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Cr´eation d’une onde de choc en laboratoire

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Partie I Th´ eorie 9

2.3 Cr´eation d’une onde de choc en laboratoire

Depuis plusieurs dizaines d’ann´ees, il a ´et´e montr´e [Basovet al. 1967, Cottet

& Romain 1982, Cottet et al. 1984] qu’il est possible de cr´eer en laboratoire des ondes de choc `a l’aide des lasers de puissance. Nous allons aborder ici la m´ethode que l’on a utilis´ee dans les exp´eriences d´ecrites dans ce travail : l’attaque directe sur cible.

L’interaction laser-mati`ere en impulsion « longue » (& 100ps) peut ˆetre d´ecrite en trois r´egimes, selon l’intensit´e sur cible :

– le r´egime bas flux : l’interaction du rayonnement laser avec la cible peut aller jusqu’`a provoquer la fusion de celle-ci ;

– le r´egime moyen flux : celui-ci est caract´eris´e par l’apparition de la phase vapeur ;

– le r´egime haut flux (Ilaser > 1012 W/cm2) : l’interaction du rayonnement avec le milieu cr´ee un plasma fortement voire compl`etement ionis´e.

Dans ce dernier r´egime, un plasma chaud est cr´e´e `a la surface de la cible.

Ce plasma, dans lequel se propage le faisceau laser, se d´etend dans le vide. En r´eaction `a cette d´etente se forme une onde de choc qui va se propager vers l’int´erieur de la cible. Dans un premier temps nous d´ecrivons les m´ecanismes d’absorption de l’´energie laser (2.3.1), puis son transport vers l’int´erieur de la cible (2.3.2). Enfin (2.3.3), nous ´etablissons dans les ´equsations d´ecrivant l’´ecoulement du plasma qui se d´etend permettant d’´evaluer la pression dite d’ablation `a laquelle l’onde de choc se forme.

2.3.1 Absorption de l’´ energie laser

La relation de dispersion d’une onde ´electromagn´etique de pulsationω et de vecteur d’onde k s’´ecrit :

k2c2 = ω2 −ωp2,

o`u ωp est la fr´equence plasma, li´ee `a la densit´e ´electronique ne par : ωp =

s nee2 ǫ0me.

Le laser se propage dans le plasma qu’il a cr´e´e et rencontre un profil de densit´e ´electronique croissant. On d´efinit alors une densit´e critiquenc en ´egalant la pulsation de l’onde laser avec la fr´equence plasma

nc(cm3) = ǫ0me

e2 ω2 = 1.1×1021 (λ[µm])2

pour laquelle le vecteur d’onde s’annule et le laser ne se propage plus. Dans nos conditions, λ=0.527 µm ce qui conduit `a nc = 4×1021 cm3.

La zone o`u la densit´e ´electronique est inf´erieure `a la densit´e critique est la zone d’interaction, ´egalement appel´ee couronne (figure 2.10). Cette zone o`u le rayonnement laser se propage est g´en´eralement isotherme (∼ keV pour une impulsion de l’ordre de la ns et un ´eclairement de l’ordre de 1013 W/cm2). Elle est le si`ege de nombreux m´ecanismes non-lin´eaires (instabilit´es param´etriques) r´esultant de l’interaction du faisceau laser avec le plasma. Les deux principaux

m´ecanismes d’absorption de l’´energie laser sont l’absorption r´esonnante et l’ab-sorption collisionnelle.

2.3.1.1 Absorption r´esonnante

Ce m´ecanisme se produit lorsque l’onde laser est en incidence oblique et qu’elle est polaris´ee dans le plan d’incidence. Il existe alors une composante du champ ´electrique qui va interagir avec les ´electrons de fa¸con r´esonnante et g´en´erer une onde plasma longitudinale de grande amplitude au voisinage de la densit´e critique.

Les champs ´electriques associ´es `a cette onde peuvent ˆetre beaucoup plus grands que le champ de l’onde laser et ainsi acc´el´erer des ´electrons suprather-miques qui vont pr´echauffer la cible en amont. Cet effet est tout `a fait n´efaste car il modifie l’´etat thermodynamique initial du mat´eriau `a ´etudier.

