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Commentaire justificatif

I. Lexicographie diachronique : Notices Étymol(ogie) et Hist(oire) du TLF

2. Du dépouillement à l’intégration

2.3. Structuration de la notice

2.3.2. Section étymologie-origine

2.3.2.2. Composantes de la section : analyse étymologique et commentaire

2.3.2.2.3. Commentaire justificatif

Le commentaire permet d'asseoir un étymon, par l'intermédiaire notamment des

rapprochements avec d'autres langues ou des dialectes qui remontent au même étymon, en

particulier lorsque la filiation entre le français et la langue d'emprunt est difficile à établir :

MATAMORE

2

Empr. à l'ar. matmūra «fosse; prison souterraine; silo souterrain», part. passif fém. substantivé de tamara

«enterrer, enfouir, cacher sous terre» (DEVIC; DOZY t. 2, p.60b; LAMMENS, pp.160-161; LOK. n

o

1444; NASSER, p.472). Cf. aussi, de même orig., le port. masmorra «cachot, prison souterraine» (XV

e

s.

mazmorra ds MACH.) et l'esp. mazmorra «id.» (fin XV

e

s. ds COR.-PASC.) d'où est empr. le fr.

masmorra «id.» (1665-66, B. DE MONCONYS, J. des voyages, t. III, p.30 ds REINH., p.247).

Oringuer

de orin, dés. -er (cf. les formes aurinque en port. et orinque en esp., ainsi que le verbe orinquear att. en

esp. à partir de 1587, v. COR.-PASC.).

Le rôle du commentaire justificatif est essentiel en ce qui concerne les lexèmes dont l’étymologie

est considérée comme inconnue, non résolue ou purement hypothétique, car il permet de rendre

compte de l’état des connaissances en étymologie au moment de la rédaction.

Pour les mots d’origine controversée, l’étymon jugé le plus plausible est cité en tête de

commentaire sous l’autorité de celui qui l’a proposé le premier (sauf si elle émane du rédacteur

diachronicien). Cet étymon retenu eu égard au fait qu’il satisfait « au plus grand nombre de

critères possible » est suivi « d’un court exposé sur les éléments qui ont motivé ce choix » puis,

dans la plupart des cas, d’ « un paragraphe consacré aux principales hypothèses éliminées, avec,

brièvement énumérées, les éléments qui constituent leur faiblesse et font difficulté » (Gérard 1972,

276). Pour exprimer le manque de certitude quant à l’étymon, celui-ci est généralement précédé

de ‘Peut-être’ ou ‘prob. (= probablement)’ ; pour signaler l’accord des étymologistes sur une

hypothèse émise, l’étymon est précédé de ‘On admet gén. (= généralement)’, et dans ce cas, ne

figurent pas les hypothèses éliminées :

LISIÈRE

Orig. incertaine. Peut-être dér. de l'a. b. frq. *lisa « ornière », que l'on suppose d'apr. le lituanien lys «

plate-bande (d'un jardin) » et l'a. prussien lyso « id. (d'un champ) ». Cette forme *lisa a dû exister à

côté de l'a. b. frq. *laiso, de la même famille que l'all. Gleis, Geleise « voie ferrée, ornière »; cf. a. h.

all. waganleisa « ornière »; cf. aussi le norm. alise « ornière »; alisée « id. » (v. REW

3

et FEW t. 16, p.

468b). L'hyp. du FEW t. 5, pp. 313b-314a, qui dérive lisière du subst. masc. lis (du lat. licium « lisière

d'étoffe »), est peu probable, ce dernier étant plus récent que lisière (1380, « grosses dents aux

extrémités d'un peigne de tisserand », Ordonnances des rois de France, t. 6, p. 473, v. aussi note b;

puis, au XVIII

e

s., au sens de « lisière d'une étoffe », v. FEW t. 5, p. 312b)

FASÉYER

Orig. obsc. On admet gén. pour étymon (cf. EWFS

2

et FEW t. 15, 2, p. 114a) le m. néerl. faselen « se

mouvoir violemment », attesté une seule fois par Kiliaen d'apr. VALKH. : faselen, agitare, factitare,

liberis operam dare.

