• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 4 : GENERATION D’UN GRADIENT LINEAIRE DE CONCENTRATION

3.1 Conditions opératoires et choix du médiateur

Pour cette expérience, il est nécessaire de disposer d’une espèce réagissant à la fois électrochimiquement et ayant des propriétés de fluorescence. Les espèces possédant ces deux

propriétés sont utilisées la plupart du temps en biologie sous forme de protéines marquées [176-179], mais aussi parfois comme sondes physiques pour suivre les variations de concentration en dynamique [118,180-191]. Dans ces deux cas, les médiateurs utilisés sont délicats à mettre en œuvre car ils nécessitent des précautions d’emploi du fait de leur faible stabilité et de leur sensibilité à l’oxygène. Ainsi, ces approches, bien qu’envisageables, mettraient en œuvre des moyens trop importants compte tenu des objectifs de notre étude.

Nous choisissons donc une méthode de suivi indirect de la concentration en espèce produite à l’électrode, basée sur la microscopie de fluorescence. Celle-ci repose sur le suivi de la variation de la concentration en proton créée indirectement dans le milieu lors de la réduction de benzoquinone (notée , Figure 4.16A) en hydroquinone (notée , Figure 4.16B), en présence de fluorescéine non électroactive (notée / , Figure 4.17).

Figure 4.16 : (A) Formule chimique de la benzoquinone. (B) Formule chimique de l’hydroquinone.

Le gradient de concentration en électrogénéré à l’électrode induit un gradient de concentration en proton en aval de l’électrode. La caractérisation de ce gradient de concentration en proton est effectuée indirectement par mesure locale de fluorescence à l’aide d’un microscope confocal. Cette caractérisation est basée sur le fait que l’absorption et la fluorescence de la fluorescéine en solution aqueuse sont fortement dépendantes du . Le système benzoquinone/fluorescéine est fréquemment utilisé dans la littérature [176-178,191,192]. Nous nous appuyons sur ces travaux pour déterminer des conditions expérimentales adéquates. Nous choisissons les concentrations initiales suivantes :

[ ] , [ ] , [ ] , le chlorure de potassium servant d’électrolyte support. Le initial est ajusté à .

Le coefficient de diffusion de la benzoquinone, nécessaire pour effectuer les conversions entre grandeurs dimensionnées et adimensionnées est issu de la littérature [193] : .

La réaction de réduction de la benzoquinone intervenant à l’électrode est consommatrice de protons, telle que :

(4.14) Il est par ailleurs important de noter que la solution n’ayant pas été dégazée, le dioxygène dissous dans la solution est lui aussi réduit suivant :

(4.15)

Nous n’avons pas cherché à éviter cette réaction, parallèle à la réduction de la benzoquinone. En effet, elle participe elle aussi à l’augmentation du , avec un rapport entre le nombre d’électrons échangés et le nombre de protons consommés égal à 1, tout comme la réaction (4.14). Il y a environ de dioxygène dissous dans un litre d’eau, ce qui correspond à une concentration de environ. Nous avons ainsi une concentration en dioxygène d’un ordre de grandeur inférieure à celle de la benzoquinone, et l’augmentation du due la présence du dioxygène sera donc minoritaire.

Lors de la réduction de la benzoquinone, le augmente. Ce changement local de induit un changement de protonation de la fluorescéine, passant de la forme à ( ). Or, la forme a une bande d’absorption à et une intensité de fluorescence à bien plus intenses que celles de [194]. Cette propriété de la fluorescéine permet de caractériser le gradient de concentration de proton créé localement. Ainsi, la solution est excitée à une longueur d’onde de , et l’intensité de fluorescence sera mesurée à . L’expression de l’intensité de fluorescence s’exprime donc :

(4.16) La concentration en fluorescéine étant faible, la loi de Beer-Lambert peut s’appliquer. En l’introduisant dans (4.16), l’expression de l’intensité de fluorescence devient :

[ ] [ ] (4.17) avec une constante de proportionnalité, l’intensité de la lumière incidente, et les

rendements quantiques de fluorescence de et de , et les absorptivités

molaires des espèces et à la longueur d’onde d’excitation , la longueur du trajet optique et [ ] et [ ] les concentrations en espèces fluorescentes.

Les termes , et n’étant dépendant que de la géométrie du système, ils sont identiques pour les deux espèces. Il est alors possible de factoriser l’équation (4.17) par le produit :

[ ] [ ] (4.18) En introduisant des valeurs numériques issues de la référence bibliographique [194], c’est à dire , , et , l’équation (4.18) peut s’écrire :

[ ] [ ] (4.19) En considérant les coefficients de diffusion des formes et identiques, la conservation de la matière donne [ ] [ ] à tout instant, ce qui permet d’écrire :

( [ ] [ ] ) (4.20) soit :

[ ] (4.21) L’intensité de fluorescence est donc une fonction affine de la concentration de l’espèce .

Figure 4.17 : Les différentes formes acido-basiques de la fluorescéine [195], avec les pKa des équilibres acido-basiques donnés dans une solution aqueuse contenant du à [194].

Par ailleurs, l’équilibre acido basique existant entre la forme mono-anionique et di-anionique de la fluorescéine est :

(4.22) de constante d’acidité , définie comme suit, en considérant que les coefficients d’activité de et sont égaux à 1 :

[ ][ ]

[ ] (4.23) avec la concentration standard. La conservation de la matière et l’équation (4.23) permettent d’exprimer [ ], telle que :

[ ] [ [ ] ] (4.24) Le étant initialement fixé à , les conditions expérimentales se situent dans une gamme telles que [ ] permettant de négliger [ ] devant .

Le tracé correspondant à l’équation (4.24) est porté sur la Figure 4.18, tout comme son ajustement paramétrique par une fonction affine d’équation :

[ ] [ ] (4.25)

Figure 4.18 : Tracés de [ ] en fonction de [ ]. Les symboles bleus correspondent à

l’équation (4.24) avec . La ligne continue noire correspond à un ajustement

paramétrique de ces points suivant une fonction affine d’équation (4.25). La gamme de concentration en proton correspond aux cas . .

Sur ce tracé, il est intéressant de noter que le coefficient de corrélation linéaire de la courbe correspondant à l’équation (4.24) vaut , ce qui permet de considérer que [ ] est une fonction affine de [ ] dans les conditions expérimentales utilisées.

Ainsi, en combinant les équations (4.21) et (4.25) nous obtenons :

[ ] (4.26) L’équation (4.26) nous permet de considérer que l’intensité de fluorescence à , due à la présence de , est une fonction affine de la concentration en proton dans le milieu. Ainsi le suivi de cette intensité de fluorescence par des mesures locales de microscopie confocale va nous permettre de suivre le gradient de concentration de proton induit par le