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7. Les recherches actuelles et futures

7.3. Des perspectives de recherches stimulantes

Dans cette partie, je m’interrogerai sur les champs de recherches que je pourrai proposer à de futurs chercheurs ainsi sur les éventuelles recherches que je pourrai impulser.

Comme écrit dans la partie II, mon champ de recherche est assez large et pluridisciplinaire mais il peut être envisagé selon cinq orientations principales qui sont les pratiques langagières (plurilinguisme, transmission), les représentations sociales, l’identité, les réseaux sociaux et leurs propriétés et la migration/insertion. J’envisage donc de prolonger mes recherches dans chacun de ces axes avec :

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- les doctorants qui se montreront intéressés par les problématiques qui en découlent, comme je le fais déjà, à moindre échelle, avec les étudiants de Master. Je conçois d’ailleurs ces directions de thèses comme des caps destinés à définir une trajectoire large dans laquelle le jeune chercheur pourra s’exprimer, avancer et d’épanouir en synergie avec son directeur184 ; - mais aussi avec d’autres chercheurs ou équipes de recherche motivés par le sujet, ses enjeux multiples (épistémologiques et sociétaux.) et la façon de l’aborder.

À ce champ peuvent d’ailleurs s’ajouter des variations comme, par exemple, l’élargissement à d’autres régions ou pays dont il a été question dans le paragraphe précédent (7.2.4).

Ces recherches apporteront de nouveaux regards (conceptuels, méthodologiques, etc.), de nouveaux outils (logiciels, diffusion, etc.), de nouvelles énergies, etc. sur les problématiques liées aux phénomènes migratoires et leur versant insertionnel envisagés de manière globale. 7.3.1. Réaliser une typologie des parcours migratoires ?

Les similitudes que l’on peut observer entre certains parcours de migration posent la question d’une éventuelle typologie à bâtir. J’envisage donc, avec les travaux de mes futurs doctorants, d’établir une typologie qui montrerait les différentes phases d’évolution des phénomènes sociocognitifs en fonction des phases concomitantes de restructuration du réseau des personnes en contexte migratoire, de l’insertion à la nouvelle société aux étapes ultérieures, intégration, assimilation ou marginalisation. Dans le même ordre d’idées, on peut se demander s’il est possible de dresser une typologie de la restructuration des réseaux.

7.3.2. Réaliser une typologie des (re)structuration des réseaux ?

Dans la lignée du point précédent, je voudrais essayer de dresser une typologie des graphes précise tout en corrélant ceux-ci aux entretiens avec les personnes afin de prolonger mes travaux sur les réseaux à plus grande échelle. Cette typologie pourrait établir différents profils migratoires et être utilisée à des fins de didactisation des langues, d’actions sociales voire politiques.

7.3.3. L’ajout d’une dimension diachronique aux recherches sur le réseau ?

Au cours des pages précédentes, j’ai évoqué plusieurs fois le problème de l’utilisation d’outils statiques comme les écrits ou les graphes pour illustrer les phénomènes dynamiques que sont l’insertion, l’apprentissage, l’évolution identitaire, etc. J’aimerais donc travailler avec des

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Même si je n’aime pas trop ce terme qui, à mon sens, s’accompagne souvent et dans de nombreux domaines de la vie, de certains aspects hiérarchiques qui n’ont pas lieu d’être.

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linguistes compétents en informatique (chercheurs confirmés ou doctorants) afin de transposer la restitution synchronique des processus en illustration diachronique. Une modélisation informatique dynamique des graphes pourrait ainsi faire apparaître de façon précise les restructurations des réseaux et leurs effets : circulation des langues, bilinguisme, insertion, etc.

7.3.4. La didactisation des effets de la structure du réseau social ?

Dans les pistes d’applications potentielles de mes actuelles et futures recherches ou direction de recherches, il y a la transposition en didactique des effets de la structure des réseaux sur l’apprentissage langagier. Comment favoriser l’augmentation du capital social et linguistique des personnes en cours de migration puisque celui-ci est lié à l’input en français ? Quelles sont les actions à entreprendre dans ce sens ? Comment l’enseignement peut-il s’articuler efficacement à ce type d’actions ? Autant de questions pour lesquelles l’apport d’une équipe multidisciplinaire comprenant des didacticiens me paraît essentiel.

