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CHAPITRE III Stockage d’Electrons sur des Complexes de Cobalt à Ligands Base de Schiff

III.1.3 Complexes de cobalt à ligands rédox-actifs

III.1.3.1 Complexes enrichis en électrons

Ces complexes sont souvent synthétisés par réduction multi-électroniques de complexe de Co(II). Elles sont génératrices de sous-produits si des conditions expérimentales strictement anhydres et anaérobiques ne sont pas employées.

Les ligands de type azaallylimine possèdent des protons acides sur le groupe méthylène en alpha des pyridines (Figure 99). Lorsque ces protons sont arrachés, les charges négatives générées sont conjuguées aux fonctions imines. Wolczanski et al. ont reporté la formation de liaisons C-C lors de la réaction du ligand ((2-py)CH2N=C)2CMe2 avec le précurseur de Co(II)

[Co(N(TMS)2)2]. 288 Les deux ligands anioniques (N(TMS)2)- jouent le rôle de base pour

arracher les deux protons acides du ligand. Le complexe dinucléaire de cobalt final [Co2(µ-

bis-(((2-py)CH2N=C)2CMe2)] C contient trois liaisons C-C pontant deux ligands et une liaison

Co-Co. Cependant, les auteurs précisent qu’il existe une incertitude sur le degré d’oxydation des deux atomes de cobalt. Il pourrait s’agir de deux atomes de Co(I) ou deux atomes de Co(II). Les deux premières liaisons C-C se formeraient par couplage radicalaire de deux fonctions imines réduites, simultanément avec une réduction des centres métalliques en Co(0) (intermédiaire A). La capacité réductrice du Co(0) permettrait ensuite de réduire une fonction imine sur chaque ligand pour former la troisième liaison C-C (intermédiaire B). Si on considère deux atomes de Co(II) dans le complexe final C, leur formation pourrait se faire par transfert d’un électron du cobalt vers le ligand. Si on considère deux atomes de Co(I), aucune réaction supplémentaire n’est nécessaire. Malgré cette ambiguïté, cet exemple très intéressant prouve le caractère rédox-actif des ligands azaallylimines coordinés au Co(II).

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Figure 99: Formations de liaisons C-C lors de la réaction du [Co(N(TMS)2)2(THF)] avec un ligand neutre azaallylimine. 288

Avec les ligands Cp, les α-iminopyridines sont parmi les ligands rédox-actifs qui ont été le plus étudiés dans la chimie de coordination. Ils sont capables d’accepter une forte densité électronique sur le squelette du ligand. 154, 155 Wieghardt et al. ont étudié la coordination au Co(II) et la réduction par le sodium de deux équivalents du ligand neutre L, L = 2,6-bis(1- méthyléthyl)-N-(2-pyridinylméthylène)phénylamine et ont isolé le complexe de Co(II) à ligands réduits [Co(L.-)2] (Figure 100). 287, 288 Les ligands prennent le dessus sur le cobalt pour

stocker les électrons.

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La réduction à deux électrons de ce complexe par un équivalent supplémentaire de sodium fournit le complexe de Co(II) à ligand mixte Na[Co(L.-)(L2-)] où le ligand (L2-) stocke deux électrons sous sa forme dianionique. Ainsi, trois électrons ont été stockés sur ce complexe où le degré d’oxydation du cobalt est toujours +II. Ce complexe très réduit est capable de réaliser l’addition oxydante de MeI en utilisant à la fois un électron stocké sur le ligand (L2-) et un électron stocké sur le métal pour former le complexe de Co(III) [Co(Me)(L.-)2]. Ce

système est un parfait exemple de la coopération métal-ligand dans la réactivité rédox des complexes de cobalt à ligands rédox-actifs.

