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D U DÉLAI DE RÉPONSE

Dans le document Composition du Jury P (Page 162-166)

Le délai mesuré entre le début de la stimulation par le facteur Xa et le démarrage du signal calcium n’avait encore jamais été décrit auparavant pour les cellules endothéliales stimulées par les facteurs de coagulation. Il semblerait indiquer l’existence d’une voie de signalisation unique induite par ce récepteur.

Le phénomène de délai en présence d’oscillations fut décrit dès 1989 par Rooney et al[294], qui montrent que la fréquence des oscillations est corrélée au temps nécessaire à l’apparition du premier pic. Plus précisément, cet intervalle de temps augmente de façon

Une étude mathématique du phénomène des oscillations de calcium a permis de théoriser cette hypothèse et de linéariser la courbe empirique reliant la latence à la période des

oscillations[295].

Dans le cas des cellules HUVEC, la courbe empirique ne semble se vérifier que partiellement, jusqu’à des concentrations de 40nM. Le nombre insuffisant de points de mesure ne permet pas de déterminer une courbe empirique linéaire (deux points de mesure menant immanquablement à une droite !) entre la période et le délai. Cependant, mes expériences montrent bien qu’à 5nM, le délai est de l’ordre de 300 secondes et la période de 230 secondes, et qu’à 40nM, le délai est de 150 secondes et la période de 75 secondes. Une analyse à l’aide des deux points montre malgré tout que la pente de la droite prend la valeur de 1, tout comme

l’est celle de la droite simulée par Dupont et al[295] dans le cas où l’IP3 atteint quasi

instantanément sa valeur maximale. Si une stimulation au-delà de 40nM diminue encore la période des oscillations, le délai semble se stabiliser autour de 75 secondes. Sans connaître le mécanisme exact à l’origine de ce délai, il est évidemment difficile d’expliquer ce seuil mais le fait que la fréquence des oscillations continue à augmenter semble être un argument pour découpler, à ce moment, le délai de la fréquence. Pour analyser cet abandon du lien entre la latence et la concentration en agoniste, il faut également reprendre les hypothèses des études

mathématiques réalisées par Dupont et al[295] qui, comme dans tout modèle scientifique, ont

dû faire des simplifications des phénomènes réels. Ainsi, dans leur modèle, les pics de calcium répétés ne sont formés qu’à partir du calcium présent dans les stocks intracellulaires et ces derniers se remplissent au fur et à mesure par diffusion depuis le milieu externe. De plus, comme tout modèle, il a ses limites propres et ne peut probablement s’appliquer que pour certaines valeurs de concentration en calcium intracellulaire.

Enfin, les observations de Rooney et la loi de Dupont ne concernent pas les récepteurs aux protéases de la coagulation qui, pour rappel, présentent un mécanisme d’activation unique. L’aspect dose-dépendance de la réponse calcique induite par les récepteurs PAR résulte d’une notion de quantum de seconds messagers formés par le récepteur activé. Les modèles mathématiques se basent sur des liaisons classiques ligand-récepteur où la signalisation se produit aussi longtemps que l’agoniste reste lié au récepteur. Il serait donc

intéressant de re-modéliser le système avec un rôle temporellement limité de l’IP3 qui n’est

produit qu’en une fois et qui est rapidement dégradé pour ne laisser que le calcium comme facteur déterminant.

Le délai n’a pas été observé dans d’autres types cellulaires activés par le facteur Xa. Cependant, à y regarder de plus près, la stimulation de cellules "Madin-Darby canine kidney" (MDCK) par le facteur Xa fait apparaître des oscillations qui semblent présenter un léger délai (60 secondes pour une stimulation par 1nM de facteur Xa) diminuant lorsque la

concentration augmente[296]. Ce délai est cependant nettement plus courts que celui observé

dans les HUVEC.

