Partie II Exp´ eriences 77
5.4 Mesures li´ees au pr´ecurseur dans le gaz
5.4.3 Densit´e ´electronique
Le diagnostic de mesure de densit´e ´electronique n’´etait pas identique dans les deux exp´eriences. En 2002, nous avons mis en place un interf´erom`etre Mach-Zehnder semi-classique (voir figure 4.34) `a l’int´erieur de l’enceinte d’interaction pour mesurer directement la densit´e ´electronique du plasma. Pour l’exp´erience de 2005, nous avions un VISAR qui permet en principe de d´eterminer la varia-tion au cours du temps de la densit´e ´electronique.
5.4.3.1 Exp´erience de 2002
Fente horizontale
Pousseur
Franges d'interférence
Cellule
300µm
Face arrière Face d'entrée
du laser sonde transverse
Face de sortie du laser sonde
transverse
Fenteverticale
300µm
Pousseur
Projection sur le plan image des streaks
Figure 5.45 Sch´ema des diagnostics de mesure de la densit´e ´electronique `a gauche et projection sur le plan image des streaks.
Pour cette exp´erience, deux steaks enregistraient les franges d’interf´erence.
La premi`ere avec la fente horizontale (le long de l’axe de propagation du choc) orthogonale aux franges, et une deuxi`eme avec la fente verticale (en direction radiale), parall`ele aux franges d’interf´erence. On illustre le principe des deux diagnostics sur la figure 5.45.
Mesure de la densit´e ´electronique
Au cours de la campagne de 2002, il a ´et´e possible de d´eterminer facilement la densit´e ´electronique avec le diagnostic Mach-Zehnder : `a partir d’une image (figure 5.40), on peutsuivre une frange au cours du temps et d´eduire directement la densit´e ´electronique par la formule 4.20 du chapitre pr´ec`edent.
−3 10
Figure 5.46 Densit´e ´electronique dans le X´enon en fonction de la position `a dif-f´erents instants (4 `a 7 ns, ∆t=1ns, PX e = 0.2 bar, E=55 J) `a partir du diagnostic d’interf´erom´etrie Mach-Zehnder (exp´erience 2002) avec comparaison d’une simulation MULTI.
On montre sur la figure 5.46 la densit´e ´electronique obtenue sur un tir avec une pression initiale de X´enon de 0.2bar. Sur la figure on montre les points mesur´es ainsi que les valeurs de densit´e ´electronique fournies par une simulation 1D MULTI `a quatre instants diff´erents (de 4 `a 7 ns apr`es le maximum du laser principal). Le trait plein noir correspond `a la partie de la simulation relative `a la couche de X´enon, tandis que le trait gris est la partie de la simulation relative au pousseur (CH +Ti). On peut voir que l’on reproduit tr`es bien la forme du pr´ecurseur, et que l’on arrive `a sonder le plasma jusqu’`a quelques 1019cm−3.
Pour mieux comprendre la forme du pr´ecurseur, on a effectu´e diff´erents tirs en changeant soit les conditions initiales de pression `a l’int´erieur de la cellule, soit l’intensit´e laser. On montre sur la figure 5.47 la mesure sur quatre tirs
Densité
Energie − Vitesse du choc
20
Figure 5.47 Mesure de la densit´e ´electronique pour diff´erents tirs (exp´erience 2002) avec comparaison des correspondants simulations MULTI.
diff´erents 4 ns apr`es le maximum laser. Les figures
A
etB
correspondent `a une´energie laser faible (≈ 55 J et une vitesse associ´ee du choc faible : ≈ 50 km/s) ; les figures
C
etD
sont pour une ´energie ´elev´ee (≈ 85 J et 80 km/s). D’autre part les figuresA
etC
correspondent `a deux tirs `a 0.2 bar de pression initiale du X´enon, tandis que les tirsB
etD
sont pour une densit´e initiale du X´enon plus petite (0.1 bar).Comme l’on peut remarquer, l’extension du pr´ecurseur augmente avec l’´ener-gie laser d´epos´e sur la cible (et donc la vitesse du choc induite). Celle -ci aug-mente aussi, comme pr´evu par la th´eorie [Bouquet et al. 2000], en diminuant la densit´e initiale du milieu.
