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1.2 La scénarisation : Un décor typé pour des scénarios dupliqués

1.2.1 Décor réaliste de la foire

Le décor du fabliau est réel, il pointe les changements sociaux du XIIIe siècle marqués essentiellement par l’essor urbain, nouveaux centres de production et de consommation. C’est à la ville que se joue le théâtre avec ses « jeux » théâtraux ; la majorité des fabliaux, profondément scéniques72, se passent en ville contre une minorité à la campagne. Les sensations de la ville sont distribuées dans le fabliau : effervescence, ruse, vol, duperie, rapidité… Ce sont des sentiments connus lors des échanges commerciaux, sujet majoritairement relayé dans le fabliau et dans la nouvelle-fabliau.

Les fabliaux restituent tout à fait fidèlement l’organisation géographique d’une ville. L’auditeur est alors en mesure de s’imaginer la scène. Récit non-sérieux, il permet à l’auditeur de savourer des dialogues pleins de vie où l’on peut entendre résonner le patois local, les bruits du quotidien, de la vie authentique. La vie quotidienne est retracée dans ces récits réalistes. Un motif est surreprésenté dans le fabliau et la nouvelle-fabliau : c’est la foire. Les foires sont nombreuses et importantes au Moyen Age elles permettent aux marchands d’exercer leur profession ; cette récurrence de la foire est notable dans les fabliaux comme dans les Cent Nouvelles nouvelles. La foire73, décor topique, tout comme la taverne qui est l’épicentre du fabliau, est un élément central car elle peut constituer le décor de l’aventure, comme dans Boivin de Provins ; elle constitue aussi le ressort qui permet à l’aventure de se produire car elle provoque un voyage, une absence du mari. Elles laissent l’occasion à l’épouse de prendre un amant car elles durent au moins trois semaines. Ainsi, la vie réelle est associée au motif central de la fiction dans le fabliau et dans la nouvelle-fabliau.

Dans le Conte du Meunier, le clerc Nicolas profite de l’absence du mari parti à Osney pour courtiser sa femme et lui faire promettre de se donner à lui. L’absence mentale du Meunier sert aussi le clerc qui le manipule et l’éloigne de Lison.

73 Nombre de personnages sont des marchands. Citons par exemple la nouvelle 7 : « Ung orfevre de Paris,

ague es, pou despe he pluseu s esoig es de sa a ha dise a l e o t e d u e feste de Le dit et d E ve s […] p. ; da s la huiti e ouvelle, o vo ue u se viteu a l ostel d u g a ha t . Qu ils soie t les p otago istes de l histoi e ou u e si ple e tio au passage, les a ha ts so t e t au da s la ouvelle -fabliau. Le Decameron de Boccace, qui reprend de nombreux fabliaux, est-il pas aussi appel liv e des

Dans La Bourse pleine de sens, le mari profite de son voyage pour mettre sa femme à l’épreuve. Recensons ici des nouvelles où l’absence prolongée intervient comme motif permettant à la femme d’être libre et de prendre un amant :

Source Citation Commentaires

Nouvelle 1 « et luy, retourné de son voiage,

trouva celuy qui se baignoit avec sa femme74 ».

Voyage d’affaires

Nouvelle 3 « [le] musnier, qui a ce coup n’estoit

pas a l’ostel, mais a Dijou ou a

Beaune75 »

Voyage d’affaires

Nouvelle 16 « ung chevalier de Picardie, lequel

en Prusse s’en ala ; et tandiz ma

dame sa fame d’ung autre s’accointa76 ».

Guerre

Nouvelle 19 « ung marchant d’Angleterre, du

quel la femme, en son absence, fist ung enfant77 ».

Cette nouvelle est

issue/copiée d’un fabliau Voyages d’agrément

Nouvelle 22 « racompte d’ung gentil homme qui

engroissa une jeune fille, et puis en

une armée s’en ala. Et, avant son retour, elle d’ung autre s’accointa,

auquel son enfant elle donna78 ».

Guerre

Nouvelle 35 « d’ung chevalier du quel son

amoureuse se maria, tandis qu’il fut

en voyaige ; et a son retour

d’aventure la trouva en mesnage79 ».

