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Tout apprentissage scolaire se déroule dans ce que l’on peut nommer un contexte. Dominique Lahanier-Reuter (2010) le définit comme « ce avec ou contre quoi l’élève agit,

dans une situation donnée » (ibid., p. 53), c’est ainsi que je le prends en essayant de mieux comprendre de quoi est constitué le « ce ».

Dans le cadre d’une discipline donnée, l’observation des pratiques d’une classe confronte à des situations didactiques, que je considère comme prenant forme dans un contexte didactique disciplinaire. Comprendre ces situations et les processus des élèves conduit conséquemment à comprendre le contexte didactique disciplinaire, et l’empreinte potentielle de ses différents paramètres, dont certains apparaissent de manière concrète, perceptible, alors que d’autres restent sous-jacents, non-directement saisissables.

Néanmoins, avant de poursuivre, et pour éviter toute confusion, il me semble utile d’évoquer la notion de milieu, que je n’utilise pas dans mon développement. Sans ambiguïté, c’est la notion de contexte que je mobilise, même si, telle que je la présente, elle peut se rapprocher du milieu que Guy Brousseau définit à un moment donné comme « tout ce qui agit sur l’élève ou sur ce quoi l’élève agit » (Brousseau, 1998/2004, p. 32). Mais Guy Brousseau spécifie de plusieurs manières le milieu, en fonction soit de l’élève, soit du savoir, ou soit de la perspective d’une réalité hors de la situation d’apprentissage; selon ces variations, le milieu est didactique, ou adidactique, ou antagoniste. Les intentions didactiques y sont clairement rendues présentes. Or, si je n’exclus aucunement ces intentions didactiques dans mon analyse, je les considère comme inhérentes à la situation didactique qui articule les dimensions du contexte, sans qu’elles soient nécessairement et explicitement désignées. Cela m’éloigne du terme de milieu qui, pour les mathématiques et l’éducation physique et sportive, considère les relations d’interaction, mais tend davantage à penser « des configurations optimales ou nécessaires des objets de la situation pour guider les conduites des apprenants » (Lahanier-Reuter, 2010, p. 55). En dehors d’une configuration supposée optimale, je cherche simplement à rendre compte, dans une tentative de formalisation, de la complexité de là où s’élaborent les savoirs.

Si le contexte est corrélé à un lieu matériel, la classe, qui selon sa taille et son équipement influe sur les pratiques, ce n’est pas sur cet aspect que je m’attarde. Ce sont plutôt les dimensions institutionnelle, sociale, didactique et cognitive que j’examine. Au travers de ces dimensions, le contexte didactique disciplinaire cristallise deux aspects : scolaire et disciplinaire. Ces deux aspects ne sont distingués ici que pour les besoins de l’explicitation, car ils sont étroitement imbriqués en situation.

L’aspect scolaire réfère implicitement à l’école comme élément participant du contexte, elle introduit une forme scolaire (Vincent, 1994) qui contraint le contexte. La classe

médiatise cette forme scolaire, et elle constitue le cadre des processus d’enseignement-apprentissage qui impliquent le professeur et les élèves. Le tout est pris dans un mouvement d’interdépendance complexe : le cadre général de l’école et de la classe contraint les modalités de travail des acteurs, mais les acteurs eux-mêmes sont des constituants du cadre. Plusieurs dimensions s’articulent : institutionnelle qui décline la forme scolaire, sociale qui s’illustre par la vie d’une école et d’une classe, didactique pour les processus d’enseignement-apprentissage qui s’y déroulent.

Pour l’aspect disciplinaire, une articulation similaire, selon des dimensions, peut être proposée : dimension institutionnelle qui concerne la formation et le fonctionnement d’une discipline scolaire, dimension sociale au travers des savoirs disciplinaires scolaires désignés comme devant être appris, dimension didactique lorsque l’on considère ce que cela implique en termes d’activité des sujets didactiques.