HALOT

Orig. incertaine. Peut-être, malgré l'écart chronol., dér. en -ot, d'un subst. *hal, de l'a.b.frq. *hal «

grotte, trou », var. de hol (v. houle), restitué d'apr. l'ags. hal « endroit caché, retiré; coin » (cf. Z. rom.

Philol. t. 38, p. 693).

REGRETTER

Étymol. discutée, v. FEW t. 16, p. 53b-54a et P. SKÅRUP ds St. neophilol. t. 37, 1965, pp. 45-50 et t.

41, 1969, p. 25-30. On a voulu y voir une orig. lat. (la dernière hyp. étant celle de H. MEIER ds Arch.

St. n. Spr. t. 117, 1965-66, p. 266-269, qui propose un lat. *requǐrǐtāre, dér. à itératif double de quĕrī

« se plaindre »), mais les étymons lat. présentant de graves difficultés, il vaut mieux accepter un

étymon germ. pourvu du préf. re- prob. tiré p. anal. d'autres nombreux verbes de la vie affective et

intellectuelle (repentir, remembrer, recorder, etc.). Wartburg propose l'a. scand. grāta « pleurer »

(apparenté aux got. gretan « id. » et m. h. all. grāzen « id. ») dont le résultat regreter au lieu de

regrater (forme rarement att., en a. fr.: ca 1180 « se livrer à des lamentations » GUILLAUME DE

BERNEVILLE, Gilles, 3562 ds T.-L.) fait difficulté; Wartburg l'explique comme acheter* en face de

achater. Pour aboutir à regreter, Skårup propose de partir d'un a. b. frq. *greotan « pleurer » (d'apr.

l'ags. gréotan « pleurer » et l'a. sax. griotan/greotan « id. »).

Mais, à cette présentation peut se substituer celle qui donne en tête l’hypothèse généralement

admise par les étymologistes, suivie d’une nouvelle hypothèse plus satisfaisante :

OGIVE

Mot d'orig. incertaine. On a voulu voir dans ogive un empr. à l'esp. algibe, aljibe «citerne», lui-même

empr. à l'ar. hisp. *al-djibb, altération de l'ar. class. al-djubb «id.», en raison, d'une part, de l'équivalence

du fr. croix d'augive, croisée d'augive (supra) avec l'esp. boveda de aljibe littéral. «voûte de citerne» d'où

p. ext. «voûte d'arête, voûte d'ogive» et, d'autre part, des formes anc. oegive, augive, orgive (v. GDF.

Compl. et Doc. ds M. AUBERT, Les plus anciennes croisées d'ogives, Paris, 1934, pp.167-169) qui

semblaient représenter des essais de transcr. de l'esp. algibe (cf. G. S.COLIN ds Romania t. 63 1937,

pp.377-381); mais boveda de aljibe ne semble pas att. av. 1661 (v. COR.-PASC.). La ressemblance du fr.

ogive avec l'angl. ogee «arc brisé; genre de moulure» (1428-29 ds NED), lui-même prob. empr. à un

anglo-norm. *ogé, du lat. obviatum «qui va à l'encontre de» (part. passé de obviare, v. obvier), fait plutôt

penser à un élargissement du type *obviativa, du lat. obviata, fém. de obviatum (cf. C.BRUNEL ds

Romania t. 81 1960, pp. 289-295).

En cas d’hésitation entre deux étymons, le rédacteur met toujours en tête celui qui a sa préférence,

la seconde hypothèse est alors introduite par la formule ‘plutôt que’ :

INCESSAMMENT

Francisation à l'aide du suff. -ment

2

*, du b. lat. incessanter « id. » (cf. NIERM. et BLAISE, Lat. Chrét.),

plutôt que dér. de incessant* plus tardif.

