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2.2 Cinétique et moyens de mesures électrochimiques

2.2.1 Cinétique électrochimique

Lorsqu’un solide est au contact d’un fluide, il se forme une double couche électrochimique [90]. La première couche correspond à la charge de surface et est liée à l’adsorption d’ions en surface de l’objet du fait des interactions chimiques. La deuxième couche correspond aux ions attirés par la charge de surface du fait de la force de Coulomb. La taille de la double couche électronique est proche de la longueur de Debye. On définit le potentiel zeta noté 𝜓 comme étant la différence de potentiel entre la surface du solide et le point de neutralité. Ce potentiel décroit en s’éloignant de la surface. La figure 24 représente la vue schématique de la formation d’une double couche électronique et l’évolution du potentiel zeta pour une plaque (a) et pour une particule solide (b).

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Figure 24 : Double couche entre un solide et un liquide et évolution du potentiel (a) plaque solide (b) particule sphérique solide

Lorsqu’une électrode est immergée dans un électrolyte et soumise au passage d’un courant, il y a alors formation d’une double couche électrochimique liée à l’apparition de charge en surface de l’électrode. Des ions présents dans l’électrolyte se placent alors proche de la surface chargée par le passage du courant, et forment la double couche. Les réactions électrochimiques se font alors à cette interface électrode/électrolyte [91].

Lorsque l’électrode est à l’équilibre et sans courant appliqué, des électrons sont simultanément acceptés et donnés par l’électrode, ceci fait alors apparaître des courants partiels d’oxydation et de réduction de signe opposé. Le courant global circulant à travers la double couche correspond à la somme de ces courants partiels et est noté 𝐼0. Ce courant est appelé courant d’échange nul et est généralement de l’ordre du mA/cm² ou inférieur [92].

On peut considérer 3 phénomènes de transport au cours d’une réaction électrochimique :

 La diffusion liée au gradient de concentration induit par la réaction.

 La migration liée au mouvement d’ions en présence d’un champ électrique

 La convection qui traduit les mouvements globaux du fluide comme par exemple l’agitation mécanique.

La réaction est dite limitée par la diffusion si la vitesse de réaction est grande devant la vitesse de diffusion. Dans ce cas, le transfert de charge à l’électrode est rapide. La concentration locale en espèce redox est alors plus faible à l’approche de la surface de l’électrode siège de la réaction

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électrochimique comme indiqué sur la figure 25. La concentration augmente lorsque l’on s’éloigne de la surface pour atteindre une valeur correspondant à la concentration globale de l’espèce en solution une fois que l’on se situe suffisamment loin de l’interface. Il y a alors un mouvement de diffusion lié à ce gradient de concentration. Les espèces qui réagissent à la surface alimentent en continu cette différence de concentration et les espèces en solution migrent alors vers l’interface pour équilibrer la concentration du système. Ce phénomène est illustré sur la figure 25où 𝛿0 représente l’épaisseur de la couche de diffusion.

Figure 25 : (a) Réaction électrochimique limitée par la diffusion (b) Evolution de la concentration locale

Lorsqu’une réaction est limitée par la diffusion, elle présente un courant maximal appelé courant limite de diffusion. L’augmentation du potentiel électrique de l’électrode ne provoque alors pas d’augmentation du courant lorsque ce maximum est atteint. Augmenter la concentration en espèce réactive dans la solution permet de diminuer l’épaisseur de la couche de diffusion et d’augmenter le courant limite de diffusion. La convection peut également permettre de modifier la taille de la couche de diffusion et le courant limite [93].

Le flux de diffusion surfacique 𝒥 est donné par la loi de Fick :

𝒥𝑗𝐷 = −𝒟𝑖𝑗∇𝑐𝑗

Avec 𝒟𝑖𝑗 le coefficient de diffusion et 𝑐𝑗 la concentration. Cette loi s’applique si l’on néglige le flux lié à la migration. Cette hypothèse est réalisée dans le cas où l’électrolyte contient un nombre important d’ions n’intervenant pas dans la réaction redox considérée. On appelle un tel

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électrolyte « électrolyte support » et le mouvement par migration des espèces redox en solution peut alors être négligé [94].

La conservation de la matière donne la relation suivante : 𝜕𝑐𝑗

𝜕𝑡 = 𝜕ℐ𝑗

𝜕𝑥

Et donc dans le cas d’un flux diffusif pur unidimensionnel la concentration s’exprime par :

𝜕𝑐𝑗

𝜕𝑡 = −𝒟𝑖𝑗 𝜕²𝑐𝑗

𝜕𝑥²

On peut exprimer le flux surfacique de matière dans le système en prenant en compte la migration des ions ainsi que la convection éventuelle. L’expression complète du flux de matière est alors donnée par l’équation de Nernst-Planck :

𝒥

𝑗

= −𝒟

𝑖𝑗

∇𝑐

𝑗

−𝑧

𝑗

𝐹

𝑅𝑇

𝒟

𝑖𝑗

𝑐

𝑗

∇𝜙 + 𝑐

𝑗

𝑣

Le terme 𝑧𝑗𝐹

𝑅𝑇

𝒟

𝑖𝑗

𝑐

𝑗

∇𝜙

représente la contribution de la migration. 𝑧𝑗 représente la valence de l’ion considéré, R la constante des gaz parfaits, T la température, n le nombre d’électrons échangés, F la constante de Faraday et 𝜙 le champ électrique. La contribution de la convection est comprise dans le terme additionnel 𝑐𝑗𝑣, avec 𝑣 la vitesse de déplacement du fluide.

