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Michel Porret est professeur ordinaire à l'Unité d'histoire moderne de l'Université de Genève (Faculté des Lettres).

Ses activités académiques en rapport avec la bande dessinée

Michel Porret est professeur à l'Unité d'Histoire moderne de l'Université de Genève (UNIGE) et s'intéresse à la bande dessinée dans le cadre de ses recherches académiques. Il a notamment dirigé un ouvrage collectif Objectif Bulles chez l'éditeur Georg, sur l'histoire culturelle de la bande dessinée. En tant qu'historien, la BD l'intéresse parce qu'il s'agit de l'un des médias de masse les plus importants du 20è siècle et représente ainsi une des sources pour étudier « l'imaginaire » collectif. Michel Porret étudie en effet la manière dont sont construites les « représentations sociales » liées à une thématique historique à travers différents médias. Par exemple, il donne un séminaire sur la chasse aux sorcières au sein duquel il introduit le visionnement de films qui traitent de la thématique pour illustrer les rapports entre un « dossier social » et la manière dont il est traité au cinéma. Relativement à la bande dessinée, il organise prochainement un colloque intitulé Bulles de sang qui a pour objectif de réunir des historiens autour de l'étude de la manière dont sont traités les thèmes du crime et de la justice dans un corpus de bandes dessinées. Son approche est donc historienne, et se distingue, dit-il, de l'approche littéraire, narratologique et stylistique pratiquée à Lausanne par Alain Boillat et son groupe.

Intérêt et besoins par rapport aux archives et au patrimoine documentaire de la bande dessinée

Il travaille donc sur des publications, et plus particulièrement sur les albums de bande dessinée. Michel Porret dit en effet s'être fixé la limite de ne travailler que sur ces supports et de laisser de côté les publications en série, afin de limiter la masse des corpus à étudier. Pour ses besoins, il ne fréquente donc pas le Centre BD de Lausanne – qu'il connaît néanmoins et décrit comme « précieux » avant tout pour les périodiques – puisqu'il peut compter sur sa collection personnelle qu'il décrit comme presque exhaustive pour la production francophone en albums depuis le début du 20è siècle jusqu'aux années '80.

conservation patrimoniale dans le domaine de la bande dessinée. En effet, en premier lieu, il existe selon lui un « gros patrimoine critique » sur la bande dessinée, qui s'est constitué lors de la période héroïque des fanzines des années 50-60 tels que Felix,

les Cahiers de la bande dessinée, Schtroumpfs et qui est aujourd'hui dispersé. Il pense

dès lors que pour la recherche « ce serait pratique d'avoir un centre où on peut avoir

ce patrimoine notamment des revues et des livres, plus ou moins comme une bibliothèque sur l'histoire du cinéma ». Un autre aspect qu'il lui semblerait urgent de

conserver, comme c'est déjà le cas en partie à Lausanne, c'est la publication de bandes dessinées dans les périodiques, non seulement les grands titres de bande dessinée d'après-guerre, mais également la multitude de titre plus ou moins spécialisés qui foisonnaient dans la première partie du 20è siècle, en France notamment. Les périodiques ayant été le principal vecteur de diffusion de la bande dessinée jusqu'aux années 1980, il est pour lui indispensable de pouvoir disposer de ce patrimoine pour étudier la bande dessinée. Le problème pourtant est que ce patrimoine a également été dispersé voire perdu, étant un support fragile et déconsidéré. « Donc deuxième point d'archivage : s'il y avait un endroit où ce type de

patrimoine serait enfin sauvé dans un premier temps, pour être mis à disposition de la recherche dans un deuxième temps, je pense que c'est important ».

En dernier lieu, il relève que l'étude de la bande dessinée ne porte pas seulement sur les aspects littéraires et historiques. Il y a également une manière de « travailler sur la

BD comme on travaille sur les imprimés, par exemple d'Ancien Régime, ce qui présuppose à la fois de la bibliométrie, ce qui présuppose justement des contrôles de publication, de réception, ce qui présuppose qu'on puisse dominer assez rapidement une masse de production d'imprimés dans lequel tel ou tel problème qui nous intéresse apparaît. ». Il serait dès lors primordial pour lui qu'il existe des collections qui

permettent ce genre de travaux dans « un endroit où on pense ça, c'est-à-dire depuis

la réception jusqu'à la livraison au public ». Il y a d'ailleurs d'après lui en Suisse une

grande tradition d'histoire du livre et des imprimés. Au delà des corpus de publications, il pense qu'il serait dès lors tout à fait pertinent de disposer de fonds d'archives d'éditeurs de bande dessinée pour étudier différents phénomènes : la « pénétration du

medium dans le tissu social », le phénomène économique des médias de masse, les

réseaux de diffusion, etc.

d'éditeurs qui soit sont très protégées, comme dans le cas de Dupuis, soit n'auront pas été conservées par manque de considération – mais il fait en l'occurrence référence à des éditeurs étrangers. Quant aux archives d'auteurs, cela lui semble encore plus invraisemblable dans la mesure où celles-ci représentent une véritable plus-value pour les auteurs et lui semblent donc difficiles à acquérir.

Pour lui, donc, la priorité serait d'archiver la diffusion médiatique, à savoir les revues, les publications – et il pense à ce niveau à la production francophone dans son ensemble. En effet, de son point de vue, la Suisse n'est pas une grande terre de bande dessinée en matière de création et d'édition. Le pays cependant lui apparaît comme tout à fait particulier pour ce qui est des collections privées : il y aurait une concentration tout à fait particulière de collections privées en Suisse proportionnellement à la population, qui s'explique notamment par un pouvoir d'achat supérieur – la BD étant « une collection de luxe ».

Pour Michel Porret cependant, il reste un écueil important à la fois à l'étude de la bande dessinée et à la constitution du patrimoine : la déconsidération dont la bande dessinée fait l'objet, ce qui fait qu'il est très difficile de défendre cet intérêt à l'Université et de rassembler des documents qui n'ont jamais été conservés avant. Malgré le

« statut culturel compliqué » de la bande dessinée à l'Université, son étude est un « océan », toutes sortes d'approches et de sources font sens. Il y a donc un enjeu

derrière ces démarches, car l'approche scientifique permet de créer « un cran culturel,

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