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131 CONGREGATION 132 Parquoy, mes frères et sœurs, soyons sur nos

Et premièrement M. lean Calvin a commencé ainsi qu'il s'ensuit:

131 CONGREGATION 132 Parquoy, mes frères et sœurs, soyons sur nos

gardes, que les gens qui ont beau babil ne nous puis-sent abuser par leurs paroles non seulement vaines, mais aussi blasphématoires et tresdangereuses. Tenons nous à la pure vérité de Dieu, et cognoissons qu'il a un conseil qui n'est point muable, et que ce qu'il a déterminé de toute éternité s'accomplira, et n'y aura nulle faute.

M. IEAN PEEERY.

[page 95] Mes frères et sœurs, nous avons icy ouy des choses que nous devrions tenement méditer, que quelque tentation qui nous peust avenir au contraire, fust repoussée; ce qui nous sera facile de faire quand nous serons persuadez et résolus de ce qui a esté dit.

Neantmoins, tout ainsi que le frère parlant dernier a dit qu'il nous faut estre sur nos gardes, de peur que Satan, par les meschans qui sont ses supposts, ne vienne à renverser ce fondement sur lequel nous devons appuyer nostre foy, aussi nous faut il souvenir de ce que sainct Paul dit, quand il exhorte les fidèles, quel moyen ils doivent tenir, quand il est question qu'une fausse doctrine est mise en avant pour s'eslever contre Dieu, que nous ne devons point seulement avoir en execration une telle doctrine, mais aussi tous ceux qui la portent, et qu'on les doit tenir comme maudits de Dieu. le suis estmxné, comme gens qui se veulent dire sages, à la seule veue d'un [page 96] homme avolant se laissent maistriser comme une putain, et se laissent ainsi abuser.

Car ces abuseurs promettent choses qu'Us n'ont point: ils promettent de contenter les esprits des

hom-mes, et eux-mesmes sont tellement agitez et transportez en leurs esprits, qu'ils ne savent où ils sont: ils pro-mettent de monstrer à l'homme, ce que tous ensemble ne pourroyent pas comprendre. Et au contraire nous savons qu'il est dit, que quand l'homme voudra savoir les raisons des choses que Dieu fait sous le soleil, qu'il ne les trouvera point. Comment donc presumerons-nous d'aller au conseil de Dieu pour y prendre ce qu'il veut nous estre maintenant caché?

Et ainsi nous voyons, que ces chiens qui viennent ainsi abbayer ' contre ceste doctrine ne demandent sinon à mener tout à perdition. Il est vray qu'ils feront de belles professions : mais gardons-nous de tels trompeurs : ils ont leurs boittes vuides, cependant il nous veulent

•faire croire qu'il y a merveilles dedans.

Avisons donc de nous tenir à ce que nous a [page 97] esté monstre et enseigné de Dieu, pour luy rendre Vhonneur qui luy appartient. Et puis que nostre bon Dieu nous a icy assemblez, les uns de cent, les autres de deux cens lieues, et que nous sommes venus pour estre instruits en sa parole, que nous monstrions com-ment nous y avons profité, et que nous n'en soyons

iamais détournez de quelque façon que ce soit. Que si nous voyons beaucoup de gens qui taschent de nous-divertir du droit chemin, fuyons telles pestes, que nous ne soyons adioincts à tels moqueurs de Dieu. Quant à moy, ie proteste que moyennant la grace de Dieu, ie ne m'y adioindray point. Et de celaie vous admon-neste aussi tous au Nom de Dieu, que nous nous séparions tous de leur compagnie, afin que nous ne soyons point divertis par leurs mauvaises conversations et par leurs blasphemes, de la pureté de la parole de Dieu et de sa saincte doctrine: mais que nous y per-sévérions tous iusques à la fin.

M. IEAN FABRi:

[page 98] Mes frères, ce qui a esté dit tant du frère qui a proposé, que par les autres qui ont desia parlé, est tres-suffisant; toutesfois, d'autant que ce présomptueux brouillon a amené une fausse doctrine,

disant que nostre salut est fondé sur nostre franc arbitre, et dit que nous ne pouvons pas estre sauvez, si non qu'ayons une liberté en nous par laquelle nous recevons la foy, et que cela procède de nous et non pas de Dieu, et que Dieu ne fait point plus de graces aux uns qu'aux autres, i'adiousteray seulement une authorité de sainct Paul, prinse au cliapitre onzième des Romains, auquel lieu sainct Paul allègue Esaye au cinquante-neufieme chapitre, et dit là: Celuy qui fait délivrance viendra de Sion, et ostera l'infidélité de Iacob, et auront de par moy ceste alliance, que i'osteray leurs péchez. (Rom. 11, 26. 27; Esaye 59, 20. 21.) Ils sont ennemis selon l'Evangile à cause de vous, mais ils sont bien-aimez selon Vélection, à cause des pères. (Rom. 11, 28.) Voila une sentence [page 99] en laquelle sainct Paul monstre que l'infidé-lité est ostée par celuy qui fait délivrance; que les péchez sont aussi ostez par celuy qui viendra de Sion,

qui est nostre Seigneur Iesus Christ. Ce n'est pas donc le franc arbitre.