Lorsque plusieurs étymons proposés se valent, les deux plus vraisemblables sont introduites par la

formule : ‘soit… soit…’ :

FOURBANCER

Orig. obsc. Soit altération d'apr. fourbir* (cf. FEW t. 3, p. 901a, note 8), de fourgancer « fourgonner,

bouleverser », var. dial. de fourgonner au sens de « fouiller quelque part en dérangeant les objets » (cf.

FEW t. 3, p. 900a); cf. encore à tort, le berrichon forbanser « rôder avec de mauvaises intentions » (cf.

FEW t. 15, 1, p. 65b); soit dér. du rad. de fourbir* avec un suff. -ancer difficile à expliquer (cf. FEW t.

15, 2, p. 189b)

MAURELLE

Soit, p. ext. de sens, de morelle*; soit dér. de maure*; suff. -elle*.

SCULPTER

Soit issu, par croisement avec sculpteur*, de l'anc. verbe sculper « graver, inciser dans une matière

dure » (fin du XV

e

s. [ms.] Ancienneté des Juifs, ms. Paris, Bibl. Ars. 5082, f

o

299d ds GDF.), lui-même

empr. au lat. sculpere « tailler »; soit tiré du lat. sculptum, supin de sculpere, sous l'infl. de sculptor, v.

sculpteur. Sculper a été évincé à la fin du XVIII

e

s. par sculpter qui semble être entré dans l'usage au

déb. du XVIII

e

s. (v. FEW t. 11, p. 346b)

Lorsque aucune hypothèse jusqu’ici proposée ne convient et que l’origine reste inconnue, les

différentes hypothèses sont « classées par ordre décroissant de probabilité, avec pour chacune,

mise en évidence des éléments positifs et négatifs » (Gérard 1972, 276) :

GUIGNE

1

Orig. obsc. Peut-être de l'a. b. frq. *wihsila « griotte »; cf. a. h. all. wîhsela de même sens, m. h. all.

wihsel; all. Weichsel « id. ». Cette hyp. fait pourtant difficulté, la présence du -n- en fr. étant inexpliquée.

La mouillure du -n- est due à l'infl. du nom de l'arbre de guignier. Cf. FEW t. 17, p. 582 a.

HUBLOT

Peut-être altération du subst. hulot « ouverture pratiquée dans le panneau de la fosse des câbles » (1694,

CORNEILLE), lui-même peut-être dér. du norm. houle au sens de « trou, brèche, cavité » (cf. houle et v.

FEW t. 16, p. 220 mais aussi v. FEW t. 23, p. 105a); suff. -ot*. L'insertion du -b- s'expliquerait par une

rencontre dans la région nantaise du norm. hulot et du poitevin loubier « vasistas, lucarne » (cf. aussi

nantais hubiau « sorte de cornet destiné à aérer les greniers » ds FEW t. 16, p. 257a). L'hyp. du FEW t.

16, p. 256a, selon laquelle hublot serait une altération de huvelot, dér. de l'a. subst. huve « sorte de coiffe

» (ca 1225 ds T.-L.), suff. -elot (-ot*) est incertaine à cause du sens peu clair de l'hapax huvelot de

1382-84 (Comptes du Clos des Galées de Rouen, éd. Ch. Bréard, p. 77).

LICHETTE

Orig. obsc. Soit dér. de licher* « lécher »; suff. -ette (v. -et), avec infl. phonét. de lèche

1

* « tranche

mince » (cf. FEW t. 16, p. 460b et p. 462b, note 23); soit plus vraisemblablement, var. de léchette « petite

lèche » (dimin. de lèche

1

*); cf. aussi la forme [lita] que l'on trouve à Poncins, ainsi que les var. en -i-

de lèche

1

, attestées pour la plupart en fr.-prov. et dans le Centre (cf. FEW t. 5, p. 373a-b). On trouve un

licquette « petit morceau, bribe » en 1501 (Livre de conduite du régisseur et compte des dépenses pour le

Mystère de la Passion, éd. G. Cohen, p. 164b)

