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Modélisation et simulation des écoulements turbulents

3.2 Discrétisation et résolution des équations de Navier-Stokes En utilisant la fermeture apportée par la modélisation sous-maille, on dispose maintenant d’un

3.2.3.2 Discrétisation spatiale des flux convectifs

e S`+δ` 2 · S`+δ` 2 , (3.29)

Mansour et al. [172] propose un schéma permettant de n’utiliser que les cellules directement avoi-sinantes. Ainsi, pour l’interface entre les cellules (i, j, k) et (i + 1, j, k) par exemple, on utilisera l’information des cellules ` ∈ [i, i+1]×[j−1, j+1]×[k−1, k+1]. Dans le cas mono-directionnel, les flux de l’équation de conservation de la quantité de mouvement se calculent simplement par

h xuei`+δ` 2 = ue`+δ`ue` ∆x = 2 e u`+δ`ue`S`+δ` 2 Ω`+δ`+ Ω` . (3.30)

Le stencil de cette approche, restreint à 3 points pour un calcul mono-dimensionnel, est donc nettement plus compact que pour l’approche précédente.

3.2.3.2 Discrétisation spatiale des flux convectifs

Les flux convectifs sont plus délicats à traiter, en raison de leur non-linéarité et de leur caractère hyperbolique.

Un fort parallèle peut être fait entre le problème de Riemann — qui consiste à déterminer l’écoulement lorsqu’une membrane qui sépare deux zones contenant du fluide dans des conditions de pression, vitesse ou température différentes est subitement supprimée — et l’évaluation des flux à l’interface entre deux mailles. Ainsi, l’utilisation de solveurs — exacts ou approchés — de Riemann pour le calcul des flux convectifs est possible. L’état du fluide de part et d’autre de l’interface séparant deux mailles voisines doit alors être reconstruit au mieux.

Reconstruction des variables à l’interface. Connaissant les valeurs des variables conservatives moyennées dans le volume de chaque maille, l’objectif est ici de les reconstruire sur la surface séparant deux mailles voisines. Le schéma de reconstruction MUSCL (Monotonic Upstream-Centered

Scheme for Conservation Laws) introduit par Van Leer [271] consiste à supposer que les variables

de champs sont paraboliques par morceaux dans chaque maille. Dans le cas mono-dimensionnel, une variable φ(x) sera donc décrite dans la maille ` par une loi de la forme

Les constantes a`, b` et c` sont choisies de sorte à satisfaire les contraintes suivantes : Z x∈Ω`−1 φ(x) dx = ∆x`−1φ`−1, (3.32a) Z x∈Ω` φ(x) dx = ∆x` φ` , (3.32b) Z x∈Ω`+1 φ(x) dx = ∆x`+1φ`+1. (3.32c)

Notons que le domaine de validité de la loi parabolique (3.31) est artificiellement étendu aux mailles voisines lors de cette étape de détermination des coefficients.

En appliquant cette loi au cas d’un maillage mono-dimensionnel uniforme, on obtient les formules de reconstruction précises à l’ordre 3 suivantes

φG`−1 2 = −1 6φ`−2+ 5 6φ`−1+2 6φ`, (3.33a) φD`−1 2 = 2 6φ`−1+5 6φ`1 6φ`+1, (3.33b) φG`+1 2 = − 1 6φ`−1+5 6φ` +2 6φ`+1, (3.33c) φD `+12 = 2 6φ` +5 6φ`+11 6φ`+2. (3.33d)

Pour des raisons de coût de calcul, ces formules sont utilisées comme telles, même dans le cas de maillage tridimensionnel non uniforme.

Le schéma AUSM+(P) avec senseur. Pour les écoulements à grands nombres de Reynolds,

les schémas centrés s’avèrent être potentiellement oscillants, voire instables. On peut alors avoir recours à des schémas décentrés vers l’amont (upwind scheme) qui permettent d’apporter plus de stabilité au prix d’une dégradation de la précision.