Et celuy qui a avancé ceste doctrine, qu'il mette en avant pour un Hard du sien, et qu'il se délivre de cest erreur, auquel il est plongé.' Puis qu'ainsi est que nous nous pouvons délivrer par nostre propre vertu, et par nostre franc arbitre, voire et sans venir à Iesus Christ, que nous nous pouvons (dirie) desvélop-per de tant d'empeschemens qui nous retiennent, que nous ne pouvons pas approcher de Dieu, que cestuy-ci se délivre de son ignorance et de ses erreurs!

Cependant nous voyons, comme i'ay desia dit, que c'est nostre Seigneur Iesus Christ qui nous délivre de nostre infirmité: c'est par son moyen que nous sommes agréa-bles à Dieu son Père: comme aussi c'est luy qui moyenne entre luy et nous pour nous y faire trouver grace.

Or ceste grace n'est point faite à tous [page 100],

133 \ • SUR L'ELECTION ETERNELLE. 134 Sainct Paul le monstre en la deuxième aux

Thes-saloniciens, deuxième chapitre, quand il parle de l'homme de péché, ou de l'enfant de perdition, qui viendra en signes et merveilles; il adiouste vers la fin, qu'il donnera efficace d'erreur à ceux qui périssent, afin qu'ils croyent à mensonge. Voila donc Dieu qui par son Fils délivre les hommes d'infidélité, et les délivre de leurs péchez. Et d'autre costé, il dit qu'il envoy era un esprit d'erreur, un esprit d'efficace pour faire croire les réprouvée à mensonge. Cecy est attribué à Dieu, et luy est attribué sans luy imputer la faute ny la coulpe de la condamnation des meschans.

Et en cecy il y a double cause: il y a une cause loingtaine, qui est la volonté de Dieu: il y a une cause prochaine, qui est la malice, l'infidélité, l'iniquité, la

rebellion de l'homme: l'homme donc est digne d'estre ainsi reietté. Mais cependant il faut que nous regardions là-haut une autre cause, que nous appelons .loingtaine, qui est la volonté de Dieu.

Et ainsi nous pouvons bien conclurre tant par cela, que [page 101] par ce que nous avons maintenant allégué de sainct Paul, c'est assavoir, que nous ne recevons point la foy de nostre franc arbitre, mais que c'est par la grace de Dieu, qui nous a esleus pour nous amener à son Fils, et qu'en luy nous soyons {Ruminez par son sainct Esprit et par sa parole.

' Quand nous croyons en Iesus Christ, c'est une grace speciale: et quant aux réprouvez, qu'estans reiet-tez par un iuste iugement de Dieu, qu'estans délaissez en leur corruption, ils sont iustement perdus et ruinez, sans toutesfois en imputer la faute à Dieu, mais aux hommes. Nous ne voulons point accuser Dieu d'in-iustice, nous ne le voulons point accuser d'acception de personnes; mais qu'il a décrété de tout temps ce qu'il

vouloit faire, que c'a esté avec équité, iustice et droic-ture, voire avec une telle droicture qu'on n'y doit et ne peut-on aussi trouver à redire. Et pourtant, que nous soyotis. bien résolus, qu'il a choisi les uns devant la creation du monde (comme il a esté dit aux Ephe-siens, premier chapitre), et [page 102] qu'il a reietté les autres, suivant ceste sentence de sainct Paul: Qu'il fait miséricorde à qui bon luy semble, et qu'il endurcit celuy qu'il veut. Et semblablement que nous regardions à ce qui- a esté adiouste, c'est assavoir, que nous som-mes esleus en sanctification, à,ce que nous soyons saincts ; à ce gue nous vivions en toute saincteté et Jwnnesteté. Et c'est l'Esprit de regeneration qui nous

sépare et discerne des meschans, et qui nous rend tesmoignage que nous sommes esleus de Dieu, voire devant la creation du monde, comme il nous a esté manifesté, quand nous avons esté appelez à la cognois-sance de Dieu par la predication de l'Evangile.

