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Chapitre 1 Discours et législation entourant la prostitution au Québec durant la première moitié du XXe

2. Le discours sur la prostitution et les journaux de la ville de Québec

En novembre 1912, le curé Joseph Beaudoin de la paroisse Saint-Jean Baptiste présente une requête157 devant le conseil municipal de la ville de Québec concernant des nuisances engendrées par l'existence de maisons closes dans son quartier, notamment sur la rue Sainte-Cécile, entre la Côte Sainte-Geneviève et la rue Sainte-Claire. Ayant l'appui d'autres prêtres et de plusieurs centaines de citoyens, celui-ci affirme que ces établissements « jettent un grand discrédit sur ce quartier et ces rues; elles158 sont en outre une occasion de scandales incessants pour les citoyens qui habitent ces rues et les passants159 ». Puis il rajoute que les familles qui vivent à proximité « ne peuvent se mettre aux fenêtres ou sortir sur la rue si elles ne veulent être témoins des spectacles les

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Archives de la ville de Québec (AVQ), Cour du Recorder, Dossiers sur les maisons de débauche, sous- série Conseil et comités, QP1-4/70-1, novembre 1912. Voir Annexe C.

158 Le curé Beaudoin fait référence ici aux maisons closes. 159 Ibid.,

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plus indécents; les plus repoussants, les plus grossiers, c'est encore une cause de démoralisation constante pour les enfants160 ». Enfin, cet homme d'Église rappelle qu'en vertu des lois du pays et de l'administration de la ville de Québec, tout citoyen a le droit à la paix, à la tranquillité et à la sécurité et par le fait même, il enjoint les autorités compétentes de prendre les mesures nécessaires afin de réprimer ce mal. Près de huit ans plus tard, soit en juillet 1920, c'est au tour du curé H.A. Scott du village de Sainte-Foy d'écrire une lettre semblable qu'il adresse cette fois-ci directement à l'assistant-procureur général de la cité de Québec, Arthur Fitzpatrick161. Dans sa requête, celui-ci se plaint du « Belmont Retreat », établissement situé sur le chemin Sainte-Foy. Puis à l'instar de son homologue de la paroisse Saint-Jean Baptiste, il qualifie ce dernier de « lieu de désordres, d'ivrognerie et d'immoralité162 » et demande l'intervention de la force constabulaire.En outre, et c'est là le véritable intérêt de cette source, le curé conseille aux policiers de « procéder savamment » car selon ses dires, depuis que « l'Action catholique en a dit un mot samedi [...] les occupants doivent avoir un œil ouvert même la nuit163

».

Ces pétitions sont intéressantes car d'une part, elles montrent qu’une partie descitoyens de la Vieille Capitale sont préoccupés par l'activité prostitutionnelle et surtout, les « nuisances » qu'elle apporte. D'ailleurs, l'auteur de la première requête s'attarde sur le « risque moral » que ces maisons font planer sur les habitants du quartier, argument qui - comme nous l'avons vu - revient de façon récurrente dans le discours social sur la prostitution. D'autre part, si on se fie aux propos du curé de Sainte-Foy au sujet du quotidien l'Action catholique, certains journaux de la ville semblent avoir la volonté de rapporter les nouvelles liées au milieu prostitutionnel. Mais est-ce vraiment le cas ? Puis dans l'optique où ils en parlent, dans quelle mesure font-ils vraiment état des inquiétudes exprimées par la population ?

160 Ibid.,

161 Bibliothèque et Archives nationales du Québec à Québec (BanQ-Q), Fonds Cour des sessions de la paix,

Dossiers, TP12, S1, SS1, SSS1, 1960-01-357/230, dossiers 278571 et 278572. 5 juillet 1920. Voir Annexe D.