Enfin, penser un contexte didactique disciplinaire oblige à spécifier ce contexte selon la discipline. En l’occurrence, la discipline scolaire histoire introduit des éléments de l’Histoire66, éléments qui revêtent une importance particulière67 ; il s’agit des univers dans lesquels se déroulent les événements du passé qui sont étudiés (les contextes du passé en quelque sorte) et qui obligent à un effort spécifique de compréhension. Je ne développe pas ici cet aspect, il est largement décliné dans les chapitres qui suivent. Par conséquent, je considère ces univers des événements du passé comme un élément introduit dans le contexte didactique disciplinaire.

Les différentes dimensions, qui comprennent les paramètres évoqués, s’actualisent au travers des situations didactiques, au sein desquelles les élèves agissent et mobilisent une activité cognitive pour élaborer des savoirs scolaires disciplinaires. Le tableau ci-dessous propose une image de cet ensemble qu’il faut d’emblée spécifier comme n’étant aucunement figé, car le contexte didactique disciplinaire est soumis à une construction en situation et à un mode dynamique d’existence.

                                                                                                               

66 Histoire, avec un H majuscule, sous forme de terme générique, au-delà de la spécification histoire académique, scolaire…

67 Cette remarque ne se veut nullement exclusive à l’histoire ; il est permis de penser que chaque discipline introduit une (des) particularité(s).

Aspect scolaire Aspect disciplinaire L’Histoire

Dimension

institutionnelle Forme scolaire Discipline scolaire

Univers du passé

Dimension

sociale École - classe Savoirs scolaires Dimension

didactique

Processus d’enseignement-apprentissage du professeur et des élèves

Activité de reconstruction des savoirs par les sujets

didactiques

Dimension

cognitive Activité cognitive des apprenants

8. Paramètres du contexte didactique disciplinaire de l’histoire scolaire

L’analyse du corpus permet de rendre compte de ces paramètres qui, en situation, se trouvent en interaction et soumis à des transformations plus ou moins perceptibles selon la temporalité dans laquelle ils s’inscrivent. Il me semble que, sur ce point, une analogie avec la triple temporalité de Fernand Braudel (1949) permet de rendre compte d’une forme de différenciation. La dimension cognitive du contexte, dans la perception que l’on peut en avoir en situation, est celle du temps court, immédiat68 ; les mouvements y sont perceptibles dans la mesure où ils traduisent l’élaboration de savoirs. Les dimensions sociale et didactique correspondent au temps de la conjoncture, au temps didactique dans lequel s’actualisent les événements que sont les élaborations de savoirs ; les paramètres y sont soumis à des mouvements, mais qui sont moins immédiatement perceptibles : processus cumulatif d’élaboration de savoirs, modifications des postures des apprenants, règles de fonctionnement de la classe qui évoluent. Quant au niveau institutionnel, c’est celui du temps long, quasi immobile. S’il est soumis à changement, cela s’inscrit dans une durée non perceptible dans le temps de l’apprentissage.

Forme scolaire, classe, individus dans leur statut social et avec leurs ressources propres, savoirs scolaires dans leur dimension institutionnelle et qui, en histoire, introduisent des univers du passé : le contexte didactique disciplinaire actualise la rencontre de toutes ces dimensions, plus ou moins perceptibles, plus ou moins dominantes. Le niveau de cohérence de leur imbrication donne forme aux apprentissages.

Par conséquent, le contexte didactique disciplinaire tel que je le propose est essentiellement une reconstruction issue de l’observation de situations d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  d’enseignement-  

68 C’est bien la dimension cognitive du contexte que j’évoque ici, et non une dimension cognitive centrée sur l’apprenant. Dans ce cas, il paraît assez évident que la perception de ce qui se joue diffère alors, le temps devient un temps long et bien des mouvements concernant les apprentissages individuels restent invisibles.

apprentissage écologiquement69 observées. S’il est corrélé à mes choix de recherche, il présente des caractères généraux qui peuvent se spécifier selon les classes et les disciplines. Cela induit que le contexte didactique disciplinaire prend la forme d’une configuration soumise à variation.

Dans la suite de ma réflexion, les dimensions du contexte didactique disciplinaire sont précisées à partir de la classe observée, afin d’en donner une image plus concrète et pour ensuite décrire les phénomènes qui y prennent forme.

2 De l’espace d’enseignement et d’apprentissage disciplinaire aux