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Description ph´enom´enologique de la dynamique

Dans ces syst`emes dynamiques cellulaires, le formalisme d’´etude fait en g´en´eral appel `a des ´equations ph´enom´enologiques de type Ginzburg-Landau. Dans cette approche, on laisse de cˆot´e les m´ecanismes internes au syst`eme (capillarit´e, viscosit´e, ´ecoulement, . . . ) pour adopter la d´emarche d’une recherche de lois simples. De ce fait, on traite le probl`eme avec les outils de la physique non-lin´eaire. On choisit en g´en´eral de mod´eliser le pattern par une fonction scalaire U (x,t) qui est en g´en´eral la somme d’une fonction p´eriodique U0(x + φ) correspondant

`a l’´etat de r´ef´erence et d’une fonction u(x + φ,t). La fonction u(x + φ,t) est elle-mˆeme la somme des d´eveloppements de tous les modes dynamiques instables [27] (φ ´etant la phase spatiale du motif):

U (x,t) = U0(x + φ) + u(x + φ,t) (2.7)

u(x + φ,t) =XAα(x + φ,t)mα(x + φ,t) (2.8)

α est l’indexation d’un mode instable mα, d´ependant du temps (´etat oscillant) ou non (´etat

d´erivant). Aα est l’amplitude (r´eelle ou complexe) de ce mode. Coullet et Iooss [27] ont montr´e

qu’il existait dix modes g´en´eriques correspondant `a dix sym´etries bris´ees diff´eremment. La figure 2.7 donne une illustration de cette sch´ematisation du motif de colonnes.

Dans le cas d’une bifurcation avec brisure de sym´etrie gauche/droite, par exemple, mα(x +

φ,t) a la forme d’une fonction antisym´etrique par rapport `a x qui vient s’ajouter `a la fonction sym´etrique U0(x + φ) [19]. Le but est ensuite de trouver, par arguments de sym´etrie et en

restant dans la limite o`u Aα et φ sont des fonctions lentement variables en espace et en temps,

Colonnes statiques Oscillations Domaine dérivant Vg Vd λλλλ1 λλλλ0 Vg x

Fig. 2.7 – Repr´esentation sch´ematique d’un motif cellulaire 1D et de quelques ´etats dynamiques, `a l’aide d’une fonction U (x,t).

se restreignant `a la dynamique de ce seul mode, ind´ependamment des autres (ce qui est une hypoth`ese valid´ee `a l’int´erieur d’un domaine d´erivant), on trouve une ´equation r´egissant la dynamique de Aα. L’´equation correspondant `a la brisure de sym´etrie gauche/droite est donn´ee

par [19]:

At= (µ + φx)A + Axx+ γAAx− δA3+ ...

φt = ωA + φxx+ ...

Cette ´equation a ´et´e restreinte `a ses ordres les plus bas en puissance de A et de φ, une troncature qui admet implicitement qu’on se trouve pr`es du seuil de bifurcation.

En g´en´eral, µ apparaˆıt comme ´etant le param`etre de contrˆole naturel de l’exp´erience. Le seuil semble alors d´ependre du gradient de phase. Les coefficients δ et ω sont a priori ind´ependants de ce gradient de phase, ce qui, nous le verrons, n’est pas v´erifi´e dans notre syst`eme. Ces ´equations mod`eles ont pu ˆetre test´ees rigoureusement sur notre syst`eme o`u les quantit´es apparaissant dans les deux ´equations ci-dessus sont identifiables `a certaines grandeurs dans notre syst`eme. Ainsi, le gradient de phase φx n’est autre que la diff´erence entre le nombre d’onde local (k) et un

nombre d’onde de r´ef´erence (k0) que nous allons pr´eciser ult´erieurement. En d’autres termes, la

valeur de φx est directement d´eductible d’une mesure locale de la distance entre colonnes. La

d´eriv´ee temporelle de la phase φtest reli´ee de fa¸con triviale `a la vitesse de d´erive et au nombre

d’onde par la relation: φt= Vdk. Par la suite, en supposant le gradient de phase et l’asym´etrie

comme constants `a l’int´erieur d’un domaine, on trouve que A et φt sont proportionnels, par le

donc de mesurer (Vdk)2 afin de voir s’il existe une relation lin´eaire entre cette quantit´e et le

param`etre de contrˆole de l’exp´erience (le d´ebit par unit´e de longueur).