Or, mes frères, ie vous exhorte et admoneste, entant qu'en moy est, que vous preniez garde à ceux qui veulent abolir l'Evangile, qui sèment des fausses doctrines, qui mettent icy des erreurs et suscitent des

troubles en ceste Eglise. Quelque belle couleur qu'il?

sachent prendre, que vous ne soyez point transportes faussement, que vous ne soyez point inconstans et voir-loges [page 103], pour dire: le ne say auquel ie me - doy tenir. Que quand il viendra quelqu'un qui ne face

que souffler dans l'oreille, que vous ne soyez esgarez.

Gardez-vous bien d'estre démenez d'une telle légèreté et inconstance; mais pour quelque chose qu'on vous puisse amener, que ne soyez divertis de la pureté et simplicité de la parole de Dieu; que vous soyez entièrement résolus en ceste doctrine qui vous a esté proposée maintenant: comme aussi elle est la vérité

infallible de Dieu. Et quant à moy, ie proteste que i'y consens et accorde. Et prie le Seigneur qu'il me face ta grace d'y persévérer iusques à la fin et d'y

mourir.

M. IEAN DE SAINCT ANDRÉ.

Il ne nous faut point esbahir si ceste doc- • trine est assaillie. Satan (comme nous le savons) qui est ennemi de nostre salut, nous assaut de la part qu'il sait estre nostre plus grand' forteresse. Pour ceste cause advisons bien de retenir ceste doctrine, et nous arrester à la simplicité d'icelle. [page 104] Gar tant plus qu'elle sera assaillie, tant plus elle nous est nécessaire à salut. L'Escriture saincte nous enseigne de ne point passer plus outre que ce qui nous est nécessaire de savoir pour trouver la cause de la ruine de l'homme. Or tous sont perdus en Adam, et de ceste condamnation universelle et generale, il a pieu à Dieu par sa miséricorde de retirer ceux qu'il luy a pieu.

Et ceux qui sont en telle condamnation, ne peuvent sinon mal faire, et ce qu'ils font mal ne doit point estre imputé à Dieu: car Dieu ne les contraint point de mal faire, mais cela doit estre imputé à ceste cor-ruption naturelle, et puis que ceste natwe corrompue est adonnée à mal, elle ne peut faire sinon tout mal.

Une mesme chose sera bonne et mauvaise: bonne en Dieu, et mauvaise en l'homme : car la fin que Dieu pretend est bonne, et la fin de l'homme est mauvaise. •

Quand nous attribuons toute puissance, toute authorité et supériorité à nostre Dieu, il faut aussi que nous luy attribuons un conseil par lequel il a délibéré de tout temps de [page 105] ce qu'il doit faire de toutes ses creatures. Et en ce secret-là, il ne nous est pas licite ny aussi possible d'entrer. Mais il nous faut contenter de ce qu'il nous en fait cognoistre en general, c'est assavoir, qu'il est en tout et par tout iuste et equitable, et qu'il n'excède point mesure en tout ce qu'il fait.

Quant à ceux qui veulent maintenir la iustice de Dieu, et pou/r la maintenir sont contraires à sa doc-trine, il est certain qu'ils obscurcissent et renversent toute la vérité de Dieu. Car nous devons considérer

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135 CONGREGATION . , 1 3 0 que la iustice de Dieu est conioincte à sa vérité, et ne

les faut séparer l'une de l'autre; de sorte que quand nous disons que Dieu a fait une chose, nous devons cognoistre qu'elle est bien faicte et iustement, puis que Dieu l'a voulu faire, et qu'il Va faite.

Au reste que nous advisions bien à entendre ce passage de sainct Paul, qui a esté allégué et très-bien déduit: c'est assavoir, que tous soyent sauvez, et que tous viennent à la cognoissance de la vérité. Si nous le prenons en general de toutes personnes, regardons [page 106] un peu ce qui s'ensuijvroit de là. Car il faut conclurre de deux choses l'une: premièrement, si tous doivent estre sauves, il s'ensuit qu'il n'y en aura aucuns de damnes, comme il a esté dit. Ce qui est directement contre le premier article de nostra foy.

Ainsi, quant à moy, ie consens à ce qui a esté dit cyrdessus, et l'approuve, c'est assavoir, que Dieu a son conseil éternel, par lequel il dispose de toutes ses creatures comme il luy plait, voire le fait iustement, comme tant de fois l'Esprit de Dieu tesmoigne en

• VEscriture saincte.