Le délai existant pour la réponse soutenue induite par le facteur Xa pourrait expliquer partiellement celui plus long observé dans les HUVEC. En effet, si un délai en présence d’oscillations semble pouvoir s’expliquer par une modélisation mathématique des oscillations, celui à la réponse soutenue ne peut trouver son origine que dans le mécanisme interne des cellules endothéliales. Il est important de constater à nouveau que ce délai est inexistant dans le cas d’une réponse soutenue induite par la thrombine. Bien évidemment, le récepteur en jeu dans cette signalisation est différent, puisqu’en l’occurrence, il s’agit ici de PAR-1. Ce délai semble donc particulier au récepteur PAR-2 et non au type cellulaire, soutenant l’hypothèse d’une voie unique pour l’activation des cellules endothéliales par PAR-2. Ce délai provient-il des messagers intracellulaires ou de l’activation de PAR-2 par son agoniste ? Les éléments en ma possession sont malheureusement contradictoires. En effet, on pourrait penser que le délai diminue de façon conséquente lors d’une pré-stimulation des cellules par le facteur Xa sans domaines Gla. Pour rappel, le domaine Gla lie le calcium et permet la liaison du facteur Xa aux phospholipides. Ce résultat pourrait indiquer que le facteur Xa doit réaliser une "action" supplémentaire avant d’activer le récepteur PAR-2, action qui ne nécessite pas son ancrage dans la membrane de phospholipides. Malheureusement, cette explication est en contradiction avec le délai observé lors de la stimulation des mêmes cellules par SLIGRL, le peptide agoniste de PAR-2 qui ne nécessite aucun clivage du récepteur. Considéré individuellement, le délai induit par SLIGRL favoriserait l’hypothèse d’un délai dans la voie interne activée par PAR-2. En conclusion, si l’existence d’un délai pour une stimulation par PAR-2 semble pouvoir trouver un fondement réel, les expériences menées dans le cadre de cette thèse ne permettent pas de déterminer l’étape de la signalisation qui semble l’induire. Son origine se trouve soit dans la mécanique d’activation du récepteur, soit dans les éléments du "calcium toolkit" choisis par la cellule.

Une confirmation du caractère cellulaire propre de ce délai a été obtenue avec les ostéosarcomes. En effet, une stimulation des cellules de la lignée SaOS-2 dans un système identique ne fait pas apparaître de latence à la réponse. Si le délai était dépendent du système

Enfin, une dernière proposition, qui apparaissait d’emblée moins évidente, peut aussi être énoncée. En fait, les cellules dans lesquelles une oscillation de calcium a été mesurée suite à une stimulation par le facteur Xa exprimaient toutes, de façon endogène ou par induction, le facteur tissulaire. Sur base de cette constatation, j’ai testé l’effet du facteur Xa à 40nM sur les HUVEC dans lesquelles le facteur tissulaire était exprimé. Le premier pic de calcium est apparu après 50 secondes, ce qui est notoirement plus rapide que les 150 secondes observées en absence de facteur tissulaire (figure 3). Malheureusement, il ne m’a pas été possible de répéter suffisamment ces expériences que pour en tirer des conclusions valables.

Figure 3. Courbe représentative de l’évolution du calcium intracellulaire dans des HUVEC exprimant le facteur tissulaire et stimulées par le facteur Xa (40nM).

Si toutefois ce phénomène venait à se vérifier, il faudrait investiguer sur le lien entre la partie intra-cytoplasmique du facteur tissulaire et le récepteur PAR-2. A ce sujet, il a été démontré que le complexe formé par le facteur tissulaire, le facteur VIIa et le facteur Xa entraînait la phosphorylation du domaine cytoplasmique du facteur tissulaire par

l’intermédiaire récepteur PAR-2 uniquement, et pas le récepteur PAR-1[297]. Il ne serait donc

pas étonnant que le facteur tissulaire et PAR-2 soient plus intimement liés que ce qui est actuellement connu et interagissent sous d’autres formes.

Finalement, le fait que personne n’ait jamais fait état du délai des oscillations lors d’une stimulation des cellules endothéliales par les sérines protéases de la coagulation peut être une autre conséquence de l’utilisation de cellules en suspension pour les mesures de calcium. Il est en effet concevable que de telles cellules soient déjà dans un état "activé" par le fait qu’elles soient en suspension et qu’une partie du mécanisme intervenant dans la signalisation induite par le facteur Xa soit déjà en fonctionnement, ce qui ne serait pas le cas dans les cellules adhérentes.

Dans le document Composition du Jury P (Page 162-166)