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Conclusion sur la complémentarité de simulations de l’écoulement et de problèmes

Figure 4.18 – Comparaison des estimations du flux de chaleur convecto-diffusif au point d’arrêt de la navette Columbia au cours de la mission STS-2 pour différentes hypothèses de catalycité

Plusieurs éléments sont à observer sur la figure4.18. Premièrement la courbe en noir de la NASA correspond à la courbe en rouge foncé de la figure 4.16. Les simulations CASL avec une vitesse de recombinaison de l’oxygène fixe et inférieure à celle du modèle de Scott extrapolé permettent d’obtenir des estimations plus proches de celles de Shinn et al.. Les écarts les plus importants par rapport à l’estimation de la NASA sont à 540 s, avec un écart de 17 kW.m−2 (6 %par rapport à l’estimation de la NASA au même point de vol) pour le caskO= 3m.s−1et un écart de 29kW.m−2 (10% par rapport à l’estimation de la NASA au même point de vol) pour le cas kO = 4 m.s−1. Les tendances suivies par les estimations de CASL sont similaires à celles de la NASA, avec des courbes en cloche. Les températures obtenues lors de ces deux nouvelles estimations sont inférieures à 1670K, ce qui n’implique aucune extrapolation du modèle de Scott pour la recombinaison de l’azote N vers des valeurs plus élevées que celles du domaine de validation. Étant donné que ces estimations ne sont pas issues du même code et que les écarts sont inférieurs à 10 % du flux de chaleur maximal estimé par Shinn et al., il peut être conclu que les deux estimations CASL sont de bonnes reconstructions des résultats de la NASA. Par ailleurs, ces résultats montrent que Shinn et al. ont dû imposer localement une catalycité différente pour la zone couverte de RCC.

4.3.3 Bilan de l’estimation du flux de chaleur par le code Navier-Stokes CASL Les résultats de la partie 4.3.2 montrent la bonne capacité du code CASL à reconstruire les estimations de la NASA pour la rentrée atmosphérique de la navette spatiale Columbia lors de la mission STS-2. Cependant il faut prendre en compte que des hypothèses manquantes ont dû être posées et que les estimations par CASL reposent sur celles-ci. Ces hypothèses complémentaires ont été posées en s’appuyant sur des études portant sur d’autres missions STS.

4.4 Conclusion sur la complémentarité de simulations de l’écoule-ment et de problèmes inverses pour l’étude des échauffel’écoule-ments pariétaux au cours d’une rentrée atmosphérique

Afin de conclure ce chapitre il est nécessaire de revenir à la figure introductive 4.1 (page73).

L’objectif de ce chapitre était de montrer la complémentarité des résultats obtenus par méthode inverse et par simulations de l’écoulement pour l’étude du flux de chaleur convecto-diffusif. Cette

méthode intervient dans le contexte des échauffements pariétaux pendant une rentrée atmosphé-rique depuis l’orbite basse terrestre. Pour ce faire ce chapitre s’est appuyé sur les données de la littérature sur la mission STS-2 de la navette spatiale américaine Columbia. La première partie4.2 était concentrée sur les estimations par méthode inverse avec l’outil THIDES. Cette étape était basée sur l’étude d’un thermocouple dans les tuiles HRSI des protections thermiques de l’intrados de la navette. La deuxième partie4.3était axée sur l’approche par simulations de l’écoulement avec l’utilisation du code CASL pour des estimations Navier-Stokes 1D le long de la ligne d’arrêt. Bien que les estimations par méthode inverse et celles par CASL n’aient pas eu lieu exactement au même endroit de la navette, ces dernières ont pu être reliées par les estimations 2D de Shinn et al. [3].

L’emploi des travaux de Shinn et al. de la NASA est justifiée par leur pertinence lors de l’étude des tuiles HRSI.

La comparaison des deux approches montrent des résultats relativement proches et ouvrent la voie à des discussions sur les hypothèses à employer pour l’estimation du flux de chaleur convecto-diffusif au cours d’une rentrée atmosphérique depuis une orbite basse terrestre. Pour aller plus loin, ce travail permet d’approfondir et de mieux comprendre les mesures de vol en leur confrontant des scénarios de mécanismes physico-chimiques dans la couche de choc. L’objectif de ce chapitre étant axé sur la méthode, il n’y a pas eu d’analyses détaillées de l’écoulement et de ses phénomènes physico-chimiques. Ce type d’analyses est proposé dans le chapitre 8 lors d’une application à la rentrée atmosphérique de la navette européenne IXV.

