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Des prémices de l’« enabling » au modèle capacitant

C Du modèle capacitant au contrôle capacitant

1) Des prémices de l’« enabling » au modèle capacitant

Les travaux fondateurs sur l’enabling ont posé les bases de cette notion et permis à Adler et Borys de forger peu à peu ce qu’ils ont appelé the enabling approach (Adler et Borys, 1996, p. 81), ou, selon notre traduction, l’approche capacitante. Les prémices de cette notion apparaissent dans les premiers travaux de Paul Adler en 1980 ; elles vont se préciser durant près de 15 ans et aboutir à l’élaboration d’un modèle conceptuel par Adler et Borys en 1996 dont vont se saisir Ahrens et Chapman et, à leur suite, des chercheurs en comptabilité, contrôle de gestion et audit. Cette lente maturation, qui va donner sa richesse mais aussi sa complexité au modèle, ne peut être ignorée pour bien en saisir tous les enjeux. Nous nous intéresserons donc aux fondements du modèle théorique capacitant, initialement adressé aux bureaucraties, en décrivant tout d’abord l’émergence de l’approche capacitante (a) avant de présenter le modèle conceptuel destiné aux bureaucraties « capacitantes » (b).

a) L’émergence de l’approche capacitante

C’est un article de Paul Adler et Bryan Borys publié dans Administrative Science

Quarterly (1996) qui a, pour la première fois, décrit le modèle conceptuel dit enabling appliqué aux bureaucraties. On ne saurait cependant cerner pleinement cette recherche, intitulée Two Types of Bureaucracies: Enabling or Coercive, qui questionne la formalisation du travail dans les bureaucraties, sans porter au préalable un regard sur les travaux précédents de Paul Adler qui lui ont permis de forger peu à peu ses principaux concepts.

La genèse de l’enabling : une valorisation des qualifications

À partir de travaux doctoraux conduits en France au début des années 1980, Paul Adler oriente sa réflexion en direction des relations complexes nées du lien entre les (nouvelles) technologies et leurs utilisateurs, en s’intéressant aux qualifications et aux compétences de ces derniers. Son point de départ est de remettre en question « une tradition estimée et ancrée de la théorie économique et sociale qui pose la réduction tendancielle des besoins de compétences à long terme » ; cette tradition lui semble en effet contredire « un point de vue de bon sens que le changement technique dans le monde réel est généralement accompagné d’une hausse des qualifications » (Adler, 1986, p. 24)49, même s’il reconnaît que certaines fonctions peuvent nécessiter des qualifications moindres, par exemple dans les métiers de l’assurance où une partie de l’analyse des risques est confiée à l’expertise de systèmes informatisés (Adler, 1986, p. 11). Il défend alors l’idée que l’impact sur le travail de l’évolution des technologies « a été une valorisation des qualifications et non une déqualification » (Adler, 1986, p. 13)50.

Les « nouvelles caractéristiques du travail »

À partir de ce constat, Paul Adler va identifier trois dimensions qualitatives critiques qui doivent être prises en compte par les managers lorsqu’ils évaluent les qualifications nécessaires pour accompagner l’automatisation et l’usage de technologies nouvelles dans le travail : les nouveaux types de responsabilités, le nouveau degré d’abstraction, et les nouveaux niveaux d’interdépendance induits par les tâches à effectuer (Adler, 1986, p. 13 et 16). L’efficacité de la gestion des membres de l’organisation dépendrait de la congruence entre ces trois dimensions et le recours aux technologies.

La première de ces trois « nouvelles caractéristiques du travail » (New Features of

Work) consiste à distinguer la responsabilité vis-à-vis des résultats de la responsabilité vis-à-vis des moyens, et cela eu égard aux dysfonctionnements et aux risques d’erreurs. En effet, la responsabilité de résultat des employés concernés par le déploiement et le fonctionnement d’un système technologiquement avancé est, selon Adler, un

49 « […] a venerable, multi-stranded tradition in social and economic theory which posits a long-run,

average tendency of technical change to reduce skill requirements […] the more “common-sensical” view that real-world technical change is usually accompanied by skill increases » (Adler, 1986, p. 24).

« impératif opérationnel » (Adler, 1986, p. 18) pour éviter des accidents, qu’ils soient « mineurs » comme ceux de nature à entamer la réputation de qualité d’une entreprise, ou majeurs comme dans le cas de défaillances dans des centrales nucléaires.

