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Conséquence du flux sur les potentiels électriques :

2.3 Résultats expérimentaux de l’effet du flux

2.3.2 Conséquence du flux sur les potentiels électriques :

D’après les lois fondamentales de la cinétique électrochimique, il est possible de prédire l’effet du recouvrement de la surface de l’électrode par les bulles. La relation de Butler-Volmer qui relie la densité de courant 𝑗(𝑡) = 𝐼

𝑆(𝑡) à la surtension de l’électrode est la suivante :

𝑗(𝑡) = 𝑗0(𝑒𝛼𝑛𝐹𝑅𝑇𝜂(𝑡)− 𝑒

(1−𝛼)𝑛𝐹 𝑅𝑇 𝜂(𝑡))

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La relation de Butler-Volmer prédit donc une augmentation de la surtension d’une électrode lorsque sa surface active S(t) diminue :

𝜂(𝑡) =

𝑅𝑇𝑙𝑛 (𝐼𝐼𝑆0

0𝑆(𝑡))

𝛼𝑛𝐹

L’apparition de bulles à la surface d’une électrode provoque en effet une augmentation de la surtension.

Figure 29 : Mise en évidence de l'effet de l’écoulement sur des électrodes de taille industrielle. Chronopotentiométrie réalisée à j = 3 mA/cm² & Q = 1.5 mL/s (a) Electrode de Nickel (dégagement

d’oxygène). (b) Contre-électrode de Zinc (électrodéposition de Zinc)

La figure 29 montre un exemple de chronopotentiométrie à l'électrode de Nickel et de Zinc de taille industrielle. Cette figure met en évidence l'effet de l'écoulement sur le potentiel. Dans cette expérience, le courant imposé est de 3 mA/cm². Un écoulement à un débit de 1,5 mL/s est activé au bout d’un certain temps et engendre une diminution du potentiel de l’électrode génératrice de bulles. Le phénomène inverse est observé lorsque le flux s’arrête. A l’électrode de zinc qui ne génère pas de phase gazeuse à sa surface, ce phénomène n’est pas observé. Ces variations de potentiels traduisent l’évacuation forcée des bulles par l’écoulement d’électrolyte. Ces résultats préliminaires ont permis de confirmer que l’écoulement d’électrolyte permet la diminution de potentiel de l’électrode à dégagement de gaz utilisée dans les cellules Zinc-Air développées par EDF R&D.

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2.3.2.a. Mesures de la tension électrique s des cellules étudiées

Dans cette section, l'analyse des tensions au niveau des cellules est présentée.. Pour cela, les tensions de cellules des deux systèmes présentés dans la section 2.1.2 sont mesurées pour différents débits et en fonction de la densité de courant appliquée. Les résultats sont présentés en figure 30. Le graphe (a) de cette figure correspond à la cellule à électrolyse et le graphe (b) est relatif à la cellule Zinc-Air. Les tensions de la cellule correspondent à la différence de potentiel entre l’électrode de travail et la contre électrode. Dans les deux cas, l’effet du débit entraine une diminution de la tension de cellule. Pour un débit de 1.5 mL/s, cette diminution atteint environ 160 mV pour le Zinc-air et environ 340 mV pour la cellule Platine-Carbone à électrolyse.

Pour les courants inférieurs à 2 mA/cm², l’écoulement a très peu d’effet sur la tension de cellule. En effet, à ces densités de courant la vitesse de production de bulles reste faible. On peut également noter que la diminution de la tension est plus importante pour la cellule à électrolyse du fait que celle-ci présente deux réactions de dégagement de gaz.

Figure 30 :Mesure de la tension de cellule en fonction de la densité de courant appliquée pour différents débits (a) Cellule à électrolyse (b) Cellule Zinc-Air

Ces résultats expérimentaux montrent le rôle de l’écoulement sur les tensions de cellule et confirment que l’utilisation du flux d’électrolyte est un bon moyen d’améliorer les propriétés des cellules Zinc-Air rechargeables ou des cellules à électrolyse.

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2.3.2.b. Influence du débit sur les potentiels électrique s des électrodes

La figure 31 montre l’évolution expérimentale du potentiel électrique à chaque électrode de nos systèmes pour différents débits à j = 3 mA/cm². Les graphes (a), (b), (c) et (d) de cette figure correspondent respectivement à l’électrode de carbone, l’électrode de platine, l’électrode de nickel et l’électrode de zinc. Les courbes de ces graphes sont obtenues pour trois valeurs de débits (0, 0.7 et 1.5 mL/s). Ces résultats sont obtenus en suivant le protocole expérimental détaillé dans la section précédente.

