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activités d’introduction de la notion de fonction de densité

5.4 Un point de vue sur les choix des enseignants par rapport aux choix des manuelspar rapport aux choix des manuels

Pour compléter l’étude des manuels, des entretiens avec quatre enseignants nous permettront de mettre en lumière quelques éléments des ETM idoines qu’ils ont choisis, non pas dans un but de les détailler précisément mais pour voir s’ils semblent avoir des points communs avec ceux proposés notamment dans les manuels.

Nous allons présenter la méthodologie relative aux entretiens des enseignants. Puis, nous présenterons les éléments clés.

5.4.1 Méthodologie relative aux entretiens

a) Des entretiens semi-directifs

Pour obtenir des informations sur les ETM idoines proposés par des enseignants, sans pour autant aller dans les classes, nous avons fait le choix de procéder à des entretiens semi-directifs. Les thèmes abordés lors de ces entretiens se trouvent en annexe F.1.

Ces entretiens ayant eu lieu tôt dans l’avancement de notre travail de recherche, en juin 2014, les points qui ont été abordés lors de ces échanges étaient assez larges et les fins n’étaient pas ciblées sur nos questions de recherche actuelles. Pour cette raison, nous n’allons pas ici détailler précisément nos choix de thèmes. Le but de ces entretiens étaient pour nous de se faire une idée assez générale sur les choix faits par l’enseignant au niveau de l’enseignement du calcul intégral et des probabilités à den-sité. Les questions des entretiens se voulaient très larges, pour laisser à l’enseignant la liberté de répondre et de dire ce qui lui passait alors à l’esprit.

Nous ne présenterons pas l’ensemble des réponses apportées mais seulement celles qui permettent de nous éclairer notamment sur l’ordre des chapitres, l’introduction de la fonction de densité et les connexions éventuelles faites entre les probabilités à densité et le calcul intégral au sein de tâches données aux élèves.

Nous avons bien conscience qu’un entretien est déclaratif, ceci est cependant suffisant ici pour ce qui nous intéresse vu qu’il s’agit de connaître les choix des enseignants. Lors des entretiens, les enseignants disposaient de documents relatifs à leurs cours (photocopies des notes de cours d’un élève, documents de l’enseignant, polycopiés distribués aux élèves...). Cela permettait notamment à l’enseignant de pouvoir s’appuyer sur ces documents lors de l’entretien.

b) Profil des enseignants

En juin 2014, à la fin de la première année de la thèse, nous avons procédé à quatre entretiens semi-directifs individuels de quatre enseignants de terminale S. Les quatre enseignants ont été choisis pour leurs profils différents tant du point de vue des années d’expérience, du lieu d’exercice que du milieu social des élèves de leur classe :

– L’enseignant A a plus de 30 ans d’expérience d’enseignement, dont environ 20 ans d’expérience en terminale S. Il exerce dans un lycée, dit prévention

violence, du Val-de-Marne, de milieu social plutôt défavorisé, dans une classe jugée plutôt « faible » par l’enseignant.

– L’enseignant B exerce dans le même lycée que l’enseignant A, cependant ils ne travaillent pas ensemble pour préparer leurs enseignements respectifs. Il a plus de 10 ans d’expérience d’enseignement, dont 7 ans de terminale S. Il travaille quant à lui dans une classe qu’il juge plutôt de bon niveau (elle est constituée d’élèves de section européenne anglais).

– L’enseignante C a plus de 10 ans d’expérience dans l’enseignement et seulement 2 ans d’expérience en terminale S. Elle travaille dans un lycée au Mans, de milieu social plutôt rural, dans une classe hétérogène.

– Enfin, l’enseignante D, qui a plus de 20 ans d’expérience d’enseignement et a été formatrice en IUFM pendant 5 ans. Elle enseigne en terminale S depuis également une vingtaine d’années. Elle exerce dans un lycée parisien du 16e

arrondissement, de milieu social plutôt favorisé, dans une classe avec une bonne tête de classe.

Ces quatre enseignants de profils différents sont pour nous un moyen de toucher un panel de pratiques qui se veulent hétérogènes.

c) Les données

Les quatre entretiens ont duré entre 40 minutes et 1h05. Ils ont tous les quatre été enregistré sur dictaphone. Seul l’entretien avec l’enseignante D (Marie), qui sera à nouveau travaillé plus tard, a été transcrit (cf. Annexe F.2). Comme expliqué ci-dessus, nous disposons aussi en complément d’éléments de cours de chaque ensei-gnant.

5.4.2 Élements des entretiens

Tout d’abord, comme dans les manuels, les quatre enseignants interrogés traitent séparément les deux chapitres de calcul intégral et de lois à densité. Le calcul intégral est suivi quelques semaines ou mois plus tard par les lois à densité. Aucun d’entre eux ne fait référence aux probabilités dans le chapitre relatif au calcul intégral.

Au niveau de l’introduction de la fonction de densité, les deux enseignants A et B ont décidé comme le manuelOdysséede ne pas proposer d’activité pour introduire la notion de fonction de densité.

L’enseignant A explique qu’il introduit «brutalement » la fonction de densité en donnant la définition et que les premiers exemples (généraux) sont un moyen pour les élèves d’utiliser leurs « connaissances sur le calcul intégral pour prouver des choses pour le moment sans lien avec la réalité, c’est-à-dire quelque chose d’abstrait». C’est donc au départ, un « prétexte » pour faire du calcul intégral. Aucun sens ne semble être donné aux lois à densité. Il explique que la «concrétisation » se fait ensuite avec la loi normale. Il s’interroge tout de même sur le problème que peut poser aux élèves cette introduction «brutale » de la définition de la fonction de densité, en concluant que comme les élèves ne posent pas de questions, cela ne semble finalement pas leur poser de problème.

