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Etude bibliographique sur la déchirure ductile

I.3. Concept de l'intégrale J

1.3.1.L'intégrale J

1.3.1.1.Concepts théoriques

En 1968, Rice [1-3] propose de quantifier l'énergie liée à une fissure dans un matériau élastique linéaire ou non-linéaire par l'intégrale de contour suivante :

(1-4) où F un contour fermé quelconque entourant la pointe de fissure (voir figure 1.3.1.1-a), T le vecteur contrainte (Tj=aynj), u le vecteur déplacement et s l'abscisse curviligne, w est la densité d'énergie de déformation :

Figure 1.3.1.1-a : Présence d'une fissure dans un milieu infini.

Cette intégrale présente de nombreuses caractéristiques intéressantes :

O D'une part, cette intégrale est indépendante du choix du contour d'intégration F. En effet, en prenant deux contours d'intégration distincts, on montre que la différence des expressions de J correspondantes est nulle.

• Rice a montré que J est égale au travail d'ouverture des lèvres lors d'une extension de fissure.

De même, J est égale à la variation d'énergie potentielle FI lors de l'extension de fissure.

Considérons un corps fissuré quelconque Q., bidimensionnel, dont le contour extérieur est noté r0 et ro,F la partie de Fo où sont imposés des efforts extérieurs. L'énergie potentielle totale s'écrit :

J fautas (1-6)

Soit F un contour quelconque entourant la pointe de fissure, et Fo le contour fermé constitué de F et des portions F+ et F" définies sur la figure 1.3.1.1-a, rejoignant les intersections de F avec les lèvres de la fissure à la pointe de fissure. En supposant les lèvres de la fissure libres de charge, F0>F se limite alors au contour F. Supposons une extension de fissure dans la direction xi. Soit Xi le système de coordonnées attaché à la pointe de fissure.

Xj s'exprime dans le repère fixe x{ par Xi=Xi-aô*ii (où Si! est le symbole de Kroneker). On a alors :

d__d_ 3 XL_ 5 _ _ ^ _ _^_

da da da dX: da dx:

d'où, en supposant que les efforts extérieurs s'appliquant sur le contour sont indépendants de a :

A partir de principe des travaux virtuels (PTV), on a de plus :

J% (1-9)

PTVJT da

en injectant cette relation dans l'expression (1-8), on obtient :

En utilisant le théorème de la divergence, la variation de l'énergie potentielle peut s'exprimer par une intégrale de contour, qui n'est autre que J :

( M l ) Ainsi, la variation d'énergie potentielle liée à une extension de fissure est donnée par l'intégrale J :

dU

J = ~— (M2) da

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Pour un matériau élastique non linéaire, cette définition de J est équivalente à celle du taux de restitution d'énergie G, défini par Griffith [I-10], correspondant à la variation d'énergie élastique liée à une extension de fissure. Cette propriété est illustrée dans le cas d'un solide soumis à un déplacement imposé (figure I.3.1.1-b(a)) ou un effort imposé (figure

1.3.1.1-(a) (b)

(1-13) d-14)

Figure I.3.1.1-b : interprétation de l'intégrale J.

• J quantifie l'intensité des champs de contraintes et de déformations en pointe de fissure.

Pour un matériau élastique non-linéaire dont la loi de comportement est une loi puissance, Hutchinson [I-11], Rice et Rosengren [1-12] proposent les relations suivantes (champs H.R.R.) :

J n+\ J

a<J0£0Inrj

71+1

pour une loi de comportement du type Ramberg-Osgood

(1-16)

où ao est la limite d'élasticité, n le coefficient d'écrouissage et a une constante. a{j, £-et In sont des fonctions tabulées en fonction de n et 6. Les champs de contrainte et de déformation sont donc directement reliés à J.

