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4.3 Effets centraux et comportementaux

4.3.2 Sur les comportements d’attachement

Après cette partie traitant des actions de l’ocytocine sur les comportements ali- mentaires, l’équilibre énergétique et le métabolisme glucidique, nous allons maintenant aborder les effets de l’OT sur les comportements d’attachement et sur les liens entre congénères.

L’étude des effets comportementaux de l’OT a été largement développée chez l’ani- mal, que ce soit sur les rats ou sur d’autres espèces comme les campagnols ou encore

les oiseaux. Ces études ont démontré que l’OT était une hormone prosociale, vulgari- sée en "hormone de l’amour" et qu’elle favorisait les attitudes d’accouplement, les liens sociaux et le maintien de l’attachement mère-enfant. L’OT est apparue tôt au cours de l’évolution et on la retrouve chez de nombreuses espèces animales éloignées sur le plan phylogénétique [155]. Chez Caenorhabditis elegans3 on retrouve déjà une action

sur le comportement sexuel. À ce stade de l’évolution, l’OT n’est pas présente, mais se retrouve sous la forme d’un précurseur appelé nematocine [155]. Cette molécule est localisée sur des neurones spécifiques et agirait sur la plasticité du système gustatif de C.elegans, et participeraient à l’élaboration de comportements d’accouplement chez le mâle [155]. Enfin, la nematocine interagit avec les système de la dopamine et de la sérotonine, à la base de la plasticité observée dans le système gustatif de C.elegans. Ce lien fort entre ces neuromodulateurs est un phénomène important pour la régulation de nos comportements sociaux qui est apparu longtemps auparavant dans l’évolution et qui n’est pas seulement l’apanage de l’espèce humaine [155].

Dans d’autres espèces animales, comme chez les femelles campagnols, le système ocy- tocinergique interagit avec celui des estrogènes et favorise les comportements sociaux, le fait d’être disposé à se rencontrer et accepter un compagnon [218], et les compor- tements d’accouplement. Lorsque ces femelles sont traitées par une molécule chimique qui perturbe certains acteurs endocriniens (methoxychlore), le couplage entre l’OT et son récepteur dans le cortex cingulaire diminue ce qui a pour conséquence de réduire les activités sociales de ces femmelles [218]. Enfin, les espèces animales monogames ont, par rapport aux espèces polygames, des taux d’OT plus élevés, ce qui suggère que l’OT agit sur le maintien des relations de couple (pair bonding) et sur l’établissement de liens forts en deux partenaires.

Outre ces effets sur les comportements prosociaux chez la souris et la recherche et l’établissement de relations de couple, l’OT aurait un effet sur le comportement mater- nel. Cette interaction mère-enfant est fondamentale pour le développement de l’enfant puisque le contact physique et les interactions sociales précoces sont des moyens de transmission de comportements adaptés socialement [352] et impactent, par la suite le comportement social adulte.

Tout d’abord, sur des rats femelles, il a été enregistré une augmentation de la concentra- tion cérébrale d’OT et d’OTR durant la grossesse et après la parturition dans le SON, le PVN et le septum ventral [218] (également observée dans d’autres espèces comme les lapins ou les campagnoles). Selon Lee et al, l’élévation d’OT participe à l’initiation et au maintien des comportements maternels chez ces espèces animales [218]. L’OT pourrait induire ces effets par son interaction avec les systèmes dopaminergiques et sérotoniner- giques afin de contrôler certains aspects du comportement maternel, en incluant par exemple le toilettage des petits, la construction d’un nid ou encore la protection des rejetons [218].

Ensuite, L’OT jouerait un rôle important dans le développement et la régulation des

relations parents-enfants. Une revue de la littérature s’est intéressée à cette facette de l’OT et plus particulièrement à 8 travaux menés chez l’Homme [139]. Les taux plasma- tiques d’OT ont été mesurés sur des mères après ou avant des interactions avec leurs enfants, durant et après l’accouchement. Même si la corrélation entre concentration périphérique et centrale d’OT est incertaine [139], les comportements maternels sont modulés par l’OT.

L’OT (ainsi que l’AVP), outre ses effets sur l’attachement mère-enfant, va voir son expression modulée par l’environnement social dans lequel l’enfant va se développer. En effet, l’OT et l’AVP sont exprimées et libérées dans le cerveau et sont d’importants régulateurs du comportement social. Certains auteurs ont émis l’hypothèse que l’envi- ronnement social précoce pourrait modifier les comportements sociaux adultes via des modifications des systèmes d’OT/AVP [352]. Pour tester cette hypothèse des modèles murins ont été mis au point en imitant un environnement social précoce défavorisé (par exemple, séparation de la mère) ou enrichi (par exemple, manipulations néonatales). Les résultats montrent en effet, que les différences de qualité de l’environnement (pauvre ou enrichi) social précoce sont associées à des altérations spécifiques de la région cérébrale de l’expression de l’OT et de l’AVP ainsi que sur la force des liaisons entre OT/AVP et leurs récepteurs respectifs [352]. Par ailleurs, ils ont osbervé que ces changements précoces induits par l’environnement social dans les systèmes d’OT/AVP étaient as- sociés à des modifications de plusieurs formes de comportement social [352]. Les plus impactés étaient notamment ceux liés aux soins maternels, mais une augmentation de l’agressivité était relevée et une altération de la reconnaissance sociale également [352]. Ces expériences menées chez le rat ont permis d’associer l’environnement social au bon développement des systèmes OT/AVP au cours de l’enfance qui par la suite, se réper- cuteront sur nos comportements adultes et les variations individuelles observées dans ces comportements.