MORTAISE

Mot d'orig. obsc. L'hyp. proposée par DEVIC et admise dans le REW et par LOK., d'un empr. à l'esp.

mortaja «id.», qui remonterait lui-même à l'ar. murtazza, part. passé de razza «introduire une chose dans

une autre», semble peu vraisemblable aussi bien du point du vue phonét. que chronol.: l'anc. forme

mortoise et l'a. prov. mortaiza, mortaissa (XV

e

s., cf.FEW t. 23, p.15a) s'accordant mal avec le mot ar. et

l'esp. mortaja n'étant att. qu'en 1734, Autoridades. Cf. FEW, t. 23, p.15 a-b et COR.-PASC.

ORIN

Mot d'orig. obsc. L'hypothèse d'une étymol. néerl. (proposée par D. BEHRENS, cf. aussi FEW t.16, p.

605a-b) semble devoir être rejetée tant pour des raisons d'ordre chronol. que sém.: le hapax néerl. ooring

n'étant att., comme terme de mar., qu'en 1861-62, tandis que les lang. rom. connaissent le mot dep.

lontemps (1340, orri en cat.; 1416, ourinque en port.; 1518, orinque en esp.) et le sens d'«anneau

inférieur de l'ancre» du néerl. ooring paraissant bien distinct de celui de «cordage; amarre» att. par les

dial. ibériques. Cf. G. COLON ds R. Ling. rom. t. 26, 1962, pp.170-183; M. HÖFLER ds Z. rom. Philol.

t. 82, 1966, pp. 460-463 et COR.-PASC., s.v. orinque.

PAGE

1

Orig. incertaine. Un empr. à l'ital. paggio (dep. 2

e

moitié du XIV

e

s., FILIPPO VILLANI ds

TOMM.-BELL.), qui serait issu du gr. paidi'on par l'intermédiaire d'une forme romanisée páidiu (DIEZ

3

p.232;

BL.-W.

4-5

; FEW t.7, p.475a) fait difficulté en raison de l'antériorité du mot fr. (cf. aussi angl. page, dep.

1300 d'apr. NED, empr. au fr.). F. HOLTHAUSEN (ds Anglia, Beiblatt t.14, p.336), suivi par DEI,

propose comme étymon le lat. pathicus «sodomite passif» (ds OLD), lui-même empr. au gr. (v.

LIDDELL-SCOTT), mais cette hyp. fait difficulté du point de vue hist. (v. REW

3

n

o

6150 et

COR.-PASC., s.v. paje). L. SPITZER (ds Z. rom. Philol. t.42, pp.340-342) propose un lat. *pagicus «paysan»

(dér. de pagus) mais cette hyp. ne convient ni du point de vue sém. (v. FEW, loc. cit.) ni du point de vue

phonét. (v. COR.-PASC., loc. cit.); un lat. vulg. *pageus, lui aussi dér. de pagus (C. A. RICE ds

Language t.9, pp.309-310) est tout aussi invraisemblable.

RIME

Étymol. incertaine. On a proposé le lat. rhythmus, v. rythme et l'a. b. frq., a. h. all. rim « série, nombre ».

Ces 2 hyp. posent le probl. du genre, rhythmus et rim étant masc. tandis que le fr. rime est fém. L'a. prov.

rim, masc. considéré jusqu'ici comme la forme primitive à côté du fr. rime et de l'a. prov. rima supposés

de formation plus récente, est en fait un doublet de la région toulousaine et langued. du fém. rima (v. P.