Dans la plupart des cas, le flux total est unidimensionnel, et perpendiculaire à l’électrode.

On a alors :

𝒥

𝑗

(𝑥) = −𝒟

𝑖𝑗

(∂𝑐

𝑗

(𝑥)

∂x

) −

𝑧

𝑗

𝐹

𝑅𝑇𝒟

𝑖𝑗

𝑐

𝑗

(

∂𝜙

∂x) + 𝑐

𝑗

(𝑥)𝑣(𝑥)

Et on peut alors exprimer l’évolution de la concentration d’après la loi de conservation de la matière :

𝜕𝑐

𝑗

𝜕𝑡

(𝑥) = −𝒟

𝑖𝑗

(

∂²𝑐

𝑗

(𝑥)

∂x²

) −

𝑧

𝑗

𝐹

𝑅𝑇

𝒟

𝑖𝑗

𝑐

𝑗

(

∂²𝜙

∂x²) +

𝜕(𝑐

𝑗

(𝑥)𝑣(𝑥))

𝜕𝑥

Le flux de matière s’exprime en mol∙cm-2∙s-1 et est donc analogue à une densité de courant pour

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diffusion devient négligeable. Le flux de matière dans la solution, loin de la surface est donc gouverné par la migration des ions et la convection éventuelle.

Le potentiel de l’électrode suit la loi de Nernst [95] [91] :

𝐸 = 𝐸0+𝑅𝑇

𝑛𝐹ln ( 𝐶𝑂∗

𝐶𝑅∗)

Avec 𝐸0 le potentiel à l’état standard. Les termes 𝐶𝑂∗ et 𝐶𝑅∗ représentent respectivement les

concentrations en oxydant et en réducteur dans la solution. La différence de potentiel par rapport au potentiel d’équilibre est appelée surtension et notée 𝜂 :

𝜂 = 𝐸 − 𝐸

0

On observe une dépendance de la densité de courant avec la surtension. Tafel a montré en 1905 que cette dépendance est exponentielle [96].

𝜂 = 𝑎 + 𝑏 𝑙𝑛(𝑗)

L’approche du traitement d’une étape élémentaire de transfert de charge permet de donner naissance à la théorie de la cinétique interfaciale. Cette théorie a été développée par John Alfred Valentine Butler et Max Volmer [97]. Ce modèle est connu sous le nom de modèle de Butler- Volmer et permet de relier la surtension avec la densité de courant [91] :

𝑗 = 𝑗

0

{𝐶

𝑂

(0, 𝑡)

𝐶

𝑂

𝑒𝑥𝑝 [

𝛼

𝐴

𝑧𝐹

𝑅𝑇

𝜂] −

𝐶

𝑅

(0, 𝑡)

𝐶

𝑅

𝑒𝑥𝑝 [

𝛼

𝐶

𝑧𝐹

𝑅𝑇

𝜂]}

Avec

𝑗

la densité de courant,

𝐶

𝑂

(0, 𝑡)

et

𝐶

𝑅

(0, 𝑡)

représentent respectivement les concentrations en oxydant et en réducteur à la surface de l’électrode, et

𝐶

𝑂∗ et

𝐶

𝑅∗ représentent respectivement les concentrations en oxydant et en réducteur dans la solution électrolytique. Les grandeurs 𝛼𝐴 et 𝛼𝐶 représentent les coefficients de transfert de charge anodique et cathodique. Dans certains cas, notamment lorsque la diffusion n’est pas limitante et que les espèces redox sont présentes en forte concentration dans l’électrolyte, on peut faire l’approximation que les concentrations en surface et dans la solution sont identiques. L’expression précédentese simplifie alors à :

𝑗 = 𝑗

0

{𝑒𝑥𝑝 [𝛼

𝐴

𝑧𝐹

𝑅𝑇

𝜂] − 𝑒𝑥𝑝 [

𝛼

𝐶

𝑧𝐹

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Lorsque la surtension est suffisamment importante et donne lieu à un fort courant d’oxydation, le courant cathodique devient négligeable devant le courant anodique. De la même manière, les courants de réduction donnent lieu à une contribution négligeable du courant cathodique pour les surtensions suffisantes. Dans ces cas, l’expression précédente se simplifie à la loi empirique développée par Julius TAFEL en 1905.

𝜂 = 𝑎 + 𝑏 𝑙𝑛(𝑗)

𝜂 = −ln(𝑗

0

) +

𝑅𝑇

𝛼𝑧𝐹 𝑙𝑛(𝑗)

Le tracé des courbes 𝑗 = 𝑓(𝐸) permet de déterminer expérimentalement le coefficient de transfert de charge de la réaction 𝛼 ainsi que la densité de courant d’échange nul 𝑗0.

Lorsque la diffusion est limitante, on peut relier le courant par la loi de Butler-Volmer complète et calculer les concentrations à partir de la loi de Fick et de la conservation de la masse. Lorsque la diffusion ne limite pas la réaction, la loi simplifiée de Butler-Volmer suffit à décrire le système. La figure 26 représente des tracés de courbes 𝐼 = 𝑓(𝐸) obtenues par calcul selon la relation de Butler-Volmer pour différentes valeurs de 𝑖0. Le graph (a) représente deux cinétiques sans limitation diffusive. Le graphe (b) représente le même type de tracés pour un système qui serai limité par la diffusion. Les courbes atteignent des plateaux lorsque les surtensions sont importantes. Ce plateau fait référence au courant limite imposé par le transport de matière par diffusion.

Figure 26 : Courbes intensité-potentiel pour différentes cinétiques (a) la diffusion n’est pas limitante (b) réaction limitée par la diffusion

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