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2-4-Les conséquences de Toulouse 2001 : un problème de réflexion globale

Le Porté A Connaissance (PAC), il revient à l’Etat de prendre l’initiative d’informer les collectivités locales des éléments d’appréciation sur les risques technologiques dont il a

Morts 30 Logements touchés 35000 Poissons mort en tonne 10

IV- 2-4-Les conséquences de Toulouse 2001 : un problème de réflexion globale

Le bilan de l’accident de l’usine AZF de Toulouse montre un problème récurrent de stratégie, ce qui revient à dire un problème de réflexion en des termes plus globaux (vision à long terme, étude de scénarios…). Ce problème de réflexion est certainement dû à l’absence de conscience du danger au moment de l’initiation d’un projet d’aménagement (à l’époque). La cible humaine a fortement été impactée par la catastrophe d’AZF.

Outre les données chiffrées, il apparaît que l’étude des causes principales de blessures et de décès est révélatrice de la dangerosité potentielle que représente la qualité des matériaux de construction utilisés pour les bâtiments.

Il est notamment flagrant que la qualité des verres de vitre peut être responsable de nombreuses blessures allant de bénignes à irréversibles graves, voire fatales. La projection, ce qui sous-entend un arrachage de pièces plus volumineuses comme les fenêtres, est révélatrice d’un problème de solidité des assemblages de ces fournitures de construction.

Plus grave encore, le fait que des constructions se soient effondrées sur leurs occupants pose le problème des normes générales de construction : types, qualités de matériaux et d’assemblage, expositions...

Concernant cette seconde cible que représente les structures matérielles, tous les dégâts observés sont une preuve que le territoire péri-industriel existant n’est pas adapté à subir les effets physiques générés par un accident industriel majeur. Ils révèlent aussi qu’en terme de normes et de qualité de construction, beaucoup d’améliorations sont réalisables. Ces améliorations ne permettraient peut être pas d’alléger la facture des réparations, mais, si la qualité des matériaux et de leur assemblage permettaient d’éviter que le bâti péri-industriel ne se transforme en piège - parfois mortel - pour ses occupants cela serait un progrès non négligeable...

Le principal point faible des constructions semble être les ouvertures (vitres, fenêtres et portes)... De plus l’onde de choc a été suivie par l’émission d’un nuage potentiellement toxique. En cas d’alerte accidentelle chimique, il est demandé aux personnes de se confiner, comment suivre ces recommandations lorsqu’il n’y a plus de fenêtres pour assurer une certaine étanchéité des locaux ?

Il y a, donc deux raisons, pour le moins, qui militent pour l’amélioration de la qualité du bâti exposé au risque industriel majeur : une nécessité de confinement potentielle et la possibilité d’une innocuité des matériaux (particulièrement le verre) en cas de projection.

L’observation des distances sources/cibles est elle aussi importante. Même s’il paraît évident que plus on est proche de la source, plus les dommages sont importants, il faut relativiser cette distance avec la quantité d’énergie libérée au point source. Cette notion de relativité, fonction de la quantité d’énergie initiale est une difficulté en termes d’étude de dangers pour le dimensionnement des périmètres mais surtout en termes de maîtrise de l’urbanisation.

Alors que les installations situées à une distance proche du kilomètre ont pour la plupart été détruites, rien ne dit que celles situées vers 1600 mètres et qui ont enregistré des dégâts moindres (vitres brisées et chutes de faux plafonds) auraient résisté à un phénomène accidentel plus fort... Là, se pose la question des scénarios de référence, de leur choix et de leurs conséquences sur la qualité du bâti. Toutefois, la quantité totale de réactifs possiblement impliquée dans le phénomène accidentel est en théorie connue et peut être modulable en capacité de stockage...

Autre remarque sur la qualité du bâti, et qui complète les précédentes, il y aurait, certainement quelques points architecturaux notamment en termes de type de construction (béton armé ou constructions légères) à étudier afin d’apporter une sécurité renforcée aux populations.

Concernant les biens mobiliers, les véhicules notamment, le problème mis en évidence par « l’expérience toulousaine » est celui de la surexposition aux risques industriels de matériels à caractère stratégique comme par exemple le matériel spécifique de la DDE, un parc important de véhicules de transports en commun, etc. avec ce type de biens, un raccourci rapide vers la

cible matérielle réseau, peut se faire. Lors de la catastrophe d’AZF, les atteintes aux réseaux ont été diverses. Il est possible de dire que la cible matérielle réseau a été moins atteinte que la cible bâti et que les interruptions de services ont souvent été de courte durée.

Malgré tout, il est à noter que certains réseaux ont physiquement été touchés par l’explosion, une preuve d’une prise en compte inadéquate des menaces industrielles dans la stratégie de ces entreprises de distribution (téléphonie fixe, garage des bus…). D’autres services ont été privés d’alimentation électrique, une preuve, cette fois, de non anticipation de certaines vulnérabilités de leur réseau (téléphonie portable).

