• Aucun résultat trouvé

Denis Baupin. Le rythme de croisière est prévu à combien ?

Dans le document Le péage de Milan (Page 140-144)

Berlin Airport Project

M. Denis Baupin. Le rythme de croisière est prévu à combien ?

M. Thomas Orsini. Cela peut être très variable. Les capacités installées à l’usine de Flins peuvent monter jusqu'à 100 000 voitures par an, mais on ne les prévoit pas la première année.

M. Denis Baupin. C’est pour avoir un ordre de grandeur. D’un côté, je vois la mise en place d’un service industriel de grande envergure – 100 000 véhicules –, et d’un autre côté, les problèmes de recharge qui ne sont pas assurés. Vous nous dites qu’il faut attendre entre six et douze mois dans une copropriété pour installer une recharge. Je pense qu’on n’a pas découvert ces problèmes-là du jour au lendemain. Il y a là quelque chose que je ne saisis pas, au moment où Renault se lance là-dedans. Cela fait quand même quelques décennies qu’on nous parle du véhicule électrique. En tant qu’élu local, on a fait installer des bornes publiques. Elles étaient utilisées à peu près soixante fois par an.

Évidemment, au bout d’un moment, on arrête. Et puis maintenant, tout d’un coup, le véhicule sort enfin, mais rien n’a été réamorcé en temps utile. Il y a quelque chose que je ne saisis pas dans la démarche, d’autant plus que quand Renault s’est lancé, c’était avec le soutien des pouvoirs publics. Comment expliquez-vous ce décalage ?

Mme Fabienne Keller. M. Darniche, une question ?

M. Bernard Darniche, journaliste, président de l’association « Les citoyens de la route ». Je voudrais faire une remarque. Bien sûr, nous sommes tous ici pour trouver des solutions. Nous sommes dans une logique de la bonne parole. Mais je voudrais d’abord qu’on mette les choses au point en termes d’utilisation réelle d’une voiture électrique. S’agissant d’une voiture thermique, tout le monde sait que le constructeur nous trompe sur la consommation réelle en cycle urbain. On devrait plus parler en temps de fonctionnement qu’en kilométrage réel. On sait tous qu’on est trompé à ce niveau-là. Pour une voiture thermique, ce n’est pas grave. On n’a plus de pétrole, on s’arrête, on en met.

S’agissant d’une voiture électrique, si l’on reste sur la logique du kilométrage, on va directement amener les gens à comprendre qu’on nous a trompés. Et je parle en connaissance de cause. Moi, je roule en Opel Ampera, et Dieu merci, j’ai un range extender. Autrement, je ne pourrais pas m’en servir aujourd'hui. Je suis passé de 80 kilomètres d’autonomie à 37 kilomètres aujourd'hui et, ça, je le constate au quotidien. 37 kilomètres aujourd'hui, cela signifie que si je n’avais pas de range extender, je ne pourrais pas m’en servir aujourd’hui dans la fonction que j’avais imaginée au départ. Donc, on m’a trompé de moitié sur l’autonomie. Parce que je ne suis pas en cycle de kilométrage, mais en cycle urbain et en temps de fonctionnement.

Mme Fabienne Keller. Donc il vous faut la réassurance.

– 142 –

M. Bernard Darniche. Il faut éclairer les gens. Et il faut une réassurance. Il suffit du moindre frein en termes de marketing pour que l’acte d’achat soit reporté, ou totalement zappé. Pendant les deux jours de neige, si nous avions eu des voitures électriques, elles seraient toutes tombées en panne sur les périphériques et sur les autoroutes ! C’est la vérité.

M. Thomas Orsini. Je vous remercie de cette intervention parce que cela me permet de préciser des choses sur l’autonomie. Je ne connais pas les caractéristiques de l’Opel Ampera, mais je connais celles de Zoé. L'autonomie homologuée de Zoé en cycle mixte NEDC (New European Driving Cycle) est de 210 kilomètres. Donc 210 kilomètres sur un cycle normalisé. Mais ce n’est pas ce sur quoi Renault communique vis-à-vis de ses clients. Renault dit à ses clients : avec une Zoé, vous allez faire 150 kilomètres dans les conditions normales de température et de pression, c'est-à-dire dans des températures tempérées avec un fonctionnement normal. Vous allez faire au minimum 100 kilomètres dans un environnement sévère, c'est-à-dire en dessous de 0°C et une utilisation agressive.

C’est ce qui se fait vraiment de mieux sur le marché aujourd'hui pour un véhicule de grande série. C’est bien meilleur que ce que vous avez décrit sur le véhicule concurrent, qui est un hybride. D’ailleurs il n’a pas besoin de cette autonomie. Et c’est bien cela qu’on dit au client. On ne lui fait rien miroiter. On lui dit : c’est entre 100 et 150 kilomètres. Donc pour vos usages, effectivement, domicile-travail, tant que vous êtes en dessous de 100 kilomètres, vous arriverez à faire cet aller-retour tous les jours, été comme hiver.

M. Bernard Darniche. Mais puisque c’est une voiture urbaine, pourquoi vous ne le dites pas en temps de fonctionnement, en minutes ou en heures ? C’est tellement plus simple. C’est un éclairage réaliste.

M. Thomas Orsini. On peut le dire, mais il se trouve que dans les véhicules électriques, plus que dans les véhicules thermiques, quand vous êtes à l’arrêt et pour peu que vous n’ayez pas besoin de chauffage …

M. Bernard Darniche. On en a besoin en ce moment, non ?

M. Thomas Orsini. Oui, en ce moment peut-être, mais vous consommez beaucoup moins. C’est 1 ou 2 kWh, et ça ne va jamais vider la batterie. Et si vous raisonnez en temps de fonctionnement, sur une Zoé, vous avez raison, on a fait le travail, et les résultats sont au contraire très rassurants. Parce qu’en cycle urbain, vous ne faites pas beaucoup de kilomètres, et vous allez vous rendre compte que pour vider la batterie, en faisant du 30 à 50 kilomètres en ville, il va falloir passer 3 à 4 heures dans la voiture. C’est tout à fait rassurant.