La deuxième caractéristique concerne la capacité d’abstraction car les tâches à effectuer et les objectifs à atteindre sollicitent de plus en plus les capacités mentales de chacun dans la mesure où « les dispositifs automatisés éloignent les employés de la fabrication et les poussent vers les fonctions périphériques et d’interface » (Adler, 1986, p. 18)51.

L’interdépendance, troisième « nouvelle caractéristique du travail », résulte des deux précédentes puisqu’un utilisateur de systèmes technologiques est dépendant des usages mis en œuvre par les autres utilisateurs, ses collègues opérationnels et ceux de la technostructure. Ces niveaux d’interdépendance conduisent les utilisateurs des systèmes technologiques à développer des capacités techniques, sociales et de flexibilité, au travers de leurs pratiques de terrain mais aussi de programmes de formation continue, qui « reflète[nt] la nature changeante des technologies » (Adler, 1986, p. 19-20)52. Ainsi, illustrant son propos à partir d’une observation participante dans une grande banque française, Adler conclut que la recherche d’une optimisation de la performance nécessite que les trois « nouvelles caractéristiques du travail » soient présentes, y compris au niveau des emplois les moins qualifiés (Adler, 1986, p. 22). Il pose ainsi les premières fondations de la théorie capacitante.

La flexibilité

Deux ans plus tard, une publication de Paul Adler approfondit la question des systèmes programmables automatisés qui pourraient permettre aux industries de capitaliser à partir des nouvelles voies de flexibilité dues à la nature programmable de ces technologies (applications informatiques mais aussi dispositifs mécaniques, électroniques, etc.) et qui induisent, de ce fait, des répercussions managériales.

Il développe une réflexion, que l’on retrouvera à l’origine du contrôle capacitant, relative à la manière de déverrouiller le potentiel issu de la flexibilité des nouvelles technologies en la liant aux compétences des employés, ce qui constitue « un paradigme émergent » (Adler, 1988, p. 35 et 47). Les gains pour les industries, ainsi que pour les

51 « As automation pushes workers out of fabrication and into peripheral, interface functions » (Adler,

1986, p. 18).

entreprises de service, devraient être considérés en termes de coûts (production, personnel, logistique), de qualité (coût d’obtention de la qualité amélioré, notamment coût de conformité) et de temps, par exemple en ce qui concerne le cycle de développement de nouveaux produits (Adler, 1988, p. 36), à l’instar de « l’excellence japonaise » (Adler, 1988, p. 42) qui inspire Adler dans nombre de ses publications (Adler, 1988, 1999).

La première co-publication de Paul Adler et Bryan Borys – qui avaient collaboré à trois working papers en 1986 et 1988 largement inspirés par l’article de Paul Adler de 1986 – vise à clarifier le débat quant à l’influence des facteurs techniques (technologies) et des facteurs sociaux (influences managériales et sociales) sur la diffusion et la mise en œuvre des nouvelles technologies, notamment des systèmes automatisés, dans un contexte où l’industrie américaine était menacée par le modèle japonais. En distinguant les approches technico-déterministe (techno-dets) et socio-déterministe (socio-dets), les auteurs défendent l’idée que la « flexibilité » associée aux systèmes automatisés programmables (par exemple des machines-outils à commande numérique) constitue la promesse de produits plus variés et plus complexes fabriqués par des employés de plus en plus qualifiés, mais aussi que le potentiel souple (flexibilité) des nouvelles technologies est insuffisamment exploité par les entreprises (Adler et Borys, 1989, p. 162) dans la mesure où les préférences des dirigeants vont à la recherche de stabilité davantage qu’à celle de nouvelles capacités technologiques (Abernathy et al., 1983).

Les enseignements pour l’approche capacitante

On retiendra que la formulation de l’approche capacitante s’est longuement nourrie de réflexion et de travaux de recherche portant sur la dimension technologique de l’économie industrielle ainsi que des apports de l’ergonomie dans la mise en œuvre des technologies nouvelles converties en instruments pour des employés-utilisateurs, même si la théorie capacitante ne revendique pas de filiation affirmée avec l’ergonomie. En effet, Paul Adler publie en 1992 deux ouvrages qui préfigurent le modèle théorique capacitant à partir d’une thèse selon laquelle les organisations ne parviennent pas à exploiter le réel potentiel des nouvelles technologies : « On ne retire qu'une fraction du bénéfice potentiel des nouvelles technologies » (Adler et Winograd, 1992, p. 7)53.

