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2.3 Un système modèle : nanocristaux coeur/coque CdSe/CdS

2.3.1 La croissance SILAR

Le principe est décrit au chapitre précédent. Ce type de croissance monocouche ato- mique par monocouche atomique nécessite de connaître parfaitement la concentration et la taille des nanocristaux de CdSe utilisés pour les coeurs. Il sut ensuite de réaliser un calcul permettant d'évaluer la quantité de précurseurs nécessaire à la croissance d'une monocouche atomique sur l'ensemble des nanocristaux présents dans le ballon[82, 77]. En pratique, les nombreuses sources d'erreur possibles impliquent de déterminer un coecient correctif à apporter à la quantité de précurseurs injectés. Les sources d'erreur peuvent être de plusieurs types :

 Erreur sur la taille des nanocristaux : la formule empirique déterminée par Yu[83] fonctionne assez bien, nous n'avons jamais remarqué de diérence très importante entre la taille calculée et celle mesurée en TEM.

 Erreur sur la concentration : Les deux articles discutant de la détermination de la concentration de nanocristaux de CdSe en fonction de leur absorbance ne donnent pas de résultats concordants[83, 84]. En général, nous avons observé une diérence systématique d'un facteur allant de 1.7 à 2.8 sur l'ensemble des synthèses eectuées, sans corrélation avec la taille des nanocristaux. La formule de calcul de la concentra- tion exposée en début de chapitre est celle qui génère l'erreur la moins importante lors de l'utilisation d'une croissance de coque.

 Erreur sur la réactivité : une hypothèse forte réalisée lors de ce type de synthèse est de considérer qu'au bout d'un temps limité (10 minutes en général pour les synthèses que nous avons développées) la réaction est quantitative i.e. tous les précurseurs ont été consommés. Ce n'est en général pas vrai, il est plus juste de considérer que nous nous sommes approchés d'un état d'équilibre. Tous les précurseurs ne sont jamais consommés, le facteur correctif expérimental déterminé ne sera donc juste que pour un temps de réaction et une température donnée.

An de déterminer ce facteur correctif, nous avons établi un premier protocole de croissance SILAR et après synthèse nous avons corrigé les quantités de précurseurs à injecter pour que taille théorique calculée et taille expérimentalement mesurée au TEM soient identiques. 2.3.1.1 Protocole typique.

Les précurseurs utilisés sont une solution de S ODE (préparation décrite Ÿ2.1.2) et une solution de Cd(oléate)20.1M dans l'ODE préparé en diluant la solution mère de Cd(oléate)2

0.5M dans l'acide oléique (Ÿ 2.1.2) dans l'ODE.

5mL d'ODE, 1mL d'oleylamine et 2mL de solution de nanocristaux de CdSe dans l'hexane (issus de la synthèse paragraphe 2.2.1.1, 3nm de diamètre environ, 100µM en général) sont introduits dans un ballon tricol de 100mL. La solution est dégazée sous pres- sion partielle 30 minutes à 70°C (en faisant attention, l'hexane est volatile, il risque de bouillir fortement). Le ballon est alors transféré sous atmosphère d'argon et la tempéra- ture de consigne est xée à 230°C. Arrivé à cette température, une première injection de Cd(oléate)2 est réalisée puis après 15 minutes de réaction, la première injection de soufre

est eectuée. La température est alors xée à 240°C et les injections de cadmium et de soufre sont réalisées toutes les 10 minutes.

A la n de la synthèse le milieu réactionnel est laissé 20 minutes supplémentaires à 240°C puis refroidit à l'air. Quand le ballon est encore chaud (80°C environ), quelques millilitres d'oleylamine sont ajoutés an de faciliter la précipitation. Celle-ci est eectuée à l'éthanol et les nanocristaux coeur/coque CdSe/CdS résultants sont dispersés et stockés dans 10 mL d'hexane.

0 5 10 15 20 25 300 400 500 600 700 longueur d’onde (nm) Coeurs CdSe/CdS 4ML CdSe/CdS 5ML CdSe/CdS 6ML CdSe/CdS 7ML CdSe/CdS 2ML 0 5 10 15 20 25 350 400 450 500 550 600 650 700 lambda (nm) abs ex fluo

Figure 2.8: Photographie des prélèvements eectués en cours de synthèse mettant en évidence le décalage vers le rouge induit par la déposition d'une coque de CdS. Spectres de PLE normalisés au premier exciton réalisés sur les diérents prélèvements. Spectres naux obtenus : absorbance, uorescence et PLE.