Alors effectivement, dans des conditions extrêmes, si vous êtes bloqué sur l’autoroute à - 10°C pendant 3 à 4 heures, il y aura un problème. Je ne le nie pas. Mais ce sont des conditions très extrêmes.

M. Bernard Darniche. C’est ce que les Franciliens vivent tous les jours le matin et le soir.

M. Thomas Orsini. Non. Pas 4 heures, coincé à -10°C sans pouvoir bouger.

Mme Fabienne Keller. La question a été entendue, la réponse a été presque apportée, mais M. Darniche n’est pas convaincu. Je passe la parole à Mme Dominique Dujols.

Mme Dominique Dujols, directrice institutionnelle de l’Union sociale pour l’habitat. Je représente l’Union sociale pour l’habitat, la maison HLM pour dire les choses rapidement. Et je suppose que notre légitimité à intervenir concerne la question du stationnement des véhicules, du moins je m’en tiendrai à ce domaine. J’ai bien compris que j’étais au milieu de spécialistes, très savants, et je viens pour apprendre sur le véhicule électrique.

Sur la question du stationnement, nous n’avons pas les mêmes difficultés qu’en copropriété. J’ai entendu dire que, certes, il y a un investissement, mais qu’on le récupérait sur les économies de carburant. La question du modèle économique se pose en ces termes : qui réalise l’investissement ? Qui paie ? Comment le récupère-t-on ? Et qui bénéficie de l’économie ? Parce que ce qui est vrai au niveau macroéconomique de la collectivité nationale ne l’est pas au niveau des choix individuels d’acteurs. Je rappelle que nous devons équilibrer notre production et notre gestion sans dispositions spécifiques.

Pour nous, faire des places de stationnement qui seraient destinées aux véhicules électriques, cela ne nous pose pas de problème de principe, à condition que ce soit à la place d’autres places de parking, et pas en plus. À chaque fois qu’on fait des choses en plus, ce sont des coûts en plus et c’est de l’exclusion potentielle de ménages. Malheureusement, nos loyers, avec l’évolution des coûts de construction, sont de plus en plus élevés. Et naturellement, il faut que nous puissions accueillir des ménages à revenus modestes ou très modestes. Donc si c’est à la place d’autres places de parking, cela ne nous pose pas de problème en termes d’espace.

Ensuite, se pose la question de l’équipement, notamment de l’équipement de recharge, de son fonctionnement et de son entretien. Et là, évidemment, pour l’instant, les choses ne sont pas précisées. Il est évident que cela poserait des problèmes de récupération de charges. La loi Grenelle ouvre des moyens de faire, en faisant appel à un concessionnaire d’infrastructure. Mais nous n’en avons pas vu se présenter spontanément comme étant intéressés, peut-être parce que le modèle n’est pas encore absolument clair dans son fonctionnement.

Cela pose donc le problème de l’équipement de la recharge et de son entretien dans la durée, et bien sûr, du paiement des consommations. A priori, on ne peut

– 144 –

pas imaginer répercuter sur l’ensemble des locataires un équipement qui ne bénéficierait qu’aux seuls propriétaires de véhicules.

C’est la principale remarque que je voulais faire. Oui, pourquoi ne pas aller vers le véhicule électrique ? Le monde HLM a toujours accompagné les progrès qui pouvaient bénéficier à tout le monde, et donc, les évolutions énergétiques ne nous posent pas de problème. Ensuite, il faut trouver un modèle qui s’équilibre.

Je ne sais pas s’il en a été débattu, mais je mets de côté l’enjeu de sécurité. Nous avons compris qu’il ne suffisait pas, dans un parking souterrain par exemple, d’avoir une borne, encore faut-il des dispositifs associés. Je ne sais pas si aujourd'hui les batteries sont totalement sécurisées. Je n’ai que les informations grand public sur Internet. Mais je pense que serait un équipement supplémentaire qu’il faudrait prendre en charge. Se poserait alors la question de l’équilibre.

Enfin, je voulais faire une remarque un peu générale à propos du stationnement. En France, on a fait le choix historique d’associer les obligations de stationnement à la production de bâtiments. J’ai cru comprendre que dans d’autres pays, notamment certaines villes allemandes, le choix est différent. La question du stationnement est gérée à l’occasion de la remise de la carte grise, c'est-à-dire que l’automobiliste doit justifier d’un mode de stationnement pour obtenir sa carte grise, ce qui aboutit à d’avantage de solutions de stationnement collectif, voire – horreur ! – à quelques centaines de mètres pour rejoindre son parking, parce que ce n’est pas forcément inclus dans la construction du logement.

Certes, certains logements ont leur parking souterrain, mais c’est une affaire de choix, voire de standing.

Alors j’ai bien conscience que cette remarque n’est pas propre à la question du véhicule électrique, mais c’est peut-être aussi une évolution à laquelle il mérite qu’on réfléchisse, aussi bien pour les véhicules électriques que pour les autres d’ailleurs. Cela permettrait d’éviter le débat lancinant sur la question de savoir, par exemple dans le logement social, s’il faut avoir une seule place obligatoire ou deux, au motif que les gens sont loin de leur emploi, ou si la question du stationnement est plutôt liée à la détention du véhicule. C’est ma seule remarque générale.

Mme Fabienne Keller. Je vous propose de passer à un autre combustible que sont les piles à combustible.

Dans le document Le péage de Milan (Page 140-144)