162 Ibid., 163 Ibid.,

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2.1 La couverture journalistique de l'activité prostitutionnelle

Pour l'année 1923, j'ai relevé dans les archives judiciaires 58 cas impliquant des infractions relatives à l'activité prostitutionnelle. De ce nombre, 21 furent couverts par des articles de journaux, soit autour de 36% des cas inscrits. Près d'une décennie plus tard, la couverture journalistique visant ce type d'infractions est pratiquement la même. Ainsi, sur les 34 délits relevés pour l'ensemble de l'année 1934, 12 purent « profiter » d'une couverture journalistique, soit un peu plus de 35% du nombre total répertorié. Ces chiffres164 nous laissent croire que si les journalistes de la Vieille Capitale ne semblent pas complètement réfractaires à l'idée de rapporter des nouvelles liées au milieu prostitutionnel, la couverture qu'ils offrent de ces évènements n'est que partielle. Mais au- delà du seul point de vue quantitatif, de quelle façon traitent-ils ce phénomène, les fois où ils choisissent d'en parler ? Durant l'entre-deux-guerres, on verra que plusieurs indices tendent à montrer que les journaux de la ville de Québec minimisent les enjeux de la prostitution.

2.2 Éviter de parler de prostitution: rapporter la nouvelle sans trop faire de bruit Tout d'abord, les journalistes qui traitent des nouvelles liées au milieu prostitutionnel ne font souvent que relater succinctement les évènements, mais sans plus165. En fait, ceux-ci semblent tout mettre en œuvre pour que leurs articles de presse passent inaperçus. À cet égard, le choix des mots est assez révélateur. Effectivement, les textes qui abordent le sujet de la prostitution sont la majorité du temps épurés de la traditionnelle terminologie166 associée à ce phénomène, vocabulaire qui pourtant, est utilisé à outrance

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Nous avons exclu de ce calcul, les 13 articles liés aux 4 cas exceptionnels puisque ces derniers se sont déroulés respectivement en 1924, 1936, 1937 et 1938.

165 Dans son étude sur la représentation des contrevenantes dans La Presse au XXe siècle, Martel constate

un phénomène semblable. Durant les années 1930, les journalistes de ce quotidien à grand tirage ont tendance à minimiser ou encore passer sous silence les nouvelles liées aux actions immorales des femmes. Voir Joanne Martel, La reconstruction de la criminalité à travers La Presse (1886-1989) : l’image de la

contrevenante et de la femme victime, Mémoire de maîtrise, Ottawa, Université d’Ottawa, 1991. p. 83 à 93.

Au sujet de la représentation du crime dans les journaux québécois au début du XXe siècle, voir aussi Fyson, « The Legal Profession », p. 148. Au sujet plus général du développement de la presse à grand tirage au Québec au tournant du XXe siècle, voir Jean de Bonville, La Presse québécoise de 1884 à 1916,

Genèse d'un média de masse, Québec, P.U.L., 1988; et Fernand Harvey, « La période à Québec de 1764 à

1940: Vue d'ensemble d'un processus culturel », Les Cahiers des dix, no. 58 (2004), p. 227-235.

166 À l'exception du terme « tenancier », il est très rare d'apercevoir dans ces articles des mots comme «

prostituée », « proxénète », « bordel », « maladies vénériennes », « syphilis », « santé physique », ou encore « double-standard de moralité ».

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aussi bien dans le discours réglementariste que celui mis de l'avant par les réformateurs. Au contraire, les journalistes qui les écrivent préfèrent opter pour des termes ambigus et vagues qui laissent place à l'interprétation. C'est ainsi que pour faire référence aux activités répréhensibles qui se déroulent dans les maisons closes, ceux-ci écrivent par exemple que « les jeunes filles étaient supposées se réunir à cet endroit pour tramer des complots que la morale désapprouve167 » ou encore que « la sûreté provinciale a arrêté 69 personnes qui dit-on, fredonnaient un refrain d'amour168 ».De plus, afin de désigner les bordels, ils ont recours à une variété de qualificatifs aussi originaux que vagues tels que des « maisons de publicité169 », des « maisons peu désirables170 », des « maisons de discorde171 », des « maisons louches172 », un « bouge173 », ou encore des « questionnable haunts174 ». Il est vrai que certains journalistes font parfois référence aux « maisons de désordre », mais nous savons que ce terme revêt aussi un caractère ambivalent. Dans la même veine, les titres qui accompagnent les articles semblent également construits de façon à éluder le thème de la prostitution. Ceux-ci ne font jamais référence à ce phénomène de façon directe. Le meilleur exemple de cette imprécision vient d'un entrefilet publié le 7 avril 1937 dans le quotidien Le Soleil. Ce qui est frappant dans ce cas-ci, c'est que malgré le caractère hautement dramatique de la nouvelle rapportée - les individus impliqués avaient été arrêtés non seulement pour avoir tenu une maison de prostitution, mais aussi pour avoir attenté à la pudeur de jeunes enfants et avoir commis des voies de fait sur ces derniers - l'auteur de l'article ne sent pas le besoin d'être plus explicite et choisit comme titre « grave accusation175 ».