Ce chapitre fait la transition entre les synthèses bibliographiques et les parties sur la démarche scientifique. La méthode globale, basée sur une comparaison des résultats obtenus par méthode inverse et par simulations de l’écoulement, a pu être pleinement présentée et testée au cours de cette application à la mission STS-2 de la navette Columbia. Le test a montré que les outils prévus pour cette étude étaient bien adaptés pour l’analyse du flux de chaleur convecto-diffusif au cours de la rentrée atmosphérique d’un véhicule depuis une orbite basse terrestre. La suite de ces travaux consiste en une étude des échauffements pariétaux au cours de la rentrée atmosphérique de la navette autonome européenne IXV. Contrairement à ce qui pourrait être attendu au premier abord, les parties suivantes ne sont pas une simple recopie du présent chapitre avec des paramètres différents. Avant de rentrer dans la phase des calculs il y a une longue période de discussion autour des hypothèses à poser. Pourquoi une approche 1D, 2D ou 3D ? Quels sont les phénomènes négligeables et non négligeables ? Quelles sont les incertitudes des données ?... Cette discussion n’apparaît pas dans ce chapitre car elle a déjà été menée par les ingénieurs de la NASA. Savoir organiser et diriger cette discussion est le challenge des chapitres à venir pour assurer une bonne analyse des flux de chaleur convecto-diffusifs à la paroi de l’IXV. Cela est d’autant plus difficile que l’IXV est l’unique démonstrateur de navette spatiale européenne ayant volé. Contrairement à la NASA qui pouvait prendre du recul en s’appuyant sur les données de plusieurs vols, cette étude ne peut s’appuyer que sur les données d’une unique rentrée atmosphérique.

Afin d’anticiper les discussions sur les hypothèses à employer pour l’étude des échauffements pariétaux, le prochain chapitre détaille la mission de l’IXV, ses protections thermiques, ses gouvernes et ses mesures de température. Ces données serviront aussi bien pour la mise en place des calculs que pour commenter les résultats obtenus.

Chapitre 5

Présentation des mesures de température embarquées et des protections thermiques à l’intrados de la navette spatiale IXV, en vue d’une étude de sa rentrée atmosphérique

Sommaire

5.1 Description générale de l’IXV et de sa mission. . . . 96 5.1.1 Contexte et enjeux de la mission . . . . 96 5.1.2 Positionnement de la thèse pour l’étude des flux de chaleur sur les parties

intrados de l’IXV . . . . 98 5.2 Description de l’intrados de l’IXV . . . . 100 5.2.1 Protections thermiques du nez de l’IXV . . . . 101 5.2.2 Protections thermiques de l’intrados du corps de l’IXV. . . . 101 5.2.3 Structure des gouvernes de l’IXV . . . . 102 5.3 Composite à matrice céramiqueC/SiC . . . . 103 5.3.1 Catalycité du C/SiC. . . . 104 5.3.2 Oxydations passive et active duC/SiC . . . . 105 5.3.3 Émissivité duC/SiC . . . . 109 5.4 Mesures de température par thermocouples . . . . 110 5.4.1 Fonctionnement d’un thermocouple. . . . 110 5.4.2 Mesures de température par thermocouples de la surface intrados de l’IXV 111 5.5 Mesures de température par thermographie infrarouge . . . . 113 5.5.1 Fonctionnement de la thermographie infrarouge . . . . 113 5.5.2 Mesures de température par thermographie infrarouge de la surface

extra-dos de la gouverne gauche de l’IXV. . . . 115

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Les chapitres précédents ont présenté une méthode pour l’étude des échauffements pariétaux pendant une rentrée atmosphérique depuis l’orbite basse terrestre, basée sur une comparaison entre une approche par simulations de l’écoulement et une approche par la résolution de pro-blèmes inverses de conduction de la chaleur. Une application à la rentrée atmosphérique de la navette spatiale américaine Columbia pendant la mission STS-2 a montré que la méthode et ses outils étaient bien adaptés aux présents travaux. L’objectif de ce nouveau chapitre est de présenter la navette automatique européenne IXV en vue d’une application avec la méthode présentée précédemment pour l’étude des flux de chaleur à sa surface intrados. Ce chapitre introduit tout d’abord l’IXV et sa mission afin de poser le contexte de sa rentrée atmosphé-rique. Les protections thermiques de l’intrados de l’IXV sont ensuite détaillées, car pendant le vol c’étaient les parties les plus exposées aux flux de chaleur dus à l’écoulement hypersonique.

