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§1 Une définition similaire de la discrimination

A. La comparabilité des situations

86. La question de la comparabilité des situations ne fait débat que dans un nombre limité d’hypothèses. En effet, dans la plupart des affaires, la comparabilité semble présumée et n’est donc pas discutée par les juridictions376. Ceci est encore plus vrai aux Etats-Unis où la Cour

375 Ces deux étapes ne sont toutefois pas en pratique totalement autonomes ni successives. La première phase de

l’analyse est en effet étroitement liée à la seconde, puisque la comparabilité des situations dépend en partie du critère de distinction choisi. C’est pourquoi, certains pensent que les deux questions se confondent en pratique. V. pour une explication de cette approche, G. DAVIES, Nationality Discrimination in the European Internal Market, Kluwer Law International, 2003, p. 13. V. également l’analyse de J. Y. QIN qui déduit la comparabilité des situations du caractère injustifié de la mesure (c’est à dire fondée sur un critère de différenciation interdit) (J. Y. QIN, “Defining Non-discrimination Under the Law of the World Trade Organisation”,.U. Int'l L.J., vol. 23, 2005, p. 215, spéc. p. 225 et s.).

376 V. à ce propos P. F. McGREAL, “The flawed Economics of the Dormant Commerce Clause”, Wm. & Mary L.

Rev., vol. 39, 1998, p. 1191, spéc. p. 1195 ; D. MARTIN, Egalité et non-discrimination dans la jurisprudence

communautaire, Etude critique à la lumière d’une approche comparatiste, Bruylant, 2006, p. 530. Selon

D. MARTIN, la CJUE ne discute généralement cette question que lorsqu’elle ne souhaite pas conclure à l’existence d’une discrimination. Cette présomption de comparabilité contraste avec la « jurisprudence » de l’organe d’appel de l’OMC qui consacre souvent de longs développements à la question de la comparabilité (v. D. WILSHER, “Does Keck discrimination make any sense? An assessment of the non-discrimination principle within the European Single Market”, ELRev., vol. 33, 2008, p. 3, spéc. p. 10 et J. Y. QIN, “Defining Non- discrimination…”, préc., p. 219 ; D. LUFF, Le droit de l’organisation mondiale du commerce. Analyse critiques, Bruylant, L.G.D.J., 2004, pp. 44-52).

Suprême ne distingue pas clairement ce qui relève respectivement de la non comparabilité des situations et de la justification de la différence de traitement et tend à envisager la question de la discrimination essentiellement sous l’angle de la justification377. Toutefois, elle a pu relever dans certains arrêts que la « notion de discrimination suppose une comparaison d’entités substantiellement similaires »378 et exclure, sur ce fondement, l’existence d’une discrimination379.

87. Théoriquement, la définition de la similarité est délicate380. La comparabilité ne

s’identifie, en effet, pas à l’identité381 qui, dans l’absolu, n’existe pas382.Comme le relève le professeur HERNU, « les situations de droit ne sont jamais en tout point identiques »383. Se fondant sur l’analyse de M. VANQUICKENBORNE, il précise que « deux objets sont considérés comme étant les mêmes « parce qu’ils sont identiques sous un certain rapport. Ils ont une ou n caractéristiques en commun […] » […] Dès lors, la comparaison, aussi objective soit-elle, présente un caractère relatif qui apparaît dans la préférence accordée à la similarité ou la singularité de situations prises dans la totalité de leurs éléments »384.

88. La question de la similitude est d’autant plus relative qu’elle dépend non seulement des caractéristiques intrinsèques des situations comparées mais également du contexte dans lequel sont examinées ces situations et du critère distinctif choisi385. Ainsi, une distinction opérée sur le fondement de l’origine nationale permet plus facilement, dans la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, de conclure à la comparabilité des situations, qu’une distinction fondée sur la résidence386. De même, la pertinence du critère choisi en tant que

377 v. par ex. Clover Leaf Creamery Co., 449 U.S. 456, préc.