La longueur des articles de presse constitue un autre indice de la discrétion dont font preuve les journalistes qui couvrent les nouvelles relatives au milieu prostitutionnel. Ces derniers favorisent une approche factuelle et par le fait même, ne rédigent souvent que de 167 L'Évènement, 23 avril 1923, p. 3. 168 L'Évènement, 30 mai 1938, p. 16. 169 Le Soleil, 26 mars 1923, p. 7. 170 Le Soleil, 26 novembre 1923. p. 3. 171 L'Évènement, 29 juin 1923, p. 3. 172 Le Soleil, 27 février 1923, p. 15. 173 Le Soleil, 28 février 1923, p. 16.

174 Quebec Chronicle Telegraph, 17 mars 1934, p. 11. 175 Le Soleil, 7 avril 1937, p. 17

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simples entrefilets. Dans un style télégraphique, ils se limitent à dire que les policiers ont opéré une descente dans une maison close et ou encore que les gens trouvés furent conduits au poste de police en attendant leur comparution devant le juge. Ceux-ci soulignent parfois que l'opération fait suite à une plainte ou encore que certains individus ont réussi à prendre la fuite, mais la majorité du temps, ils sont avares de détails quant aux circonstances entourant la nouvelle. De plus, si ceux-ci précisent le jour où la descente policière a été effectuée ainsi que le nombre de personnes arrêtées, il en est tout autrement pour ce qui est de l'adresse de la maison visée. En effet, ils se contentent souvent d'indiquer le nom de la rue ou encore, ils mentionnent simplement que l'événement s'est déroulé en Basse-Ville. Dans le même ordre d'idée, on constate que les journalistes font autant preuve de réserve face à la question des maladies vénériennes ou encore de la « traite des blanches ». Pourtant, ces thèmes sont - comme on l'a vu - intrinsèquement liés au phénomène de la prostitution. Ce silence est de surcroît d'autant plus révélateur qu'il contraste une fois de plus avec le discours des réformateurs et des réglementaristes qui, chacun à leur façon, traitèrent abondamment de ces sujets.

S'il est vrai que les journalistes font preuve de discrétion ou encore tente d'éviter le sujet de la prostitution, il faut tout de même admettre que les articles qu'ils rédigent fournissent à l'occasion quelques informations utiles, notamment sur la nature des maisons closes. D'une part, le nombre de personnes trouvées sur les lieux lorsque les agents effectuent une descente laisse à penser qu'à Québec, les bordels sont généralement de petite taille. D'autre part, certaines indications géographiques tendent à montrer que si la grande majorité du temps, ceux-ci prennent place à l'intérieur même des logements des citoyens, il arrive aussi que des locaux utilisés à des fins de prostitution soient situés au sein d'établissements publics. Par ailleurs, les articles qui traitent des nouvelles liées au milieu prostitutionnel apportent aussi quelques indices sur les rapports que les individus arrêtés entretiennent avec le système judiciaire. Par exemple, il semble que les tenancières aient les moyens de se défendre. Ces dernières n'hésitent pas à recourir à un avocat ou encore à porter leur cause en appel, stratégies qui, de toute évidence, ne paraissent pas envisageables pour les prostituées.

