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Ce travail de thèse repose sur l’exploitation d’une base de données d’imagerie TEP et IRM, acquise depuis plusieurs années au sein de l’unité INSERM U1000au Service Hospitalier Frédéric Joliot (SHFJ) à Orsay, dans le cadre de deux protocoles de recherche en psychiatrie : « PSYDAT » et « CAIMAN ». Les études basées sur ces protocoles ont porté sur l’imagerie du transporteur de la dopamine (DAT) avec le [11C]PE2I, acquise sur une caméra TEP haute résolution. Avant le début de la thèse, cette base de données a permis la publication de deux articles, l’un concernant l’apport d’une nouvelle méthodologie en TEP (Leroy et al, 2007) et l’autre concernant la disponibilité du DAT dans l’addiction au cannabis et au tabac (Leroy et al, 2012). Deux études basées sur les images TEP acquises dans le cadre de ces deux protocoles, ont été initiées en amont de la thèse et finalisées puis publiées durant la thèse.

1.1.! Protocoles PSYDAT & CAIMAN : Design des études

1.1.1.!PSYDAT

Le protocole PSYDAT avait à l’origine été conçu pour l’étude du DAT dans la schizophrénie, puis s’est étendu par la suite à l’étude de plusieurs pathologies psychiatriques comme la dépression et l’addiction au cannabis ou au tabac. Ce protocole inclut, en plus de l’imagerie TEP du DAT à l’aide du [11C]PE2I, des examens d’imagerie IRM anatomique (IRMa), fonctionnelle (IRMf) et de diffusion (DTI) et des tests d’évaluations cliniques. Les évaluations cliniques incluent les échelles de dépendance au tabac avec le FTND (Fagerstrom Test for Nicotine Dependence)(Fagerstrom et al, 1990), de dépression avec la MADRS (Montgomery-Åsberg Depression Rating Scale)(Montgomery and Asberg, 1979) et la BDI (Beck Depression Inventory)(Beck et al, 1961), et de symptomatologie de la schizophrénie avec la PANSS (Positive And Negative Syndrome Scale)(Kay et al, 1987). Les objectifs du protocole PSYDAT étaient

d’explorer la relation entre des changements de densité du DAT et des changements dans la fonction ou la structure/la densité de régions sous-corticales riches en dopamine, et de déterminer des liens entre ces mesures d’imagerie et la symptomatologie de plusieurs troubles psychiatriques.

1.1.2.!CAIMAN

L’étude CAIMAN (Cocaine Addiction Imaging Medication And Neurotransmitters) initiée en 2009 par le Dr Laurent Karila dans le service d’addictologie de l’hôpital Paul Brousse et l’unité INSERM U1000 « Neuro-imagerie et Psychiatrie », concerne l’étude de l’effet du modafinil (un psychostimulant utilisé dans le traitement de troubles du sommeil tels que la narcolepsie) sur le DAT, évalué en TEP chez des patients dépendants à la cocaïne pendant leur sevrage thérapeutique en cocaïne. Il s’agit d’une étude mono-centrique randomisée en double aveugle contre placebo d’une durée totale de 36 mois (Figure 17). L’étude comprend au total vingt-sept sujets diagnostiqués dépendants à la cocaïne selon les critères du DSM-IV-TR, en demande de traitement pour sevrage. Au cours de cette étude, les patients ont été hospitalisés pendant dix-sept jours, et ont été testés à deux reprises en imagerie et en clinique, à J3 et J17 après le début du sevrage thérapeutique. Après randomisation à J0, les patients ont été répartis en deux groupes de quinze. Chaque groupe a reçu, en aveugle, soit le modafinil soit le placebo de J4 à J17. Tous les patients ont reçu les mêmes unités de traitement délivrées par les soignants du service d’addictologie pendant leur hospitalisation. Chaque session d’imagerie comportait un examen d’IRM anatomique pondérée en T1, un examen d’IRMf, un examen d’IRM de diffusion, et un examen de TEP réalisé avec le [11C]PE2I. Les évaluations cliniques et neuropsychologiques comportaient l’échelle de dépression BDI, l’échelle de « craving » en cocaïne CCQ (Cocaine Craving Questionnaire)(Karila et al, 2011b), et les tests du N-back (Carlson et al, 1998) et de l’Iowa Gambling Task (Bechara et al, 1994). Le craving, de l’anglais signifiant « désir ardent, appétit insatiable », désigne le désir compulsif de consommer de nouveau la substance après une période d’abstinence. L’aveugle concernant les traitements médicamenteux a été levé à la sortie d’hospitalisation (J17). A l’issue

de cette première phase, les patients initialement sous modafinil, ont continué à recevoir, en ouvert, du modafinil jusqu’à J90. Les patients initialement sous placebo ont été également suivis pendant cette période. L’objectif de ce protocole était de rechercher, grâce à la TEP et au [11C]PE2I, les modifications de la densité du DAT dans les régions striatales et extrastriatales chez des sujets dépendants à la cocaïne, hospitalisés pour sevrage thérapeutique (entre J3 et J21) et d’évaluer l’impact du modafinil, qui constitue une approche thérapeutique prometteuse (Anderson et al, 2009; Dackis et al, 2005; Dackis et al, 2012; Hart et al, 2008), sur le système dopaminergique et sur l’évolution clinique des patients.