Par cet exemple, on se rend compte de la possibilit´e de tester le mod`ele de Coullet et Iooss et de mesurer les coefficients de ses ´equations.

Cette approche, qui peut sembler r´eductrice au niveau de la ”physique” des ph´enom`enes observ´es a apport´e de remarquables succ`es dans l’interpr´etation de la dynamique des patterns et dans la mise en ´evidence d’une universalit´e des ph´enom`enes [14].

Bien que les colonnes liquides en elles-mˆemes constituent des singularit´es dans le profil interfacial, il est tout `a fait possible de sch´ematiser leur position et leur dynamique par les ´equations ci-dessus : le maximum de la fonction U (x,t) peut repr´esenter le lieu d’une colonne. Par cette approche, on r´eduit la figure de ruissellement de colonnes liquides comprenant un profil d’interface tr`es complexe dans les trois dimensions d’espace, `a un ensemble de couples (position des colonnes/vitesse des colonnes) pour chaque colonne donnant toute l’information n´ecessaire (une information facilement accessible par l’interm´ediaire des diagrammes spatio-temporels).

Ainsi, le pattern de colonnes est d´ecrit comme une fonction scalaire continue et d´erivable dans le temps et l’espace, construite comme la fonction U (x,t) sur la base d’un ´etat de r´ef´erence et de modes instables brisant la sym´etrie initiale du probl`eme. Ce point de vue usuel dans l’´etude des syst`emes cellulaires va nous permettre de d´ecrire le motif de colonnes et sa dynamique de fa¸con beaucoup moins limit´ee qu’une ´etude hydrodynamique l’aurait permise.

Chapitre 3

R´egimes dynamiques laminaires: ´etude

exp´erimentale

Dans ce chapitre sont pr´esent´es les ´etudes quantitatives des diff´erents ´etats laminaires. Leur ordre d’exposition est `a longueur d’onde moyenne croissante, dans les quatre premiers paragraphes.

Pour mieux appr´ehender cet ordre d’exposition, et bien que la stabilit´e des diff´erents ´etats fasse l’objet d’un prochain chapitre, on peut pr´esenter ici une vue d’ensemble des ´etats dy- namiques. Le diagramme figure 3.1 montre l’existence des ´etats dynamiques lorsqu’on varie la longueur d’onde moyenne λmoy (li´ee au nombre de colonnes par λmoy = Nπdcol) et le d´ebit par

unit´e de longueur Γ. Il concerne le cas de l’huile 100 cP. On y voit de gauche `a droite les ´etats correspondant `a une structure de plus en plus dilat´ee. Pour une structure tr`es peu dilat´ee, les colonnes sont statiques (CS). Lorsqu’on augmente λmoy (en supprimant quelques colonnes), on

obtient en fonction du d´ebit et des conditions initiales des oscillations ou un domaine d´erivant local (DL). Si on continue `a supprimer des colonnes, on atteint des structures de plus en plus dilat´ees. On voit toujours un domaine d´erivant mais dont la taille devient de plus en plus im- portante, jusqu’`a atteindre la taille enti`ere du syst`eme. On parle alors de d´erive globale (DG). Le chaos spatio-temporel (CST) est un peu `a part, dans la mesure o`u on ne peut plus contrˆoler λmoy. Une plage d’existence est n´eanmoins mesurable.

Nous commen¸cons donc par d´ecrire le cas des structures les plus resserr´ees. Nous allons voir dans un deuxi`eme paragraphe que cet ´etat peut pr´esenter dans certaines conditions une d´erive lente1. Ensuite, nous nous int´eresserons `a l’´etat d’oscillations, et aux ´etats d´erivants locaux et

globaux.

3.1

Etat statique - Etat de r´ef´erence

C’est l’´etat le plus simple obtenu en r´egime de colonnes, dans le sens o`u il d´ecoule directement de l’instabilit´e primaire avant que d’´eventuelles bifurcations secondaires n’entrent en jeu. Apr`es un transitoire o`u la phase peut ´eventuellement diffuser, le motif apparaˆıt parfaitement homog`ene et quasi-immobile. Il correspond aux structures les plus resserr´ees (grand nombre de colonnes par unit´e de longueur). Sa plage d’existence est d´etaill´ee en figure 3.2, `a partir d’un zoom du diagramme de stabilit´e g´en´eral. Globalement, la plage en longueur d’onde varie peu avec le 1. L’adjectif lent est `a consid´erer relativement `a la d´erive ”rapide” qui correspond `a l’´etat de brisure de parit´e. La vitesse d’une d´erive lente est environ 100 fois inf´erieure `a celle de la d´erive normale.