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2.3 Le bon travail des policiers: une ville propre et exempte de prostitution Si les journalistes éludent le sujet de la prostitution, à l'inverse, ils n'hésitent pas à encenser l'activité policière dirigée contre les maisons de débauche. En premier lieu, les titres et les chapeaux qu'ils choisissent pour leurs articles sont révélateurs de cette tendance. Lorsque ceux-ci ne mentionnent pas directement « l'exceptionnalité » du travail des forces de police, ils y ont font allusion de manière implicite en indiquant le nombre d'individus arrêtés ou encore la comparution qui attend ces derniers. Il n'est donc pas rare de voir des entrefilets coiffés de titres tels que « Fructueuses cueillettes de la police176 », « Beau travail de la police dans Québec177 » ou encore « Le recorder a 40 prisonniers: 27 ont été arrêtés dans des raids de la police des mœurs samedi soir178 ». En deuxième lieu, cette volonté de souligner l'efficience des opérations policières à l'encontre du milieu prostitutionnel est aussi perceptible à travers le corps même des articles de presse. Dans certains d'entre eux, on peut lire par exemple que les forces de l'ordre ont « accompli un beau coup de filet179 » ou bien que ceux-ci « ont opéré avec succès le dernier raid180 ». Plus encore, les journalistes sous-entendent que le nombre d'arrestations effectuées par la police constitue en soi une preuve de leur efficacité: « Thus ended one of the biggest evenings in police history in connection with raids being carried out, and the result, thirty-five arrests, speaks volumes for the work of the squads of men who accomplished the raids181. ». Enfin, ils jugent que « leur travail trop ignoré, mérite des éloges182 ». Un troisième signe qui montre que les articles rapportant les nouvelles liées à la prostitution vantent le travail de la force constabulaire tient au fait que ces derniers contiennent une quantité considérable de renseignements sur les agents qui opèrent les descentes. Ceux-ci fournissent non seulement une liste exhaustive des policiers impliqués, ils indiquent aussi pour chacun d'entre eux leur nom ainsi que leur grade. En donnant ces informations, les journalistes les font sortir de leur anonymat et du coup, c'est comme s'ils gagnaient en

176 Le Soleil, 2 avril 1934, p. 14. 177

Le Soleil, 14 mai 1934, p. 3.

178 L'Évènement, 27 août 1923, p. 3. D'ailleurs, de tous les articles de presse répertoriés, ce sont les titres de

cette nature qui, de façon générale, sont écrits en plus gros caractères.

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L'Évènement, 6 octobre 1934, p. 3.

180 Le Soleil, 27 août 1923, p. 12. 181 Quebec Chronicle, 27 août 1923, p. 3. 182 L'Évènement, 31 mai 1938, p. 16.

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reconnaissance. Du reste, ces précisions ont de quoi surprendre quand on sait à quel point les articles sont avares de détails en ce qui concerne les individus arrêtés.

En ne cessant de marteler ce discours sur l'acharnement des forces de l'ordre à l'égard des maisons de débauche, les journalistes suggèrent que l'activité prostitutionnelle dans la Vieille Capitale est forcément minime, puisque sans relâche réprimée: « the police authorities are pursuing an active campaign against disordely house and are determinate to wipe them out in the Ancient capitale183 ». Dans le même ordre d'idées, ils précisent que les descentes constituent « an another instance of the unceasing vigilance of the police of Quebec, and goes to show that they are leaving no stone unturned in an effort to close-up all the house of ill-fame184. ». De plus, ils rajoutent que « le vice commercialisé n'a vraiment pas sa chance dans la vieille capitale185 ». Il arrive même que les journalistes fassent allusion à cette « vigilance incessante » du corps policier plusieurs fois à l'intérieur du même article de presse. Pour ces derniers, il semble que ce soit expressément en raison de cette attitude déterminée dont fait part la force constabulaire que la ville de Québec peut jouir d'une réputation remarquable au point de vue de la criminalité. Du moins, c'est ce que l'un d'entre eux laisse entendre lorsque dans un entrefilet relatant une descente opérée dans un bordel situé sur la rue Ste-Marguerite, il cite les dires du chef de police Émile Trudel: « Aucune ville n'a un plus bas pourcentage de criminalité que Québec. Sans doute, ce n'est pas la perfection et il ne faut pas s'attendre à cela. Mais si l'on tient ici qu'il y a une population de 120 000 âmes il faut nécessairement conclure que la santé morale y est des plus florissantes186. ». En fait, ces propos traduisent une volonté de rassurer la population. En insérant dans son article une citation ou le chef de la police atteste lui-même du caractère sécuritaire de la Vieille Capitale, le journaliste laisse entendre que les citoyens n'ont pas à craindre le vice et que par le fait même, ils peuvent « dormir sur leurs deux oreilles187 ». C'est encore une fois ce qu'il cherche à faire lorsqu'un peu plus loin dans le même entrefilet, il mentionne non sans relent xénophobe que ce sont les étrangers qui sont à blâmer: « Pour le bon renom de