378 General Motors Corp., 519 U.S., préc., p. 298. V. également en ce sens Ford Motor Co. v. Texas Department

of Transportation, 264 F.3d 493 (5th Cir. 2001). 379 v. par ex.United Haulers Assn., 550 U.S. 330, préc.

380 V. à ce propos, D. WILSHER, “Does Keck discrimination make any sense?…”, préc., pp. 4 et s.

381 V. en ce sens, CJCE, 27 février 1980, Commission c/ France, aff. 168/78, Rec. p. 347, pt 5.

382 V. en ce sens, G. DAVIES, Nationality Discrimination…, op. cit., p. 9 ; K. LENAERTS, « L’égalité de

traitement en droit communautaire : un principe unique aux apparences multiples », CDE 1991, p. 3, spéc. pp. 9- 10. V. également les conclusions de l’avocat général MAZÁK présentées le 9 décembre 2010 sous l’affaire C- 253/06Commission c/ Hongrie, pt 44.

383 R. HERNU, Principe d’égalité et principe de non discrimination…, op. cit., p. 316.

384 R. HERNU, Principe d’égalité et principe de non discrimination…, op. cit., pp. 316-317. Le professeur

HERNU cite ici M. VANQUICKENBORNE, « La structure de l’égalité en droit », L’Egalité, vol. 1, Travaux du Centre de philosophie du droit de l’Université libre de Bruxelles, Bruxelles, Bruylant, 1971, p. 176.

385 V. en ce sens, J. Y. QIN, “Defining Non-discrimination…”, préc., p. 223. 386 V. infra. §3 de la présente section.

critère de comparaison varie selon le domaine dans lequel intervient la réglementation. Pour reprendre l’exemple du critère de la résidence, un non-résident et un résident seront considérés comme étant dans une situation similaire dans certains domaines mais non dans d’autres. Au regard de la fiscalité, leur situation est similaire lorsque le non-résident perçoit une certaine part de ses revenus sur le territoire de l’Etat. Au regard de certaines prestations sociales, en revanche, le non-résident ne peut revendiquer la similitude de sa situation avec le résident387. Les critères permettant d’établir la similitude des situations ne peuvent donc être définis de manière générale et abstraite et leur identification varie en fonction de chaque cas d’espèce, la seule exigence commune étant le caractère objectif de ces critères388.

89. Dans bien des situations, la similarité apparaît si évidente qu’elle n’est pas discutée. Toutefois, il est des domaines où la détermination de la comparabilité des situations s’est révélée délicate. Tel est le cas, en particulier, du domaine de la fiscalité, directe et indirecte, pour lequel les juridictions ont du établir des critères permettant de déterminer si les situations traitées différemment étaient comparables.

90. C’est en matière d’impositions intérieures que la CJUE a sans doute le plus développé les critères de comparabilité, employant un raisonnement analogue à celui utilisé en droit de la concurrence pour identifier le marché en cause389. Sont similaires, des produits qui « au même stade de production ou de commercialisation, présentent au regard des consommateurs des propriétés analogues ou répondent aux mêmes besoins »390. Il convient donc de rechercher si les produits sont, au regard des consommateurs, substituables, en se fondant, notamment, sur leurs caractéristiques, leurs procédés de fabrication, leur utilisation, et les besoins auxquels ils répondent391. En revanche, on ne saurait, selon la Cour, se référer aux seules « habitudes de consommation existant dans un Etat membre ou dans une région déterminée », ces habitudes ne pouvant « être considérées comme une donnée immuable ». En

387 V. infra, §3, B, 2 de la présente section.

388 V. par ex. D. MARTIN, Egalité et non-discrimination dans la jurisprudence communautaire…, op. cit., p. 39. 389 V. par ex., CJCE, 14 février 1978, United Brands, aff. 27/76, Rec. p. 207, pts 10-12 ; TPICE, 8 juin 1995,

Schöller c/ Commission, aff. T-9/93, Rec. p. II-1611, pt 40.