Guerre

Nouvelle 43 « tant y alla et tant la laissa seule que

ung gentil compaignon

s’approucha80 »

Affaires

Nouvelle 61 « ung bon marchant maryé a une

vaillant femme, lequel tressouvent alloit en marchandise81 »

Affaires

74 Nouvelle 1, table des matières, op. cit., p. 1.

75 Nouvelle 3, op. cit., p. 38.

76 Nouvelle 16, table des matières, op. cit., p. 4.

77 Nouvelle 19, table des matières, op. cit., p. 5.

78

Nouvelle 22, table des matières, op. cit., p. 6.

79 Nouvelle 35, table des matières, op. cit., pp. 8-9.

Nouvelle 69 « d’ung gentil chevalier de la conté

de Flandres, marié a une tres belle et gente dame, lequel fut prisonnier en

Turquie par longue espace, durant laquelle sa bonne et loyale femme,

par l’ammonestement de ses amys,

se remaria a ung autre chevalier82 ».

Guerre

Nouvelle 72 « le doloreux mary, plus jaloux que

nul homme vivant, contraint fut

d’abandonner le [mesnaige] et aller

aux affaires qui tant lui touchoient83 »

Affaires

Nouvelle 73 « il vouloit aller, ung jour tel qu’il

nomma,mener a Saint Omer une charrette de blé84 »

Affaires

Nouvelle 78 « d’ung gentilhomme marié lequel

s’avoulenta de faire plusieurs et

lointains voyaiges, durant lesquelz sa bonne et loyale preude femme de

trois gentilz compaignons

s’accointa85 ».

Voyages d’agrément

Nouvelle 100 « d’un riche marchant de la cité de

Jennes, qui se maria a une belle et jeune fille, laquelle, pour la longue absence de son mary, et par son mesme advertissement, manda querir

ung sage clerc pour la secourir86 ».

Affaires

81 Nouvelle 61, op. cit., p. 378.

82 Nouvelle 69, table des matières, op. cit., pp. 14-15.

83 Nouvelle 72, op. cit., p. 434.

84

Nouvelle 73, op. cit., p. 435.

85 Nouvelle 78, table des matières, op. cit., p. 16.

Le voyage d’affaires (la foire) ou la guerre créent un ressort utile au fabliau, à la nouvelle -fabliau, pour justifier la mauvaise action de l’épouse. Ces absences peuvent également se révéler plus courtes, dans ce cas, bien sûr, la femme n’a pas le temps de se remarier ou d’élever un enfant avec un autre homme mais elle peut mettre à profit le temps où elle est seule, sans chaperon. Cette idée nous est d’ailleurs clairement énoncée dans la nouvelle 88 :

Le bon mary d’usage demeuroit tressouvent aux champs, en une maison qu’il y avoit, aucunesfoiz trois jours,

aucunesfoiz quatre jours, aucunesfoiz plus, aucunesfoiz mains, ainsi qu’il lui venoit a plaisir, et laissoit sa femme

prendre du bon temps a la bonne ville, comme elle faisoit87.

Cette idée était déjà à l’œuvre dans la nouvelle 45 :

Et bien souvent et le plus, la maistresse, si son mary n’y estoit, vouloit bien avoir sa compaignie88

Ou encore dans la nouvelle 49 :

Tantost que la bonne femme pensa que son mary estoit dehors, elle fit prestement savoir a ung de ses amys qu’il

vensist vers elle89

Dans Le Vilain Mire, le paysan qui part labourer sa terre sera trompé durant ce laps de temps où il laisse sa femme seule :

Quant il ira à la charrue Li vassaus ira lez la rue A cui toz les jors ot foiriez. Et quant il sera esloingniez De sa meson, li chapelain Vendra tant et hui et demain

Que sa fame li foutera, Ne jamès jor ne l'amera

Ne le prisera90.

Dans le ConteduRégisseur, le sommeil du mari pendant la nuit – durée courte, ponctuelle et régulière –permet à l’étudiant de profiter de sa femme. On associe ici la nuit, la mauvaise vue et l’absence du mari causée par son sommeil.