Des ´etudes th´eoriques [Fabreet al. 1980] et exp´erimentales [Garban-Labaune et al. 1982] montrent que l’absorption r´esonnante est n´egligeable devant l’ab-sorption collisionnelle si

Ilaser[W/cm2] 6 1014

(λ[µm])2 = 3.5×1014 W/cm2, ce qui est v´erifi´e dans nos exp´eriences.

2.3.1.2 Absorption collisionnelle

L’absorption collisionnelle, ´egalement d´enomm´ee Bremsstrahlung inverse, est le m´ecanisme dominant d’absorption de l’´energie laser dans nos conditions exp´erimentales. Il s’agit d’un processus `a trois corps : un photon est absorb´e lors de la collision entre un ´electron et un ion.

L’absorption de l’intensit´e laser est d´ecrite par dIlaser

dx = −αIlaser

o`u α est le coefficient d’absorption, exprim´e en m1. Dans le cadre du mod`ele classique de Drude-Lorentz d´ecrivant l’effet de l’onde laser sur le plasma, on peut ´ecrire

α = νeiω2p

ω2cR(n)[1 + (νei/ω)2], o`u R(n) = p

1−ne/nc est la partie r´eelle de l’indice optique et νei est la fr´equence de collision ´electrons-ions.

Celle-ci s’obtient `a partir de l’´equation de Fokker-Planck [Shkarovsky et al.

1966] :

νei = 3,6Z2nilog Λ Te3/2

,

o`u Λ est le logarithme coulombien donn´e par log Λ = logλD

b0 ,

o`u λD est la longueur de Debye et b0 est le param`etre d’impact pour un angle de d´eflexion de 90˚. Le logarithme coulombien vaut entre 5 et 10 pour des plasmas cr´e´es par laser. Dans nos conditions, νei ≪ω; le coefficient d’absorption s’´ecrit alors

α = 3,6Z2niωp2log Λ Te3/2ω2cp

1−ne/nc

.

Le coefficient d’absorption est une fonction d´ecroissante de la temp´erature, mais croˆıt avec la densit´e ´electronique. Il pr´esente un maximum tr`es piqu´e au voisinage de la densit´e critique. L’absorption collisionnelle se produit donc ma-joritairement au niveau de la densit´e critique.

2.3.2 Transport de l’´ energie

Va D

T0

Densité Critique nc

Zone de conduction Couronne sous-critique Onde

Figure 2.10 Absorption et transport de l’´energie laser par un mat´eriau l´eger (Z <

10). xa d´esigne la position du front d’ablation et xc celle de la surface critique.

On peut distinguer sur la figure 2.10 les profils de densit´e volumique de masse et de temp´erature dans les diff´erentes zones caract´eristiques de l’´ecoulement du plasma en face avant cr´e´e par laser lors de l’interaction avec un mat´eriau l´eger (Z < 10) : On distingue trois r´egions : la couronne que nous venons de d´ecrire, la zone de conduction et la zone sous choc o`u la densit´e est sup´erieure `a la densit´e du solide.

Dans la zone de conduction, l’´energie est transport´ee vers l’int´erieur de la cible essentiellement par conduction thermique ´electronique. La temp´erature ainsi que la vitesse du fluide d´ecroissent de la densit´e critique jusqu’au front d’ablation.

2.3.2.1 Conduction thermique

Suivant la th´eorie de [Spitzer & H¨arm 1953], le flux de chaleur est donn´e par la formule :

QSH = −k0 T05/2 dTe

dx (2.26)

o`uk0 est la conductivit´e thermique ´electronique. Cette formule est applicable uniquement lorsque la longueur de gradient de la temp´erature est sup´erieure au libre parcours moyen des ´electrons. Dans la zone de conduction les gradients peuvent ˆetre tr`es raides et, dans ce cas, l’´equation 2.26 n’est plus valable. Des exp´eriences r´ealis´ees par [Gray & Kilkenny 1980] ont montr´e que le flux de chaleur est inf´erieur (d’un facteur compris entre 10 et 100) `a celui donn´e par la formule classique. On utilise alors les expressions heuristiques suivantes :

Q = ǫ min(|QSH, f Ne k Te) (2.27) Q1 = (QSH)1 + (ǫ f Ne k Te)1 (2.28) o`u la constante f appel´ee facteur de flux limite est inf´erieure `a 1 et o`u ǫ est le signe de Dte/dx.