390 CJCE, 17 février 1976, Rewe c/ Hauptzollamt Landau, aff. 45/75, Rec. p. 181 ; CJCE, 27 février 1980,

Commission c/ Royaume-Uni, aff. 170/78, Rec. p. 417, pt 14. Avant de se référer au consommateur, la Cour établissait le rapport de similitude en se fondant sur « la classification fiscale, douanière et statistique » (v. CJCE, 4 avril 1968, Fink-Frucht c/ Hauptzollamt München, aff. 27/67, Rec. p. 327, spéc. p. 342). Ce critère est devenu par la suite « un élément d’appréciation important » (CJCE, Rewe, aff. 45/75, préc, pt 12). Pour une synthèse des critères servant à établir la similitude des marchandises, v. not. D. BERLIN, Droit fiscal communautaire, P.U.F., coll. Droit fondamental, 1988, pp. 134-140.

outre, la prise en compte d’un tel critère permettrait de « cristalliser des habitudes de consommation données en vue de stabiliser un avantage acquis par les industries nationales […]»392.

Il ressort de la jurisprudence de la Cour en ce domaine qu’une comparabilité suffisante doit être établie mais non une identité rigoureuse des marchandises393. Ainsi, selon le professeur BERLIN, « l’article [110], § 1, n’exige pas l’identité des produits, ni même leur parité. La

notion de similitude impliquerait plutôt l’idée d’un parallèle qui, se contentant d’un rapport apparent, n’est ni aussi naturel, ni aussi rigoureux que doit l’être la parfaite

comparaison »394. Ont été ainsi qualifiées de marchandises similaires les cigarettes brunes et les cigarettes blondes395.

Ces nuances et la variété des critères employés impliquent des appréciations économiques et de fait approfondies. La question de la comparabilité est donc parfois longuement analysée dans la jurisprudence communautaire396. La Cour Suprême a, semble-t-il, été plus souple et laconique en la matière, puisqu’elle se contente, pour établir la discrimination, d’un rapport de concurrence entre les produits, rapport dont elle discute rarement la teneur397.

91. En matière de fiscalité directe, il a souvent été reproché, aux Etats-Unis comme dans l’Union européenne, aux Etats d’opérer une distinction entre les résidents et les non résidents. Or, une telle distinction serait discriminatoire en ce qu’elle défavoriserait majoritairement les ressortissants des autres Etats. Un tel raisonnement présuppose, toutefois, que les résidents et les non résidents sont dans la même situation. Or, comme l’a relevé la Cour de justice, « en matière d’impôts directs, la situation des résidents et celle des non-résidents ne sont, en règle

392 CJCE, Commission c/ Royaume-Uni, aff. 170/78, préc., pt 14.

393 V. par ex. CJCE, 11 août 1995, Roders e.a., aff. jtes C-367 à 377/93, Rec. p. I-2229. 394 D. BERLIN, Droit fiscal communautaire, op. cit., p. 133.

395 CJCE, 27 février 2002, Commission c/ France, aff. C-302/00, Rec. p. I-2055.

396 V. CJCE, Commission c/ France, aff. 168/78, préc. ; CJCE, 27 février 1980, Commission c/ Italie, aff. 169/78,

Rec. p. 385 ; CJCE, Commission c/ Royaume-Uni, aff. 170/78, préc. Néanmoins, la Cour élude parfois la question en examinant la réglementation en cause sous l’angle de l’article 110 TFUE pris dans sa globalité et non sous le seul angle de son 1er paragraphe (v. à ce propos, M. de WOLF, Souveraineté fiscale…, op. cit., p. 156,

note 170).

397 V. cependant General Motors Corp., 519 U.S. 278, préc. (longs développements sur la similitude des

fournisseurs de gaz bénéficiant d’un monopole pour la distribution aux consommateurs individuels et des fournisseurs intervenant sur le marché ouvert, amenant la Cour à distinguer plusieurs marchés) ; Bacchus Imports Ltd. v. Dias, 468 U.S. 263, 268 et s. (1984) (les vins d’ananas et d’okolehao sont en concurrence avec les autres alcools. Une mesure fiscale favorisant ces deux liqueurs, produites localement, est donc discriminatoire).