On s’intéressera ici aux schémas AUSM (Advection Upstream Splitting Method). Ces schémas appartiennent à la famille des schémas de type FVS (Flux Vector Splitting) par opposition à celle des schémas de type FDS (Flux Difference Splitting) à laquelle les schémas de Roe ou d’Osher ap-partiennent. En particulier, le schéma AUSM+(P) incorpore diverses modifications par rapport à la formulation originelle. Ces modifications permettent, d’une part, d’obtenir la précision des sché-mas FDS tout en gardant la robustesse des schésché-mas FVS [168] et d’autre part, d’assurer le couplage entre vitesse et pression [77], ce qui améliore la précision en régime subsonique. Une version simpli-fiée — sans capture de choc — introduite par Mary & Sagaut [176] a été retenue dans cette étude. Ce schéma est décrit ci-dessous dans le cas mono-dimensionnel.

En définissant les vecteurs Q = ρ, ρu,e ρ Ed+ p et P = 0, p, 0, les flux convectifs à chaque interface s’écrivent de la manière suivante :

Fconv`+1 2 = Ucent `+1 2 QG`+1 2 + QD `+1 2 2 − 2 Φ`+1 2 Uupw `+12 QG`+1 2 − QD `+1 2 2 + PG`+1 2 + PD `+1 2 2 . (3.34)

Les grandeurs Ucent et Uupw sont homogènes à des vitesses. La première est utilisée pour assurer la partie centrée, peu dissipative, du schéma, alors que la suivante amène le décentrement. Elles sont définies par Ucent= ueG+ueD 2 − C2 pG− pD ρrefUref , (3.35a) Uupw= max C1Uref, Uint, (3.35b) avec Uint = ueG+ueD 2 − C2 pG− pD

ρrefUref max 0, 1 − 2 ueG+ueD 2 c

!

Les grandeurs ρref et Uref sont des grandeurs de référence qui peuvent être, par exemple, celles de l’écoulement libre. Les coefficients C1 et C2 sont tous deux fixés à 0.04 de sorte à limiter la dissipa-tion du schéma [176].

Le dernier terme de l’équation (3.34) est le senseur Φ. De façon nominale, ce senseur est fixé à 0 de sorte que le schéma soit centré et donc plus précis et moins dissipatif. Néanmoins, dans les zones où des oscillations numériques sont repérées, fixer le senseur à 1 permet d’amener le décentrement nécessaire à une stabilisation de la solution. En pratique, il suffit que l’une des variables conservatives présente un comportement oscillant pair–impair sur les mailles ` − 1, ` et ` + 1 pour que le senseur soit fixé à 1 pour le calcul des flux aux interfaces ` −1

2 et ` +1

2. Cette condition peut être formalisée de la manière suivante : Φ`+1 2 = max (Ψ`−1Ψ`, Ψ`Ψ`+1, Ψ`+1Ψ`+2) , (3.36) avec Ψ` = ( 1 si ∃k tel que Q`+1(k) − Q`(k) Q`(k) − Q`−1(k) <0 , 0 sinon, (3.37)

où Q`(k) dénote ici la k-ième composante du vecteur Q`.

3.2.4 Intégration temporelle

La méthode des volumes finis (3.26), au côté des flux discrétisés (3.29) et (3.34), permet de décrire l’évolution temporelle des variables conservatives moyennées dans chaque maille W`. Il faut maintenant discrétiser en temps cette équation d’évolution, ce qui implique la dérivée temporelle.

Un schéma d’intégration temporelle explicite est, au mieux, conditionnellement stable. C’est-à-dire qu’une condition sur le pas de temps ∆t doit être respectée pour que le schéma demeure stable. Celle-ci porte le nom de condition CFL (pour Courant, Friedrichs, Lewy [55]). Pour assurer la stabilité du schéma, la quantité

CF Lhyperbolic= max i (c + |uei|) ∆t ∆xi  . (3.38)

doit rester inférieure à une valeur seuil qui dépend du schéma d’intégration utilisé. Cette condition revient à comparer la taille de la maille à la distance parcourue par une perturbation acoustique pendant un pas de temps. À cette condition portant sur la propagation acoustique viennent s’ajouter des conditions relatives à chacun des phénomènes propagatifs en jeu. Dans notre cas, le transport par diffusion visqueuse doit également être pris en compte, ce qui amène à considérer le nombre sans dimension suivant

CF Lparabolic= max i µ∆t ∆xi2  . (3.39)

On voit donc que pour un écoulement donné, la limitation visqueuse peut devenir prépondérante si la discrétisation spatiale devient suffisamment fine.

