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Quelques consid´erations au sujet de la r´esolution des conflits

4.6 Complexit´e et pertinence ´emotionnelle dans la narration

5.1.4 Quelques consid´erations au sujet de la r´esolution des conflits

Une fois un conflit d´etect´e vient une phase de diagnostic. Cette phase vise `a fournir une explication de l’´etat conflictuel d´etect´e ou `a calculer un plan pour r´esoudre le conflit si celui-ci est anticip´e. Dans les deux cas, il s’agit de calculer une hypoth`ese qui explique l’incoh´erence du support des ´etats sources du conflit ou va correspondre au plan que l’on va r´ealiser dans le but de r´esoudre le conflit.

Soit un conflit autour d’un ´etat T d´esir´e mais dont l’occurrence est inattendue (suffisamment pour qu’il y ait conflit) et H une hypoth`ese causale. C’est un conflit que l’on cherche `a r´esoudre en calculant un plan (repr´esent´e par une hypoth`ese) qui permet de produire l’´etat d´esir´e.

Nous pouvons ´evaluer l’occurrence de l’´etat T sous l’hypoth`ese H : ν(H ∗ T ) = −U (H ∗ T ). Nous souhaitons que l’hypoth`ese r´esolve le conflit. Une bonne candidate doit donc faire baisser l’intensit´e de cette ´evaluation (c’est-`a-dire rendre l’occurrence de T moins inattendue). L’hypoth`ese H doit donc permettre une

´evaluation pour T qui fait sortir l’´evaluation de T sous l’hypoth`ese H du support de T .

En utilisant la loi de composition de la complexit´e de g´en´eration (voir ´equation 4.8), et sachant que la complexit´e de g´en´eration d’une situation est ´egale `a la complexit´e d’une hypoth`ese causale qui la g´en`ere (voir ´equation 4.12), la meilleure hypoth`ese causale pour r´esoudre le conflit doit v´erifier :

H = argmink[Cw(Hk) + Cw(T ||Hk)] (5.6)

C’est l`a encore une version du rasoir d’Occam. Parmi toutes les hypoth`eses causales, il faut privil´egier ‘la plus simple qui nous rapproche le plus du but `a atteindre’ (il y a une double optimisation).

5.2

Le conflit narratif : un ensemble de conflits

cognitifs

L’objectif de ce chapitre est de donner une d´efinition cognitive, en termes de complexit´e, du conflit narratif. Nous avons introduit pr´ec´edemment les notions de n´ecessit´e et de conflits cognitifs, ce qui nous a permis de faire le lien entre calculs de complexit´e et d´etection de conflits internes aux individus. Il nous faut maintenant montrer les liens entre conflits internes `a un individu et la notion de conflit narratif.

Comme nous le rappelions en introduction de ce chapitre, le conflit narratif est d´efini comme l’incompatibilit´e entre les objectifs de deux personnages ou forces. Au cœur de la notion de conflit narratif se trouve l’id´ee qu’un ensemble d’actions in- tentionnelles de personnages (planifi´ees dans le but d’ˆetre r´ealis´ees) pour atteindre un ou plusieurs objectifs se trouvent contrecarr´ees par des ´ev´enements inattendus (des obstacles). Ces ´ev´enements peuvent ˆetre des actions d’autres personnages ou non. Il est classique de distinguer plusieurs sortes de conflits en fonction des forces en pr´esence. Classiquement, on distingue trois formes de conflits narratifs :

1. le conflit entre personnages, c’est-`a-dire un conflit qui oppose au moins deux protagonistes dont les objectifs sont contradictoires. Un exemple typique est

5.2 Le conflit narratif : un ensemble de conflits cognitifs 117

le conflit “h´eros-nemesis” (Batman contre le Joker ou encore l’affrontement final entre les trois personnages principaux dans “Le Bon, la Brute et le Truand”).

2. le conflit entre un personnage et la nature (c’est-`a-dire entre un personnage et des ´el´ements non contrˆol´es par une entit´e rationnelle appartenant au monde fictif). Dans ce cas, ce sont des world events qui viennent perturber la r´ealisation des plans d’un ou plusieurs protagonistes du r´ecit (un exemple typique est l’arriv´ee d’une tornade dans le film Twister).

3. le conflit interne `a un personnage. Dans ce type de conflit, le personnage est oppos´e `a lui-mˆeme, il doit faire face `a des incoh´erences internes. Un exemple classique de conflit est le dilemme moral. On peut citer comme exemple ce dilemme moral classique : un protagoniste doit d´ecider s’il se met en danger pour sauver un autre protagoniste.

Les conflits entre personnages ou entre un personnage et le monde fictif sont souvent consid´er´es comme externes. Or ces conflits peuvent ˆetre ramen´es `a un en- semble de conflits internes aux protagonistes impliqu´es dans ces conflits. Prenons l’exemple du duel au pistolet entre deux personnages. Aucun des protagonistes im- pliqu´es ne souhaite mourir, mais les chances de mourir sont suffisamment ´elev´ees pour au moins l’un d’entre eux, ce qui, chez ce protagoniste au moins, provoque l’apparition d’un conflit cognitif interne. Dans la plupart des duels, chacun des personnages se met suffisamment en danger pour que la situation provoque l’ap- parition d’un conflit cognitif chez chacun d’eux. D’une mani`ere g´en´erale, lorsqu’il y a conflit (dans le sens ‘affrontement’) entre deux protagonistes, on peut d´ecomposer ce conflit narratif en deux conflits d’ordre cognitif dans l’esprit de chacun des pro- tagonistes (qui sont ici trait´es comme seraient trait´es des ˆetre humains r´eels (voir la remarque faite p.27 `a ce sujet)).

De la mˆeme mani`ere, un conflit entre un personnage rationnel et une force quelconque non rationnelle du monde fictif est ´equivalent `a un conflit cognitif interne `a l’´echelle du personnage.

Le conflit narratif interne `a un personnage est ´egalement d´ecomposable en un ensemble de conflits cognitifs, au sens d´efini plus haut, c’est-`a-dire de conflits entre n´ecessit´es d’´etats du monde. L’exemple classique de conflit interne est le dilemme

moral. Par exemple, une h´ero¨ıne doit mettre sa vie en danger pour sauver un protagoniste auquel elle est attach´ee. Ce dilemme est une conjonction de deux conflits : le premier dont la source est le danger qui p`ese sur la vie de l’h´ero¨ıne (c’est n´ecessaire pour sauver un autre protagoniste mais tr`es peu n´ecessaire car non-d´esir´e par l’h´ero¨ıne), le second dont la source est le danger qui p`ese sur la vie du protagoniste `a sauver (ce danger est n´ecessaire car sa non-occurrence est inattendue - le protagoniste est en danger - et non-n´ecessaire car non-d´esir´e par l’h´ero¨ıne). Ainsi le dilemme moral est bien une conjonction de deux conflits. Il y a dilemme parce que la r´esolution de l’un empˆeche la r´esolution de l’autre.

Ainsi, d’une mani`ere g´en´erale, nous proposons :

Un conflit narratif, c’est-`a-dire l’incompatibilit´e entre les objectifs de deux per- sonnages, peut ˆetre assimil´e `a un ensemble de conflits d’ordre cognitifs `a l’´echelle des protagonistes rationnels qui sont impliqu´es dans le conflit.

La figure 5.2 r´esume ce qui a ´et´e dit pr´ec´edemment.

5.3

Le conflit narratif, un ´el´ement essentiel de la