Cartographie 2D de la densit´e ´electronique
Je rappelle sur la figure 5.45 le sch´ema de principe des deux cam´eras streak coupl´ees `a l’interf´erom`etre Mach-Zehnder transverse. La streak avec la fente verticale (parall`ele aux franges) observe les franges d´efiler devant elle et enre-gistre la succession de maxima et de minima d’interf´erence. A chaque frange m correspondra donc une densit´e ´electronique donn´ee par la formule 4.21 : Ne(t+ ∆t) = Nch
1−(1−m λ/d)2i
≈ m 8.36×1018cm−3.
Bien que nous n’ayons pas eu tous les tirs exploitables avec ce diagnostic, on
Laser principal t=0
600 ps
4×1180
1.2×1190
2.1×10
19
2.5×1019
Temps [ns]
Dimensionradiale[µm] Dimension tachefocale
Figure 5.48 Image exp´erimentale et cartographie de la densit´e ´electronique `a 300 µm de la face arri`ere du pousseur pour la streak `a fente verticale.
montre quelques r´esultats int´eressants : si l’on regarde la figure 5.48 dans le sens du temps (de gauche `a droite), on observe au temps 0 le signal du laser ; c’est un signal parasite qui nous permet de caler temporellement l’enregistrement. Puis pendant 2.5 ns il n’y a plus de signal (le temps n´ecessaire au choc `a parcourir les 300 µm de distance qui s´eparent la face arri`ere de la cible de la la position de la fente de la streak). A partir de 3 ns, on observe une premi`ere frange suivie peu apr`es des autres. Les densit´es ´electroniques correspondantes varient radialement
`a cause de la courbure du front du pr´ecurseur.
On remarque que pour la premi`ere frange (qui correspond au « pied » du pr´ecurseur), l’iso-densit´e `a 4 ×1018 cm−3 atteint le rayon `a 350 µm tr`es tard (une diff´erence de 4-5ns par rapport au centre). Cela nous permet de montrer que le pr´ecurseur reste confin´e dans une couche autour du choc.
Cette mesure nous donne ´egalement une information de l’extension radiale du pr´ecurseur radiatif. Ces donn´ees ne sont pas assez nombreuses dans cette configuration pour fournir une tendance de cette ´evolution radiale. De meilleures mesures ont ´et´e obtenues lors de la campagne de 2005, o`u le diagnostic d’om-broscopie 2D (GOI) ´etait en place.
5.4.3.2 Exp´erience de 2005
En 2005, le diagnostic d´edi´e `a la mesure de la densit´e ´electronique ´etait le VISAR en raison de certaines contraintes exp´erimentales li´ees `a la nouvelle installation LULI2000. Mais nous avons souhait´e pouvoir suivre la forme spatiale du choc et du pr´ecurseur dans le gaz avec les obturateurs rapides (GOI), ce qui
´etait impossible avec l’interf´erom`etre Mach-Zehnder classique `a l’int´erieur de l’enceinte.
Référence
−0.3
−0.2
−0.1 0 0.1 0.2
−2 −1 0 1 2 3
Décalage de frange
Temps [ns]
Tir Frange au repos
−0.4
Figure 5.49 D´ecalage des franges (exp´erience 2005) en fonction du temps (Eω = 1.3kJ, PX e = 0.2bar, U sCH = 33km/s,U sX e = 58km/s).
Comme nous l’avons indiqu´e dans le pr´ec`edent chapitre (´equation 4.24), ce diagnostic ne permet pas d’acc´eder directement `a la densit´e ´electronique du plasma, mais `a sa variation au cours du temps (en utilisant une cam´era `a balayage de fente). Pour remonter `a la densit´e ´electronique il faut donc int´egrer le d´ecalage des franges au cours du temps.
