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123 CONGREGATION 124 tout à luy, comme c'est bien raison: et que ne passant

Et premièrement M. lean Calvin a commencé ainsi qu'il s'ensuit:

123 CONGREGATION 124 tout à luy, comme c'est bien raison: et que ne passant

point outre ce qu'il nous declare par sa parole, nous disions avec David: Seigneur, ie chanteray iugement et miséricorde.

Et ce n'est pas sans cause qu'il conioinct ces deux motz: car ceux [page 73] qui ont cogneu la miséricorde de Dieu en leur election, il est certain qu'ils cognois-sent son iuste iugement en la reprobation des meschans.

Et cela sert pour nous humilier. Que quand nous regardons la miséricorde de Dieu, de laquelle il a usé envers nous, si puis après nous concevons quel est son iugement, nous nous deffions alors de nous-mesmes, pour mettre entièrement nostre confiance en sa bonté.

Quand ces deux choses seront cognues de nous pour en estre bien résolus, .nous serons alors assuietis à nostre Dieu en vraye obéissance.

M. PHILIPPE DE ECCLESIA.

Quant à ceste élection de Dieu, il n'y a céluy qui en puisse iuger aucune chose, sinon ce qui nous a esté révélé par sa parole, qui est certaine. Or nous avons plusieurs passages en VEscriture qui nous en rendent

tesmoignage : et entre autres sentences dignes de memoire, prenons ceUe qui est plus certaine, des [page 7 4] Ephesiens, premier chapitre, où il est fait mention de la cause de

nostre election, quand il est dit que tel a esté le bon plaisir de la volonté de Dieu. Voila quelle est la cause d'icelle: et nous doit suffire, veu que sainct Paul n'amené point d'autre cause que ceste bonne volonté de Dieu: et par cela il veut forclorre tout mérite et toute dignité, et veut monstrer"<que ceste election de Dieu est gratuite et fondée sur sa pure bonté. Mais cependant aussi, il ne faut point (comme il a esté dit), tellement considérer ce bon plaisir de Dieu, que nous le séparions de ce qui s'ensuit en sainct Paul, quand il adiouste: en Iesus Christ. Car Dieu ne nous a point esleus seulement en soy, mais il nous a aimez

en Iesus Christ, et nous accepte en Iesus ' Christ. Et comme il a esté dit, Iesus Christ est le miroir et le patron auquel nous pouvons considérer la cause de

nostre élection: car nous ne pouvons pas cognoistre ne savoir si nous sommes esleus de Dieu ou non, si ce n'est que Iesus Christ, qui est descendu de Dieu son Père [page 75], nous le révèle. Or puis après sainct Paul adiouste la cause finale de l'élection, quand il dit: afin que nous fussions saincts et sans macule devant sa face. Nous avons donc esté esleus selon le bon plaisir de la volonté de Dieu, en Iesus Christ; et notamment il dit: en Iesus Christ; car si nous voulions cercher l'élection hors de Iesus Christ, nous n'en trouverions point; et ceux qui ne sont point en luy, sont reprouves.

Or cependant, il y en a aucuns qui disent: Com-ment saurons nous si nous sommes esleus? Vray est

que ie confesseray bien, que c'est le plaisir de Dieu, quand ie suis esleu en Iesus Christ, sans aucuns mérites. Mais comment pourray-ie cognoistre que ie suis du nombre des esleus de Dieu? le ne suis point clerc: voire encores ie ne pourroye point entrer en ce conseil de Dieu qui m'est caché. Comment donc est-ce que Dieu m'a déclaré que ie suis de ses esleus? Or il est certain que nous ne pourrons pas cognoistre que nous soyons des esleus de Dieu a priori (comme l'on dit) [page 76], c'est à dire, que nous soyons entrez en son conseil pour le savoir; mais a posteriori nous pourrons le comprendre, quand il le nous declare, et

il nous le révèle par Iesus Christ. Comme quand nous voyons du feu, nous ne pouvons cognoistre comment il a chaleur en soy: mais tant y a que nous iugerons bien qu'il est chaut. Aussi quand nous venons à Iesus Christ, ce nous est un certain signe que nous sommes esleus, quand nous appréhendons, par foy, qu'il nous a receus en sa protection et sauvegarde.