générale, pas comparables »398. En effet, contrairement au résident, « le revenu perçu sur le

territoire d’un Etat par un non-résident ne constitue le plus souvent qu’une partie de son

revenu global »399. Très souvent, ce dernier perçoit également des revenus dans son Etat de résidence. Il est donc susceptible d’être imposé dans plusieurs Etats, en particulier dans son Etat de résidence qui le fera bénéficier des avantages fiscaux prévus par sa législation. Il ne se trouve ainsi pas dans une situation comparable au contribuable qui ne tire de revenus que de son seul Etat de résidence. C’est pourquoi, « le fait pour un Etat membre de ne pas faire bénéficier un non-résident de certains avantages fiscaux qu’il accorde au résident n’est, en règle générale pas discriminatoire […] »400. Concrètement, la comparabilité dépend de l’importance des revenus du contribuable dans son Etat d’emploi. Si le contribuable non résident y perçoit plus de 90% de ses revenus, il doit être soumis au même traitement que les résidents, en raison de la comparabilité de sa situation avec celle des résidents. En revanche, si les revenus sont inférieurs à 90%, les situations ne sont généralement plus considérées comme comparables401. Des exceptions à cette règle ont toutefois été admises eu égard à la spécificité de certaines dispositions fiscales402.

Aux Etats-Unis, la Cour Suprême a également estimé qu’un Etat n’était pas dans l’obligation d’attribuer aux non résidents l’ensemble des déductions accordées aux résidents. Son raisonnement aboutit sensiblement au même résultat que celui employé par la Cour de justice, même s’il se fonde davantage sur la justification de la mesure que sur la qualification de

398 CJCE, 14 février 1995, Schumacker, aff. C-279/93, Rec. p. I-225, pt 31.

399 CJCE, Schumacker, aff. C-279/93, préc., pt 32. V. également, CJCE, 27 juin 1996, Asscher, aff. C-107/94,

Rec. p. I-3089, pt 41 : « la situation des résidents et celle des non-résidents dans un Etat donné ne sont, en règle générale, pas comparables, car elles présentent des différences objectives tant du point de vue de la source du revenu que de la capacité contributive personnelle ou de la prise en compte de la situation personnelle et familiale ».

400 CJCE, Schumacker, aff. C-279/93, préc., pt 34. Il convient de relever que l’article 65, paragraphe 1, a) TFUE,

relatif à la libre circulation des capitaux, autorise expressément les Etats à « appliquer les dispositions pertinentes de leur législation fiscale qui établissent une distinction entre les contribuables qui ne se trouvent pas dans la même situation en ce qui concerne leur résidence ou le lieu où leurs capitaux sont investis ». L’applicabilité de cette disposition dépend entièrement de la non-comparabilité des situations. V. à ce propos, CJUE, 25 octobre 2012, Commission c/ Belgique, aff. C-387/11 (non encore publié au recueil), pts 41 et s.

401 V., par ex., CJCE, 14 septembre 1999, Gschwind, aff C-391/97, Rec. p. I-5451.

402 V. par ex., CJCE, 12 juin 2003, Gerritse, aff. C-234/01, Rec. p. I-5933 ; CJCE, 6 juillet 2006, Robert Hans

Conijn c/ Finanzamt Hamburg-Nord, aff. C-346/04, Rec. p. I-6137. La Commission pour sa part a adopté une

recommandation fixant le seuil à 75% des revenus imposables (recommandation n° 94/79 du 21 décembre 1993 relative à l’imposition de certains revenus obtenus par les non-résidents dans un Etat membre autre que celui de la résidence, JOCE 1994, n° L39/22). V. à ce propos A. MAITROT de la MOTTE, Souveraineté fiscale et construction communautaire…, op. cit., p. 154.

discrimination403. Ainsi dans l’arrêt Lunding de 1998, la Cour Suprême a déclaré contraire à la Privileges or Immunities clause du 14ème amendement de la Constitution une réglementation new-yorkaise excluant toute déductibilité des dépenses personnelles pour les non résidents. Qualifiant la mesure de discriminatoire, elle a conclu qu’elle n’était pas fondée sur une « justification substantielle » ou « une explication rationnelle »404.

