1.3 Equivalence d’homotopie
1.3.2 Compactifications
On introduit dans ce paragraphe la notion de compactification, et plus pr´ecis´ement de bonne compactification (cf [SV96], §3) qui va nous servir `a interpr´eter certains groupes de correspondances finies `a homotopie pr`es.
Remarque 1.3.4.– L’hypoth`ese que S est un k-sch´ema r´egulier noeth´erien est, dans cette sous-section concernant les compactifications, surperflue.
1.3.2.1 D´efinition
D´efinition 1.3.5 Soit X une courbe sur S.
1. Une compactification de X/S est un S-sch´ema ¯X, muni d’un S-morphisme X −→ ¯i X tel que :
(a) i est une immersion ouverte. (b) ¯X/S est une courbe propre. (c) ¯X est normal.
On note dans ce cas X∞= ¯X − i(X) le sous-sch´ema ferm´e r´eduit de ¯X associ´e.
2. On dit qu’une compactification ¯X/S de X/S est bonne ssi X∞ admet un voisinage
ouvert affine sur S dans ¯X.
Remarque 1.3.6.– Ainsi, si ¯X/S est une bonne compactification de X/S, X∞ est fini
sur S, car il est propre et affine sur S.
Remarque 1.3.7.– Consid´erons dans cette remarque que tous les sch´emas sont essen- tiellement de type fini (cf d´efinition A.1.1) sur un corps de base k. Soit X un S-sch´ema tel que X est normal. Supposons donn´e ¯X un S-sch´ema v´erifiant les conditions (a) et
(b) de la d´efinition pr´ec´edente, et tel que X∞ admette un voisinage affine V . Soit ˜X le
normalis´e de ¯X. Alors, ˜X −→ ¯p X est fini car ¯X/k est essentiellement de type fini, donc
˜
X/S est une courbe propre normale. Par ailleurs, X ´etant normal, c’est un ouvert de ˜X.
Enfin, l’image r´eciproque de V par p est un voisinage affine de ˜X − X dans ˜X, puisque p
est en particulier affine. Donc ˜X/S est une bonne compactification de X/S.
Pr´ecisons qu’on appelle simplement paire ferm´ee tout couple de sch´emas (X, Z) tel que
Z est un sous-sch´ema ferm´e de X, d’apr`es la d´efinition 5.4.1.
D´efinition 1.3.8 Soit (X, Z) une paire ferm´ee.
Soit S un sch´ema et f : X → S un morphisme de sch´emas de dimension relative ´egale `a 1 qui fait de X un S-sch´ema.
Une bonne compactification de (X, Z) relativement `a S est un S-sch´ema ¯X qui est `a la fois une bonne compactification de X/S et de (X − Z)/S.
Remarque 1.3.9.– On dira encore que (X, Z) admet une bonne compactification sur
S pour dire qu’il existe un S-sch´ema ¯X tel que ¯X/S est une bonne compactification de
(X, Z) relativement `a S.
Autrement dit, une bonne compactification de (X, Z) sur S est une compactification de X/S telle que X∞t Z admet un voisinage ouvert affine sur S.
1.3.2.2 Le cas des courbes sur un corps de base
La situation est simple dans le cas o`u on ´etudie les courbes sur un corps. Proposition 1.3.10 Soit C/k une courbe quasi-affine et r´eguli`ere.
Alors, il existe une courbe projective r´eguli`ere sur k not´ee ¯C telle que pour tout sous- sch´ema ferm´e Z de C ne contenant aucune composante irr´eductible de C, ¯C est une bonne compactification de (X, Z) sur k.
Preuve : On peut se ramener au cas o`u C est affine. D`es lors, C/k ´etant affine et de type fini, on peut consid´erer une immersion ferm´ee C → Ank. Soit ¯C l’adh´erence de C
dans Pn
k, munie de sa structure r´eduite. Alors, par d´efinition, ¯C/k est une courbe int`egre
et projective.
Consid´erons ˜C/k la normalisation de C/k, qui est une courbe de type fini puisque ¯C/k
est de type fini. Alors, ˜C est fini sur C, donc propre sur k. Comme ˜C est normal, il r´esulte
de [EGA2], 7.4.5 et 7.4.10, que ˜C/k est une courbe projective et r´eguli`ere.
Par ailleurs, C est un ouvert dense de ¯C. Donc, comme C est un sch´ema normal, c’est
encore un ouvert dense de ˜C.
Soit Z une partie ferm´ee de C de dimension nulle. Le sous-ensemble ( ˜C − C) t Z est
donc une partie ferm´ee de ˜C/k, constitu´ee d’un nombre fini de points. Elle admet donc
un voisinage affine puisque ˜C/k est projective. ¤
1.3.2.3 Cas semi-local
Le th´eor`eme suivant est dˆu `a M.Walker :
Th´eor`eme 1.3.11 (Walker) Supposons que k est un corps infini.