53 « […] new technologies can realize only a fraction of their potential benefit » (Adler et Winograd,

Ces deux ouvrages sont le fruit de contributions à un séminaire sur « la technologie et le travail du futur » qui avait réuni, en mars 1990 à l’Université de Stanford, 250 dirigeants et responsables syndicaux américains, ainsi qu’une cinquantaine de chercheurs venant d’Asie, d’Europe et des États-Unis. Un volume était dédié aux questions de design des technologies, en mettant l’accent sur le concept d’utilisabilité (usability), tandis que le second s’intéressait aux conditions de mise en place effective de ces technologies.

Ces deux publications, et particulièrement Usability: Turning Technologies into

Tools (Adler et Winograd, 1992), offrent un regard prospectif sur la théorie capacitante et permettent de mieux la comprendre à travers la question suivante : quelles sont les lignes directrices qui vont aider les développeurs de systèmes à garantir l’utilisabilité optimale lors de la mise en place de nouvelles technologies (Adler, 1992, p. v) ? Les contributions, tout comme le modèle capacitant, s’inscrivent dans la démarche traditionnelle d’optimisation des sciences de l’action, qui est connue depuis les travaux des pères fondateurs du management et de la théorie des organisations tels Frederick W. Taylor, Max Weber ou Henri Fayol, ce dernier forgeant alors le concept de technologie au cœur de la théorie capacitante, à savoir l’instrument de gestion ou l’outillage administratif (Peaucelle, 2003, p. 2008).

Pour ce qui nous intéresse, il convient d’en distinguer trois enseignements qui ont constitué des éléments de référence pour l’élaboration ultérieure du modèle capacitant : la difficulté que rencontrent les organisations à exploiter le potentiel des technologies ; les mythes technologiques à l’épreuve des hommes au travail ; l’émergence d’une bureaucratie dite de « formalisation du travail ».

Le triptyque technologie-hommes-organisation

Le premier enseignement part du constat que le « modèle dominant dans de nombreuses entreprises est le triptyque technologie-hommes-organisation qui combine à la fois indifférence et foi aveugle » (Adler, 1992, p. 4) 54; il y aurait ainsi à la fois une indifférence des dirigeants d’entreprises vis-à-vis du rôle crucial joué par ce triptyque lors de la mise en place de systèmes automatisés, et une foi aveugle dans le fait que la technologie suffit à elle seule pour perpétuer ou restaurer la compétitivité. De ce fait, en se référant à la terminologie de Mintzberg, les membres de la ligne hiérarchique, ceux

54 « […] the dominant technology-people-organization model combines indifference and blind faith […] »

de la technostructure, ceux du support logistique ainsi que ceux du centre opérationnel seraient laissés dans la confusion en l’absence d’orientations stratégiques. Ainsi, et alors que l’on a assisté au cours des dernières décennies à un « formidable développement de la complexité et de la puissance des outils que nous utilisons au bureau et dans l’industrie » (Adler et Winograd, 1992, p. v)55, les organisations ne parviennent pas à exploiter le « véritable potentiel des nouvelles technologies » (Adler et Winograd, 1992, p. 12)56. Pour ce faire, il est nécessaire que les employés disposent à la fois de compétences de plus en plus développées et de responsabilités et champs d’intervention élargis (Adler, 1992, p. 13) dans la mesure où de la combinaison de nouvelles compétences et de nouveaux rôles émerge la capacité d’un meilleur usage des technologies.

Le double mythe de l’infaillibilité technologique et de la déqualification inhérente

En outre, et cela constitue le deuxième enseignement, Paul Adler introduit l’idée que les dirigeants d’entreprises commettent fréquemment une double erreur qu’il associe à un double mythe.

Tout d’abord, le mythe de l’infaillibilité des dispositifs technologiques selon lequel : « le héros est une machine si parfaite qu'elle est à l'abri des limites de ses utilisateurs » (Adler et Winograd, 1992, p. 3)57. Il est patent que ce mythe demeure largement répandu, il n’est que de s’intéresser aux coûts considérables engendrés par les rappels de véhicules dans l’industrie automobile58 ou aux questions sécuritaires avec la vidéosurveillance censée permettre dissuasion et détection et qui « ne garantit leur infaillibilité imaginaire qu’au prix d’une confusion réelle » (Le Blanc, 2010, p. 34). Ce mythe a été souligné par plusieurs philosophes, notamment Jacques Ellul selon qui « le

55 « […] a tremendous increase in the complexity and power of the tools we use in the office and

industry » (Adler et Winograd, 1992, p. v).

