• Aucun résultat trouvé

PARTIE 3 – VALIDATION DU MODELE EQUILIBRE DE PERFORMANCE :

3.2 Les retours d’expérience

3.2.2 Deuxième retour d’expérience : à propos de la situation de crise

3.2.2.3 Des capteurs pour détecter les signaux faibles

Dans toutes les organisations, chacun doit être particulièrement attentif à toute convergence de signaux indiquant le développement d’une situation anormale ou à potentiel de crise interne ou externe et à ces conséquences dans l’opinion. La capacité de détection est directement liée aux prises de conscience ainsi qu’aux méthodes mises en place et aux observatoires développés dans l’organisation. Pour être performant, il faut être préparé à ce qui n’est pas inné, et anormal. Plusieurs outils ou types d’organisations permettent de faciliter cette veille sociale.

3.2.2.3.1 Les outils d’analyse sociale Des exemples d’outils d’analyse sociale

Les objectifs de l'observation sociale s'inscrivent classiquement dans deux stratégies : la première est de nature défensive et s'applique surtout à prévenir les crises ; alors que la seconde plutôt offensive, vise à accompagner une politique de mobilisation du personnel. Dans le contexte des sites où l'on recherche initiative, créativité, implication des hommes et des équipes (management par la qualité), c'est bien la démotivation et les risques de dé- cohésion du corps social qui apparaissent comme des risques majeurs, alors même que l’entreprise entre dans une nouvelle phase de développement plus exposée (déréglementation, concurrence, crise de la demande, pression des lobbies…) et que les sujets de divergences potentiels ne manquent pas.

Traditionnellement le recueil de l’information sociale se fait par divers canaux notamment la voie hiérarchique et la voie syndicale. Mais force est de constater que des problèmes locaux n'arrivent pas toujours complément à s'exprimer par ces circuits habituels formels. Il apparaît donc nécessaire de mettre en place d’autres canaux de remontées d’informations, non- concurrents mais complémentaires, de manière à bien rester en contact avec le terrain.

Que ce soit par une investigation ponctuelle ou par la mise en place d’un dispositif d’observatoire social continu, les objectifs d’une démarche d’analyse sociale que nous préconisons et que nous avons mis en place dans les sites D et C sont globalement de : - Détecter et comprendre : les divergences de perceptions (Direction / Management /

Terrain), les risques de dérives et de conflits, les risques de dé-cohésion et de démotivation, les opportunités et les voies de progrès.

- Identifier et remonter : les points de vue sur la situation de l’entreprise, les différents niveaux d’attentes des salariés, les positions sur les dossiers “ chauds ” du moment. - Analyser les conflits forts et marquants en : les situant dans le contexte global,

dépassant les causes apparentes.

- Favoriser les contacts et le dialogue en privilégiant : les voies hiérarchiques, les modes transverses.

- Appuyer la ligne hiérarchique, notamment en : favorisant leur compréhension des problématiques sociales, leur fournissant les informations et les argumentaires susceptibles d’asseoir des relations de confiance avec les agents, les faisant participer aux plans d’actions.

Pour ce faire, nous avons participé à la construction d’un dispositif à deux niveaux :

- un DSI70 (Diagnostic de Satisfaction Interne) connecté au référentiel EFQM (dont nous

avons évoqué les objectifs et les finalités au sein de notre premier retour d’expérience à propos de la mise en réseau), il couvre 150 items et au moyen d’un questionnaire renseigné par un échantillon représentatif du site, il permet de compléter le diagnostic interne par une approche objectivée et très innovante. Il est réalisé tous les 3 ans et permet de construire l’action après une phase d’appropriation et de partage avec le terrain.