ZUMTHOR ds Trav. Ling. Litt. Strasbourg t. 2 n

o

1 1964, p. 188 qui nous montre par ailleurs que l'hyp.

du EWFSrime est présenté comme un déverbal de rimer « faire des rimes », d'un gallo-rom. *rimare

« disposer sur un rang », repose sur une forte part de probab., ibid., p. 192). L'étymon rhythmus pour

lequel on a suggéré l'évol. à partir du sens « vers non métrique » à « vers rimé » puis « rime », se heurte

à des difficultés d'ordre phonét. et sém. Les formes *rimmo, *remmo attendues en ital. et les formes

intermédiaires *ritme, *ridme attendues en fr. ne sont pas att. et il est difficile de comprendre comment

rhythmus qui désigne en b. lat. le vers non métrique simpl. accentué dont le caractère fondamental est la

cadence, a pu prendre le sens de « rime », la rime n'y ayant qu'un caractère secondaire. L'a. b. frq. *rim,

d'apr. l'a. h. all. rim « série, nombre », phonét. plausible, semble convenir pour le sens (du sens de «

suite » on a facilement pu passer à celui de « série de fins de vers semblables » puis « rime »), mais rime

serait le seul mot de l'anc. terminol. littér. à provenir du germ. (v. P. ZUMTHOR, op. cit., p. 189).

Il arrive que soient indiqués « en toute hypothèse, les rapprochements et les affinités possibles »

(Gérard 1972, 276) :

RINGARD

2

Orig. inc. Peut-être empl. comme n. commun d'un n. propre (v. CELLARD-REY).

On constatera que toutes les hypothèses émises le sont à la suite d'un examen critique sévère où

sont analysés aussi bien les points faibles que les points forts ; ces hypothèses sont accompagnées

à la fois d’un argumentaire justificatif où sont pesés le pour et le contre, avant qu’une solution ne

soit adoptée, et d’un renvoi précis aux autorités de référence.

Mais, en dehors de ces questions proprement étymologiques, le commentaire permet de

traiter d’autres aspects linguistiques et de développer les évolutions inattendues qui s’écartent des

règles générales, qu’elles soient phonétiques, sémantiques ou grammaticales. Ce commentaire sert

aussi à renseigner l’utilisateur du dictionnaire sur l’usage d’un mot ou d’une locution, sur les

variantes ou les synonymes en concurrence et enfin sur des éléments extra-linguistiques qui

ressortissent à l’encyclopédisme comme les éléments historiques référentiels fiables. Chaque

étymon direct, chaque hypothèse avancée comporte la référence bibliographique de l’autorité

scientifique émettrice, comme je l’ai déjà observé plus haut.

2.3.2.2.3.2. Typologie des données

À présent, je dégagerai le genre d’informations susceptibles d'être données dans ce

commentaire justificatif ; pour ce faire, je dresserai une typologie sommaire des principales

caractéristiques que le consultant peut s’attendre à y voir figurer et que j’ai rangées sous six

catégories distinctes.

1) ARGUMENTATION PHONETIQUE OU GRAPHIQUE

Cette argumentation a pour but de répondre aux questions posées par les formes

irrégulières de l’évolution phonétique entre l’étymon et l’unité lexicale moderne. Il faut expliquer

quand et pourquoi ont eu lieu les altérations par rapport à l’évolution phonétique (ou graphique)

attendue. Ces altérations, comme en témoignent les exemples qui suivent, peuvent être liées à des

phénomènes articulatoires comme la dissimilation ou la métathèse ou résulter d’un conservatisme

propre à certaines spécialités professionnelles ; d’autres altérations s’expliquent tout simplement

par l’influence d’un autre mot, comme par exemple un mot régional, ou par l’influence d’une

langue sur l’autre.

a) phonétique

FIGER

issu du lat. de l'époque imp. ficatum devenu *fecatum (v. foie) puis feticum, avec métathèse des

consonnes c et t et substitution de suff.; la forme figier serait due au pic. fie issu de *ficatum.

FORESTIER

Forestier conserve la prononc. du -s- sous l'infl. de la lang. jur. qui s'en est tenue à la forme anc.

HALER

2

Dér. de l'anc. interj. hare (s.v. haro); dés. -er. La forme haler provient sans doute d'une dissimilation

des deux -r-, occasionnée par l'inf. et le fut. (cf. FEW t. 16, p. 151b), et qui a gagné les autres mots de

la famille (cf. TILANDER Nouv. Essais, pp. 100-102).