56 « […] new technologies will realize too little of their potential » (Adler et Winograd, 1992, p. 12). 57 « In the idiot-proofing myth, the hero is a machine so perfect that it is immune from the limitations of

its users » (Adler et Winograd, 1992, p. 3).

58 « Après les rappels à répétition de l’américain General Motors, c’est au tour de l’allemand BMW d’être

touché par le phénomène. Le constructeur automobile a annoncé, mercredi 16 juillet, le rappel d’environ 1,6 million de voitures dans le monde en raison d’airbags potentiellement défectueux » (extrait de l’article « BMW rappelle 1,6 million de voitures pour un problème d’airbags », Le Monde Économie du 16 juillet 2014. Consulté en ligne le 26 juillet 2014 : www.lemonde.fr/economie/article/2014/07/16/bmw-rappelle- 1-6-million-de-voitures-pour-un-probleme-d-airbags_4458236_3234.html. Voir aussi Lauraux, Matthieu « GM : 8,45 millions de voitures au rappel, 29 millions depuis janvier », du 1er juillet 2014, consulté en ligne le 26 juillet 2014 : www.tf1.fr/auto-moto/actualite/gm-8-45-millions-de-vehicules-au-rappel-29- millions-depuis-janvier-8444351.html

discours technologique est essentiellement le discours du mensonge » (Ellul, 1988, p. 438) et s’apparente à un « bluff technologique », selon le titre éponyme de l’un de ses ouvrages.

Corollaire à ce premier mythe, le mythe de la déqualification (deskilling) décrit « un système si infaillible que l'entreprise peut s’accommoder non seulement d’employer proportionnellement moins de travailleurs, mais aussi des travailleurs qui sont en moyenne moins qualifiés et moins coûteux » (Adler et Winograd, 1992, p. 3)59. Cette part mythologique est importante car l’on distingue ici l’une des pierres angulaires de l’approche capacitante : celle selon laquelle « les nouvelles technologies deviendront plus efficaces lorsqu'elles seront conçues pour augmenter plutôt que remplacer les compétences des utilisateurs » (Adler et Winograd, 1992, p. 3)60. Cet enseignement conduit les auteurs à identifier le défi de l’utilisabilité dans la conception et la mise en place des dispositifs technologiques, mais aussi à constater l’importance de la question de l’utilisateur. Cette dernière étant à la fois centrale et problématique pour l’approche capacitante, nous y reviendrons en évoquant les leviers de compréhension du contrôle capacitant en fin du présent chapitre.

Le cas NUMMI, référence organisationnelle du modèle capacitant

Le troisième enseignement tient à la nécessité de construire une organisation apprenante qui fait implicitement référence aux caractéristiques capacitantes de

transparence et de réparation que les auteurs appellent de leurs vœux en conclusion de leur contribution (Adler et Winograd, 1992, p. 13). Cet appel est poursuivi par Adler au travers de deux publications en 1993 basées sur une étude qualitative menée durant deux années au sein de la New United Motors Manufacturing Inc. (NUMMI) (Adler, 1993a, p. 97, Adler et Cole, 1993, p. 85), une co-entreprise lancée à Fremont en 1984 par General Motors et Toyota sur les fonts baptismaux de GM-Fremont, située face à l’Université de Stanford où Paul Adler venait de diriger le séminaire « technologie et travail du futur ». Comme l’usine Western Electric de Cicero – connue sous le nom de

Hawthorne Works, où des équipes de chercheurs menèrent durant les années 1920 et 1930 des travaux sur les relations entre l’environnement et la productivité du travail

59 « […] offering a system so idiot-proof that the business can presumably get along not only with

proportionately fewer workers, but also with workers who are on average less skilled and less expensive » (Adler et Winograd, 1992, p. 3).

