Il est maintenant venu le temps de tirer des leçons de tout ce qui a été dit. Nous remarquons tout d'abord que la question de l'universalité des droits de l'Homme est loin d'être réglée et qu'elle risque d'être le sujet de nombreux débats futurs.
De plus, l'on observe que pour être efficaces (ou effectifs), les droit de l'Homme ne doivent pas être élevés au rang de principe moral « idéal ». Cette conception impliquerait une impossibilité de les réaliser. Ils doivent plutôt se situer au niveau concret, « vulgaire » de la règle de droit dont le respect est essentiel au bon fonctionnement de tout ordre juridique.
L'on a ensuite vu que la fondation transcendantale des droits de l'Homme est sujette à controverse, difficile à fonder de façon irréfutable. C'est d'ailleurs pourquoi certains auteurs (Haarscher, Osiatynski) privilégient une approche plus réaliste qui ne fonde pas objectivement les droits de l'Homme, mais cherche plutôt un fondement
« pratique » qui n'est pas forcément fondé philosophiquement ou culturellement.
Cette approche pratique mène à prendre en compte les rapports de forces politiques dans le débat des droits de l'Homme. En effet, le rapport gouverné-gouvernant joue un rôle essentiel dans le débat (notamment chez Haarscher). C'est aux gouvernés de peser dans la balance politique forcer les gouvernants au respect de leurs droits, non pas parce qu'ils sont issus d'un principe humain ou naturel, mais parce que le peuple exige un certain respect de la part des gouvernants en « jouant le jeu » politique.
Et c'est certainement maintenant qu'arrive la plus grande leçon à tirer de ce travail.
Pour qu'un peuple pèse dans la balance politique, il faut qu'il ait été « éduqué ». En effet, c'est par l'éducation (républicaine pour Haarscher) que les individus apprennent leurs droits, mais aussi leurs devoirs. Et ces devoirs comprennent notamment celui de participer à la vie politique. Aucun gouvernant ne concédera de droits à des gouvernés qui ne demandent ou n'exigent rien.
Une dernière leçon à tirer de ce travail réside dans l'idée que les droits de l'Homme ne sont pas un « produit fini ». Il est important de garder l'esprit ouvert et de penser les droits de l'Homme comme étant sujets à modifications. Et dans une perspective universaliste, l'idée que cette idée puisse apprendre et s'améliorer de par le contact d'autres cultures mérite que l'on s'y intéresse.
Pour conclure ce travail, soulignons ce qui semble être les deux plus grandes leçons que l'on peut tirer de ce travail. D'une part, il faut (re)mettre l'accent sur le rôle de l'éducation dans une universalisation future des droits de l'Homme. Cette idée implique que les droits de l'Homme ne sont pas une idée (ou un principe) que l'on impose de l'extérieur, mais bien une prérogative populaire qu'il appartient à chaque peuple de faire respecter. C'est pourquoi il est important « d'éduquer » chaque gouverné, non pas à l'idée des droits de l'Homme en tant que valeur, mais au fonctionnement politique de l'Etat dans lequel il vit, des moyens dont il dispose pour se faire entendre, etc. En bref, il s'agirait d'octroyer une « éducation » républicaine ou citoyenne à chaque individu pour qu'il puisse agir au mieux pour faire respecter ce qu'il considère être ses droits.
D'autre part, il est important de souligner l'aspect inachevé des droits de l'Homme.
En effet, l'idée de droits de l'Homme issus d'un dialogue interculturel prend tout son sens dans la perspective universaliste. Pour que ces droits soient considérés comme universels par toute la communauté internationale, il semble logique qu'ils soient adaptés à un monde multiculturel et qu'ils évoluent par le contact des différentes cultures. L'universalité future des droits de l'Homme se trouve peut-être dans ce que l'on appelle aujourd'hui le relativisme.
« J'atteste que dans ce texte toute affirmation qui n'est pas le fruit de ma réflexion personnelle est attribuée à sa source et que tout
passage recopié d'une autre source est en outre placé entre
guillemets. »
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