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3.2 ­ La construction du projet de recherche En 2007 lors de la rédaction de la convention de recherche, les discussions avec le SYSDAU ont porté, au­

Qui évalue ? Une évaluation déjà engagée, un partenariat à développer 

I. 3.2 ­ La construction du projet de recherche En 2007 lors de la rédaction de la convention de recherche, les discussions avec le SYSDAU ont porté, au­

delà des questions méthodologiques, sur l’apport de la recherche dans le cadre de la révision du SD 2001 en  SCOT. Pour y répondre, le projet a été envisagé comme une recherche action que nous définissons sur ses  bases comme « l’action délibérée de transformation de la réalité ; recherche ayant un double objectif :  transformer la réalité et produire des connaissances concernant ces transformations » (selon Hugon M.­

A.  et  Seibel  C.,  1998,  p.13  dans  Barbier  R.,  1996).  Plus  précisément,  il  s’agissait  d’une  recherche­action  d’inspiration lewinienne ou néo­lewinienne telle que le décrit René Barbier (op. cit., p.26) : « les chercheurs,  distincts des acteurs, offrent des connaissances savantes, une expertise professionnelle, non sous forme  de conclusion (modèle de la recherche appliquée) mais en se mettant à la disposition du groupe pour  offrir une méthodologie scientifique applicable à un problème d’action ».  En traduction opérationnelle, l’objectif initial de la recherche était multiple :  - Construire de la connaissance sur des questions problématiques et une intervention paysagère dans les  documents d’urbanisme peu étudiée ; 

-  Construire  une  démarche  d’évaluation  avec  les  acteurs  dans  un  objectif  de  validation  continue  et 

d’appropriation  avec  le  SYSDAU  et  l’A’Urba.  Il  s’agit  non  pas  de  proposer  une  démarche  d’évaluation  circonscrite mais de proposer des outils scientifiques d’évaluation qui seront adaptés par les acteurs ;  - Capitaliser les apprentissages de l’évaluation lors de la formulation des orientations du SCOT en cours  d’élaboration ;  - Accompagner les acteurs pour élaborer des indicateurs depuis le diagnostic de territoire jusqu’au projet  (document d’orientations et d’objectifs) et une démarche de suivi de la politique paysagère du futur SCOT.    Ces objectifs ont été proposés selon le constat suivant :  - la perception d’une problématique récurrente et de la faible approche qualitative des paysages dans  les documents d’urbanisme. Ce constat partagé avec le SYSDAU a permis les échanges sur le projet de  recherche. Dans l’action quotidienne du SYSDAU, la directrice identifiait des difficultés liées à l’application  des  orientations  dans  les  PLU.  La  perspective  de  révision  du  SD  2001  en  SCOT  imposait de porter un  regard précis sur les acquis de la politique paysagère du document produit en 2001. 

- Le  fait  que  les  évaluations  réalisées  sur  le  SD 2001 sont issues de l’A’Urba, structure technique à 

l’origine  du  SD  2001.  Il  se  posait  pour  le  SYSDAU  une  problématique  liée  aux  liens  trop  étroits  entre  l’évaluateur  et  l’objet  évalué.  Une  intervention  extérieure  du  CETE  animant  un  processus  d’évaluation  paraissait une étape utile pour le partage de la démarche et des échanges méthodologiques. 

- L’absence d’une expertise paysagiste au sein de l’A’Urba en 2007, qui a été recrutée en 2009.  

Pour notre démarche de recherche, ce dispositif de recherche action correspondait à plusieurs objectifs :   ­  Tout  d’abord,  un  engagement  personnel124  dans  l’idée  que  la  recherche  doit  profiter  aux  acteurs  et  les 

       

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 Paysagiste DPLG de formation initiale, j’ai intégré le ministère de l’Equipement en 2002 comme ingénieur des travaux publics de l’Etat. En poste initial  en DDE des Yvelines comme responsable d’une unité « stratégie territoriale » dans le service urbanisme et développement durable, le questionnement de  la  place  du  paysage  dans  les  politiques publiques et en particulier dans la planification territoriale s’est naturellement développé. Cette thèse est un  prolongement de ce questionnement. 