60 « […] new technologies will become more effective when designed to augment rather than replace the

(École des relations humaines et travaux dirigés par Elton Mayo), qui ferma définitivement ses portes en 1984, année du lancement de NUMMI - cette dernière constitue la référence organisationnelle emblématique du concept de bureaucratie capacitante. En effet, alors que « l'usine GM-Fremont présentait un bilan catastrophique en matière de productivité, de qualité et des conflits de travail » (Adler, 1993b, p. 3)61, le pire de toutes les usines du groupe GM, deux années après son lancement NUMMI « était devenue l’usine la plus productive de montage d'automobiles aux États-Unis et la qualité du produit principal de l'usine, la Nova, a été classée par les consommateurs et les audits internes de GM dans la catégorie la plus élevée parmi les voitures nationales et étrangères » (Adler, 1993b, p. 3-4)62. En outre, le taux d’absentéisme avait chuté de 25 %, à 2,5 % et plus de 90 % des employés prenaient part au programme de suggestions avec une contribution moyenne de cinq idées par personne ; plus de 80 % de ces propositions étaient adoptées, ce qui traduisait leur qualité (Adler et Cole, 1993, p. 87).

De cette expérience, deux nouvelles caractéristiques émergent : le pouvoir et l’empowerment. Selon les mots d’un représentant du puissant syndicat américain de l’industrie automobile United Auto Workers :

« La clé de la réussite de NUMMI est que la direction a donné une partie de son pouvoir, certaines de ses prérogatives traditionnelles. Si les gestionnaires veulent motiver les travailleurs à contribuer et à apprendre, ils doivent renoncer à une partie de leur pouvoir. Si les gestionnaires veulent que les travailleurs leur fassent confiance, nous devons être à 50-50 dans la prise de décision. Ne pas simplement prendre la décision et dire : ‘Faites- moi confiance’ » (Adler, 1993a, p. 107)63.

Le cas NUMMI fait l’objet de comparaisons avec d’autres usines de construction automobile et Adler et Cole (1993) se sont intéressés à une mise en perspective avec l’usine Volvo de Uddevalla, ville située dans l’ouest de la Suède, à proximité de

61 « The GM-Fremont plant had an abysmal record of productivity, quality and labor strife » (Adler,

1993b, p. 3).

62 « […] had become the most productive auto assembly plant in the U.S. and the quality of the plant’s

principal product, the Nova, was ranked by consumers and internal GM audits in the highest category among domestic and foreign cars » (Adler, 1993b, p. 3-4).

63 « The key to NUMMI’s success is that management gave up some of its power, some of its traditional

prerogatives. If managers want to motivate workers to contribute and to learn, they have to give up some of their power. If managers want workers to trust them, we need to be 50-50 in making the decision. Don’t just make the decision and say, ‘Trust me’ » (Adler, 1993a, p. 107).

Göteborg, deuxième ville suédoise par sa population et son activité économique et industrielle. Le constructeur automobile Volvo y mena une expérience qui visait à proposer un modèle de production post-taylorien avec une participation active des employés dans les décisions managériales, ce qui a été qualifié de human-centered

model (Adler et Cole, 1993, p. 85). Cette unité de montage automobile, qui ouvrit en 1987 et ferma en 1993, opérait ainsi durant les mêmes années que NUMMI. Alors que NUMMI reposait sur une formalisation du travail poussée, l’usine Volvo était organisée non pas autour de la technologie organisationnelle mais selon un principe de large autonomie donnée aux équipes de travail avec le concept de self-managing teams (il s’agit d’équipes auto-administrées, structure organisationnelle ancrée dans le débat sur les équipes de travail qui revêt différentes formes (Proença, 2010, p. 337-338 ; Schuring, 1992, p. 61) ou d’équipes semi-autonomes de travail - ÉSA -, pour reprendre ce concept utilisé dans des recherches en langue française (Roy et Audet, 2002, p. 47)) qui, par le pouvoir transféré aux employés et leur empowerment, devait stimuler leur motivation au travail :

« Le passage de formes traditionnelles d’organisation du travail à l’adoption d’équipes semi-autonomes de travail constitue un changement majeur dans les pratiques organisationnelles, puisqu’il remet en question le partage des droits et des pouvoirs entre les acteurs au sein des entreprises. Une organisation en équipes semi-autonomes prévoit un transfert de responsabilités traditionnellement assumées par les gestionnaires, vers les employés. Bien que l’étendue des pouvoirs transférés varie considérablement d’une entreprise à l’autre, il n’en demeure pas moins qu’il y a un changement de paradigme et que les employés ne sont plus seulement considérés comme des exécutants, mais comme des partenaires. Ce changement modifie en profondeur la vie au travail. Plusieurs considèrent qu’il devrait apporter aux individus une amélioration de certains aspects de la qualité de vie au travail, tels qu’une plus grande satisfaction au travail, un plus grand bien-être psychologique, une amélioration de la santé et de la sécurité ainsi qu’une augmentation de la motivation » (St-Jacques et Roy,