0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.8 1 1.2 1.4 1.6 1.8 2 2.2 2.4 ΓΓΓΓ (cm 2 /s) λλλλm (cm) Nbre colonnes Gouttes Dér. loc. Oscillations Statique CST Dérive globale Dér. glob. Dérive locale + λλλλ0 Dér. Loc. + Stat Structures dilatées Motif comprimé

Fig. 3.1 – Vue d’ensemble des ´etats dynamiques, apparaissant en variant le d´ebit et le nombre de colonnes (huile silicone 100 cP).

0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.8 1 1.2 1.4 1.6 1.8 2 2.2 2.4 ΓΓΓΓ (cm 2/s) λλλλmoyen(cm) Cellules statiques Nappes annulaires Chaos spatio temporel Oscillations Dérive globale Dérive locale Gouttes λλλλ0 λλλλmoy ΓΓΓΓ ETAT QUASI-STATIQUE HOMOGENE Seuil dérive lente λλλλmin Vers états dynam. λλλλmax

Fig. 3.2 – Zoom sur la plage d’existence des ´etats statiques (100 cP).

d´ebit. On constate n´eanmoins que `a trop haut d´ebit, les ´etats trop resserr´es n’existent plus. Sur cette figure 3.2, on a aussi trac´e en pointill´es la limite d’apparition d’une d´erive tr`es lente en bloc de la structure. Cette d´erive lente est ´etudi´ee dans le paragraphe suivant, l’´etat correspondant ´etant not´e quasi-statique sur la figure 3.2.

Si on regarde bien la figure 3.2, on remarque que, au moins `a bas d´ebit, la largeur de la plage d’existence en λ est pratiquement ind´ependante du d´ebit, et ne d´epend que de la viscosit´e. La d´ependance de cette plage en viscosit´e est reproduite sur la figure 3.3. L’´etat statique apparaˆıt donc dans une certaine plage en λ. Comme on le verra plus tard, il existe une valeur λ0 dans

cette plage qui est choisie comme longueur d’onde de r´ef´erence. Cette valeur de r´ef´erence est s´electionn´ee par la dynamique du syst`eme et on verra qu’elle ne varie quasiment pas avec le d´ebit.

Une telle s´election dynamique de longueur d’onde a ´et´e observ´ee dans d’autres syst`emes cellulaires, comme la solidification directionnelle ou l’instabilit´e de l’imprimeur [15, 16].

La figure 3.3 rapporte aussi l’´evolution de cette longueur d’onde de r´ef´erence λ0 avec la

viscosit´e η, pour des huiles silicones. Quelques remarques en d´ecoulent:

0,9 1 1,1 1,2 0 50 100 150 200 250

λλλλ

(cm)

Viscosité (cP)

RT

λλλλ

inf

Fig. 3.3 – Plage de longueur d’onde maximale accessible pour l’´etat de colonnes statiques, en fonction de la viscosit´e (huile silicone). Les disques pleins repr´esentent la longueur d’onde de r´ef´erence λ0.

lorsque la viscosit´e augmente. A faible viscosit´e, λ0 ' λRT

- La plage des longueurs d’ondes accessibles en r´egime de colonnes statiques devient plus ´etroite `a faible viscosit´e. Pour autant, la longueur d’onde minimale accessible ne varie pas. Elle reste ´egale `a la longueur d’onde minimale pour laquelle le taux de croissance de l’instabilit´e de Rayleigh-Taylor est positif λinf = 2π

q

σ ρg =

1 √

2λRT [1]. Toute tentative de rajouter une colonne

lorsque le syst`eme se trouve `a λinf se solde par la fusion de deux autres colonnes autre part sur

la coupelle: le syst`eme se maintient au dessus de λinf. Par ailleurs, de l’autre cˆot´e de la plage de

stabilit´e, l’´etat statique va bifurquer vers un ´etat dynamique (oscillations, d´erive): voir figure