Soit (X, Z) une paire ferm´ee, telle que X est un sch´ema affine dans Lk. On suppose que Z est partout de codimension non nulle dans X.
Consid´erons {x1, ..., xn} un ensemble de points de X.
Alors, il existe :
1. un sch´ema affine S alg´ebrique lisse. 2. un voisinage ouvert affine U des xi.
3. un k-morphisme f : U → S lisse de dimension relative 1
tels que le couple (U, U ∩ Z) admet une bonne compactification sur S.
Preuve : La preuve suivante reprend la d´emonstration correspondante dans [Wal96], remarque 4.13.
1) R´eduction : On peut tout d’abord supposer que X est irr´eductible, puisqu’il est somme disjointe de ses composantes irr´eductibles.
Par ailleurs, on peut supposer que tous les xi sont ferm´es quitte `a prendre des sp´ecial-
isations, et que Z est de codimension 1 dans X, quitte `a le grandir.
Enfin, si l’on peut trouver une bonne compactification relative au voisinage de chacun des points s´epar´ement, puisque ceux-ci sont ferm´es, on peut r´eduire les ouverts correspon- dants pour qu’ils soient disjoints, ce qui donne ensuite une compactificaton pour la somme disjointe de ces ouverts, qui convient.
Le probl`eme se r´esume donc `a trouver une bonne compactification relative pour un diviseur Z de X au voisinage d’un point ferm´e not´e x.
2) Construction de S : Soit r + 1 la dimension de X. Ainsi, Z est purement de dimension r.
Puisque X est affine de type fini sur k, on peut consid´erer une immersion ferm´ee
X ,→ An
k, ce qui nous permet d’identifier X `a un sous-sch´ema ferm´e de Ank. On note :
1. ¯X l’adh´erence de X dans Pn
k vu comme sous-sch´ema r´eduit de Pnk
2. ¯Z l’adh´erence de Z dans Pn
k vu comme sous-sch´ema r´eduit de Pnk
3. ˙X = ¯X − X la fronti`ere de X dans Pn
k, qui est encore l’intersection de ¯X avec
l’hyperplan `a l’infini. C’est un sch´ema de dimension inf´erieure `a r.
On se r´eserve le droit d’augmenter n en consid´erant un plongement arbitraire An
k ,→ An
0
k .
On cherche le morphisme f en consid´erant les projections orthogonales de An
k dont le
centre est en position g´en´erale parmi les sous-vari´et´es lin´eaires de An
k de codimension r.
Param´etrisation des projections orthogonales An k → Ark.
Plus pr´ecis´ement, ces projections sont param´etr´ees par les points du sch´ema Anr k . En
effet, si λ est un point de Anr
k , notant κ(λ) son corps r´esiduel, il correspond `a un point
rationnel de Anr
κ(λ), c’est-`a-dire un ´el´ement (λi,j)1≤i≤r
1≤j≤n de κ(λ)
nr.
On associe donc `a λ une projection lin´eaire pλ =: An
κ(λ) → Arκ(λ) d´efinie comme le
spectre du morphisme κ(λ)-lin´eaire
κ(λ)[t1, ..., tr] → κ(λ)[X1, ..., Xn]
ti 7→
Pn
j=1Xj− λi,j.
On note Lλ le centre de cette projection, c’est-`a-dire le sous-sch´ema ferm´e d´efini par
l’intersection des r hyperplans correspondant aux z´eros de chaque projections de pλ sur A1κ(λ).
Par ailleurs, si ˙Lλ d´esigne la fronti`ere de Lλ vu comme sous-sch´ema de Pnκ(λ), le mor-
phisme pλ se prolonge sur les espaces projectifs en un morphisme ¯
pλ : Pnκ(λ)− ˙Lλ → Prκ(λ).
Munis de ces notations, on peut ´enoncer le lemme suivant qui va nous servir `a trouver le morphisme f de l’´enonc´e :
Lemme 1.3.12 Notons Ωn l’ouvert de Anrk form´e des points λ tels que :
1. pλ|Zκ(λ) est finie.
2. ˙Xκ(λ)∩ ˙Lλ est constitu´e d’un nombre fini de points ferm´es.
Alors, pour n assez grand, Ωn est dense dans Anrk .
Preuve : Il est facile de montrer que Ωn est ouvert, et la partie difficile est de voir que cet ouvert est dense. On fait la d´emonstration en deux ´etapes :
i) On se place d’abord dans le cas o`u x est un point rationnel de X. On peut donc supposer que x = 0 dans An
k.
Le fait que la premi`ere condition est dense r´esulte du fait que Z est ferm´e de dimension
r dans Ank.
Le fait que la deuxi`eme condition est dense r´esulte de ce que l’intersection dans Pnk de la sous-vari´et´e projective ˙X, qui est de dimension inf´erieure `a r, avec une sous-vari´et´e
projective lin´eaire de codimension r en position g´en´erale est finie.