Quant au second membre de la predestination, qui est la reprobation, il est certain que si nous voulons faire ceste antithèse de choisir et reprouver, quand il est dit que Dieu nous a choisis par son vouloir, et par le plaisir de sa bonne volonté, voi/re en Iesus Christ, afin, di-ie, que VantitJtese soit bonne, ü faudra consequemment inférer qu'il en a aussi re-prouvez hors de Iesus Christ. Il est vray qu'aucuns

ont voulu (comme les docteurs anciens), quand ils ont parlé de Èeprouver: que de reprouver [page 77] ceux

qui sont meschans, n'est autre chose que de les laisser en leur nature mauvaise: mais tout revient à un. Car quand Dieu ne besongne point aux hommes, et qu'ils demeurent en leur nature mauvaise, ils sont reprouvez de luy. Non pas qu'on puisse inférer par cela que Dieu soit autheur de péché. Il est la regle de toute iustice et droicture: la chose quant à soy demeure tousiours bonne, iuste et droicte; mais ce qu'il en dispose, ainsi que bon luy semble, est d'autant qu'il est maistre sur toutes choses, et qu'il ne nous y faut pas trouver à redire.

Et ainsi ce qui a esté allégué de l'élection et de la reprobation est une doctrine tresveritable, et à laquelle il se faut tenir et arrester du tout.

M. FRANÇOIS BOURGOING.

On se devroit bien contenter de ce qui a esté dit iusques à present. Toutesfois afin que de ma part ie monstre que i'approuve la doctrine qui a esté annoncée, ie diray un mot. Pour ce que ce [page 78] brouillon qui trouble l'Eglise de Dieu, insiste principalement sur ce poind, que nostre election depend de nostre foy, et qu'il renverse icy l'ordre qui a esté mis de Dieu en son Escriture saincte, il nous faut entendre que Dieu nous rend tesmoignage que nous sommes asseuree de

125 SUR L'ELECTION ETERNELLE. 126 nostre election, par la foy qui nous est donnée. Il

faut donc que Velection precede la foy, et que la foy aile après. Et d'amener et alléguer le contraire, c'est envelopper l'esprit des hommes en des erreurs dont ils ne se pourront pas retirer facilement.

Qu'ainsi soit, quelle raison y a-il de dire que nous avons un franc arbitre, par lequel nous avons liberté

•de reietter ce que Dieu nous veut donner, c'est assavoir, la foy, ou bien de la recevoir quand bon nous sem-blera ? Si ainsi estoit, où seroit la certitude et fermeté de nostre salut ? l'alléguerai un passage d'Esaye pour confermer ceste doctrine, c'est assavoir que nous dé-pendons totalement de l'élection de Dieu, et qu'il faut

nécessairement que ceste bonté gratuite de Dieu [page 79] prévienne avant que nous puissions croire, et la foy se rapporte à Iesus Christ, comme à son vray but; et nous n'aurons iamais accès ny adresse à nostre Dieu, sinon que son Fils nous y mené et nous y conduise; cependant il faut que nous sachions première-ment compremière-ment nous venons à Iesus Christ.

Voila que le prophète Esaie dit: Me voici et les enfans que tu m'as donnez. Lequel passage est attribué par l'Apostre {aux Hébrieux, deuxième cha-pitre) à nostre Seigneur Iesus Christ, lequel dit de semblables paroles. Cela est dit expressément de Iesus Christ: Il se présente à Dieu son Père, non seulement comme le chef des docteurs et des ministres de la parole de Dieu, mais aussi comme le Docteur unique, par la bouche duquel tous les docteurs anciens parlent.

Il présente ses esleus, ceux qui luy sont donnez. Il est vray que nous ne pouvons aller iusques à Dieu,, noies n'en pouvons nullement approcher, sinon que Iesus CJirist nous y mené par la main. Si faut-il que nous cognoissions que Dieu donne [page 80] au 'Fils ce qu'il luy amené, et qu'il faut qu'il luy ait

donné ses esleus, devant qu'il les luy présente.

Par cela donc nous cognoissons que quand nous a/oons la foy en Dieu par Iesus Christ, cela vient d'autant qu'il luy a pieu de nous choisir, voire selon son conseil, qui nous est incomprehensible, dedans lequel nous ne devons point présumer d'entrer: seule-ment nous nous devons contenter de ceste foy qu'il nous a donnée, par laquelle il nous rend certain tesmoignage que nous sommes de ses esleus. Mais il nous faut tousiours noter, que le Père donne au Fils ceux qu'il a esleus, et lesquels il ne veut point laisser périr.