L’enseignant B de la même façon impose la définition de la fonction de densité, mais avec un niveau de formalisme encore plus poussé. Son cours a été inspiré

no-tamment de cours destinés aux étudiants de classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) Économique. Il propose aussi quelques exemples généraux pour appliquer la définition, mais passe très vite à la suite.

Pour introduire la notion de fonction de densité, l’enseignante C, quant à elle, propose à ses élèves l’activité 1 p. 322 du manuel Indice sur l’Éco-point, que nous avons présentée page 145. Elle ne propose pas de modification particulière par rap-port à l’énoncé du manuel. Les remarques que nous avons pu mettre en avant dans notre analyse (comme le fait que l’histogramme ne permettent pas directement d’ob-tenir la fonction de densité contrairement à ce que dit l’énoncé, le fait que probabilité et fréquence soient assimilées...) n’ont pas été abordées.

Enfin, l’enseignante D propose une activité qu’elle a construite elle-même. On peut la retrouver en annexe F.3.2. L’enseignante présente cette activité entre les lignes 308 et 352 de la transcription en annexe F.2. L’énoncé introductif est le suivant :

On s’intéresse aux clients d’une banque qui possèdent un crédit à la consommation. On choisit un client au hasard parmi ces derniers et on note X la variable aléatoire égale à la mensualité de son crédit à la consommation. Les mensualités de remboursement sont comprises entre 100 et 400 euros par mois.

Pour définir la loi de probabilité de X, on a effectué une enquête auprès des clients de la banque dont les mensualités de remboursement de crédit à la consommation sont entre 100 et 400 euros par mois. On a tracé l’histogramme des fréquences obtenues.

La variable aléatoire considérée correspond à la mensualité du crédit à la consom-mation d’un client d’une banque choisi au hasard. La probabilité que la mensualité soit entre a et b est donc égale à la fréquence des clients ayant une mensualité dans cet intervalle. Aucune phase de modélisation n’est attendue par l’enseignante. L’activité est découpée en trois parties (elles sont séparées par des sauts de lignes dans l’annexe), distribuées séparément au fur et à mesure de l’avancement. Tout d’abord, un histogramme d’amplitude 50 est proposé. Puis en demandant de dé-terminer P(180 < X < 220), les élèves demandent à avoir les fréquences dans des intervalles plus petits (un histogramme d’amplitude 10 est alors distribué aux élèves). Ceci relance le travail de la question 2, et à nouveau surgit un problème pour déterminer P(122,50< X < 143,70). Ensuite, en prenant des amplitudes de plus en plus petites, les élèves voient « apparaître » une fonction. Pour passer à la fonction de densité, dans la troisième partie de l’activité, il est écrit :

En utilisant des intervalles d’amplitude de plus en plus petite, on construit des histogrammes d’aire 1 et on peut déterminer une fonction continue

f telle que les histogrammes seront de plus en plus proches du domaine sous la courbe de la fonction f.

Cetteactivité fait apparaître des points communs avec celle de l’Éco-point ( acti-vité 1 p. 322) du manuelIndice. On retrouve la même idée de prendre une amplitude des classes plus petite, mais ici il s’agit de diminuer de plus en plus cette amplitude. Cependant, il n’y a pas a priori de prise en compte du fait que les données sta-tistiques sont en nombre fini et fixé et qu’il n’est donc pas possible en diminuant

les amplitudes autant que l’on veut de déterminer une telle fonction (de densité). Il s’agit justement à ce moment-là de choisir un modèle pour traiter ces données.

Dans cette activité, l’enseignante a conçu ces tâches de telle sorte qu’elles sus-citent chez les élèves le besoin d’aménager les données, notamment en diminuant les amplitudes. Malgré cet effort d’introduction, la fonction de densité finit par être imposée par l’énoncé et ses propriétés ne sont pas construites, notamment le fait que l’aire sous la courbe doit impérativement valoir 1.

Chez les quatre enseignants, deux sur quatre donnent directement la définition de la fonction de densité et considèrent finalement les probabilités comme un « pré-texte » pour faire du calcul intégral. Nous pouvons nous étonner de ce constat. Les deux autres préfèrent l’introduire avec uneactivité passant par les histogrammes, en ayant choisi une situation de catégorie 1.2, décrite dans la section 5.2.4. Ces activi-tésne permettent cependant pas réellement de construire l’objet fonction de densité avec ses propriétés.

Chacun des quatre enseignants proposent en début de chapitre des fonctions de densité « générales », notamment pour appliquer la définition (et faire du calcul intégral). Ils insistent ensuite particulièrement sur les lois normales.

Nous pouvons conclure que ces quatre entretiens confortent ce que nous avons pu repérer dans les manuels, dans le chapitre 5. Aucune tâche profondément différente de celles proposées dans les manuels n’a été rencontrée, ce qui permet de donner d’autant plus de valeur à l’analyse de manuels, tout en gardant à l’esprit qu’il ne s’agit que de quatre entretiens d’enseignants.

À travers l’entretien avec l’enseignante Marie (la transcription se trouve en An-nexe F.2), nous allons essayer de comprendre son point de vue sur l’enseignement du calcul intégral et des probabilités à densité, leurs enjeux, ainsi que sur l’appren-tissage des élèves sur ces notions, et aussi sur les contraintes qui peuvent peser sur l’enseignement de ces notions. Il s’agit simplement pour nous de présenter quelques éléments de l’entretien avec Marie, révélateur de quelques points de l’ETM idoine proposé par l’enseignante dans sa classe et surtout sur son ETM personnel rela-tif aux probabilités à densité et les contraintes institutionnelles qui pèsent sur ces choix. Dans cet entretien, nous avons pu dégager quelques aspects qui nous semblent intéressants.