Pour la troisi`eme condition, il suffit de garantir que l’intersection de Lλ avec X est
transverse en 0. On utilise alors le th´eor`eme suivant pour lequel on renvoie `a [SGA4], expos´e XI, th´eor`eme 2.1 :
Th´eor`eme 1.3.13 L’intersection dans An
k de X avec r hypersurfaces de degr´e 2 contenant
0 et qui sont en position g´en´erale est transverse. Or, quitte `a plonger An
k dans An
2
k par le plogement de Veronese, une sous-vari´et´e
lin´eaire de An2
k correspond `a une quadrique (donc de degr´e 2) de Ank, et le th´eor`eme
pr´ec´edent s’applique pour montrer que la troisi`eme condition est dense. ii) Cas g´en´eral.
On consid`ere une extension finie k0/k telle que la fibre de x dans X ⊗
kk0soit constitu´ee
de points rationnels x0
i. Pour chacuns de ces points, les conditions de l’´enonc´e donnent
donc un ouvert Ω0n,i dense dans Anrk0. L’extension Ark0/Ark ´etant fid`element plate, les
conditions de l’´enonc´e se redescendent, et l’image directe de ∩iΩ0n,i dans Anrk est incluse
dans Ωn, ce qui implique que Ωn est dense. ¤
Puisque k est infini, Ωn admet donc un point rationnel λ. On note alors p : X → Ar k
la restriction de pλ `a X. On pose ˙L = ˙X ∩ ˙Lλ qui est donc un sch´ema fini sur k d’apr`es la
condition 2 du lemme pr´ec´edent. On dispose donc du morphisme ¯p : ¯X − ˙L → Pr
k obtenu
par restriction du morphisme ¯pλ.
On utilise le truc classique suivant pour rendre ¯p projectif. On note ˜X l’adh´erence du
graphe de ¯p dans ¯X ×kPrk. D`es lors, ¯X − ˙L est un ouvert dense de ˜X, et la projection
canonique ˜p : ˜X → Pr
k prolonge ¯p. Comme ¯X/k est projectif, ˜p est projectif. On a donc
obtenu le diagramme suivant :
X p ²² // ¯ X − ˙L ¯ p ²² // ˜ X ˜ p ||xxxx xxx Ar k //Prk. 3) Construction de la compactification :
Comme le carr´e du diagramme ci-dessus est cart´esien et que L est fini sur k (condition 2 du lemme pr´ec´edent), les fibres de ˜p dans ˜X − X au-dessus de Ar
Donc, il existe un voisinage ouvert S de p(x) dans Ar
k tel que ˜p−1(S) ∩ ( ˜X − X) est
fini sur S. Quitte `a r´eduire S, puisque d’apr`es la condition 3 du lemme pr´ec´edent, p est lisse en p−1(p(x)), on peut supposer que p−1(S) → S est lisse.
Finalement, on pose donc U = p−1(S), et on note f : U → S la restriction de p `a
U . Le morphisme f est donc lisse de dimension relative 1. De plus, d’apr`es la premi`ere
condition du lemme pr´ec´edent, le morphisme Z ∩ U → S, obtenu par restriction de p, est fini.
On pose encore ¯U = ˜p−1(S), de sorte que le morphisme ¯f : ¯U → S obtenu par
restriction du morphisme ˜p est projectif. Il en r´esulte enfin que ¯U − U est fini sur S,
d’apr`es le choix de S.
Pour conclure, le lemme suivant montre, quitte `a restreindre encore S au voisinage de
p(x), que ( ¯U −U )tZ ∩U admet un voisinage ouvert affine, ce qui conclut la d´emonstration
du th´eor`eme :
Lemme 1.3.14 Soit ¯p : ¯U → S un courbe projective, et F un ferm´e de ¯U tel que F/S est fini. Soit x un point de F , d’image s dans S.
Alors, il existe un ouvert affine S0 de S contenant s, et un diviseur effectif D dans ¯X
tel que :
1. FS0 est inclus dans ¯US0− D.
2. ¯US0 − DS0 est affine.
Preuve du lemme : On regarde Fs la fibre de F au-dessus de s. L’ensemble sous-jacent `a
Fs est donc fini. Comme ¯U /S est projectif, il existe une section f dans Γ( ¯U , OU¯(i)), pour
i suffisamment grand, dont le diviseur D est disjoint de Fs. Il existe donc un voisinage
ouvert affine S0 de s dans S, tel que D est disjoint de F
S0, ce qui garantit la premi`ere
condition. Comme S0 est affine, et D
S0 est le diviseur associ´e `a une section globale d’un
fibr´e tr`es ample sur ¯US0, le sch´ema ¯US0− DS0 est affine. ¤ ¤