Le recours à un schéma d’intégration temporelle implicite qui soit inconditionnellement stable permet d’utiliser un pas de temps bien plus long, sans considération CFL sur la stabilité. En contre-partie de cette stabilité inconditionnelle, les schémas implicites imposent une inversion de matrice difficile et coûteuse. En pratique, il faut avoir recours à des méthodes itératives, exécutées jus-qu’à l’atteinte d’un niveau de convergence suffisant. Une attention particulière doit être portée à la convergence de ces résidus, en particulier dans le cas d’écoulements à faible nombre de Mach.

Bien qu’aucun risque d’instabilité ne se pose alors, le pas de temps du calcul doit néanmoins être suffisamment petit pour pouvoir décrire correctement la physique instationnaire que l’on veut simuler. En pratique, pour la plupart des applications aéronautiques subsoniques, l’utilisation d’un schéma implicite demeure une solution de choix en termes de coût de calcul.

Schéma temporel implicite rétrograde d’Euler. Le schéma utilisé dans cette étude est le schéma Euler rétrograde du second ordre proposé par Gear [100]. La dérivée temporelle du vecteur des variables conservatives W` à l’instant tn+1= (n + 1)×∆t s’écrit :

 tW`n+1' 3 2Wn+1` − 2Wn ` +1 2Wn−1` ∆t . (3.40)

Le caractère implicite de la formulation découle du fait que la dérivée ∂tW` est exprimée au même instant tn+1 que le vecteur le plus avancé dans le temps qui la compose, c’est-à-dire Wn+1. En introduisant cette expression dans l’équation d’évolution (3.26), les flux convectifs et visqueux se retrouvent donc eux-mêmes exprimés à l’instant tn+1 le plus avancé :

∀` , ∀n , 3 2∆Wn+1` −1 2∆Wn` +∆tΩ` X kδ`k=1 Fn+1 `+δ`2 = 0 , (3.41) avec F`+δ` 2 = S`+δ` 2 Fconv`+δ` 2 − Fvisc `+δ`2

le vecteur regroupant les flux convectifs et visqueux implicite-ment multipliés par la surface S`+δ`

2 et avec ∆Wn

` = Wn

` − Wn−1` le vecteur d’évolution incrémen-tale.

Résoudre cette équation implique de déterminer simultanément le vecteur Wn+1et les flux Fn+1= F (Wn+1) qui en dépendent. Pour ce faire, on linéarise la dépendance des flux au vecteur W autour de l’état

à l’instant tn, c’est-à-dire

Fn+1 = Fn + ∂F

∂W(Wn) · ∆Wn+1 + O

∆t2, (3.42)

où la matrice jacobienne ∂F /∂W à l’instant tn est connue puisque l’état Wn l’est également. En prenant en compte la linéarisation des flux, l’équation d’évolution devient alors

3 2 1+ ∆t Ω` X kδ`k ∂F ∂W (Wn) · ∆Wn+1 = 1 2∆Wn ∆t Ω` X kδ`k Fn. (3.43)

Le calcul des matrices jacobiennes est non seulement coûteux, mais conduit également à une matrice mal conditionnée ce qui rend la résolution délicate. On peut alors avoir recours à différentes approximations pour simplifier le calcul [204,49,288,129], mais celles-ci mettent à défaut l’ordre 2 de la discrétisation temporelle.

Pour le retrouver, il est nécessaire d’utiliser un algorithme de résolution itératif, dans lequel la linéarisation des flux (3.42) est systématiquement recalculée à partir de la nouvelle estimation sous-itérative1 Wn+1,p du vecteur Wn+1. En notant ∆Wn+1,p+1= Wn+1,p+1− Wn+1,p, l’algorithme sous-itératif s’écrit alors

3 2 1+∆tΩ` X kδ`k ∂F ∂W  Wn+1,p · ∆Wn+1,p+1 = −32 Wn+1,p− Wn +12∆Wn∆t Ω` X kδ`k Fn+1,p. (3.44) Ainsi, à convergence, lorsque ∆Wn+1,p+1 tend vers zéro, c’est-à-dire lorsque l’estimation itéra-tive Wn+1,p+1 n’évolue plus, les flux sont alors exactement calculés puisque leur linéarisation est faite autour de la valeur d’intérêt.