2.3.1.2 Propriétés des nanocristaux résultants.

La réaction est suivie en eectuant des prélèvements du milieu réactionnel avant chaque injection de soufre. On observe à l'oeil une augmentation de la brillance des prélèvements et surtout un décalage continu vers le rouge après chaque épaisseur de coque déposée. Les coeurs de 3nm de diamètre émettant dans le vert (λf luoM ax = 548nm ) les décalages en

Figure 2.9: Image en microscopie électronique en transmission des nanocristaux CdSe/CdS coeur/coque synthétisés.

spectres de uorescence conrment ce décalage, permettent de vérier la conservation de la monodispersité de l'échantillon (très faible augmentation de la largeur à mi-hauteur du pic de uorescence) et l'absence de nucléation secondaire (qui donnerait un pic de uorescence supplémentaire). Les spectres de PLE montrent, si on les normalise au premier exciton, une forte augmentation de l'absorbance avant 500nm, ce qui est dû à la croissance de la coque de CdS. Enn, une comparaison entre les spectres d'absorbance et de PLE naux conrme l'absence de nucléation secondaire et la monodispersité de l'échantillon, ces deux spectres se superposent parfaitement. Une mesure de rendement quantique sur l'échantillon nal donne une valeur comprise entre 65% et 75% (il existe une certaine variabilité entre les synthèses et la mesure n'est qu'une évaluation assez grossière).

Cet échantillon est également caractérisé en microscopie électronique à transmission an de vérier la monodispersité de la population et d'observer la morphologie des nanocristaux obtenus (g 2.9). On peut alors remarquer que les nanocristaux synthétisés sont bien monodisperses et de forme sphérique.

Enn, nous avons récemment démontré que le clignotement des nanocristaux CdSe/CdS était fortement dépendant de l'épaisseur de coque de CdS (voir le chapitre consacré à l'étude du clignotement), une coque susamment épaisse ( typiquement 5nm) permettant d'obtenir des nanocristaux virtuellement non-clignotants. Ces observations nous ont amené à développer des protocoles spéciquement dévolus à l'obtention de coques épaisses de CdS. 2.3.1.3 Cas particulier des coeurs CdSe zinc-blende.

Que ce passe t-il si l'on souhaite faire croître une coque de CdS par un protocole SILAR sur un coeur de CdSe zinc-blende ? Ce problème est discuté spéciquement au chapitre suivant qui traite du contrôle du polytypisme.

2.3.1.4 Discussion du protocole et des résultats obtenus.

Le principal écueil auquel nous nous sommes heurtés lors du développement des proto- coles de synthèse de type SILAR provient de phénomènes de nucléation secondaire. Nous leur attribuons plusieurs causes que nous avons alors essayé de minimiser au maximum. Plusieurs faits expérimentaux sont à prendre en compte an d'expliquer d'où provient cette nucléation secondaire :

 Celle-ci, quand elle apparaît, est visible en uorescence dès la première monocouche de CdS déposée et l'intensité de uorescence augmente au fur et à mesure de la croissance de la coque de CdS.

 Son maximum de uorescence est situé au delà de 500nm et se décale vers le rouge pendant la croissance de la coque.

 Ce phénomène, quand il survient, est souvent accompagné d'un faible décalage vers le bleu de la uorescence des nanocristaux de CdSe après la montée en température. L'explication la plus plausible est que, lors de la montée en température du mélange ODE, oleylamine, dots, ceux-ci subissent une dissolution partielle permettant d'établir un équi- libre de solubilité CdSebulk,nanocristal <=> CdSe monomérique complexé à l'oleylamine. Lors de l'injection de la première couche de CdS, il y aura nucléation de nanocristaux de CdSeS en plus de la croissance homogène du CdS sur les nanocristaux initiaux de CdSe. Cela provoque donc l'apparition d'une population secondaire de nanocristaux qui va com- plètement perturber la croissance de la population principale en consommant une partie des précurseurs et en éloignant la synthèse des conditions d'une croissance SILAR.

Cet eet est d'autant plus fort que la quantité d'oleylamine est importante. La disso- lution, quand elle survient, est beaucoup plus prononcée à des températures supérieures à 240°C, il est donc nécessaire de prendre soin de ne jamais dépasser 240°C lors de la montée initiale en température.

En conclusion, les croissances de coque de type SILAR, quand elles sont bien menées, permettent d'obtenir des populations de nanocristaux parfaitement isotropes et très mono- disperses. Il est tout de même nécessaire d'optimiser le protocole en fonction de la taille des coeurs utilisés mais celle-ci reste assez versatile. Il reste un problème de reproductibilité des synthèses, nous ne sommes pas capables d'assurer un taux de réussite de 100% des croissances de coque.