Tout comme la nouvelle 85 des Cent Nouvelles nouvelles où le mari se lève tôt et part à heure régulière, laissant à sa femme l’occasion de trouver un moyen pour se distraire. Cette distraction est justifiée par le narrateur (même s’il est ironique) :

Le bon mary orfevre estoit tant alumé et ardent en convoitise qu’il ne dormoit heure ne bon somme pour

labourer. Chacun jour se levoit une heure ou deux devant jour, et laissoit sa femme prendre la longue crastine jusques a VIIJ ou a IX heures, ou si longuement qu’il lui plaisoit91.

Le narrateur insiste ici sur le temps qu’elle passait seule dans sa couche.

Ceste bonne et entiere amoureuse, voyant son mary chacun jour continuer la diligence et entente de soy lever pour ouvrer et marteler, s’advisa qu’elle employroit avecques son curé le temps qu’elle estoit habandonnée de

son mary, et que a telle heure son dit amoureux la pourroit visiter sans le sceu de son dit mary, car la maison du curé tenoit a la sienne sans moyen92.

88 Nouvelle 45, op. cit., p. 303.

89 Nouvelle 49, op. cit., pp. 319-320.

90Recueil général et complet des fabliaux des XIIIe et XIVe siècles, édité par Anatole de Montaiglon et Gaston Raynaud, Librairie des Bibliophiles, Paris, 1872, tome III, p. 82, Le Vilain mire, vv. 47-55.

91 Nouvelle 85, op. cit., p. 492.

Dans la nouvelle 23 :

Ne demoura gueres après ceste deliberation que, nostre procureur estant hors de l’ostel, sa femme vint a nostre

clerc93[…]

Dans la nouvelle 56 :

le bon curé tenoit lieu de gentilhomme toutes fois qu’il estoit dehors94.

Dans la nouvelle 51, l’adultère de la femme porte à conséquence puisque les absences répétées de son mari ont conduit la femme à prendre plusieurs amants qui lui ont fait des enfants :

de la femme qui departoit ses enfants au lit de la mort, en l’absence de son mary, qui siens les tenoit95

Dans la nouvelle 99, le mari craint d’être cocu, il donne des conseils à sa jeune épouse pour choisir son amant (et finalement se faire rouler et l’empêcher de prendre un amant). Car cet état de fait tient à la nature-même de la femme, incapable de résister à la tentation.

1.2.2 La misogynie

La femme est volontiers malmenée, déshumanisée. I. Siciliano écrit :

Elle est la source de toute convoitise, l’héroïne d’une source énorme de fables étranges et d’histoires gaillardes, l’objet d’une haine ancestrale, d’une haine aveugle, montant des ténèbres des âges et des cœurs, acharnée,

déraisonnable, inépuisable96.

Dans les ouvrages sérieux comme dans les ouvrages « non-sérieux », la misogynie sévit, du Nord au Midi. On nous invite à la méfiance et on produit des satires dirigées contre la femme et contre l’amour. Des contes piquants et autres fabliaux lubriques circulent. La querelle

93 Nouvelle 23, op. cit., p. 151.

94

Nouvelle 56, op. cit., p. 362.

