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Dans cette partie, certaines caractéristiques relatives à la violence physique utilisée par les adolescents lors de la commission de leur(s) délit(s) actuels ont été explorées. Soixante-et- onze adolescents sur les cent six de notre échantillon sont accusés d’au moins un délit violent envers d’autres personnes au moment de leur admission à l’IPPM. Les données suivantes concernent la violence physique utilisée par ces adolescents au cours de ce(s) délit(s).

TDC identifié à partir du DSM-IV

Une différence significative existe entre les groupes de délinquants. Tel qu’indiqué dans le tableau 22, les délinquants bipolaires sont proportionnellement plus nombreux à avoir commis des crimes violents envers des personnes en autorité que les délinquants sans pathologie associée (100% vs 44,4% : p ≤ 0,05). Celles-ci peuvent être, par exemple, un enseignant, un intervenant, un éducateur ou un policier.

Tableau 22. Informations sur la violence physique utilisée par les adolescents selon le type de TDC identifié à partir du DSM-IV.

TDC seul

(gr. 1) (n = 45) TDC et MAB (gr. 2) (n = 5) TDC et TDAH (gr. 3) (n = 21) Fisher’s Exact Test Informations sur la violence physique utilisée (n = 71)

Envers des personnes autres qu’en autorité 91,1% 60,0% 81,0% N.S. Envers des personnes en autorité 44,4% 100% 61,9% 2 > 1; p ≤ 0,05 Violence planifiée/ proactive 66,7% 20,0% 52,4% N.S. Violence non- planifiée/ réactive 66,7% 100% 81,0% N.S.

D’autres informations intéressantes sont notées, même si les différences entre les groupes ne sont pas significatives.

Toujours d’après le tableau 22, les délinquants sans pathologie associée ont été violents tant d’une manière planifiée (66,7%) que réactive (66,7%), en plus de constituer le groupe que présente la plus grande proportion de jeunes se livrant à des comportements agressifs proactifs. Plus de 90% d’entres eux ont en effet été violents physiquement envers des personnes qui ne sont pas en position d’autorité, tel un autre jeune ou un membre d’un gang rival. Malheureusement, les délits pour lesquels ils ont été reconnus coupables et ceux pour lesquels ils sont présentement accusés sont regroupés dans la même catégorie appelée nombre total de délits à l’admission à l’IPPM. Il est donc impossible de savoir combien de délits ont été planifiés ou commis en réaction à une provocation.

Néanmoins, il demeure que c’est chez les délinquants sans pathologie associée qu’on rencontre la plus grande proportion de jeunes ayant commis des délits violents prémédités de même que des délits commis envers les personnes n’étant pas en position d’autorité. Ils

regroupent par ailleurs les plus faibles proportions de jeunes ayant commis des délits violents réactifs et des délits envers les personnes d’autorité. Ces résultats suggèrent que leur délinquance semble davantage organisée que celle des délinquants bipolaires et hyperactifs, ce qui va dans le même sens que les affirmations de Biederman et coll. (1997) qui concluaient que les délinquants sans pathologie associée tendent à manifester une agressivité proactive, prédatrice et une délinquance organisée. Celle-ci n’aurait toutefois pas pour cible des personnes en autorité.

Tous les délinquants bipolaires ont pour leur part commis au moins un délit violent de manière réactive et au moins un délit envers une personne d’autorité. Pour trois jeunes sur cinq (60%) de ce groupe, au moins une victime n’était pas en position d’autorité et, enfin, un seul jeune se révèle avoir planifié un délit violent. Cette non-sélectivité des victimes, ainsi que le caractère réactif et peu prémédité des délits violents soulignent bien le caractère impulsif et réactif de ces jeunes, tel que souligné dans les écrits sur la MAB typique ou atypique. La faible proportion de jeunes ayant commis des délits violents prémédités est étonnante, car de nombreux auteurs attestent que les jeunes bipolaires manifestent autant de comportements agressifs proactifs que réactifs (ex. Bierderman et al., 1997, 1999, 2003; Spencer et al., 2001). Toutefois, il ne faut pas oublier qu’il y a peu de délinquants bipolaires et qu’ils affichent une faible moyenne de délits judiciarisés (2,7 délits).

