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VA, DÉCOUVRE TON PAYS !

Dans le document SEPTANTE-CINQUIEME ANNEE FRIBOURG Prix: 2 fr. (Page 173-179)

LE VAL DE LYS ET LES PACCOTS

«Nous allons en Suisse!», disaient certains Genevois.

Les frontières fermées, il leur a bien fallu chercher l'air des cîmes et les champs de neige dans leur propre pays jus-que là trop souvent méconnu.

Parmi les coins ravissants ainsi découverts, la petite cité fribourgeoise sise au pied de nos préalpes, Châtel-St-Denis, a conquis leur sympathie, et beaucoup d'entr'eux se joi-gnent aujourd'hui aux autres riverains du Léman qui depuis plusieurs années vont passer là-haut leur week-end.

Si les hôtels-restaurants de Châtel, d'une renommée indiscutable, ont leur part d'attraction, c'est surtout le

Val de Lys qui provoque les grandes affluences.

Le Val de Lys se déploie entre les deux contreforts du Niremont (1516 m.) et du Mont Corbetta (1402 m.), et remonte la Veveyse chàteloise jusqu'au pied de la Dent de Lys (2017 m.) qui dresse au fond sa crête abrupte. Sur toute la longueur de ses pentes s'étalent en un pittoresque

«nsemble les grands bois de sapins, et les riches pâturages.

Longtemps ia jolie vallée ne fut connue que dos monta-gnards, bûcherons et alpinistes de la région. La vieille route rocailleuse, dont il reste un tronçon, s'animait à la montée des troupeaux vers les chalets d'alpage, s'égayait aux cahotements homéricjucs des chars de foin et ne s'as-sagissait qu'en, hiver sous la neige durcie pour laisser ghsser les lourds traîneaux chargés do billons.

C'était là-haut le grand désert, quand les sapins avaient mis loin' perruque poudrée, que les chalets comme les pâturages dormaient sous l'épaisse couverture blanche

«t que la Veveyse osait à peine murmurer entre les glaçons.

Ce furent des Vaudois, les professeurs Faes et Mcrcanton de l'Université de Lausanne, qui .les premiers, en 1905,

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couvrirent les attraits de ce désert blanc et vinrent tirer le Val de Lys de sa torpeur hivernale en traçant sur ses merveilleuses pentes les sillons de leurs skis.

Les mêmes devaient édifier en 1920 le premier chalet de villégiature" à la Borbuintse (1278 m.).

Autre événement qui exercerait à son heure une influence capitale sur la vie delà vallée: A l'initiative du syndic de

(Photo S. Glasson, Bulle.) La chapelle de N o t r e - D a m e des Neiges, a u x Paccots.

Châtel, M. Oscar Genoud, et pour obvier au chômage, du-rant la dernière guerre, on traça une nouvelle route, une jolie route de montagne qui, terminée en 1918, rendait aisé, même aux automobiles, l'accès de la région des Pac-cots (1078 m.).

Dix ans encore la vallée garda sa physionomie d'antan et ne livra ses secrets qu'à un petit nombre d'alpinistes et skieurs. En 1929 seulement l'idée vint à quelques Châtelois qu'ils pouvaient trouver tout près de chez eux les charmes d'une villégiature en montagne, aussi bien que l'exercice

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vivifiant des sports d'hiver. Le « Castel chantant » tut cons-truit dans une splendide solitude qui s'éveilla souriante aux chants des gais amis.

Ce fut la petite chiquenaude qui provoqua le grand mouvement.

En 1932 'surgit aux Paccots le « Foyer de Corbetta », pension-restaurant et centre de ravitaillement, avec ses

(Photo S. Glasson, Bulle.) L'intérieur de la chapelle {fresque de G. Thévoz).

dortoirs et ses chambres et son magnifique champ de neige tout indiqué pour une école de ski.

Les chalets poussent alors comme des champignons, plus de 50 en dix ans.

Or, en février 1935 le Foyer de Corbetta devient la p r c priété des Œuvres paroissiales de Châtel, et, tout en gar-dant sa destination première, va recevoir à certaines épo-ques, colonies scolaires, troupes scoutes et groupements de jeunesse catholique.

Mais, pour les montagnards et les villégiateurs, pour les alpinistes et les skieurs, le devoir dominical, l'assistance à la messe garde toute sa grave obligation. Assurer aux

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cots un service religieux ne pouvait manquer de devenir la préoccupation d'un prêtre zélé et l'idée n'allait pas tar-der à se traduire en acte pour le réalisateur qu'est l'abbé Bernard Kolly.

Et voilà comment, en cette même année 1935, quelques mois après l'acquisition du Foyer de Corbetta, s'élevait, tout à côté, la chapelle dédiée à Notre-Dame des Neiges et à saint Bernard de Menthon, patron des alpinistes.