accompagner dans un objectif d’amélioration. Nous nous inscrivons dans les conclusions présentées par Yves  Luginbühl à ce sujet sur le repositionnement de la recherche en paysage à partir des modes d’action publique  (Luginbühl  Y.,  2007b)  et plus particulièrement dans la conclusion de l’ouvrage de synthèse récapitulant les  résultats de l’appel à projet de recherche « paysage et développement durable » (Luginbühl Y., 2007a). Le  chercheur ne se positionne pas en sachant mais en catalyseur de questionnement, d’interrogations que les  acteurs  vont  manipuler  pour  identifier  des  réponses  et  les  transformer  en  actions.  Par  ailleurs,  le  positionnement extérieur du chercheur vis­à­vis des structures d’action est garant d’une objectivité et d’une  distance qui peut faire défaut aux groupes d’acteurs en place. Rappelons que le SYSDAU et l’A’Urba logent  dans les mêmes murs, et cette dernière est liée à son maître d’ouvrage par un principe de conventionnement  annuel  au  titre  de  la  participation  des  collectivités  à  l’association  qu’est  l’A’Urba.  Les  relations  maître  d’ouvrage/maître d’œuvre ne sont pas celles d’un marché régit par les règles de concurrence habituelles. Le  lien entre le SYSDAU et l’A’Urba est très fort. L’externalisation de l’évaluation, qui plus est dans un objectif de  recherche action, était nécessaire et exprimé par nos interlocuteurs de l’équipe technique du SYSDAU. Par  ailleurs, l’A’Urba s’était positionnée sur la question de l’évaluation du volet paysager du SD 2001 en indiquant  qu’elle n’était pas possible (A'Urba, 2008a).  - Ensuite, la recherche action devait constituer le creuset d’observations sur les rapports entre acteur­

politique  et  acteur­technique  dans  un  objectif  d’étude  épistémologique  des  discours  et  des  réactions  suscitées  par  le  contenu  de  la  démarche  (blocage,  enthousiasme,  qualité  des  échanges,  perceptions  paysagères, engagement, choix, etc.). 

Le déplacement du projet de recherche, reflet d’une réalité de l’action publique 

Ce projet de recherche­action n’a pu aboutir pour les raisons suivantes : 

- Un  engagement  faible  du  SYSDAU  dans  l’association  de  l’A’Urba  à  ces  objectifs  d’évaluation.  La 

signature de la convention est intervenue dans un contexte de décision politique de révision du SD 2001,  avec  des  enjeux  de  mobilisation  des  deux  structures.  Le  temps  de  l’évaluation  était  en  quelque  sorte  dépassé125. L’imprécision du contenu de la convention sur ce sujet était un signe motivé du SYSDAU qu’il  fallait interpréter en ce sens, comme une approche minimaliste en prévision d’éventuelles difficultés. 

- L’objectif  d’évaluation  de  la  politique  paysagère  du  SD  2001  n’était  pas partagé par l’ensemble du 

comité  syndical,  élément  que  nous  avons  découvert  par  la  suite  lors  d’une  première  présentation  du  contenu de la recherche en comité syndical en septembre 2008. Un élu vice­président du bureau syndical  en particulier s’est opposé à l’initiative en la découvrant. Nous avons ainsi constaté que d’une part, l’acte  d’évaluation n’est pas ancré comme une nécessité pour tous les élus ; et d’autre part, que des rapports de  force s’exercent au sein de ce comité syndical. Nous avons alors découvert des premiers éléments de notre  recherche, relatifs à la structuration des motivations internes qui régissent l’action au sein de cet instrument  qu’est  le  SYSDAU126.  Les  travaux  de  Dominique Mons et al. (2002, pp. 8­11) nous ont montré que ces 

réticences  sont  identifiables  dans  des  circonstances  similaires  (réticences  des  acteurs  à  l’évaluation,  difficultés d’accès aux informations, polysémie de la notion de paysage, illisibilité de l’action publique, etc.).          125  Propos tenus par un vice­président du SYSDAU lors de la présentation des objectifs de la recherche en septembre 2008 en comité syndical.  126  L’objet de la convention n’a pas été débattu en comité syndical. Seul le bureau en a pris l’initiative, ainsi que de son financement. La découverte du  projet en comité syndical a mis à jour des tensions internes. Par ailleurs, la politique paysagère du SYSDAU étant essentiellement concentrée sur sa  périphérie,  son  évaluation  mettrait  en  surface  des  mécanismes  de  la  gouvernance  périurbaine  faisant  partie  des  règles  du  jeu  tacites  et  des  problématiques de transfert dans les PLU. 