7.3.5. Les possibilités de traitement informatique des données ?

J’aimerais également travailler avec des linguistes informaticiens pour prendre en charge la codification de la masse de données collectée au fil des recueils de mes doctorants et des miens afin de leur confier une partie du traitement quantitatif. Cette démarche pourrait permettre de dégager des variables ou des corrélations moins « apparentes » lors du traitement qualitatif (Billiez, 2011) et d’en compléter, d’améliorer ou de rectifier les résultats. Elle implique toutefois la collaboration avec d’autres et la remise en cause de l’opposition qualitatif/quantitatif, artifice théorique qui gagnerait à être remplacé par la complémentarité des deux approches et les synergies qu’elle crée. C’est en tout cas la démarche que je privilégierai.

7.3.6. Diffuser c’est exister !

Pour avoir vécu en « live »185 la révolution du numérique dans la musique, je conçois l’ensemble un peu flou de ce qu’on appelle les « nouvelles technologies » comme une chance incroyable en termes de moyens (enregistrement, compilation, traitement, référencement, partage, etc.) et de diffusion de nos travaux qui demeurent souvent confinés dans de petites sphères alors que nous disposons d’un moyen de diffusion considérable avec Internet et/ou autres technologies similaires. Par exemple, je constate que les étudiants, du moins ceux que

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je côtoie, vont plus souvent sur Internet qu’à la bibliothèque comme le montrent leurs bibliographies. À l’image du travail collaboratif sur plateforme numérique, je pense que cette manière de faire dénote, au sein d’un changement global lié aux nouvelles technologies, des pratiques estudiantines en évolution. Or, je suis attentif à la diffusion des travaux auprès du public universitaire tout comme à la vulgarisation de ceux-ci vers un public plus large. Ainsi, je diffuse les miens sur :

- HAL186 dès que possible ;

- ou le site du département linguistique et FLE de l’UAPV187.

Mais je suis également prêt à diffuser mes travaux sur tout autre support de vulgarisation grand public, comme je l’ai fait plusieurs fois déjà (cf. volume II, articles 2 et 4), même si cela nous oblige, nous chercheurs, à modifier notre manière de communiquer pour mettre nos résultats au service de tous.

Pour conclure cette partie sur la recherche, je pense que travailler avec des personnes compétentes dans leurs domaines est un enrichissement mutuel et que c’est en bâtissant des synergies, en partageant des savoirs ou en confrontant des points de vue, que l’on avance dans la connaissance. Encore faut-il accepter la pertinence du regard de l’autre, la relativité de nos propres représentations ainsi que notre caractère par nature égocentrique. Ainsi, je n’exclus pas de travailler un jour avec des chercheurs issus de la psychologie sociale, des sciences cognitives voire de la biologie pour continuer à explorer les méandres du fonctionnement de notre espèce, nécessaire synergie scientifique sans laquelle, selon moi, on ne fait qu’effleurer la richesse et la complexité du monde.

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https://hal.archives-ouvertes.fr/ (HAL ou Hyper Articles en Ligne : plateforme de dépôt d’article développée par le CNRS).

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URL : http://blogs.univ-avignon.fr/linguistique-fle

Dès mon arrivée à l’UAPV, avec Anika Falkert, Maître de conférence HDR, nous avons créé le site Internet du département FLE qui en était dépourvu. Ce site propose les onglets suivants : les formations (descriptions pédagogiques, organisationnelles et administratives des formations assurées par le département linguistique et FLE ; les stages (informations administratives sur les stages, leurs contenus et leurs modalités) ; les offres de stages en France et à l’étranger (rubrique mise à jour dès qu’une nouvelle offre est diffusée, environ 600 offres) ; l’emploi (toutes les offres d’emploi qui nous parviennent et qui peuvent concerner nos étudiants, CDD ou CDI, en France ou à l’étranger) ; les partenaires (liste des organismes sociaux, associatifs et privés partenaires du département ainsi que les liens qui permettent l’accès à leurs sites respectifs) ; l’équipe (CV des membres du département) ; les articles (les articles des membres du département) ; les liens (accès au site du laboratoire ICTT, du CECAV (Centre d’études canadiennes), de l’AFEC (Association française d’études canadiennes), au service des relations internationales, etc.). Ce site Internet représente un outil important pour la diffusion des offres d’emplois ou de stages, de nos recherches ainsi que de toutes les informations qui concernent le département Linguistique et FLE.