Œuvre de l'architecte Dumas, la chapelle cadre à mer-veille avec le paysage. Le porche massif avec ses cintres bas lui donne son cachet original, à la fois grave et avenant.

Au-dessus de l'entrée, une fresque du peintre Thévoz repré-sente, dans le décor du col qui porte son nom, saint Ber-nard de Menthon en prière, derrière lui, le monstre infernal écrasé sous les débris du paganisme et en face, un groupe de montagnards, skieurs et bûcherons chez qui rayonnent la foi et la confiance. L'intérieur simple et de bon goût, éclairé par des vitraux aux couleurs harmonieusement associées, invite au recueillement. Au dessus de l'autel, autre fresque du même peintre: au centre Notre-Dame des Neiges étend son manteau semé de flocons blancs, soutenu par des anges ; autour des scènes schématiques : annonciation, nativité, pietà, couronnement de la Vierge.

Derrière l'autel, la sacristie qui est à la fois une confor-table cellule pour les desservants et pour les chapelains occasionnels qui y défilent nombreux au temps de la belle saison.

Enfin sous l'édifice, une vaste salle bien éclairée offre aux colonies et aux groupements un abri des plus appréciés.

Le 4 août 1935, ce fut une grande fête là-haut. Mon-seigneur Bourgeois, Révérendissime Prévôt du Grand Saint-Bernard bénissait solennellement la chapelle, entouré d'autorités ecclésiastiques et au milieu d'une affluence de Ghâtelois.

Depuis lors, le Service religieux est assuré aux Paccots chaque dimanche par deux messes durant la période des villégiatures et celle des sports d'hiver, sans compter les messes en sernaine qui devieniient quotidiennes au temps des colonies, des camps de scouts, des réunions de groupe-ments de jeunesse, etc.

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Peu de temps après, à courte distance du Foyer, s'est élevé le «Refuge de la Dent 4© Lys», pension-restaurant et plus haut, au bord du Lac des Joncs, surgit une autre grande « Auberge » du même genre.

Lo monte-pente de Corbctta.

(Cliché Monle-l'entc de Corbctta S.A., Ctiâtel-St-Denis.)

E t maintenant, c'est tout un village qui se déploie dans la région dos Paccots, le nombre de clialols éparpillés dans le Val de Lys court vers la centaine.

Vogue bien méritée, car les Paccots offrent un séjour délicieux, dans un paysage alpestre rcposanL ; c'est un

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tre de jolies excursions, un point de départ idéal pour les ascensions de la Dent de Lys, du Moléson, de la Cape au Moine, etc.

Du sommet de Corbetta déjà ,ron jouit d'une vue splen-dide sur les massifs du Mont Blanc et des Dents du Midi, sur le Léman et sur la plaine jusqu'au Jura.

Mais c'est surtout l'hiver qui amène les grandes foules.

Le club alpin local avait formé dès 1923 une section de skieurs, et, lorsque, en 1936, Châtel fondait son ski-club, le ski était à ce point entré dans les mœurs qu'un concours de ski, organisé par le clergé et la Société de jeunes gens

« L'avenir », pour les enfants des écoles^ le 28 janvier 1934, avait mis en ligne 96 concurrents, dont 23 en dessous de 11 ans et deux de 6 ans !

Et l'attraction des Paccots s'exerçait de plus en plus sur les sportifs de l'extérieur, les Vaudols surtout...

L'année 1938 vit la fondation de Vécole de ski et dès le premier janvier fut inauguré un Monte-Pente des plus mo-dernes, qui des Paccots (1078 m.) transporte en huit mi-nutes les skieurs presqu'au sommet de Corbetta (1402 m.).

De là une piste les ramène au point de départ et Une autre jusqu'à l'entrée de Châtel. Dire que le cable hisse les skieurs au rythme de 400 à l'heure et que certains jours il fonctionne sans interruption ! Les chemins de fer gruériens et vevey-sans, durant fa saison, les samedi soir et dimanche matin, déversent en gare de Châtel en moyenne 3000, et aux jours de grande affluence 4 et même 5000 skieurs.

Le Val de Lys, les Paccots, Corbetta ont acquis la re-nommée.

On ne peut que s'en réjouir, pourvu que cette belle région de nos préalpes n'en perjje pas son vrai charme et reste un séjour sain pour les âmes aussi bien que pour les corps.

Le néo-paganisme a déjà risqué quelques pointes d'of-fensive à tendance nudiste plus ou moins prononcée. Nos autorités veilleront.

Puisse la croix, dressée au sommet de la Dent de Lys, régner à jamais sur la douce vallée, que saint Bernard la protège du paganisme qu'il expulsa jadis et que Notre-Dame des Neiges la garde immaculée.

A. C.

Dans le document SEPTANTE-CINQUIEME ANNEE FRIBOURG Prix: 2 fr. (Page 173-179)