- Un baromètre BSI71 (Baromètre de Satisfaction Interne) réalisé mensuellement par

enquête téléphonique. Sur la base d’un questionnaire court de 5 questions fermées, un consultant spécialisé et habilité interroge individuellement au hasard un quota représentatif de trente agents. Il permet une mesure longitudinale entre les DSI et constitue pour les acteurs un indicateur clé de veille d’autant qu’il conjugue des données quantitatives et qualitatives à travers les verbatims livrés au site. Ce type d’enquête permet de suivre mensuellement les données sociales et managériales du site. Cette voie est retenue dans la perspective du processus continu d’analyse et d’observation sociale. Les résultats se cumulent de mois en mois, permettant ainsi de mesurer les évolutions des opinions et perceptions72.

Il faut donc considérer que ce type de dispositif est avant tout le moyen de disposer d’une véritable base de données, quantitative et qualitative, dont l’exploitation et le suivi sert tout aussi bien la Direction que l’ensemble des managers du site.

Ce dispositif nous l’avons couplé avec l’analyse d’indicateurs qualitatifs plus difficiles à traiter mais néanmoins très riches. Il s’agit ici d’analyser des documents ou des événements. Voici quelques sources d’informations qui peuvent constituer une base d’indicateurs qualitatifs :

- tracts et courriers syndicaux,

- comptes-rendus d'organismes statutaires, - cahiers de revendications,

- affichage des panneaux syndicaux,

- nature des échanges dans les organismes statutaires (de coopératif à très agressif), - demandes d’audience du personnel (délégations),

- résultats des élections professionnelles, - tenue de conseils d’atelier,

- événements externes au site (autres unités, autres entreprises, politique...) et veille sociale globale (colloque ; recherche universitaire, publications…).

71 Cf. Annexe 3.2 : Exemple de questionnaire BSI

Les recommandations

Tout le monde est d’accord avec l’idée qu’il vaut mieux anticiper, voir venir les crises pour mieux les prévenir, les esquiver ou les traiter au mieux, ce qui veut souvent dire en faire ou les transformer en occasions de progrès. Les constats issus des retours d’expérience sont récurrents : les signaux précurseurs de crises sont au mieux captés mais ils restent régulièrement non acheminés et non exploités.

Une question toute simple doit se posée dans toute organisation : dispose-t-on d’un système d’évaluation de la politique de veille ? La veille figure-t-elle au moins dans les items inscrits dans les retours d’expérience ? Dans la quasi totalité des cas, la réponse est négative, ce qui en dit long sur l’importance effectivement accordée à la veille. La veille doit être dynamique et s’attacher à repérer avec détermination et rigueur les signaux faibles et les convergences non conventionnelles émergeant ou survenant dans des territoires inhabituels.

En matière de signal, on se trouve face à un dilemme: soit on privilégie la sensibilité et l’on a des seuils de déclenchement d’alarme tirés vers le bas (avec l’inconvénient d’avoir de fausses alarmes en nombre éventuellement important), soit on privilégie la spécificité et l’on évitera beaucoup mieux les fausses alarmes mais avec le risque de ne pas détecter certains phénomènes sérieux. Chaque organisation devra opérer ses arbitrages. Mais en regard, il faut prendre en compte le fait que les seuils de déclenchement de crise aujourd’hui sont de plus en plus bas et que le coût des crises est de plus en plus élevé.

La plupart des systèmes d’informations sont bâtis sur des modes d’intelligence dits « cognitifs ». Le mode opératoire est simple « je vois, j’identifie, je classe donc je connais ». Le système peut fonctionner longtemps sur lui-même. Or lorsque l’on passe à la crise, l’environnement n’est plus lisible avec ce système de base. Il faut avoir à côté d’un système cognitif qui ramène sur des champs rationnels un autre système de gestion de l’information. Ces modes de gestion de l’information supposent outre de la souplesse, de la flexibilité dans l’acquisition de l’information et plus encore de l’humilité dans son interprétation.