Les matériaux composites à la surface des protections thermiques et des gouvernes font l’objet d’une partie à part afin de présenter leurs propriétés liées aux interactions gaz-paroi. Dans un dernier temps, ce chapitre décrit les installations embarquées pour les mesures de température par thermocouples et par thermographie infrarouge pendant le vol. Les mesures de température et les propriétés thermiques des protections thermiques serviront dans les chapitres suivants pour l’étude des flux de chaleur par méthode inverse et par simulations de l’écoulement. L’em-ploi en parallèle de ces deux approches pour l’étude des flux de chaleur à l’intrados d’une navette pendant sa rentrée atmosphérique depuis l’orbite basse terrestre est inédit en Europe.

5.1 Description générale de l’IXV et de sa mission

5.1.1 Contexte et enjeux de la mission

Figure 5.1 – Dimensions de l’Intermediate eXperimental Vehicle [99]

L’Intermediate eXperimental Vehicle (IXV), visible sur la figure 5.1, est un véhicule de rentrée atmosphérique de type corps portant de 5,058 m de long, 2,237 m de large, 1,540 m de haut et pesant près de 1850kg. L’IXV a été lancé depuis le Centre Spatial de Kourou (CNES/ESA), en Guyane, le 11 février 2015. Il est monté jusqu’à 412 km d’altitude (altitude proche de celle de la Station Spatiale Internationale) pour ensuite retourner sur Terre en suivant une trajectoire

5.1. Description générale de l’IXV et de sa mission 97 suborbitale. La trajectoire de l’IXV est présentée dans la figure 5.2, avec en vert foncé l’ascension de l’IXV à l’aide d’un lanceur européen Vega, en bleu la phase balistique, en rouge les phases hypersonique et supersonique de la rentrée atmosphérique (de 120 km à 25 km d’altitude) et en vert clair la fin du vol, allant de l’ouverture des parachutes jusqu’à l’amerrissage. Les véhicules de rentrée atmosphérique de type corps portant (navette spatiale américaine, navette Bourane, X37-B, IXV, RLV-TD) se distinguent des véhicules de type capsule (capsules Vostok, Mercury, Gemini, Soyouz, Apollo, ARD, Shenzhou, Dragon, Orion, Dragon V2, CST-100) par leur capacité à générer de la portance, permettant un pilotage précis de la trajectoire de rentrée.

Figure5.2 – Trajectoire autour de la Terre (échelle altitude×10) et principales phases de vol de l’IXV, d’après di Martucci Scarfizzi et al. [100]

La mission de l’IXV était un vol non habité et piloté par un ordinateur de bord. Sa forme émous-sée compoémous-sée de variations de section très douces et le moins d’arêtes possible est caractéristique des véhicules de rentrée atmosphérique. L’objectif de sa mission était de recréer les conditions d’une rentrée atmosphérique depuis une orbite basse terrestre (altitude inférieure à 2000 km) et de ras-sembler des données sur les principaux phénomènes physico-chimiques rencontrés. Pour cela l’IXV a été instrumenté de systèmes de mesure [101] permettant la réalisation de plusieurs expériences : estimation des flux de chaleur, vérification de la tenue thermique et de la tenue mécanique des protections thermiques, transition de la couche limite laminaire-turbulente, catalycité de la paroi, pilotage... Ces données doivent permettre une meilleure compréhension des mécanismes physico-chimiques dans une couche de choc hypersonique pour aboutir à une amélioration des outils pour la préparation des prochaines missions de rentrée atmosphérique.

Les expériences sur la rentrée atmosphérique de l’IXV ont commencé à 120 kmd’altitude, soit 3900saprès son décollage. L’altitude de 120 kmest souvent utilisée dans la littérature [13][15][16]

pour marquer le début d’une rentrée atmosphérique terrestre. D’un point de vue aérodynamique cela se confirme pour l’IXV, car ses interactions avec l’atmosphère terrestre ont débuté entre 110km et 120km d’altitude (valeurs trouvées en calculant l’altitude à partir de laquelle les forces

aérody-namiques exercées sur l’IXV n’étaient plus négligeables par rapport à l’attraction terrestre). Cette altitude de rentrée est aussi confirmée par les mesures de température dans les protections ther-miques, car une augmentation significative de la température a été détectée peu de temps après avoir passé cette altitude.

