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Alexandre Bouchet. On ne perd pas trop, non

Dans le document Le péage de Milan (Page 90-95)

Berlin Airport Project

M. Alexandre Bouchet. On ne perd pas trop, non

M. Alain Dollet, Institut des sciences de l’ingéniérie et des Systèmes (INSIS), CNRS. Dans le premier volet de mon intervention, je vais revenir sur les questions d’hydrogène qui ont été évoquées, en particulier sur le rendement, la conversion pour le stockage. Puis je vous donnerai un élément plus général de réflexion sur la recherche autour des problèmes liés à l’énergie et à la pluridisciplinarité nécessaire pour aborder toutes ces questions.

Concernant l’hydrogène, on a évoqué la possibilité de le produire par électrolyse, par exemple à partir d’énergies renouvelables. Une expérience, actuellement menée, implique l’une de nos unités mixtes de recherche, l’UMR de l’Université de Corte, le CEA et la société Hélion. Elle consiste à stocker l’énergie solaire sous forme d’hydrogène par électrolyse de l’eau. On récupère l’électricité des panneaux photovoltaïques pour électrolyser l’eau, fabriquer l’hydrogène qu’on va pouvoir restituer à l’aide d’une pile à combustible. En termes de rendement, on obtient à peu près 80 % au stade de l’électrolyse, un peu moins de 50 % sur la pile à combustible. Mais si l’on considère au départ cette voie-là uniquement pour la production d’hydrogène et de fourniture d’électricité, on est handicapé par le rendement photovoltaïque qui, lui, peut s’avérer relativement pénalisant, puisqu’il va être de l’ordre de 15 % sur une centrale. Donc pour les énergies renouvelables, c’est vraiment une solution de stockage, mais qui ne sera pas destinée, je pense, à permettre une production d’hydrogène qui sera éventuellement ensuite utilisé pour un autre usage.

Dans le cadre de nos recherches, nous nous intéressons à d’autres possibilités, sur le long terme, de fabriquer de l’hydrogène de manière très propre, avec en plus des rendements plus intéressants. Il s’agit d’une production directe, qui utilise des cycles thermochimiques à haute température. À partir d’énergie solaire concentrée, et simplement de l’eau comme matière première, on va pouvoir produire de l’hydrogène, avec un rendement meilleur qu’en partant du photovoltaïque électrolyse. Dans un premier temps, l’énergie ne sera pas dégradée, et par ce biais-là, on va pouvoir atteindre des productions tout à fait originales d’hydrogène, avec des rendements plus intéressants et un procédé très propre. Nous sommes sur les zones très ensoleillées et sur le long terme, à l’horizon 2030.

Cette même voie permettrait d’ailleurs de valoriser le CO2, puisqu’avec le même type de cycle, on pourrait produire du CO qui permettrait de faire des carburants de synthèse, toujours avec les mêmes avantages de ce procédé, c'est-à-dire un procédé propre avec des rendements intéressants. C’est une filière à long terme.

J’arrive au deuxième volet de mon intervention. J’ai entendu la complexité des choix en matière d’énergie et de véhicules. Plusieurs options s’offrent à nous : véhicule électrique ou hybride. Sur ces questions très pluridisciplinaires, il s’agit d’avoir des approches pragmatiques. Au-delà de la solution technologique, il faut se poser la question des ressources disponibles, des enjeux environnementaux bien sûr, et des enjeux sociétaux, pas seulement en termes d’acceptabilité, mais également en réfléchissant à la manière d’associer les citoyens au débat public et aux décisions qui sont prises. C’est quelque chose de très important. Je pense que dans tout le travail qu’on doit faire, nous devons intégrer cette dimension-là.

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On disait sobriété et efficacité énergétique. Bien sûr, c’est indispensable. Mais pour me rendre au Japon prochainement, ce sera difficile pour moi d’utiliser le vélo. Et même si c’est quelque chose qu’il faut absolument développer, ce ne sera pas suffisant. Aujourd'hui, il faut vraiment regarder le problème dans toute sa complexité. Par exemple, s’agissant des véhicules aujourd'hui et de leur efficacité, il faut regarder les questions d’allègement du véhicule, et pas seulement de propulsion et de diminution de l’impact CO2, qui sont importantes. Il faut regarder les questions de biocarburants qu’il ne faut pas du tout écarter. Et puis concernant l’électrification du véhicule, M. Raux l’a dit, si on fait des véhicules électriques et que l’électricité est d’origine fossile, on n’aura pas gagné grand-chose. Et quand on fera l’analyse du puits à la roue, et une analyse plus complète de l’impact environnemental, on s’apercevra que le résultat est décevant. Aujourd'hui, les technologies hybrides font partie des solutions à envisager.