H Sous hypothèse de chargement proportionnel (dans ce cas, le comportement d'un matériau élasto-plastique peut être assimilé à celui d'un matériau élastique non-linéaire), J permet l'extension de la théorie de Griffith aux matériaux élasto-plastiques. Ce type de chargement permet de s'assurer qu'il n'y a pas de décharge. Ainsi, en chaque point de la structure, les contraintes et déformations équivalentes sont reliés par la courbe de traction, ce qui permet d'assimiler le matériau à un matériau élastique non linéaire. C'est pourquoi les essais de déchirure sont réalisés sous un chargement monotone croissant. Ceci implique que J n'est pas adapté pour caractériser une fissure sous chargement cyclique ou impliquant des décharges, ne serait ce que locales.

• J peut s'exprimer également, lors d'un essai de déchirure sur éprouvette, à partir de l'aire sous la courbe expérimentale force-déplacement. En effet, cette aire correspond à l'énergie reçue par l'éprouvette. En exprimant alors la variation de cette aire avec une extension de fissure, peuvent apparaître des relations du type :

E en contraintes planes

a v e c E*= E

a v e c E = E ( I 1 7 )

Bb Y e n déformations planes

où U est la composante plastique de l'aire sous la courbe force-ouverture des lèvres de la fissure, B l'épaisseur, b la longueur du ligament et Ki le facteur d'intensité de contrainte élastique. r\ est une fonction dépendante de la géométrie qui est en général déterminée à l'aide de calculs aux éléments finis.

L'ensemble des ces propriétés, numériques et analytiques, expliquent le statut de quasi-monopole dont dispose l'intégrale J pour la définition de critères d'amorçage et de propagation en mécanique de la rupture non-linéaire.

I.3.1.2.Définition de critères d'amorçage et de propagation

Rapidement, des propositions de critères d'amorçage basées sur ce concept sont apparues, liant l'amorçage de la propagation à une valeur critique de J notée Jœ [1-6]. Pour caractériser la propagation ductile, une autre grandeur matériau est la pente dJ/da (où a est la longueur de fissure) ou, de manière équivalente, le module de résistance à la déchirure Tmat

proposé par Paris et al [1-13] :

<J0 da

De nombreuses normes [1-7,8] proposent une démarche systématique pour déterminer l'évolution de J avec la propagation et en déduire ces grandeurs caractéristiques de l'amorçage et de la propagation. Lors d'un essai de déchirure sur éprouvette, les grandeurs force et ouverture des lèvres de fissure (CMOD) sont mesurées. Ceci permet de calculer J à chaque instant. Ces méthodes normalisées ne nécessitent pas une détermination de l'extension de

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fissure au cours de l'essai mais impliquent plusieurs essais. Cette méthode, appelée méthode des chargements interrompus, impose d'arrêter chaque essai à des instants différents (c'est à dire des longueurs de fissure différentes, sous l'hypothèse d'une parfaite reproductibilité de l'essai). La courbe de résistance à la déchirure ductile est construite en reportant dans le diagramme J-Aa les valeurs de J et d'extension de fissure correspondante en fin d'essai pour chaque éprouvette. La courbe est alors lissée linéairement ou par une loi puissance.

Cependant, certaines techniques permettent de connaître la longueur de fissure tout au long de l'essai, ce qui présente l'avantage de construire la courbe J-Aa avec un seul essai :

• Méthode basée sur la variation de la complaisance élastique : au cours de l'essai, des décharges partielles sont réalisées. La pente élastique de ces décharges étant directement liée à la longueur de fissure, l'avancée du défaut peut être simplement calculée. Cependant, cette méthode viole la condition de chargement monotone croissant nécessaire pour assurer la validité de J et est donc parfois contestée.

• Méthode de la différence de potentiel : cette technique consiste à mesurer la variation du potentiel d'un courant traversant l'éprouvette. Cette variation est directement liée à l'extension de la fissure. Cependant, la relation n'est pas explicite et est donc déterminée à partir de plusieurs essais réalisés pour des profondeurs différentes.

Ces critères d'amorçage et de propagation, couramment utilisés, supposent que la grandeur JiC et la courbe J-Aa sont intrinsèques au matériau. Malheureusement, il est rapidement apparu qu'il n'en était rien, les résultats obtenus lors des essais de caractérisation présentant une sensibilité importante aux effets d'échelle et de géométrie.