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2 Cadre théorique

2.3 Le concept de l’autonomisation économique des femmes et son importance

Avant toute chose, signalons que le cas spécifique de l’autonomisation des femmes rurales au Mali est très peu documenté à cause de la rareté des études dans le domaine et concernant le pays. Néanmoins, les recherches réalisées à travers le monde et les résultats des échanges que nous avons eus à faire lors du stage du DESS/DRI en été 2016 considéré comme une phase exploratoire à cette recherche, ont permis de mieux élaborer cette partie consacrée au concept de l’autonomisation économique des femmes.

Dans la littérature, plusieurs définitions existent pour le concept de l’autonomisation économique des femmes. La majorité de ces définitions montrent que « l’autonomisation économique combine le concept du renforcement du pouvoir et celui de l’avancement économique » (Affaires étrangères, commerce et développement Canada, 2013, p. 2). Dans cette recherche, il n’a pas été nécessaire de faire la liste de ces définitions, et pour nos réflexions et nos analyses deux définitions ont retenu notre attention. D’abord, mentionnons celle de Golla, Malhotra, Nanda, et Mehra (2011) pour lesquelles, l’autonomisation économique des femmes est à la fois leur capacité de réussir et de progresser économiquement. C’est aussi pour les femmes le pouvoir de créer et d’agir sur les décisions économiques (Golla et al., 2011, p. 4). Il est donc question de gain et de succès économique pour les femmes. Ce qui nécessite un contrôle des femmes sur les revenus qui proviennent de leurs activités de même que sur les ressources qu’elles utilisent pour ces

activités14. La définition d’Eyben, Kabeer et Cornwall (2008) est également importante, car elle complète la

compréhension du concept que nous retenons de la première. Avec ces auteures, « l’autonomisation économique est la capacité des hommes et des femmes pauvres à participer, à contribuer et à bénéficier du processus de croissance dans des conditions qui reconnaissent la valeur de leurs contributions, qui respectent leur dignité et qui leurs permettent de négocier une répartition plus équitable des avantages de la croissance15 » (Eyben et al., 2008, p. 9). Cette définition met l’accent sur l’importance de la participation de

façon égalitaire, des femmes et des hommes au processus de développement. L’autonomisation économique concerne donc les populations qui ont des revenus faibles, ou dépourvues de revenus afin de réduire les inégalités engendrées par la croissance. Dans leur ouvrage, ces auteures mettent l’accent sur l’accès à la terre de ces populations pauvres, leur sécurité sociale de même que leur accès à un emploi décent. Pour cela, le processus doit favoriser la possession de revenus conséquents qui faciliterait l’accès à ces ressources. Les auteures ajoutent la forte organisation des couches pauvres pour mieux prendre en compte leurs besoins et leurs intérêts dans le processus de croissance. Donc avec cette définition, nous constatons que l’autonomisation économique des femmes est un processus qui considère les femmes ou les populations pauvres comme une composante importante du processus de croissance et ayant des droits et des devoirs au même titre que les détenteurs des capitaux. La satisfaction de leurs besoins en formation et leur insertion dans les marchés devient nécessaire pour ce faire.

L’organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE), dans son document de réflexion sur le sujet, affirme que l’égalité entre les hommes et les femmes passe forcément par une « croissance pro- pauvres » (OCDE, 2011, p. 11). Le processus d’autonomisation économique des femmes devient donc un « atout pour l’économie » lorsqu’on envisage le développement durable favorable à une participation des couches pauvres d’une population. Il permet également de réduire les écarts entre les hommes et les hommes, cependant pour une réussite du processus d’autonomisation économique des femmes il est impératif d’atteindre celles qui ne sont pas alphabétisées et qui ne jouissent pas de leurs droits (OCDE, 2011). Pour Kabeer (2012), dans un pays, la pauvreté des femmes ne favorise pas le développement de celui-ci, car elles constituent, la couche la plus importante et leur participation est plus qu’indispensable à la réussite du processus. Leur accès à des emplois et à une formation fait reculer la pauvreté avec des avantages sur le capital humain selon l’auteure. Dans les communautés où le patriarcat est la formule de base, les règles de l’éducation et de vie se transmettent de génération en génération comme c’est le cas au Mali et les inégalités se perpétuent de sorte que si une couche est pauvre elle continue de l’être pendant plusieurs générations sauf s’il y’a une large prise de conscience dans la communauté. Pourtant, il y a un relatif consensus dans les

14 Traduction libre. 15 Traduction libre.

organisations internationales pour considérer que l’accroissement des revenus des femmes et de leur contrôle sur les dépenses familiales a des répercussions positives sur des secteurs comme la santé, l’éducation des enfants, la nutrition favorisant de la sorte la rupture du cycle de la pauvreté entre les générations (Affaires étrangères, commerce et développement Canada, 2013). L’autonomisation économique des femmes devient donc un facteur de réduction de la pauvreté et des inégalités nécessaire pour un développement durable et inclusif. Or, dans les pays en développement comme c’est le cas pour cette étude, les programmes d’ajustements structurels (PAS) ont conduit les gouvernements de ces États à supprimer ou à réduire les appuis dans certains secteurs tels que la santé, l’éducation, les infrastructures sociales entre autres (Hilal, 2008). Pour l’agriculture, ces restrictions budgétaires ont eu pour conséquence le développement des productions commerciales à grande échelle pour l’exportation, avec une domination des terres productives par les hommes laissant les femmes avec des petites surfaces à faible valeur agricole (Hilal, 2008).

Pour Soladie (2010, p. 41), la réussite économique est un facteur important pour l’empowerment des femmes et « l’empowerment économique individuel correspond au fait que les femmes contrôlent elles-mêmes leur revenu issu de leurs micro-entreprises ». Il ne s’agit pas seulement pour les femmes d’être capable de faire des activités qui leur procurent de l’argent, mais il faut qu’elles arrivent à gérer ce revenu de façon autonome et qu’elles parviennent à changer leur situation de la manière qui leur convient. Pour les institutions internationales, promouvoir l’autonomisation économique des femmes favoriserait l’acquisition de nombreuses capacités par celles-ci, ce qui entrainerait le développement des divers pouvoirs de l’empowerment. Thèse à laquelle adhèrent l’État malien et ses partenaires d’où la concentration des efforts dans le domaine. Cependant, en milieu rural malien, elles sont les plus actives et les plus chargées, pas par les tâches ménagères seulement, mais par la charge économique liée aux différentes responsabilités qu’elles ont vis-à- vis de leurs familles. Les politiques d’autonomisation économique de l’état malien en faveur des femmes depuis les objectifs du millénaire pour le développement (OMD) et récemment avec les objectifs du développement durable (ODD) ne font pas avancer la situation des femmes rurales à hauteur de souhait nous l’avons vu, dans le chapitre de la problématique. La compréhension de cette lente évolution est le but de cette recherche dont les résultats sont présentés dans la deuxième partie de ce mémoire. Mais avant tout, abordons le concept d’empowerment des femmes.

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