183 Quebec Chronicle, 4 septembre 1923, p. 3. 184

Quebec Chronicle, 21 novembre 1923, p. 5.

185 L'Évènement, 17 novembre 1923, p. 1. 186 Ibid.,

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la ville de Québec, il convient de dire que les prévenus sont des étrangers qui ne sont installés ici que depuis peu188. ». En pointant du doigt les étrangers, il sous-entend que la ville de Québec - et par extension ses citoyens - ne peut être tenue pour responsable puisque de toute façon, l'origine de la criminalité est extérieure à celle-ci.

Pour tout dire, il est étonnant de voir que les auteurs des articles traitant des nouvelles liées au milieu prostitutionnel ne sentent jamais le besoin de nuancer leurs propos lorsque vient le temps de louer non seulement les efforts, mais aussi l'efficacité de la force constabulaire. En aucun cas, ils admettent que les policiers ont pu avoir de la difficulté, à un moment ou à un autre, à enrayer le phénomène de la prostitution. Pourtant, les sources judiciaires montrent qu'année après année, entre 1919 et 1938, ceux-ci ne cessent d'arrêter des gens pour des motifs liés à la prostitution. Aussi, force est d'admettre que ces journalistes ont de la difficulté à reconnaitre qu'au fil du temps, l'activité prostitutionnelle à Québec ne s'estompe pas.

2.4 Et avec une touche d'humour !

Le 26 mars 1923, le journal Le Soleil publie dans sa section intitulée « Chronique du Recorder », l'article suivant:

Il y a dans la vie publique tant de hasards qu'il ne faut point s'étonner de celui qui vient de surprendre l'existence d'une citoyenne de Québec dans l'accomplissement de ses fonctions quotidiennes. Son admiration outrée des hommes en général et des hommes publics en particulier l'avait poussée à ouvrir rue St-Olivier, une maison de « publicité » assez achalandée. Un homme, qui n'avait pas pour le moment de position reconnue, se présentait hier soir à cette philanthropique agence pour en demander une horizontale autant que possible. La tenancière acquiesça et tout allait comme dans le meilleur des mondes lorsque la police se mêla d'opérer dans l'immeuble précité une descente qui ont généralement le caractère de s'effectuer en montant. L'homme à position horizontale fut poliment prié de venir s'expliquer devant le recorder, comment il se faisait qu'il n'avait point choisi de préférence la verticale, commune au commun des mortels. Devant la pudeur de son silence et le silence de sa pudeur, M. le recorder Desrivières a condamné le prévenu à 25$ d'amende et les frais ou à quinze jours de prison. La tenancière de son côté, a inscrit un plaidoyer de non culpabilité et l'audition de sa cause a été fixée au 28 courant. Des deux femmes arrêtées en même temps, l'une a reçu le

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châtiment qu'elle méritait; l'autre qui disait aller là que pour laver les planchers a reçu une admonestation et s'est tirée sans frais de son mauvais pas189.

Ce n'est peut-être pas évident pour le lecteur non averti, mais cet article rapporte une descente policière opérée dans une maison débauche. En fait, s'il est si difficile à comprendre, c'est parce qu'il est presque uniquement composé de sous-entendus. Dès lors, il faut souvent plus d'une lecture pour arriver à cerner son objet. L'autre élément qui frappe lorsqu'on examine cet article de presse, c'est sa dimension hautement humoristique et c'est surtout là que réside l'intérêt de cette source. Même si ce n'est pas toujours aussi marqué que dans cet exemple, les journalistes qui couvrent les nouvelles liées au milieu prostitutionnel ont effectivement tendance à adopter un ton comique. Tantôt plaisantins,