3.2.2.3.2 Les appuis et consultants (FH, conduite du changement, ...)

Sur les deux sites D et C nous avons préconisé de constituer une équipe d’appui pluridisciplinaires (FH, communication, conduite du changement, qualité, RH….) internes et externes. L’information et la veille sont normalement ainsi facilitées par le croisement et le recoupement des réseaux et des données de changements. La conduite du changement est aussi facilitée.

Depuis quelques années, la DPN a identifié la nécessité de s’appuyer sur l’Homme en tant que facteur de progrès. Dans cette optique, les directions de site ont donné une place importante à la sollicitation de l’équipe et aux conditions nécessaires pour que ces appuis soient efficaces. Comme nous l’avons largement évoqué, les équipes d’appuis ont pour fonction d'aider, de suivre les acteurs du site dans leurs missions et la conduite de leurs différents projets. Ils mettent à disposition les outils et les méthodes sciences humaines. Ils ont donc un devoir de créativité quand à la résolution de problèmes mais également des devoirs d'alerte, d'analyse et d’appui management.

Dans les paragraphes qui suivent, nous allons principalement nous attarder sur les rôles des consultants Facteurs Humains internes aux sites dans la détection de signaux et la veille sociale.

Le consultant Facteur Humain contribue à ce rôle de veille à travers : - La contribution à l’analyse événementielle

L’objectif est d’analyser les ESS pour déterminer les causes récurrentes et les signaux faibles dans un souci de mutualisation de ces éléments pour une meilleure analyse des actions à engager en terme de qualité d’exploitation. Dans cette optique, les consultants produisent un bilan annuel ou pluriannuel des évènements de l’unité, à partir duquel ils réalisent une analyse globale, sous l’angle FH, permettant d’identifier les causes dites « profondes » des évènements et les axes de progrès associés.

- Contribution au développement de la culture FH - Appui au management du site.

L’objectif est d’apporter appui et conseil à un service ou une équipe dans la compréhension de dysfonctionnements, la recherche de solutions adaptées, et l’accompagnement de changements dans l’organisation du travail et/ou les modes de management. Dans ce cadre, les consultants FH accompagnent les managers de proximité dans l’animation du REX interne des services en :

- définissant, identifiant, analysant et traitant les signaux faibles par le développement d’une méthodologie appropriée,

- valorisant la détection, la remontée et le traitement des signaux faibles, écarts, dysfonctionnements et bonnes pratiques rencontrés au quotidien par les équipes élémentaires,

- à partir de l’analyse globale de dysfonctionnements, identifiant les actions à développer et accompagner leur mise en œuvre.

3.2.2.3.3 Le fonctionnement en réseaux : le lien entre nos deux premiers retours d’expérience

Dans son acception la plus simple, le réseau désigne un «faisceau de relations associant des entités». Au niveau organisationnel, concevoir l’entreprise comme un réseau, c’est rejeter le cloisonnement des activités et éviter ainsi de la fractionner de manière arbitraire, c’est chaîner toutes les entités qui participent à un problème qu’il s’agisse d’entités humaines (le personnel) ou non-humaines (technologies de production, outils de gestion, rapports...).

L’observation sociale a pour objectif de fluidifier l’information en utilisant tous les canaux de la régulation sociale. Son fonctionnement en réseau ne peut qu’accentuer cette tendance. En effet, en privilégiant l’interactivité, le contexte de réseau permet le déploiement des processus de création et de diffusion d’informations. Le réseau absorbe l’information pour la redistribuer en donnant accès à toutes ses ressources. C’est le partage de l’information et du savoir. Les contributions se multiplient. L’information circule plus rapidement et de manière transversale entre des parties relativement séparées de l’entreprise.

Le réseau n’est plus seulement un capteur et un diffuseur d’information. Il est aussi un lieu d’interface de compétences très pointues et variées. L’information horizontale et multidimensionnelle qui circule entre les acteurs complexifie le réseau et permet la créativité de compétences croisées en favorisant les synergies de proximité entre des partenaires de secteurs différents et les apprentissages collectifs.