95 Nouvelle 51, op. cit., table des matières, p. 12.

autour du Roman de la Rose97 illustre la position instable de la femme. Toutes les études sur le Roman de la Rose s’accordent sur la grande influence de ce texte sur la littérature médiévale et renaissante : la nouvelle-fabliau puis la nouvelle n’ont pas échappé à cette constante. Même si le fabliau relaie avant toute chose la misogynie que l’on retrouve ultérieurement dans le Roman de la Rose car cette tendance est un topos dans la littérature médiévale, ce roman cristallise la mentalité ambiante de la fin du XIIIe siècle et l’évolution de la condition des femmes à travers les querelles qui l’ont suivi. La virtualité98 du débat au sein de la communauté des lecteurs du Romandevient en effet réalité en 1401 au milieu d’un petit groupe de lettrés parisiens. Deux secrétaires du roi (Jean de Montreuil et Gontier Col) ainsi qu’un chanoine de Paris s’opposent à une femme de lettres reconnue à la cour (Christine de Pizan) et au chancelier de l’Université de Paris (Jean Gerson). S’engage alors un long échange épistolaire entre les deux camps opposés. Quand Jean de Montreuil fait l’éloge du Roman et de Jean de Meun dans un traité aujourd’hui perdu, Christine de Pizan répond par une lettre qui reprend des passages du Roman et qui les critique pour leur obscénité, les valeurs immorales qu’il véhicule et leur misogynie. Jean Gerson se range au côté de Christine de Pizan et écrit un traité allégorique condamnant le Roman tandis que les frères Col se portent à la défense de Jean de Montreuil et de Jean de Meun. Les conséquences de cette querelle de 1401-1405 sur la circulation de l’œuvre ne sont pas immédiates puisqu’elle continue à être lue, récrite commentée, rééditée jusqu’au milieu du XVIe siècle. Ses échos dans les œuvres contemporaines sont en revanche immédiats, notamment dans la Querelle de la Belle Dame Sans Merci en 1424 et la Querelle des Femmes vers 1540.

Les Cent Nouvelles nouvelles laissent transparaître et deviner ces nouvelles interrogations quant à la condition féminine en exagérant systématiquement jusqu’à la caricature la nature mauvaise de la Femme et en ironisant sur ses vices là où le fabliau se servait la plupart du temps de la tradition misogyne pour faire rire sans nécessairement chercher à faire réfléchir. Dans la nouvelle 37, on nous fait mention de ces récits misogynes :

Et car, la Dieu mercy, les histoires anciennes comme Matheolet, Juvenal, les Quinze Joyes de mariage, et aultres pluseurs dont je ne scay le compte99

97 Voir notamment Badel, P.-Y., Le Roman de la rose au XIVe si le. Etude de la eptio de l’œuv e, Genève, Droz, 1980, passim.

98

Voir aussi Le débat sur le Roman de la Rose, traduit par Virginie Greene, Paris, Honoré Champion Editeur, 2006, passim.

En d’autres termes, nous recensons une similitude dans le recours à la misogynie entre le fabliau et la nouvelle-fabliau mais un écart sensible quant à son utilisation : le fabliau reprend la tradition misogyne afin de faire rire quand la nouvelle-fabliau l’utilise afin de faire rire mais aussi de retracer des questions contemporaines et sociétales.

En accord avec Juvénal puis avec Jean de Meun100, la femme est donc considérée dans le fabliau et la nouvelle-fabliau comme la complice de Satan, qui cherche par son intermédiaire à tenter et à corrompre les hommes. Même l’amour courtois est remis en question avec le temps : ce qui la mettait indubitablement à l’honneur jadis se dégrade ; elle apparaît désormais comme une créature ambivalente. Même si le fabliau est peu porté sur la psychologie des personnages et la critique pour y privilégier le rire, cette question de la courtoisie revient relativement fréquemment au cœur des histoires avec des motifs anti -courtois aisément reconnaissables.

Retenons pour l’heure que l’anti-courtoisie médiévale va de pair avec la tradition anti-matrimoniale relancée dès le XIIIe siècle dans les œuvres en langues vulgaires avec de nombreux ‘dits’ satiriques comme la Blastenge des Femmes, De la Femme et de la Pie, L’Epitre des Femmes, la Contenance des Femmes, Clicheface, l’Evangile des Femmes (qui nous fait penser aux Evangiles des Quenouillesau XVe siècle car l’ironie fait l’intérêt de ces deux œuvres.

Dans les Quinze joies de mariage, œuvre parodique101 jouant avec la tradition misogyne, nous retrouvons le style du fabliau et de la nouvelle-fabliau102. L’on ne prendra pas pour argent comptant ce qui est affirmé car tout dans cette œuvre, plus proche chronologiquement du fabliau que de la nouvelle, est parodique et ironique. Son titre parodie déjà la prière des

Quinzejoies de Notre Damemais a l’intérêt de rappeler les clichés consacrés à la femme. Si l’ironie règne également en maître dans les Cent Nouvelles nouvelles, son utilisation des clichés misogynes est la même que dans les Quinze joies de mariage en lien direct avec Le Roman de la Rose.