Et cela est conformé par le passage qui a esté (dleguê du 6. de sainct lean, oti il est dit: Tout ce que mon Peré m'a donné, viendra à moy. Et ce qui tient à Iesus Christ, il nous faut présupposer qu'il

% est donné de son Père. Aussi ce n'est pas à dire que les hommes ayent ceste liberté d'accepter ou refuser Ta foy selon leur bon plaisir: autrement il faudroit aire que les esleus ne fussent point menez de Dieu [page 81] à salut. Mais au contraire, il faut que nous cognoissions que Dieu a les siens, lesquels il a choisis

de tout temps, et lesquels il baille de main en main à nostre Seigneur Iesus Christ: comme s'il luy disait:

Voicy, ie te donne les miens, et veux que tu sois protecteur de mes esleus. Voila comment nous devons

cognoistre que nous sommes tellement en la main de nostre Seigneur Iesus Christ, que nous luy avons esté donnez de Dieu son Père, à cause qu'il nous'avoit esleus par sa bonté gratuite.

Car autrement, si cela estoit en nostre liberté de recevoir ou reietter la foy, quand elle nous seroit présentée, de'l'accepter de nostre propre vertu, que

seroit-ce? Où seroit le fondement de ceste certitude de la beatitude éternelle que nous devons avoir? Sur quoy seroit fondé nostre salut? Sur la volonté inconstante des hommes! Et quelle asseurance y auroit-il, s'il falloit que l'homme esleust cela à sa fantasie, pour dire: le veux croire! et incontinent après il pourroit placquer là tout! Et bien, prenons le cas, qu'un [page 82] homme ait bonne affection de croire, selon qu'il est inconstant et muable, et que son propos luy changera, le voila diverty, si tost qu'il luy viendra quelque fantasie en l'esprit. Et ne pourroit autrement avenir, ie dy mesme à tous les plus constans et les plus fermes du monde,. voire si nostre foy estoit fondée

sur nostre propre vertu, comme ces mal-heureux l'afferment.

Mais quand nous savons maintenant que nous sommes donnez de la main du Père à son Fils, et qu'il nous prend en sa garde, par le moyen de ceste donation icy: nous voyons sur quoy nostre foy doit estre appuyée, sur quoy elle a prins son fonde-ment, c'est assavoir sur la bonté et miséricorde de Dieu, estans asseurez que ce que le Fils a prins une fois en garde du Père, ne périra iamais; que quand nous serons sous la protection et sauvegarde de nostre Seigneur Iesus Christ, nous serons hors de tous dangers: pour le moins, nous ne serons point frustrez du salut qu'il nous a acquis, et duquel nous entrons desia en possession, par la [page 83] foy que nous avons en luy. Voila en bref ce que ie vouloye adiouster à ce que les frères ont dit, pour confirmer la doctrine qui a esté amenée.

Au reste, ie prie de ma part au nom de Dieu, que nous ne nous laissions point esblouir par la grandeur des hommes, qu'il semble avis qu'ils doivent ravir les simples iusques au ciel par leur hautesse et excellence: car c'est alors qu'ils s'efforcent de renverser la vérité de Dieu. Davantage, quand nous verrons icy leur belle rhétorique, qu'ils auront de gros mots et magnifiques pour emplir les aureilles des ignorans, ne nous laissons point transporter par cela : mais chemi-nons en la crainte et en la vérité de Dieu. Il est vray qu'elle est simple, mais elle a plus de maiesté que toute la pompe et excellence de ces langues bien affilées qui se transportent en paroles vaines, et qui pensent résister à la vérité de Dieu, à laquelle il nous

127 CONGREGATION 128 faut tousiours arrester, et iamais n'en estre destournez,

en sorte quelconque, ne pour quelque chose qui nous en puisse avenir.

M. LOYS TREPPEREAU.

[page 84] Ceste saincte doctrine est si entière et si parfaicte, qu'il n'est plus besoin qu'on y adiouste quelque chose. Mais le principal est que nous en facions nostre profit, qu'elle nous serve d'armures

contre tous blasphémateurs qui nous voudront des-tourner de la vraye doctrine de nostre salut, et de la voye d'icéfte. Et pour comprendre en brief ce que nous en devons cognoistre, sachons que quand il est parlé de l'élection et de la reprobation, que l'élection se fait par grace, et la reprobation se fait par iuste iugement

de Dieu. Car il ne faut point dire que Dieu soit cause de la damnation des meschans, mais c'est le vice qui est en eux. Et mesme, comme il a esté dit, encores que nous fussions tous perdus et abysmez, et que iamais Dieu n'eust pitié de nous, ce seroit un iuste iugement, et n'y auroit occasion en cela sinon de luy donner gloire, confessans qu'il est iuste iuge, puis qu'il punit les meschans pour leurs vices et [page 85] pour

leurs iniquités.

