses envies. Il faut

donc adopter une attitude prudente et éclairer soigneusement le propriétaire avant toute décision.

Par ailleurs, la présence au sein de la famille, d’enfants en bas âge est un facteur de risque d’accident très important. Les enfants, parce qu’ils veulent jouer avec le chien et ne savent pas interpréter les postures de menace, pourraient déclencher des agressions par irritation. L’évocation de l’éventualité de morsures au visage avec leurs conséquences esthétiques, fonctionnelles et psychologiques peuvent aider les propriétaires à prendre conscience du danger (PAGEAT 1998).