Figure 31 : Mesures expérimentales du potentiel électrique en fonction du temps pour différents débits à j = 3 mA/cm² (a) carbone, (b) platine (c) nickel, (d) zinc

On observe pour chaque type d’électrode à dégagement de gaz une diminution du potentiel de l’électrode lorsque l’électrolyte est en écoulement. Cette diminution est liée à l’évacuation des bulles en surface. Il est à noter que l’électrode de zinc, à laquelle a lieu uniquement la réduction des ions 𝑍𝑛(𝑂𝐻)42− en zinc métal, ne présente pas de variation significative de potentiel avec le débit. La diminution du potentiel est plus importante lorsque le débit augmente. Chacune des électrodes présente une dynamique propre de l’évolution du potentiel qui est dépendante de l’évacuation naturelle et forcée des bulles à la surface. Ces différences peuvent dépendre de

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l’état de surface et de la géométrie de l’électrode ainsi que de la nature de l’électrode (Ni, C et Pt) et des bulles formées (O2 et H2).

Ces différentes évolutions du potentiel seront comparées avec le modèle théorique qui sera présenté dans le chapitre consacré à la modélisation.

2.3.2.b. Influence du courant sur les potentiels électrique s des électrodes à dégagement de gaz :

L’effet de l’écoulement peut maintenant être étudié à différents courants dans le but d’effectuer une première analyse du procédé d’évacuation des bulles. Chaque électrode est analysée séparément.

Electrode de Nickel (OER)

La figure 32 illustre les résultats de chronopotentiométrie à différentes densités de courant à l’électrode de nickel. Ces graphiques permettent de comparer la configuration statique (Q= 0 mL/s) et celle en écoulement (Q=1.5 mL/s) de l’électrolyte. Les graphes (a), (b) et (c) correspondent respectivement à des densités de courant de 3, 5 et 20 mA/cm2. Pour cette électrode à laquelle des bulles de dioxygène sont générées, le potentiel diminue avec le débit. L’écart entre le potentiel mesuré utilisant l’électrolyte en régime statique et celui mesuré pour l’électrolyte en écoulement varie entre 50 et 120 mV selon le courant.

Il est à noter que bien que cette différence de potentiel soit significative, le procédé ne permet pas l’évacuation de la totalité des bulles. En effet le potentiel théorique de l’électrode calculé à partir des paramètres extraits des courbes de Tafel est légèrement inférieur au potentiel mesuré en écoulement. Aux faibles densités de courant (j = 3 mA/cm²), le potentiel théorique est selon l’équation de Butler-Volmer égal à 0.67 V vs Ag/AgCl. Le potentiel mesuré en écoulement atteint 0.7 V vs Ag/AgCl. La surtension liée à la présence de bulles en surface est alors de 30 mV. Elle est en revanche de 130 mV en électrolyte statique. En augmentant la densité de courant, la surtension liée aux bulles en écoulement augmente. Une évacuation totale des bulles à la surface de l’électrode devrait donner théoriquement un potentiel autour de 0.8 V (vs Ag/AgCl). La valeur mesurée dans notre système en flux est de 0,95 V (vs Ag/AgCl) et oscille entre 0,85 et 1,05 V en électrolyte statique. Ces différences, entre le calcul et la mesure, sont probablement liées à la présence des bulles bloquées localement avec des tailles encore trop

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petites pour être emportées par le flux. Elles peuvent également être bloquées dans une zone dans laquelle la vitesse d’entrainement de l’électrolyte est plus faible (typiquement dans les coins inférieurs de la cellule). La géométrie de l’électrode peut également avoir un rôle. En effet, l’utilisation d’une grille modifie la dynamique d’évacuation des bulles.

Figure 32 : Chronopotentiométrie expérimentale à l’électrode de nickel avec électrolyte statique (courbes noires) et avec flux (courbes en couleur) (a) j = 3 mA/cm² (b) j = 5 mA/cm² (c) j = 20

mA/cm²

Nous remarquons que la mesure du potentiel en électrolyte statique est fortement bruitée pour les fortes densités de courant. En revanche, un signal plus lisse est mesuré lorsque l’électrode est soumise à un écoulement de l’électrolyte. Ces oscillations peuvent atteindre 150 mV pour une densité de courant de 20 mA/cm² et peuvent être attribuées au décrochage par évacuation naturelle de grandes bulles de la surface de l’électrode [106]. Elles témoignent d’une accumulation importante de bulles dans la cellule, rendant alors très instable la surface active de l’électrode.

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Electrode de Platine (OER)

De la même manière que pour l’électrode de nickel, la figure 33 montre l’évolution du potentiel de l’électrode de platine en régime statique de l’électrolyte et en régime d’écoulement. Les graphes (a), (b) et (c) sont obtenus pour respectivement des densités de courant de 3, 10 et 20 mA/cm2. Comme dans la sous-section précédente, le potentiel en écoulement mesuré est inférieur au potentiel en électrolyte statique. Cette diminution peut atteindre de 150 mV.