- L’intervention d’une structure extérieure au dispositif partenarial SYSDAU­A’Urba n’a pas été perçue  pertinente par ce même élu qui dispose d’une parole prépondérante dans le comité syndical. En effet, le  CETE127 est un service administratif déconcentré technique qui est associé à l’Etat. Si l’indépendance et la  neutralité du CETE ont été identifiées dans le dispositif du SD 2001, il s’avère qu’en période de révision, il  peut être perçu comme une présence de l’Etat (qui plus est en situation évaluative) non souhaitable pour  des élus qui disposent de leur instrument technique (l’A’Urba) déjà mobilisé. Le projet a été perçu comme  une forme d’ingérence, dans les relations entre les collectivités et l’Etat. Le déroulement du projet en relation  avec la DDE de la Gironde (qui a participé à son financement), a été l’occasion de constater les conflits qui  règnent dans le cadre de la participation de l’Etat en tant que personne publique associée. Ces conflits sont  sédimentés entre les collectivités et l’Etat.    

A  la  lecture  de  l’article  d’Alain  Thalineau  et  Thierry  Rivard  (2007),  nous  avons  pris  conscience  que  les  conditions  de  faisabilité  d’une  telle  démarche  n’étaient  que  trop  partiellement  réunies :  divergence  entre  l’objectif  méthodologique  et  les  questions  de  recherche,  position  du  chercheur­évaluateur  en  situation  opérationnelle perçu comme un expert technique, commande trop peu qualifiée, financement insuffisant, faible  engagement politique. En fin de compte, la recherche a été menée indépendamment d’un partenariat souhaité  selon une recherche action, et nous devons qualifier notre thèse davantage comme une recherche finalisée128 

ou  de  type  ingénierique  dans  une  forme  d’isolement.  Nous  avons  constaté  ce  glissement  au­delà  des  blocages institutionnels par le recentrage de l’équipe technique du SYSDAU sur des attendus finalisés de type  ­  méthode  d’évaluation  et  liste  d’indicateurs.  Cependant,  cette  situation  nous  a  permis  de  faire  des  observations que nous préciserons par la suite dans la thèse, liées aux divergences/attentes entre acteurs. Par  ailleurs,  ce  décalage  entre  notre  objectif  initial  et  la  réalité  du  parcours  de  la  recherche  participe  de  nos  résultats et nous permet d’en tirer des conclusions que nous illustrerons par la suite. Plusieurs échanges ont  eu lieu avec l’équipe du SYSDAU qui a suivi les étapes de la recherche. Sept rencontres se sont déroulées en  quatre années de recherche (2007­2010). Les résultats ont été accueillis positivement, avec une présentation  finale à l’équipe projet du SCOT au sein de l’A’Urba en janvier et avril 2011. Mais cette initiative n’a pas été  renouvelée en direction du comité syndical ou du bureau du SYSDAU, malgré nos sollicitations.  Ce déplacement des modalités de recherche a constitué un frein important dans l’intérêt du questionnement,  essentiellement sur la démarche d’évaluation que nous identifions comme une action dont la pertinence prend  toute sa forme en collaboration avec les acteurs, dans une formulation partagée. Nous préciserons ce point  par  la  suite  dans  le  mémoire.  Par  ailleurs,  cette  évolution  a  nécessité  un  temps  de  recalage  du  projet  préjudiciable dans la programmation de la recherche. L’enquête par internet n’a pas été assumée par les élus  du SYSDAU, nécessitant de faire référence à la convention pour rappeler sa programmation initiale dans la  convention. Le projet évoluant, nous avons recentré notre recherche sur les mécanismes de la compatibilité  entre  le  SD  2001  et  les PLU. Se faisant, les entretiens auprès des trois communes n’ont pas pu être faits  officiellement dans le cadre de la convention au nom du SYSDAU, sa directrice ne souhaitant pas inscrire cette  démarche d’entretiens dans une visibilité d’action du syndicat. En conclusion, la démarche d’évaluation inscrite  contractuellement n’a pas été assumée politiquement.           127  En poste au CETE comme chef de projet environnement, la thèse a été menée sur la base d’un mi­temps pendant trois ans, l’autre mi­temps étant  consacré à des études opérationnelles et disjointes de nos questions de recherche. Avec le recul, nous constatons que les conditions de réalisation de la  thèse  n’ont  été  que  partiellement  réunies  vis  à  vis  des  exigences  que  nécessite  une  collaboration  avec  des  acteurs  (investissement,  disponibilité,  ressources internes).  

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 La recherche finalisée vise les travaux de recherche scientifique, entrepris afin de résoudre des problémes précis d’usage pratique. Elle se distingue  de la recherche appliquée en ce qu’elle conserve un objectif générique, ne dépendant pas obligatoirement de la problématique.