Et quant à ce qu'aucuns disent que Dieu accepte les personnes, en damnant l'un et sauvant l'autre: c'est un moyen que le diable cerche, par lequel il ne de-mande sinon d'obscurcir et renverser la certitude que nous avons de nostre salut. Mais encores quand il est question de monstrer comment Dieu est iuste en tout ce qu'il fait, s'il y avoit similitude qui fust digne d'amener avant, pour nous donner à entendre que la gloire qui appartient à Dieu doit estre coniointe à ses iugemens, il n'y en a point de plus propre, que celle que nous avons en- la iustice des hommes. Regardons, mes frères ; voila un iuge qui condamne un homme â la mort iustement, et le condamne à mourir d'un tel supplice de mort: assavoir si on viendra à murmurer contre un tel iugement? Non, mais au contraire, on louera une telle iustice. 0 loué soit Dieu! dira-on.

Et pourquoy ne louerons-nous pas Dieu quand il re-prouve les meschans? Et toutesfois il ne faut pas dire que Dieu soit cause de leur condamnation [page 86]: mais, comme i'ay dit, que c'est leur vice qui est en eux.

Brief, l'élection de Dieu est gratuitement faite, et la reprobation des meschans est- iustement faite. Et cependant ü ne faut point enquérir pourquoy Dieu fait cela: mais regardons de cheminer en toute humilité et modestie, considerans que c'est que nous avons receu

• de Dieu, pour luy en rendre louange; surtout quand il nous rend tesmoignage de nostre election, et qu'il nous fait participans de sa grace, laquelle il nous a eslargie par Iesus Christ. Et quand nous l'aurons

une fois goustée, nous suivions sa doctrine, car eUe nous est annoncée par luy, et que nous persévérions en icélle i/usques à la fin, nonobstant tous les empes-chemens qui pourroyent advenir pour nous en des-tourner. Gomme ie prie à ce bon Dieu qu'il nous en face la grace d'y vivre et d'y mourir.

M. REMOND CHAUVET.

Mes frères, ie ren graces à Dieu des gram thresors qu'il nous desploye [page 87] en ceste doctrine pleine de consolation. Vray est que combien que ceste doctrine soit telle que ie viens de dire, riche et pleine de consolation, si est-ce que ce n'est pas (quand on en viendra à disputer), qu'il n'y ait du dangier et de la difficulté. Mais aussi on ne pourroit passer le lac, ou entrer dedans la mer pour faire quelque bonne traffique, sans grande difficulté, et qu'il n'y ait des dangiers beaucoup. Geluy qui voudroit passer par la mer, ou par le lac, sans batteau et sans conduicte, it se mettroit en des gouffres, il se pourroit précipiter el ruiner. Mais s'il y entre avec une navire, et avec une bonne conduite, ce luy sera une ioyeuse navigation, et delectable, voire et qui luy portera grand profit. Ainsi quand nous voudrons traitter de la predestination de Dieu, en ce qu'il a esleu les siens, et qu'il a réprouvé les meschans et iniques, il nous y faut entrer par la navigation qui a esté proposée par le frère proposant et par ceux qui ont confermé la doctrine: c'est as-savoir, que nous cognoissions en general que [page 88]

nous sommes tous perdus et damnez. Mais si nous, voyons que Dieu nous ait fait la grace de nous Mu miner et de nous appeler à la cognoissance de so vérité, par laquelle nous cognoissions et soyons certains et asseures que nous sommes sesenfans, d'autant qu'il nous a prédestinez devant la creation du monde: nous avons la matière et occasion de glorifier Dieu, et d(

l'avoir en admiration de ce qu'il desploye ainsi sa grace et sa miséricorde sur nous, qui sommes si povres et si miserables creatures.

Si nous voyons d'autrepart que Dieu en réprouve aucuns, nous avons occasion et matière de cognoistrt son iuste iugement, qu'il ne fait rien sans iuste raison combien qu'elle nous soit cachée. Que sur cela nous venions où sainct Paul nous amené, assavoir, à cestt admiration des secrets et iugemens de Dieu incom prehensibles, pour dire avec luy: 0 hautesse, o

pro-fondeur et richesse de la patience- de Dieu ! Combien sont incompréhensibles tes iugemens! (Rom.. 11, 33.]

le veux adiouster un mot, pour ce qu'il y a auiourd'huy [page 89] des chiens qui abbayent &

circuissent çà et là, cerchans s'ils pourront trouver à mordre, et disent: 0! ü ne faut point croire aun hommes, mais à Dieu. Et mal-heureux, qui est-ce qui dit le contraire? Mais quand les hommes parleropi

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