Figure 33 : Chronopotentiométrie expérimentale à l’électrode de Platine avec électrolyte statique (courbes noir) et avec flux (courbes en couleur) (a) j = 3 mA/cm² (b) j = 10 mA/cm² (c) j = 20 mA/cm²

Pour une densité de courant de 3 mA/cm² le potentiel passe de 0.7 V (vs Ag/AgCl) en électrolyte statique à 0.55 V (vs Ag/AgCl) lorsque électrolyte est en écoulement. La valeur calculée par la relation de Butler-Volmer à partir des paramètres de Tafel est sensiblement la même. L’impact des bulles en surface semble être plus limité lorsque la quasi-totalité des bulles d’oxygène sont

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évacuées. Les bulles résiduelles n’entraînent pas de façon significative de masquage de la surface et restent par conséquent sans effet marqué sur le potentiel de l’électrode.

Une augmentation de la densité de courant provoque ici aussi une diminution de l’efficacité du procédé. Pour une densité de courant de 20 mA/cm², le potentiel mesuré est environ 0.95 V alors qu’une surface d’électrode non masquée par les bulles devrait avoir un potentiel théorique autour de 0.75 V vs (Ag/AgCl). Cependant, le procédé garde son intérêt car le potentiel mesuré en électrolyte statique est supérieur à 1.15 V (vs Ag/AgCl). Les fluctuations du potentiel liées l’instabilité du nombre de bulles en surface en électrolyte statique aux fortes densités de courant sont inférieures à 0.1 V (pour une densité de courant de 20 mA/cm2). Elles sont de plus faibles amplitudes comparées à celles obtenues sur la grille de nickel. Ceci est dû probablement à la nature du matériau, à l’état de surface et à la configuration géométrique des électrodes qui modifient la dynamique d’évacuation naturelle des bulles. Notons également que pour les faibles densités de courant, les mesures décroissent lentement pour atteindre un plateau en variant entre 0.6 V et 0.55 V vs Ag/AgCl. Cette diminution progressive du potentiel peut être liée à la présence de bulles résiduelles de petites tailles sur l’électrode. Ces dernières peuvent être évacuées par le débit une fois une taille suffisante est atteinte.

Electrode de Carbone (HER)

La figure 34 illustre l’évolution expérimentale du potentiel de l’électrode de Carbone en fonction du temps pour différentes densités de courant en régime statique et en écoulement forcé de l’électrolyte. A l’électrode de carbone a lieu une réaction de dégagement d’hydrogène.

L'électrode de Carbone présente un comportement similaire aux autres électrodes à dégagement de gaz décrites dans les sous-sections précédentes. La formation d’hydrogène se fait à des potentiels négatifs (vs Ag/AgCl) et la valeur absolue de la différence de potentiel entre l’électrode de carbone et la référence diminue en écoulement. Aux faibles densités de courant (j = 3 mA/cm²) le potentiel mesuré est de -1,23 V (vs Ag/AgCl) en écoulement et de -1,29 V (vs Ag/AgCl) en électrolyte statique. La valeur théorique de potentiel pour une interface électrode/électrolyte en absence de bulles est de -1,20 V (vs Ag/AgCl). L’écart de 30 mV entre la mesure en écoulement et le calcul basé sur les mesures des grandeurs associées à la cinétique électrochimique (courbes de Tafel) laisse supposer ici aussi la présence de bulles résiduelles non évacuées par l’écoulement d’électrolyte. Le procédé perd également en efficacité sur cette électrode. Pour j = 20 mA/cm², le potentiel calculé de l’électrode en prenant en compte la totalité

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de la surface active (S(t) = S0)est de -1,34 V vs Ag/AgCl. Les valeurs mesurées en régime

statique se situent autour de -1.66 V et sont de -1,47 V pour Q = 1,5 mL/s.

Figure 34 : Chronopotentiométrie expérimentale à l’électrode de Carbone avec électrolyte statique (courbes noires) et en flux (courbes en couleur) (a) j = 3 mA/cm² (b) j = 10 mA/cm² (c) j = 20 mA/cm2

A cette électrode, la diminution du potentiel par l’écoulement peut atteindre plus de 170 mV. L’amplitude des fluctuations à fort courant en électrolyte statique est proche de 100 mV.

Ces différentes analyses expérimentales nous renseignent sur le comportement des électrodes en écoulement et sur l’efficacité du flux d’électrolyte. Le procédé permet une réduction significative du potentiel des électrodes liée à l’évacuation des bulles en surface. Les dynamiques d’évacuation forcée et naturelle sont dépendantes de plusieurs paramètres comme la nature de l’électrode, de l’état de surface de l’électrode et de sa géométrie. L’augmentation du débit permet de réduire d’avantage le potentiel mesuré, jusqu’à atteindre la limite théorique de potentiel en absence de bulles (pour 𝑆(𝑡) = 𝑆0). L’augmentation du courant provoque une

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perte de l’efficacité du procédé du fait de la plus importante quantité de bulles produites par unité de temps. Lorsque le courant est trop important, des phénomènes oscillatoires s’observent et sont liés à l’instabilité de la surface active de l’électrode provoquée par la production trop intense de bulles.