À chacune des sous-itérations, il faut résoudre un système linéaire (3.44) dont on simplifie la notation à

Mn+1,p· ∆Wn+1,p+1= Rn+1,p. (3.45)

1. Le terme de “sous-itération” sera utilisé ici pour faire référence à l’algorithme itératif de résolution du système implicite à un pas de temps n donné, afin que le terme d’ “itération” désigne sans ambiguïté les résolutions successives du système implicite, pas de temps après pas de temps.

La matrice M peut aisément être approchée par la décomposition incomplète de type Gauss–Seidel symétrique :

M = L + D + U 'L + D· D−1·D + U, (3.46)

où les matrices introduites sont respectivement les parties strictement inférieure, diagonale et stric-tement supérieure de la matrice complète [204]. Cette décomposition permet de résoudre le sys-tème (3.45) par les trois étapes

 L + D· ∆W = R , (3.47a) D−1· ∆W∗∗ = ∆W , (3.47b)  D + U· ∆Wn+1= ∆W∗∗, (3.47c)

présentant chacune l’avantage d’être facilement vectorisable par balayage sur des plans i + j + k constants.

Dans un calcul multiprocesseur, la répartition des données est distribuée : aucun processeur n’a vocation à disposer des informations nécessaires à la résolution du système (3.44) global. Au contraire, chaque processeur vise à résoudre la partie de l’écoulement Wn+1 restreinte aux mailles du (ou des) bloc(s) qui le concerne. Ainsi, pour chacun des blocs de maillage, un système d’équations est construit de façon équivalente à celui du système global, mais d’étendue limitée aux cellules du sous-domaine. Chaque découpe du domaine globale devient donc une frontière pour ces problèmes aux limites restreints. Les détails quant à la prise en compte de ce type particulier de conditions aux limites sont apportés dans la sous-section suivante.

3.2.5 Conditions aux limites

Après avoir décrit la méthode numérique de discrétisation et de résolution des équations de Navier-Stokes, il nous reste à aborder la problématique des conditions aux limites. Il s’agit non seulement d’établir les équations qui caractérisent la présence d’une frontière, mais également de préciser comment les imposer numériquement.

En particulier, les codes volumes finis FLU3M et FUNk sont des codes structurés auxquels l’utilisateur doit fournir un maillage qui discrétise la totalité de l’espace Ω de fluide à simuler. Plutôt que d’interférer, à proximité des frontières ∂Ω, avec la résolution numérique des équations de Navier-Stokes dans le domaine Ω, une ou deux rangées de cellules de maillage sont générées par prolongement derrière chaque frontière. Ces mailles, créées pour des besoins numériques, sont appelées cellules fictives alors que celles du domaine fluide sont appelées cellules réelles par opposition.

Lors de la résolution des équations de Navier-Stokes discrètes, les mailles fictives sont numéri-quement utilisées comme les mailles réelles pour le calcul des flux à travers la frontière. Néanmoins, pour imposer les conditions aux limites voulues, elles sont remplies à chaque début de sous-itération par les valeurs de variables conservatives adaptées. Ces valeurs dépendent donc du type de condi-tion aux limites (Dirichlet, Neumann, non-réflexion, etc.) et de l’écoulement dans les mailles réelles de l’autre côté de la frontière. À ce remplissage des variables conservatives dans les cellules fictives s’ajoute éventuellement une correction des flux initialement calculés par les schémas discrétisés (3.29) et (3.34).

Pour les études d’écoulements sans gradient de pression réalisé dans cette thèse, le domaine de calcul est globalement parallélépipédique. Parmi les six faces, on distingue différents types de conditions aux limites : une paroi solide en vis-à-vis avec une frontière dans l’écoulement libre, une condition d’entrée en vis-à-vis avec une condition de sortie et, enfin, deux frontières latérales reliées par périodicité. À ces frontières du domaine global viennent s’ajouter l’ensemble des frontières de raccord informatique entre les sous-domaines traités par des processeurs différents.