Cette catastrophe a aussi permis de mettre en évidence la surexposition (ou le manque de protection) de certains matériels comme les véhicules, les « serveurs téléphoniques », ou encore certaines infrastructures comme les voies ferrées et les autoroutes, il apparaît donc une lacune en termes de prise en compte du risque industriel pour l’installation de certains matériels stratégiques (mobiles ou fixes), cette remarque rejoint celle faite pour les véhicules « spéciaux » quelques lignes plus haut.

Quant au bilan de cet accident sur la cible milieu naturel, il semble que les impacts sur cette cible aient été les moins importants, en comparaison des autres cibles. Deux aspects du milieu naturel sont à prendre en compte : les effets sur la faune et la flore et l'effet le plus médiatisé celui du milieu naturel comme vecteur de pollution ayant pour cible l'homme.

Concernant le premier aspect, peu de communications sur le sujet ont été trouvées. Par contre le second aspect, l'exportation de polluants hors de la zone d'accident par médiations atmosphérique et aquatique a été relatée. Il est intéressant de noter que les pollutions induites par l'explosion (fuite d’ammoniac vers le milieu aquatique, nuage de poussière et de gaz) ont provoqué des effets à longues distances :

-le nuage d'ammoniac a parcouru des dizaines de kilomètres survolant une population nombreuse avant que n'intervienne sa dissipation. La pollution atmosphérique résultante, bien que non négligeable, n'a pas entraîné de gêne particulière hormis des irritations d'yeux et de gorges aux abords de la zone accidentée ;

-la pollution des eaux à l’ammoniac s’est faite ressentir quelques jours après la catastrophe entraînant des restrictions d’usage de l’eau distribuée par le réseau.

Cependant, l'analyse de l'accident de Toulouse ne permet pas de savoir si un accident industriel majeur du type de celui de l’usine AZF provoquerait des dommages spécifiques au milieu naturel. Des pollutions, comme une variation des qualités chimiques de l'eau des cours d'eaux voisins peuvent intervenir, mais quel est leur impact spécifique sur le milieu inféodé?

Il en va de même pour l'onde de choc, quelle en est l'incidence sur le milieu naturel? La faune urbaine, la plus proche du lieu de l'accident, a-t-elle été touchée? Ces éléments peuvent paraître futiles au regard des dégâts humains mais ces acteurs faibles font partie de l’environnement et la défense de ce dernier passe aussi par une meilleure connaissance de ce genre d'événement.

Les rouages de la société sont eux aussi, en cas d’accident industriel majeur, mis à l’épreuve. Certaines situations peuvent être anticipées notamment via les plans communaux de secours. Pour rendre ceux-ci encore plus efficaces, il faut dépasser le seul stade de la crise immédiate liée à l’événement accidentel lui même. Afin de permettre un retour à la normale, le plus rapidement possible, certaines vulnérabilités de la société comme par exemple la capacité d’enseignement de la commune doivent être établies et traitées.

Des plans peuvent ainsi être créés afin de réduire l’importance de la gêne occasionnée (autant une remise en cause de la carte scolaire, que la mise en place de plans de répartition des élèves afin que cette gêne majeure de la société qu’est une interruption de l’enseignement soit atténuée.). Une autre remarque, et c’est là l’un des enjeux de la culture de sécurité (ESSIG, 2002) (29), la création de collectifs est souvent issue de la crise.

Pour autant faut-il en arriver là ? Les avantages de telles associations sont entre autres l’émergence d’un pouvoir de représentation. Nous touchons là, le point sensible de la concertation, la représentativité des porteurs d’enjeux « diffus », la faiblesse majeure de la victime est souvent d’être « isolée mais en grand nombre ».

Un autre point important, est la prise de conscience et l’implication des autorités. Eu égard à la puissance d’un phénomène dangereux, qu’il soit d’origine naturel ou industriel, l’humilité des autorités est primordiale. Les conséquences sur la cible économique de l’accident d’AZF Toulouse sont - hormis la branche chimie qui a été décimée - que l’économie s’est bien remise de la catastrophe industrielle. La raison de cette résilience rapide est certainement le fort dynamisme économique de la ville et une mobilisation importante de la CCI (30).

Cette vision synthétique permet de mettre en évidence deux niveaux d’interactions : les interactions directes et indirectes. Les conséquences de ces deux types d’interactions sont les mêmes : des dommages, des victimes. Il paraît important de distinguer ces deux niveaux car ils mettent en évidence deux types de vulnérabilité :

-une vulnérabilité liée à la présence de cibles (qui représentent des enjeux). Cette vulnérabilité est générale et directe : un flux de danger va venir frapper une cible parce que celle-ci est présente sur le territoire ;

d’indirecte, est directement liée au potentiel de nuisance entre les cibles en cas d’occurrence d’un flux de danger. Ce second type de vulnérabilité permet de déterminer quelques axes d’améliorations possibles afin de rendre le territoire péri-industriel plus sûr. Cette vulnérabilité peut être apparentée à un (micro) effet domino qui serait élargi à l’ensemble des cibles.

Source : Emmanuel. H, 2005

Figure n°30 : Représentation source - flux de dangers -

IV-3-Nouvelle mesure législatives et stratégie de prévention : Adoption de la loi