Graces à Dieu de ce qu'il luy a pieu se servir de son election pour monstrer sa grace en moy, et non point pour se servir de ma condamnation, pour y

monstrer son iuste iugement: ce que toutesfois il eust peu faire sans me faire tort, et n'eust point fallu

murmurer à Vencontre, suyvant l'admonition de sainct Paul, quand il dit: 0 homme/ qui es-tu, qui veux plaider à Vencontre de Dieu? Cependant ie glorifie mon Dieu de ce que ceste doctrine peut estre clairement entendue, quand elle nous a esté [page 107] exposée maintenant si facilement, que mesme ceux qui nous mettent en avant que nous la tenons des hommes, se doivent tenir pour plus que convaincus, quand ils voyent les passages de VEscriture saincte qui ont esté mis en avant; et nous ne saurions nier que ce ne soit Dieu qui a parlé par la bouche des hommes.

F I N .

[page 108] Apres que les Ministres susdits eurent parlé, chacun en son ordre, et comme il est dit cy-dessus, M. lean Calvin admonesta, que s'il y avoit quelqu'un qui eust quelque doute, il la mist en ayant, afin qu'il luy fust respondu, et qu'un chacun fust résolu entièrement de ceste doctrine.

Cela fait, M. Claude Baduel adiousta ce qui s'ensuit :

Combien qu'il ne falle pas que ie parle après tant d'esprits excéllens, par lesquels la doctrine de nostre salut nous a esté remonstrée, maintenant puis que Dieu m'a fait la grace de me retirer de ceste tyrannie de VAntéchrist, en laquelle i'ay esté detenu si

long-temps, et de m'amener icy en ceste saincte compagnie, là où ie- reçoy iournéllement grande consolation, ie [page 109] ne me puis taire que ie ne proteste et face icy confession de ma foy, en laquelle ie veux vivre et mourir.

Et pource que sainct Paul, escrivant à Timothêe, en la seconde epistre, au second chapitre, monstre quelle reigle doivent tenir les fidèles, quand ils sont appelés à la cognoissance de la vérité, quand il dit que le Seigneur cognoist qui sont les siens, et que tout homme qui nomme le Nom du Seigneur, se retire de toutes iniquités; suyvant, di-ie, ceste protestation, ie veux lien monstrer que, moyennant la grace de Dieu, ie me destourneray de toutes mauvaises doctrines, de tous mensonges et faussetés, m!arrestant du tout à la vérité de Dieu, comme il Ta déclarée par son Escriture.

Et ainsi, ie croy en Dieu le Père toutpuissant, qui nous a esleus et choisis devant le commencement du monde, en son Fils, nostre Seigneur Iesus Christ, en qui il nous a promis la vie éternelle, de laquelle nous sommes desiâ en posàession par foy, quand il luy a pieu nous eslargir en son temps .la predication de l'Evangile, [page 110] le croy au Fils qui est son image, lequel a esté envoyé en terre pour preseher-et maintenir sa vérité, de laquelle il a fait, confession devant Pilate, et ne l'a point nié- le croy .au- sainct Esprit, lequel nous rend tesmoignage dans nos cœurs que nous serons du nombre des bien-heureux, au iour clé la resurrection. le croy à la saincte Eglise, voire la présente, à laquelle il a pieu à Dieu me retirer, le priant qu'il luy plaise de m'y entretenir, en sorte que i'y puisse vivre et mourir.

Ainsi, que chacun se conferme de plus en plus en ceste pureté et simplicité de la parole de Dieu, afin que tous ensemble conioints, nous suyvions le che-min que le Seigneur monstre pour parvenir à la vie éternelle, à laquelle il nous appelé et convie, et pour confermer et ratifier nostre élection, nous en rendions un tel tesmoignage, par nostre bonne vie et conversa-tion, que les povres aveugles et idolâtres en puissent estre attires à la cognoissance de vérité, pour se ioin-dre en union de foy avec nous; et que les mesclmns et reprouves, ce«a;[page m ] qui sont obstines et rebel-les du tout, soyent tellement sépares de nous, que nous les tenions comme abominables et excommunies, comme aussi eux mesmes se séparent de l'Eglise de Dieu et de la communion des fidèles: et telle est ma foy.

Finalement, M. lean Calvin a fait la .conclusion, en priant ainsi que s'ensuit:

Or, mes frères, nous avons à remercier Dieu tresaffectueusement, de ce qu'il nous a choisis de-vant que nous le puissions cognoistre. Car nous

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