100Jea de Meu s i spi e d auteu s de l A ti uit et ota e t de la Satire VI de Juvénal.

101 « traité » misogyne où un même cas nous est décrit avec plusieurs possibilités ou recueil de nouvelles dans la même catégorie que les Cent Nouvelles nouvelles? “i ette œuv e est du ôt de la ouvelle, l utilisatio du th e de la isog ie o e sujet d i o ie est e o e e fo e.

102 Ce texte est antérieur aux Cent Nouvelles nouvelles a l auteu des Quynze Joies de mariage les évoque et les classe parmi les « histoires anciennes » qui parlent mal des femmes.

Ainsi, on se répand en invectives contre la Femme : elle est jugée coquette donc superficielle. Dans la première joie des Quinze joies de mariage, la femme voit d’autres femmes mieux habillées donc elle utilise toutes les ressources dont elle dispose pour convaincre son mari de lui acheter de nouvelles toilettes. Le Conte du Marin repose sur les dépenses inconsidérées d’une épouse :

Malheur à qui doit régler toute la note ! Le pauvre mari ne cesse de payer Pour nos habits et pour nos falbalas103,

[…]

Sa lubricité est utilisée comme outil de persuasion, dans le fabliau comme dans la nouvelle-fabliau. Elle domine l’homme et le manipule en utilisant ses points faibles. Dans la première joie, on écrit que :

Lors regarde lieu et temps et heure de parler de sa matere a son mary, et voulentiers elles devroient parler de leurs choses especialles la ou leurs mariz sont plus subgitz et doivent estre plus enclins pour octrier, c’est ou lit, ouquel le compaignon dot j’ay parlé vieult atendre a ses delitz et plaisirs et lui semble qu’il n’a d’aultre chouse a

faire104.

Dans le Conte du Marin, la femme utilise la même ressource ; elle n’hésite pas à payer de son corps, et avec plaisir de surcroît :

La belle et Dom Jean conclurent un marché Contre ses cent francs il la posséderait

La nuit entière elle se donnait à lui. Marché conclu, marché tenu –ô combien :

La nuit se passa en joyeux ébats105.

Le marché tenu entre la femme et Dom Jean est plutôt facilement accepté par la femme. Si, à la fin du conte, elle s’aperçoit qu’elle s’est fait rouler, elle utilise tout de même la même

103

Conte du Marin, op. cit., p. 405.

104 Les XV joies de mariage, publiées par Jean Rychner, Genève, Droz, 1967, p. 7.

monnaie corporelle pour rembourser son mari. La première joie des Quinze joies de mariage

ainsi que le Conte du Marin sont tout à fait parallèles.

Dans le Conte du Cuisinier, la femme utilise également son corps pour gagner sa vie : Et dont la femme pour la façade tenait

Boutique mais comme putain gagnait sa vie106.

Cette monnaie est courante dans les Cent Nouvelles nouvelles où la femme, profondément lubrique, trouve ici le moyen de s’en tirer à bon compte. Cette monnaie d’échange semble lui convenir parfaitement. Dans la nouvelle 24, le corps de la jeune fille lui sert de monnaie d’échange pour accéder au mariage. Cette même nouvelle démontre aussi sa vénalité puisqu’elle pense à elle mais aussi à sa famille qu’elle a le pouvoir de rendre riche en poussant le comte à l’épouser. La manœuvre fonctionne puisqu’il ne regarde pas à la dépense lorsqu’il l’épouse. Dans la nouvelle 18 des Cent Nouvelles nouvelles, la femme de chambre feint de n’être pas intéressée par le marché que lui propose le gentilhomme mais c’est un stratagème pour gagner plus. Elle est rompue à ce genre d’accords et parvient à soutirer une belle somme à l’intéressé qui ne peut plus attendre.

Est-il utile d’ajouter qu’elle n’aime personne d’amour ? Elle se montre seulement vénale et maléfique.