Une formule plus raffin´ee a ´et´e propos´ee par [Lucianiet al.1983]. Ces auteurs ont d´emontr´e que, dans le cas de gradients raides, le flux de chaleur en un point donn´e d´epend du profil de temp´erature autour de ce point (sur des distances de l’ordre de soixante fois le libre parcours moyen ´electronique) et pas simplement du gradient de temp´erature en ce point. On parle alors de transport d´elocalis´e.

On peut montrer [Mora & Luciani 1994] que, dans ce cas, le flux de chaleur est assur´e par des ´electrons dont la vitesse est de l’ordre de 3ve. Les simulations num´eriques que nous avons r´ealis´ees ont montr´e que l’´equation 2.28 donne des r´esultats pratiquement ´equivalents `a ceux de [Luciani et al. 1983] en utilisant f = 0.06.

2.3.3 Ecoulement du plasma et processus d’ablation

Le processus d’ablation, cons´equence directe de l’expansion du plasma vers le vide, est `a la base de la formation de l’onde de choc. L’´etude de l’´ecoulement du plasma permet d’obtenir des lois d’´echelle pour la pression d’ablation, ´egale

`a la pression du choc, et pour le taux d’ablation.

On se place en g´eom´etrie plane et monodimensionnelle. Ce qui suppose une tˆache focale spatialement homog`ene. On peut alors ´ecrire que, dans le plasma, les ´equations de conservation de la masse, de l’impulsion et de l’´energie sont :

∂ρ

La pression p est donn´ee par :

p= ne kB Te+ ni kB Ti = ρ(Z + 1)

est la vitesse du son isotherme.

L’enthalpie est h = γ+1γ Pρ = γ+1γ c2s; γ est le coefficient adiabatique d’un gaz parfait.

Le flux de chaleur dans un plasma est donn´e par : q = −K0 T5/2 ∂T

∂x (2.32)

o`u K0 ≈ 1011S.I.

[Mora 1982] montre que si l’intensit´e laser est sup´erieure `a une intensit´e critique alors la pression d’ablation pablation et le taux d’ablation ˙ma sont donn´es par

pablation[Mbar] = 12.3 I[1014W/cm2]2/3

Si en revanche l’intensit´e est inf´erieure `a l’intensit´e critique (2.33), comme montr´e par [Fabbro et al. 1985], la pression et le taux d’ablation sont alors donn´es par

pablation[Mbar] = 11.6 I[1014W/cm2]3/4

(λ[µm])1/4 A

2Z

7/16

Zτ[ns]

3.5

1/8

(2.35)

˙

ma[kg/s ·cm2] = 143 I[1014W/cm2]3/4

(λ[µm])4/3 A

2Z

2/8

Zτ[ns]

3.5

1/4

Dans nos exp´eriences, λ = 0.527µm et τ ≈ 1 ns. Si le mat´eriau ablateur est du plastique que l’on suppose Z = 3.5, alors l’eq. 2.33 nous donne

Ic ≈ 4.4×1014W/cm2

Etant donn´e que l’intensit´e laser du LULI2000, est un peu inf´erieure `a cette valeur (∼ 1014W/cm2), on utilise l’eq. 2.35, ce qui donne une pression d’ablation th´eorique de

Pablation[Mbar] = 18.3 I[1014W/cm2]3/4

et une pression donn´e par la 2.34 :

Pablation[Mbar] = 13.1 I[1014W/cm2]2/3

Les intensit´es laser atteintes dans nos exp´eriences (LULI 6F et LULI2000) sont limit´ees `a ≈ 1014W/cm2, ce qui conduit `a des pressions d’ablation de ≈ 13 Mbar. Cette valeur nous permet d´ej`a d’atteindre le r´egime HDE.

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