La trajectoire de l’IXV est présentée par les figures 5.3 et 5.4 qui montrent respectivement l’altitude de l’IXV en fonction de sa vitesse, puis sa vitesse et son altitude en fonction du temps depuis son décollage. Le contrôle de la trajectoire a été réalisé grâce aux deux gouvernes et aux quatre propulseurs de repositionnement. La partie la plus critique de la rentrée atmosphérique a eu lieu entre 75km et 60 km d’altitude car l’échauffement pariétal y était maximal. Afin de pouvoir nommer les points de vol de l’IXV, la convention suivante est suivie tout au long de ce document : les points de vol de l’IXV sont nommés en fonction de leur date (en seconde) par rapport à la date de décollage du lanceur Vega qui transportait l’IXV. Par exemple, le point de vol « 4400s» définit le point de vol 4400 secondes après le décollage du lanceur Vega qui transportait l’IXV.

Figure 5.3 –Altitude de l’IXV au cours de sa rentrée atmosphérique, en fonction de sa vitesse, d’après Lambert et al. [102] et Fumo et al. [103]

5.1.2 Positionnement de la thèse pour l’étude des flux de chaleur sur les parties intrados de l’IXV

L’IXV peut être découpé en deux parties : l’intrados où se situe la surpression de l’écoulement et l’extrados où se situe la dépression. La figure5.5montre la surface intrados, la surface extrados et l’incidence de l’IXV. L’incidence de l’IXV a été maintenue entre 43 et 50 pendant la phase hypersonique de sa rentrée atmosphérique afin que les protections thermiques de l’intrados (recon-naissables à leur couleur noire sur la figure5.5) puissent jouer leur rôle de bouclier thermique. La tenue thermique du véhicule est l’un des points critiques lors de la préparation d’une mission de rentrée atmosphérique. En effet, l’écoulement juste en aval du choc peut atteindre des températures

5.1. Description générale de l’IXV et de sa mission 99

Figure 5.4 – Altitude et vitesse de l’IXV au cours de sa rentrée atmosphérique, en fonction du temps, d’après Lambert et al. [102] et Fumo et al. [103]

Figure 5.5 – Surfaces intrados et extrados de l’IXV, d’après la photo de M. Pedoussaut pour l’ESA [9]

supérieures à 6000K [16] et la température à la surface des protections thermiques peut dépasser les 1300K. Dans ces conditions le choix des matériaux à la surface est primordial. Un triste exemple de cette problématique est la rentrée atmosphérique de la navette spatiale américaine Columbia le 1er février 2003, où un trou dans les protections thermiques a engendré la destruction complète de la navette ainsi que le décès de 7 astronautes.

L’une des missions de l’IXV était de valider la tenue thermique de ses gouvernes et des pro-tections thermiques de son intrados au cours de sa rentrée atmosphérique. Afin de remplir cet objectif, des mesures de température ont été réalisées à la surface de ses gouvernes et à l’intérieur

de ses protections thermiques. L’un des buts de la présente étude est l’estimation du flux de cha-leur échangé entre l’écoulement hypersonique et l’intrados de l’IXV. Pour cela deux approches ont été employées, l’une par méthode inverse à partir des mesures de température et l’autre par des simulations de l’écoulement à partir de la trajectoire de vol. En reprenant la définition des flux de chaleur à la paroi de la partie2.5 (page40), le flux de chaleur à estimer contient uniquement les contributions des phénomènes de convection et de diffusion, et peut être qualifié de flux de chaleur convecto-diffusif. Cette hypothèse étant posée, l’objectif de cette partie de l’étude peut être refor-mulée comme une estimation par méthode inverse et par des simulations de l’écoulement du flux de chaleur convecto-diffusif à l’intrados de l’IXV. Par rapport à la mission de l’IXV, les présents travaux se positionnent comme une analyse des mesures de vol afin d’approfondir la compréhension des échauffements pariétaux à l’intrados dus à l’écoulement hypersonique de rentrée atmosphérique.