HECTIQUE

Empr. sav. au lat. hecticus (v. étique). La forme hectique qui apparaît à côté de étique au XVI

e

s., est

due à un rapprochement avec le gr. e<ktiko'j. Il faut cependant noter que la graphie hectique se

prononçait encore [etik] jusqu'à la fin du XVIII

e

s. (cf. Trév. 1771).

JE

d'après l'ensemble des lang. rom. : ital. io, roum. eu, esp. yo, port. eu, fr. je,... (cf. VÄÄN., p. 131, §

280). La diversité des formes d'a. fr. : gié, jeo, jo..., s'explique par des traitements phonét. variés,

encore mal éclaircis, de *eo, selon que la force d'accent s'était maintenue ou non (cf. FOUCHÉ t. 2, p.

162-163, FR. DE LA CHAUSSÉE, Initiation à la morphologie historique de l'ancien français, p. 74,

§ 58 et BOURC.-BOURC., § 49, II). La forme atone je, déjà attestée dans Roland semble provenir

d'un affaiblissement de jo. L'emploi de jo/je devant le verbe est devenu plus fréq. à la suite de

l'effacement des dés. verb. L'usage de je comme forme forte (dont il nous reste p. ex. la formule je

soussigné) s'est maintenu jusqu'au XVII

e

s. (cf. NYROP t. 5, § 177).

[Le DEAF J, 229-233 en donnant un « un tableau représentatif de toutes les formes possibles »

de je en ancien français, permet de préciser davantage le développement de eo selon que

l’accent porte sur la première ou sur la deuxième voyelle et signale que toutes les formes qui en

sont issues se trouvent aussi bien en position tonique qu’en position atone, excepté le type gié

qui ne figure qu’en position tonique]

MANDILLE

Ces formes sont vraisemblablement issues, à la suite d'une évolution cour. de -nt- en -nd- dans le

domaine occitan et en partic. en gasc. (cf. ROHLFS Gasc. 1970, pp. 137-139 et R. Ling. rom. t.45,

1981, p. 96, 116), du lat. mantile «essuie-main, serviette, nappe» (cf. TLL), var. de mantele, réfection

de mantelia, plur. de mantilium, var. de mantelum (v. manteau). Il n'est donc pas nécessaire, pour

justifier la forme -nd- de suivre le cheminement du FEW qui fait remonter le mot au gr. μανδήλη en

passant par l'hispano-arabe mandil «mouchoir, serviette», issu de l'a. ar. mindil «nappe», lui-même

issu de l'a. syrien (cf. FEW t. 6, 1, p. 629a-b).

MANGOUSTE

2

Graphie hypercorrecte d'une forme prononcée -ousse, qui est probl. empr. au port. mangus «id.»

(1716 ds DALG.; déjà mongus en 1685) lui-même empr. au mahratte mangûs «id.». La forme

mangouste a été vulgarisée par les continuateurs de Biron (voir ARV., pp. 318-320). L'esp. mangosta

et le port. mangusto ont dû subir l'infl. du fr. Voir ARV., pp. 316-321 et KÖNIG, pp. 140-141.

POIREAU

Dér. de l'a. subst. por «poireau» (ca 1225, PEAN GATINEAU, St Martin, éd. W. Söderhjelm, 2210),

du lat. porrum «id.», suff. -eau*. L'altér. de porreau en poireau s'est produite d'abord dans la région

parisienne, prob. sous l'infl. de poire*; mais porreau survit encore dans les parlers provinciaux (v.

FEW t.9, pp.194b-195a).

SOUHAITER

D'un gallo-rom. *subtus-haitare « promettre de façon à ne pas trop s'engager », comp. du lat. subtus,

v. sous* et d'un a. b. frq. *haitan « ordonner, promettre » (cf. le got. haitan, a. h. all. heizzan «

ordonner »); v. FEW t. 16, p. 125b. Le passage de -d- à -t- que l'on note en m. fr. (1

re

moit. du XV

e

s.