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Conclusion

En guise de conclusion, j’appréhenderai l’ensemble de ce travail comme un parcours dynamique, interactif, réflexif et lui ferai quelques remarques critiques. Je poserai ensuite certaines questions que suggèrent mes avancées scientifiques et conceptuelles puis j’effleurerai les applications qui pourraient être les leurs pour finir par un dessin d’idéal. J’aime beaucoup la citation d’Aude Bretegnier188 qui suit parce qu’elle décrit de manière synthétique et exhaustive un cheminement proche du mien tout au long de cette HDR :

« Le parcours est ainsi marqué par des détours, des retours, et bien entendu de multiples

croisements. Il produit un questionnement qui demeure dans le fond de sa thématique, mais dont la reconstruction progressive, à la fois, le précise et l’élargit, fait évoluer sa formulation pour inscrire la recherche dans la perspective d’une sociolinguistique qualitative, impliquée, réflexive et critique » (2016 : 5).

Ainsi, j’ai eu plaisir et trouvé grand intérêt à revisiter avec les yeux du chercheur mon parcours pré-universitaire, à m’analyser rétrospectivement à l’aune de mes recherches, à prendre le temps de me perdre dans les méandres de la théorie pour formuler de nouvelles hypothèses, à dessiner des perspectives et des projets, pétri par la pensée de n’écrire que ma représentation des faits à une époque et en un temps défini. Alors bien sûr, on pourrait m’opposer les biais de ma méthodologie, un excès empathique comme ce fût le cas pendant ma soutenance de thèse, un éventuel éparpillement entre des disciplines parfois fort distantes, des propos teintés par ma manière d’envisager le monde et moult autres travers, mais j’assume l’ensemble, ma pensée, mes propos et aussi mes erreurs, tout comme j’accepte alter sans condition.

Dans ma conclusion, je ne reviendrai pas sur mes travaux, passés, actuels ou futurs, puisqu’il me semble les avoir exposés de façon détaillée au cours de ce travail. En revanche, au-delà des travaux eux-mêmes, mes recherches ou postures théoriques (re)posent le problème de ce qui en nous relève de l’individuel ou du social, de l’être ou de la structure, de la part de l’humain qui habite l’espèce ou de la part de l’espèce qui habite l’humain. Par extrapolation, elles m’interrogent aussi sur ce qui s’inscrit dans la phylogénèse de l’homme, sur la latitude d’agir sur le présent afin d’infléchir le futur. À cet égard, les approches pluridisciplinaires dont je me réclame confinent parfois à un genre de syncrétisme assumé qui, par instant, réconcilierait behaviorisme, structuralisme, innéisme et socioconstructivisme au sein d’un grand ensemble interactionniste.

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Et puisqu’au fil du texte, sans m’appesantir je l’espère, j’ai égrené des allusions à une autre facette de mon identité, celle de musicien, je peux maintenant affirmer celle de chercheur en essayant de faire en sorte que soit adoucie, et dans l’idéal abolie, la double peine qui frappe nombre de nos congénères : une peine « sociale » qui s’incarne dans les diverses discriminations et ségrégations dont ils sont victimes (sociales, financières, urbaines, à l’emploi, etc.), à laquelle s’ajoute une peine « linguistique » que représentent la glottophobie, les insécurités de tous genres, l’inaccessibilité à certains domaines de la société, etc.

Quoi qu’il en soit, j’espère que la distance entre l’oral et l’écrit en tant que norme hégémonique que j’évoquais dans mon propos liminaire, s’estompera sous la pression de l’émergence d’autres pratiques en littératie (tablettes, Smartphones, ordinateurs, etc.) qui engendreront une correspondance graphie/phonie moins arbitraire, d’autres normes moins prégnantes, moins dominantes, plus démocratiques, plus collaboratives, proches de l’oral, davantage plurielles… Je pense d’ailleurs, que chaque humain est détenteur d’un répertoire verbal et d’une compétence linguistique uniques qui lui confère une compétence de linguiste tout aussi unique mais trop souvent sous-estimée, ignorée voire méprisée.

Alors, j’aimerais œuvrer à resituer l’ensemble des phénomènes que j’ai abordés au cours de ce mémoire dans une théorie sociocognitive générale, puis à diffuser et vulgariser celle-ci afin d’apporter ma petite pierre à l’édifice de la connaissance et contribuer ainsi, à mon humble mesure, à améliorer le sort de mes congénères… notamment ceux qui migrent, qui changent d’univers, géographiques ou sociaux.

Je pense que l’HDR, avec les possibilités qu’elle offre de recherches et de projets, est un bon moyen de suivre ce cap.

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