Figure 17 : Déroulement de l’étude CAIMAN. L’étude se divise en deux phase. La phase d’hospitalisation s’étend du jour 1 au jour 17 et comprend deux sessions d’évaluations, au jour 3 et au jour 17. Ces deux sessions comportaient des examens IRM et TEP, des tests neuropsychologiques évaluant la mémoire de travail (N-back task) et la prise de décision (Iowa Gambling task), des évaluations cliniques des symptômes dépressifs et du craving (envie de consommer), ainsi que des tests urinaires de dépistage de la cocaïne. A partir du jour 4, les patients ont reçu un traitement quotidien, placebo ou modafinil (400mg/jour). La phase ambulatoire s’étend du jour 17 au jour 90 et comporte des tests urinaires de dépistage de la cocaïne, effectués toutes les deux semaines. Durant ce suivi ambulatoire, les patients ont continué de prendre leur traitement, placebo ou modafinil.

1.2.! Participants

Pour le protocole PSYDAT, des sujets sains (n=26) n’ayant aucun antécédent de maladies neurologiques ou psychiatriques ont été recrutés dans la population générale par voie d’affichage. Des hommes fumeurs de tabac (n=20) et/ou de cannabis (n=17) ont été recrutés au sein du service d’addictologie de l’hôpital Paul Brousse à Villejuif et remplissaient les critères diagnostiques pour la dépendance à la nicotine ou au cannabis selon le DSM-IV. Des hommes âgés de 22 à 56 ans (n=27) remplissant les critères diagnostiques de la schizophrénie selon DSM-IV-TR ont également été inclus. Ils ont été recrutés par des psychiatres expérimentés des services psychiatriques de plusieurs hôpitaux du sud de la région parisienne. Les patients schizophrènes, à l’exception d’un participant, suivaient un traitement antipsychotique en monothérapie. Aucune association avec d’autres traitements comme les antidépresseurs ou les régulateurs d’humeur n’a été autorisée, à l’exception d’un faible dosage de benzodiazépines. Des sujets déprimés (n=8), remplissant les critères du trouble dépressif majeur selon le DSM IV-TR, ont également été inclus par des psychiatres des services psychiatriques de la région parisienne. Ces patients étaient sous inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) en monothérapie (à l’exclusion de la sertraline).

Les critères d’exclusion étaient les suivants: être âgé de moins de 18 ans ou de plus de 60 ans, tout abus ou dépendance à l’alcool ou à une autre substance (à l’exception du tabac pour les sujets fumeurs et du cannabis pour les sujets dépendants au cannabis) au cours des 6 derniers mois, tout traitement incluant une molécule susceptible d’interférer directement avec le DAT, tout traitement électro-convulsif au cours des six derniers mois, toute condition médicale actuelle, des antécédents de crises épileptiques, des antécédents d’autres troubles psychiatriques, neurologiques ou de lésions cérébrales importantes, et toute contre-indication aux champs magnétiques (objets métalliques, claustrophobies) selon les critères de sécurité établis. Tous les volontaires ont donné

leur consentement éclairé par écrit après avoir reçu une explication détaillée de la procédure!et vérification des critères d’inclusions par des psychiatres expérimentés.

Pour l’étude CAIMAN, vingt-neuf hommes âgés de 26 à 52 ans ont été inclus dans le protocole au sein du service d’addictologie de Paul Brousse, à Villejuif. Ils étaient tous fumeurs de tabac, remplissaient les critères diagnostiques de la dépendance à la cocaïne selon le DSM-IV-TR, présentaient un test de dépistage urinaire positif pour la cocaïne lors de l’inclusion, et étaient à la recherche d’un traitement. Les sujets dépendants à la cocaïne étaient consommateurs depuis 12,8 ± 6,2 ans en moyenne. Le consentement oral et écrit des participants a été obtenu après une description complète de l’étude. Les participants ont été randomisés par l’unité de recherche clinique de l'Université Paris Sud.

Les critères d’exclusion étaient les suivants : être âgé de moins de 18 ans ou de plus de 65 ans, être une femme, présenter une hypersensibilité ou des contre-indications au modafinil, tout trouble de l’Axe I lié à la substance (à l’exception de la dépendance au tabac), tout traitement interférant directement avec le DAT ou le modafinil, des antécédents d’autres troubles psychiatriques, neurologiques ou de lésions cérébrales importantes et toute contre-indication à l’IRM.

Avant chaque examen d’imagerie, tous les participants de PSYDAT et CAIMAN ont subi un dépistage urinaire semi-quantitatif à la recherche de dix substances psychoactives dont la cocaïne, l’amphétamine, la méthamphétamine, le cannabis, la méthadone, les opiacés, l’ecstasy, les barbituriques, les benzodiazépines et les antidépresseurs tricycliques (Biomedical Diagnostics®, Marne-la-vallée, France) afin d’exclure des sujets qui n’auraient pas spontanément signalé une consommation de drogues ou une prise de médicaments pouvant interférer avec les données d’imagerie.