M. Denis Baupin. C’est bien que vous parliez de l’acceptabilité des énergies en parlant du Japon. La question principale pour les Japonais aujourd'hui en matière d’acceptabilité et de choix énergétique n’est pas forcément comment on y va, en vélo ou en avion.

M. Laurent Antoni. Je voudrais rebondir sur la fin de votre propos selon lequel la production d’électricité, si ce n’est pas à partir de renouvelable, ne nous fera pas gagner pas grand-chose par rapport aux véhicules thermiques. Il faut quand même faire la distinction entre le véhicule thermique, qui émet du CO2 de manière totalement dispersée, et une production d’électricité centralisée, qui permet de faire de la captation de CO2. Cela ne veut pas dire qu’on n’est pas sans CO2, mais qu’on le produit de manière moins diffuse, donc moins difficile à capter, et à recycler.

M. Fabio Ferrari, président directeur général de SymbioFCell. Je fais ici partie du groupuscule des gens qui pensent que l’hydrogène est une bonne solution. Nous proposons des solutions basées sur des piles à hydrogène pour des véhicules. Comme nous sommes une petite structure, nous cherchons des solutions pour aujourd'hui, accessibles tout de suite sur le marché, et qui ont déjà des clients intéressés à des solutions vertueuses par rapport à l’environnement.

Nous nous attaquons au sujet de la livraison en centre-ville. Nous pensons que l’hydrogène est la seule solution viable pour le centre-ville.

Évidemment, on sait livrer avec des petits vélos électriques, mais dès qu’on va faire de la grosse livraison pour les supermarchés ou le e-commerce, je pense en particulier à tous les camions qui circulent en ville, on a besoin d’autonomie, de beaucoup d’énergie embarquée. Et aujourd'hui, on arrive aux limites de ce que sait faire une batterie. Donc la seule solution qui permet de venir en centre-ville sans aucune pollution, c’est l’hydrogène. Je rappelle que la pile à combustible est une réaction électrochimique très simple qui ne fait que de l’eau pure (H20). Cette

solution résout cette problématique de santé publique, puisqu’on ne va plus dégager de polluants.

Et elle résout une autre problématique qui me paraît très importante. On a parlé de sécurité énergétique. Il faut savoir qu’aujourd'hui 99% des transports dépendent des énergies fossiles. On peut réduire la consommation des moteurs à travers différentes solutions dont on a parlé, mais si on veut vraiment s’affranchir des énergies fossiles au niveau des livraisons, là aussi, il faut bien mettre un vecteur énergétique qui ne dépende pas de ces énergies.

On a parlé de l’électricité stockable à bord du véhicule par la batterie.

L’hydrogène, c’est la deuxième solution pour venir stocker de l’électricité dans des véhicules.

On a parlé d’électrolyse. L’hydrogène peut être produit à partir d’électrolyse. Aujourd'hui, il y a beaucoup d’hydrogène fatale qui est produite à partir de cette électrolyse, et qu’on peut venir stocker à bord des véhicules.

Nous cherchons des solutions qui soient intéressantes pour les clients.

Aujourd'hui, ce qu’ils viennent chercher, ce sont des valeurs écologiques, mais aussi de l’augmentation d’usage. À partir du moment où l’on est capable d’avoir une solution électrique pour faire de la livraison, cela ouvre l’accès à des livraisons de nuit parce que peu bruyantes. Et dans ce cas-là, on va moins se heurter à l’encombrement des centres villes, et donc améliorer la livraison. Le gain n’est pas uniquement sur l’image. Il est aussi sur l’économie du système. C’est très important.

Dans ce cadre-là, nous développons des solutions pour des flottes captives, ce qui évite d’avoir à attendre des infrastructures hydrogène. Notre produit est un kit qui vient s’installer sur les véhicules existants et qui permet de doubler leur autonomie.