Les ligands bis-iminopyridines (bimpy) offrent une stabilisation supérieure de la charge négative introduite grâce au squelette aromatique plus conjugué que celui des α- iminopyridines. 291 La réduction du système [Co(bimpy)Cl2], déjà étudiée dans les années

2000, avait été identifiée comme fortement prometteuse pour effectuer la catalyse de polymérisation de l’éthylène. 153, 292, 293 A l’époque, l’espèce mono réduite active avait été asumée comme étant un complexe de Co(I) à ligand neutre. 294, 295 Récemment, Chirik et al. ont réétudié le système [Co(Arbimpy)Cl2] où Arbimpy = 2,6-(2,6-i-Pr2-C6H5=CR)2C5H5N, R = Me,

Ph avec des substituants aromatiques sur l’azote de l’imine. Ceci dans le but de déterminer la structure électronique exacte des complexes mis en jeu dans la séquence de réductions multi-électronique (Figure 101). 229

Figure 101: Réductions mono-, bi- et tri-électronique du complexe [Co(Arbimpy)Cl2]. 229

Ainsi, le complexe de Co(II) [Co(Arbimpy)Cl2] peut être mono-réduit par un excès de zinc pour

former le complexe de Co(II) [Co(Arbimpy.-)Cl]. Lors de la seconde réduction, le cobalt est réduit pour former le complexe de Co(I) [Co(Arbimpy.-)]. Enfin, lors de la troisième réduction,

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le ligand est réduit une seconde fois pour donner le complexe de Co(I) Na[Co(Arbimpy2-)]. Grâce à la RPE et aux mesures de moment magnétique, les auteurs ont déterminé que l’espèce mono-réduite est en fait un complexe de Co(II) à ligand radicalaire mono-réduit contrairement à une espèce de Co(I) à ligand neutre qui avait été postulée.

Le complexe mono-réduit Co(II) [Co(Arbimpy.-)Cl] présente une réactivité acide/base qui donne accès à une autre chimie rédox centrée sur le ligand (Figure 102). 296 Le ligand peut être déprotoné pour former un complexe de Co(II) à ligand énamide monoréduit. En présence d’agents oxydants précis comme Ph3CCl, PhSSPh ou NO, il se produit un couplage

oxydant entrainant la dimérisation du complexe énamide pour former le complexe dinucléaire de Co(II) [Co2(µ-bis-Arbimpy.-)X2] où X = Cl, SPh, NO. Ce couplage est la

conséquence directe de l’oxydation de la fonction ènamide en fonction imine. En présence d’agents oxydants moins encombrants, le couplage entre le complexe et l’agent oxydant est également observé. Enfin, le complexe [Co2(µ-bis-Arbimpy.-)X2] peut être réduit par NaBEt3H

pour récupérer le complexe mononucléaire de départ.

Figure 102: Couplage oxydant et rupture réductrice de liaison C-C sur le complexe de cobalt [Co(Arbimpy)N2]. 296

Dans la continuité de ces travaux, Chirik et al. ont étudié les complexes [Co(Alkbimpy)Cl2] où Alk

bimpy = 2,6-(R=CMe)2C5H3N, R = C6H11(Cy), i-Pr, avec des substituants alcanes sur l’azote

de l’imine. 230, 294

De Bruin et al. ont étudié la chimie rédox du complexe bis-ligand [CoL2](PF6)2, L = 2,6-bis[1-

(4-méthoxyphénylimino)éthyl]pyridine, et ont déterminé la structure électronique des complexes synthétisés au cours de la séquence d’oxydation et de réduction. 297 En partant du complexe [Co(L0)2] à ligands neutres, la première réduction entraine la réduction du

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métal en Co(I) puis la deuxième réduction entraine la réduction d’un ligand (Figure 103). Ce résultat contraste avec celui observé pour les complexes mono-ligand [Co(Arbimpy)Cl] et [Co(Alkbimpy)Cl] où les réductions s’opèrent d’abord sur le ligand puis sur le métal. 229, 230, 294 Les différences entre ces trois exemples concernant les complexes de cobalt à ligand bis- iminopyridine montrent clairement à quel point il est difficile de prédire le comportement de ce type de complexes lors des séquences de réduction multi-électroniques.

Figure 103: Chimie rédox du complexe bis-ligand [Co(L)2]. 297

Dans un registre similaire, Chirik et al. ont prouvé le caractère rédox-actif du ligand bis- carbènepyridine lors de l’étude de polymérisation catalytique du 1,1-diphényléthylène. 298 En effet, le diphényléthylène peut s’additionner sur la position 4 de la pyridine (Figure 104). Des études spectroscopiques et structurales poussées ont permis de localiser la charge du complexe sous forme de radical en position 4 de la pyridine.298

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