De manière générale la compétence fiscale des Etats s’exerce sur l’ensemble des revenus de leurs résidents, tandis que seule une partie des revenus des non-résidents relève de cette compétence. Cette différence de situations justifie que les Etats n’appliquent pas un principe de stricte égalité entre résidents et non résidents405. Ainsi, ils peuvent limiter les avantages fiscaux qu’ils attribuent aux revenus générés sur leur territoire406. Cette hypothèse d’ « inégalités » fiscales fondées sur la résidence montre clairement que la détermination de la similitude des situations dépend à la fois du critère de distinction choisi – ici la résidence – et du contexte dans lequel les situations sont comparées – ici la fiscalité.

92. La question de la comparabilité s’est également posée dans le contexte de mesures étatiques favorisant des entreprises publiques par rapport aux autres entreprises. Dans l’Union européenne, les entreprises publiques ne peuvent, par principe, faire l’objet d’un traitement de faveur de la part des Etats407, sauf à démontrer la nécessité de ce traitement au regard de certains objectifs légitimes408. La Cour de justice considère donc que les entreprises publiques et les entreprises privées se trouvent dans une situation comparable et que toute différence de

403 V. Lunding v. New York Tax Appeals Tribunal, 522 U.S. 287, 298 (1998).

404 V. p. 303 de l’arrêt.

405 Shaffer v. Carter, 252 U.S. 37, 57 (1920) ; Travis v. Yale & Towne Mfg. Co., 252 U.S. 60 (1920). 406 Travis v. Yale & Towne Mfg. Co., 252 U.S. 60, préc.

407 Aux termes de l’article 345 TFUE, « [l]es traités ne préjugent en rien le régime de la propriété dans les Etats

membres ». Toutefois, selon la jurisprudence constante de la CJUE, « ledit article n’a pas pour effet de faire échapper les régimes de propriété existant dans les États membres aux règles fondamentales du traité […] notamment celles de non-discrimination, de liberté d’établissement et de liberté des mouvements de capitaux » (CJUE, 8 novembre 2012, Commission c/ Grèce, aff. C-244/11 (non encore publié au recueil), pts 15-16).

408 V. notamment l’article 106 TFUE : « 1. Les États membres, en ce qui concerne les entreprises publiques et

les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, n'édictent ni ne maintiennent aucune mesure contraire aux règles des traités, notamment à celles prévues aux articles 18 et 101 à 109 inclus. 2. Les entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général ou présentant le caractère d'un monopole fiscal sont soumises aux règles des traités, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l'intérêt de l'Union ». Cette question ne sera pas développée dans le présent travail et il est renvoyé, notamment, aux ouvrages suivants : A. RACLET, Droit communautaires des affaires et prérogatives de puissance publique nationales, Dalloz, 2002 ; J.-V. LOUIS et S. RODRIGUES, Les services d’intérêt économique général et

traitement entre elles est, a priori, discriminatoire. Au contraire, la Cour Suprême a, dans des arrêts récents, jugé que les entreprises publiques et les entreprises privées ne se trouvaient pas dans une situation similaire, notamment en raison des objectifs non exclusivement économiques poursuivies par les premières. Aussi, a-t-elle pu considérer qu’une mesure favorisant une entreprise publique n’était pas discriminatoire, l’ensemble des critères de qualification de la discrimination n’étant pas réuni409. Cette jurisprudence, en ce qu’elle conduit, en théorie, à immuniser une catégorie large de traitements différentiels, a été vivement débattue410.

93. Ces exemples révèlent que la question de la comparabilité est, en pratique, délicate à résoudre. Etroitement liée aux faits d’espèce, elle est souvent discutable411. Aussi, la doctrine a pu reprocher tant à la Cour de justice qu’à la Cour Suprême, de « ne pas avoir donné un contenu suffisant à la notion de « similitude » des situations […]. L’échec des juridictions

d’articuler des standards clairs […] a conduit à une incertitude juridique significative

[…]»412.