Enfin, le tableau 22 signale que les délinquants hyperactifs ont eu recours à la violence physique d’une manière assez diversifiée. En fait, ils semblent avoir atteint tant les personnes en autorité (61,9%) que celles qui ne le sont pas (81,0%), alors que certains délits ont été planifiés (52,4%) et d’autres non (réactif : 81,0%). Tout comme les délinquants bipolaires, les délinquants hyperactifs apparaissent impulsifs et réactifs, mais ils semblent aussi être violents de la même manière que les délinquants sans pathologie associée, c’est- à-dire de manière planifiée et envers des personnes autres que celles en position d’autorité. Les caractéristiques identifiées chez les délinquants hyperactifs ressemblent donc davantage à celles des délinquants bipolaires identifiés dans la littérature; c’est-à-dire qu’ils manifestent une agressivité aussi bien proactive que réactive dont les victimes sont des personnes en position d’autorité ou non. En tenant compte de ces résultats, il paraît plausible que des délinquants hyperactifs de ce groupe soient des délinquants bipolaires dont la MAB-J n’a pas été identifiée; ce qui soutiendrait l’idée que la MAB-J est souvent

sous-diagnostiquée ou est prise pour un autre trouble, tel que conclu par quelques auteurs (Kovacs et Pollock, 1995; Spencer et al., 2001).

TDC identifié à partir du CBCL

À partir du CBCL, on observe au tableau 23 que les adolescents ayant un TDC délinquant se sont significativement démarqués des jeunes ayant un TDC avec des symptômes du TDAH pour ce qui est des victimes de leur(s) délit(s). En fait, presque tous les jeunes ayant un TDC délinquant auraient commis leur(s) dernier(s) délit(s) violent(s) envers des personnes qui ne sont pas en position d’autorité, contrairement aux jeunes ayant un TDC avec des symptômes du TDAH (94,3% vs 74,1% : p ≤ 0,05).

Les jeunes avec un TDC associé à des symptômes du TDAH ont pour leur part été proportionnellement plus nombreux à commettre des délits violents envers des personnes en position d’autorité que les jeunes ayant un TDC délinquant (66,7% vs 37,1% : p ≤ 0,05). Même si les jeunes avec un TDC avec une MAB-J présentent une proportion nettement plus élevée quant à cette variable (77,8%), ceux-ci ne se démarquent pas de manière statistiquement significative des jeunes ayant un TDC délinquant (p = 0,057), ce qui est probablement attribuable au petit nombre de jeunes inclus dans ce groupe.

Tableau 23. Informations sur la violence physique utilisée par les adolescents selon le type de TDC identifié à partir du CBCL.

TDC délinquant (gr. 1) (n = 35) TDC avec MAB-J (gr. 2) (n = 9) TDC avec symp. TDAH

(gr. 3) (n = 27) Fisher’s Exact Test Informations sur la violence physique utilisée (n = 87)

Envers des personnes autres qu’en autorité 94,3% 88,9% 74,1% 1 > 3; p ≤ 0,05 Envers des personnes en autorité 37,1% 77,8% 66,7% 3 > 1; p ≤ 0,05 (2 > 1; p = 0,57) Violence planifiée/ proactive 71,4% 44,4% 48,1% N.S. Violence non- planifiée/ réactive 68,6% 77,8% 77,8% N.S.

Comme les délinquants sans pathologie associée (DSM-IV), les jeunes avec un TDC délinquant (CBCL) ont commis leur(s) dernier(s) délit(s) violent(s) tant de manière réactive (68,6%) que proactive (71,4%). Pour ce qui est des adolescents ayant un TDC avec une

MAB-J et ceux ayant un TDC avec des symptômes du TDAH, leur(s) dernier(s) délit(s) violent(s) ont été commis de manière similaire : certains ont été prémédités (44,4% et 48,1% respectivement), mais la plupart ne l’ont pas été (77,8% dans les deux cas). Toutefois, le(s) délit(s) violent(s) des jeunes avec un TDC avec une MAB-J ont été un peu moins réactifs, mais davantage organisés (planifiés) que ceux des délinquants bipolaires (DSM-IV) notés précédemment. Tout en tenant compte du faible nombre de jeunes inclus dans ces deux groupes, ces quelques données, sans que les différences ne soient statistiquement significatives, suggèrent pourtant que les jeunes ayant un TDC avec une MAB-J semblent avoir été capables d’une certaine organisation: ce qui pourrait leur avoir permis de planifier un délit et/ou choisir une victime. Ces informations sur le(s) comportement(s) agressif(s) des jeunes avec un TDC avec une MAB-J ressemblent davantage à ceux identifiés auprès des adolescents bipolaires des recherches reconnus pour être autant prémédités que réactifs (ex. Bierderman et al., 1997; 1999; 2003; Spencer et al., 2001).