[ms. du XVI

e

s.], Deux versions de la vie de S. Eustache, éd. H. Petersen, p. 211, v. 731: je

souhettoye; et en 1458, Arch. Nord B 1689, f

o

6 v

o

ds IGLF: souhaittier) est dû à l'infl. de souhait*.

b) graphique :

HARPE

2

La présence du h- est due à la famille de harper

2

* « saisir ».

PAIX

La graphie étymol. paix a évincé l'anc. forme pais ou pes. Le sens C 1 remonte au lat. chrét. pacem

dare «donner le baiser de paix» (cf. BLAISE Lat. chrét. et FEW t.8, p.95a, note

2

).

2) ARGUMENTATION SEMANTIQUE

C’est aussi dans le commentaire explicatif qu’est signalée l’origine des évolutions

sémantiques et que sont explicités les interférences, emprunts ou calques qui ont agi sur ces

évolutions

LUTHÉRIEN

aussi, d'une façon plus générale, tous les adversaires de la religion catholique (sens qu'avait huguenot*).

À partir de 1560, luthérien se limite au seul sens de «protestant qui professe la religion de Luther».

Sont également abordées les questions relatives aux évolutions sémantiques non triviales,

c’est-à-dire celles qui attestent une rupture dans la continuité de sens entre l’étymon et son continuateur

moderne. Lorsqu’un chaînon de la filiation sémantique a été rompu au profit d’un sens émergent

inconnu qui ne peut être rattaché à aucun sens dérivé, il faut déterminer quel trait spécifique

caractérise le sémantisme du lexème ou quels lexèmes ont subi un développement analogue ou

encore — comme en ce qui concerne l’évolution phonétique irrégulière — quelle influence a pu

être exercée par une autre langue. Dans ce cas, les faits historiques et leur contexte apportent bien

souvent des éléments de réponse.

FOURRAGEUR

1. Fin XIV

e

s. fourrageur « soldat qui va au fourrage, aux vivres » (J. FROISSART, Chroniques, II, 13,

éd. S. Luce, t. 9, p. 16); 2. a) 1553 « pillard » (Bible Gérard, Jere. 48

e

ds FEW t. 15, 2, p. 155a); b) av.

1859 fig. « celui qui prend son bien çà et là » (SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, t. 14, p. 256); 3. 1841 «

cavalier d'un peloton qui combattait en ordre dispersé » (BALZAC, loc. cit.). Dér. de fourrage*; suff.

-eur

2

. L'approvisionnement en vivres pour l'armée s'effectuait généralement dans l'anarchie la plus totale

d'où les sens 2 a et b.

HOMARD

1525. VI. hommars zool. (Comptes de François I

er

, B.N. 10384, f

o

13 r

o

ds GDF. Compl.); 2. 1847 «

soldat anglais » (Dictionnaire d'argot ds ESN.) (…)

Le sens 2. s'explique par une analogie de couleur (cf. aussi l'angl. lobster, proprement « homard » qui

servait à désigner les soldats angl. d'apr. leurs uniformes rouges : ca 1643 ds NED).

[il faut y voir un emprunt sémantique à l’anglais]

INFESTER

4. méd. a) ca 1570 « infester, atteindre (d'une maladie) » (JEAN VATEL, Discours sur les corruptions

de ce tems ds Satires françaises du XVI

e

s., éd. F. Fleuret et L. Perceau, t. 1, p. 130 : la contagion qui

nostre France infeste); de nouv. b) 1910 « envahir (en parlant des parasites pénétrant dans un

organisme) » (BRUMPT, Parasitol., p. XXIII). Empr. au lat. infestare « harceler, ravager, désoler »; au

fig. « attaquer, altérer, corrompre ». Le sens 4 est prob. dû à l'infl. de son paronyme infecter*.

JAMBE

Le fait de montrer une belle jambe et de prendre une démarche avantageuse a donné lieu à l'expr. faire

une belle jambe. Jouer qqn par-dessous la jambe vient prob. d'une allusion aux joueurs de paume ou de

boules qui, pour montrer leur supériorité, lançaient la balle ou la boule en la faisant passer par-dessous