Sur l’image exp´erimentale 5.42, il est tr`es difficile de reconnaˆıtre `a l’oeil un d´ecalage de frange.
En d´eveloppant un outil de traitement d’image avec recherche de frange, on arrive `a mesurer un d´ecalage `a la limite des possibilit´es du diagnostic. Dans la suite, je pr´esente donc un exemple de r´esultat obtenu sur ce d´ecalage de frange (le d´ecalage de franges ∆F est li´e `a la variation de la phase ∆φ = 2π∆F) `a partir de l’image exp´erimentale (figure 5.22). Le travail de reconnaissance du d´ecalage n´ecessite une comparaison fine entre le tir de r´ef´erence (`a gauche sur la figure 5.22) effectu´e sans les faisceaux laser et le v´eritable tir (`a droite sur la mˆeme figure).
Le r´esultat relatif `a la mesure du d´ephasage est pr´esent´e sur la figure 5.49.
Le trait pointill´e correspond au tir de r´ef´erence, le trait plein au tir sur cible `a une distance de 300µm de la face arri`ere du pousseur.
On remarque une premi`ere zone o`u les deux franges (r´ef´erence et tir) sont superpos´ees ; puis on observe un l´eger d´ecalage relatif entre les deux. Cet ´ecart qui se creuse entre les deux n’atteint au maximum les 0.2 franges, qui est une valeur limite de d´etectabilit´e. En effet, ´etant le nombre de pixel contenus en une interfrange de ≈ 24, la frange s’est d´ecal´ee de moins de 5 pixels.
Ne mesurée Ne MULTI
par MULTI
décalage de frange mesurée décalage de frange
−3
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1
2 2.5 3 3.5 4 4.5 5 0
1e+19 2e+19 3e+19 4e+19
Décalage de frange Densité électronique [cm ]
Temps [ns]
Figure 5.50 Evolution de la densit´e ´electronique au cours du temps `a un endroit fix´e (300µm du pousseur) par interf´erom´etrie VISAR (exp´erience 2005). En tirets fins, la densit´e ´electronique donn´ee par le code MULTI, en tirets ´epais le d´ecalage de frange correspondant ; en trait ´epais la mesure exp´erimentale du d´ecalage de frange et en trait fin la densit´e ´electronique correspondante.
Temps [ns]
−0.1 0 0.1 0.2 0.3
−2 −1 0 1 2 3
Décalage de frange
−0.2
Figure 5.51 Evolution du d´ecalage des franges au cours du temps `a un endroit fix´e (300µm du pousseur) par interf´erom´etrie VISAR (exp´erience 2005).
On peut alors d´eduire la densit´e ´electronique `a partir de ce d´ecalage de frange (figure 5.50). En trait plein on montre la mesure exp´erimentale, et en tirets la valeur d´eduite d’une simulation MULTI. Pour la mesure, on pr´esente le d´ecalage de frange relatif (la diff´erence des deux courbes de la figure 5.49) et l’int´egrale du d´ecalage de frange qui nous donne la densit´e ´electronique suivant la formule 4.24.
Cette fois le d´ecalage est en fait obtenu par d´erivation de la densit´e ´elec-tronique au cours du temps. On peut remarquer que le d´ecalage de franges et la densit´e ´electronique correspondante mesur´ee sont beaucoup plus faibles que ce que nous donne la simulation. On pense que cet effet est dˆu au fait que le d´ecalage mesur´e est tr`es proche du seuil de d´etectabilit´e.
Pour mieux comprendre la difficult´e de cette mesure, sur la figure 5.51 j’ai repr´esent´e la mesure de la densit´e ´electronique brute, les points sont les donn´ees exp´erimentales, la ligne en trait plein correspond `a une moyenne statistique et la ligne en tirets repr´esente l’int´egrale du d´ecalage de frange qui est li´ee `a la densit´e ´electronique (equation 4.24).