M. Mohamed Gabsi, ENS-Cachan. J’ai entendu beaucoup de choses intéressantes. Ma réflexion personnelle, c’est que les solutions qu’on cherche sont difficiles à trouver, difficiles à mettre en œuvre, difficiles à faire et à défaire. Ma spécialité, c’est la motorisation électrique de l’automobile. Pour moi, électrifier l’automobile, cela nécessite déjà d’avoir la formation qui va avec, pour faire, et aussi pour défaire après. Pour tout ce qui est batterie, il y a un problème de recyclage qu’il faut penser en amont.

Je dirais qu’il faut y aller d’une façon progressive, sans précipitation, parce que tout ce que nous faisons est complexe. À chaque fois, cela peut avoir des conséquences négatives. Alors que nous pensions résoudre le problème de la pollution, on va en créer d’autres. Il ne faut pas sous-estimer les difficultés de cette évolution. Nous ne sommes pas en train de faire des téléphones portables.

Les véhicules, les moyens de transport, c’est compliqué.

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Il y a un problème sociétal et un problème technique. Par rapport à la vertu du vélo, j’ajouterais qu’on apprend à l’électrifier, à le réparer aussi, et donc on prépare la société à vivre avec l’électricité dans nos moyens de transport.

En ce qui concerne les véhicules électriques, chez General Motors on a évoqué la prolongation d’autonomie. Je pense à la prolongation d’autonomie et à l’hybridation. Enfin, l’électricité partielle dans les moyens de transport, c’est sage, c’est progressif, on apprend. Je suis allé en Chine quelquefois, et j’ai été impressionné de voir le nombre de deux-roues électrifiés. Je pense qu’ils vont apprendre à les mettre en œuvre, à les recycler, et à les traiter d’un point de vue sociétal.

Aujourd'hui, tout le monde sait qu’en France il n'y a plus de réparation de machines électriques à grande échelle. Elles vont être l’organe de motorisation de nos véhicules. Et si un jour, le véhicule électrique tombe en panne, va-t-on le jeter ? Ce n’est pas du jetable. Ce n’est pas comme du téléphone portable. Il faut savoir le réparer.

Un autre mot clé, c’est la sûreté. La sûreté de fonctionnement de l’ensemble, parce qu’on peut faire fuir l’utilisateur devant des véhicules qui tombent en panne, qu’on ne sait pas réparer. Il faut y penser dès le début.

Mme Fabienne Keller. Merci beaucoup pour votre approche très intégrative.

M. Sébastien Grellier, chef de département planification et relations extérieures, Toyota France. Je vais traiter d’une question qui a été abordée rapidement par MM. Pourcelly et Schulz. Effectivement, quand on parle de réduction et d’enjeux énergétiques, nous pensons, au sein du groupe, qu’il faut une analyse du cycle de vie. Ce matin, nous avons beaucoup parlé des véhicules et de leur efficacité énergétique, mais je pense que l’analyse globale du cycle de vie, qui prend en compte la conception, la production, l’utilisation et également le recyclage, est une donnée clé. Nous la faisons au sein du groupe depuis plusieurs années. L’analyse de cycle de vie est systémique et systématisée pour l’ensemble de la conception de tous les véhicules, qu’ils soient hybrides ou thermiques.

Je vais vous donner les deux résultats principaux que ces analyses nous permettent d’avoir systématiquement. Le premier concerne l’allègement des pièces. M. Baupin parle beaucoup d’adaptation de la taille des véhicules en fonction des usages. C’est effectivement un enjeu de la mobilité de demain, et l’allègement fait partie de ces questions. Par exemple, pour la Yaris hybride, qui est produite en France, cette analyse du cycle de vie a permis, par rapport à la Prius qui était le premier véhicule hybride, de réduire de 17 % le poids des composants hybrides, et de 25 % en taille. Cela a permis de mettre cette technologie hybride dans un véhicule plus petit de type Yaris.

Le deuxième élément, tout aussi important, se pose en termes de production. L’un des enjeux pour l’instant des constructeurs, c’est de travailler aussi au niveau des usines. Vous savez que nous avons la chance d’avoir l’usine de Valenciennes, et cette usine fait partie, parmi les 59 usines Toyota à travers le monde, des cinq plus vertueuses en termes d’environnement. Et je donnerai un dernier chiffre. Par véhicule produit, l’usine de Valenciennes a réussi à réduire de plus de 30 % la consommation énergétique nécessaire à la production d’un véhicule. Au-delà des émissions de CO2, c’est aussi l’un des enjeux de la production, et il aura un impact global.

M. Denis Baupin. Quand vous parlez de recyclage des véhicules, cela

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