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3. Le chemin de la délivrance

3.5 Chapitre 9 : La délivrance (mokṣa)

jaha ṇāma ko vi puriso bandhaṇayammi cira-kāla-paḍibaddho / tivvaṃ manda-sahāvaṃ kālaṃ ca viyāṇae tassa // SS_288 // jai ṇa vi kuṇai chedaṃ ṇa muccae teṇa bandhaṇa-vaso saṃ / kāleṇa u bahueṇa vi ṇa so ṇaro pāvai vimokkhaṃ // SS_289 // iya kamma-bandhaṇāṇaṃ payesa-payaḍi-ṭṭhidī ya aṇubhāgaṃ / jāṇanto vi ṇa muccai muccai so ceva jai suddho // SS_290 //

Par exemple : un homme ordinaire attaché pendant longtemps à une chaîne en vient à connaître la résistance, la nature des faiblesses et la durée de [la chaîne].

S’il ne la rompt pas, il ne s’en libérera pas et restera prisonnier de la chaîne. Malgré un temps très long, cet homme n’atteindra pas la libération.

De la même manière, bien que connaissant l’étendue, la nature, la durée et l’intensité des liens karmiques148, il n’en est pas libéré. Il en est libéré s’il est pur.

jaha bandhe cintanto bandhaṇa-baddho ṇa pāvai vimokkhaṃ / taha bandhe cintanto jīvo vi ṇa pāvai vimokkhaṃ // SS_291 //

De même qu’en pensant à la chaîne celui qui est enchaîné n’atteint pas la libération, l’âme, bien qu’elle pense à l’asservissement, n’atteint pas la libération.

jaha bandhe chittūṇa ya bandhaṇa-baddho u pāvai vimokkhaṃ / taha bandhe chittūṇa ya jīvo saṃpāvai vimokkhaṃ // SS_292 //

De même que celui qui est enchaîné atteint la libération après avoir rompu la chaîne, l’âme atteint la libération après avoir interrompu l’asservissement karmique.

bandhāṇaṃ ca sahāvaṃ viyāṇio appaṇo sahāvaṃ ca /

bandhesu so virajjadi so kamma-vimokkhaṇaṃ kuṇai // SS_293 //

148 Glasenapp (Doctrine of Karman) définit les termes : pradeśa « space-point, the space of an atom » ; prakṛti « species of karman » ; sthiti « duration » ; aṇubhāga renvoie à rasa « intensity of the effect ».

82 Connaissant la véritable nature des asservissements et la véritable nature du soi, celui qui est détaché des asservissements procède à la libération du karman.

jīvo bandho ya tahā chijjanti sa-lakkhaṇehiṃ ṇiyaehiṃ / paṇṇā-chedaṇaeṇa u chiṇṇā ṇāṇattam āvaṇṇā // SS_294 //

L’âme et l’asservissement se différencient grâce à leurs signes distinctifs. Bien différenciés par la lame du discernement149, ils sont rendus à leur diversité.

jīvo bandho ya tahā chijjanti sa-lakkhaṇehiṃ ṇiyaehiṃ / bandho cheyayavvo suddho appā ya ghittavvo // SS_295 //

L’âme et l’asservissement se différencient grâce à leurs signes distinctifs. L’asservissement doit alors être interrompu et le soi pur doit être perçu.

kaha so ghippai appā paṇṇāe so u ghippae appā /

jaha paṇṇāe vibhatto taha paṇṇāe ‘va ghittavvo // SS_296 //

Comment le soi peut-il être perçu ? Le soi est perçu par le discernement. De même qu’il est différencié par le discernement, il doit aussi être perçu par le discernement.

paṇṇāe ghittavvo jo cedā ahaṃ tu ṇicchayado /

avasesā je bhāvā te majjha pare ti ṇāyavvā // SS_297 //

L’être conscient qui doit être perçu par le discernement est, d’un point de vue absolu, le moi. Les états psychiques qui restent doivent être compris comme différents du moi.

paṇṇāe ghittavvo jo daṭṭhā so ahaṃ tu ṇicchayado / avasesā je bhāvā te majjha pare ti ṇāyavvā // SS_298 //

Le vrai croyant qui doit être perçu par le discernement est, du point de vue absolu, le moi. Les états psychiques qui restent doivent être compris comme différents du moi.

paṇṇāe ghittavvo jo ṇādā so ahaṃ tu ṇicchayado / avasesā je bhāvā te majjha pare ti ṇāyavvā // SS_299 //

149 Comparaison très courante dans les textes philosophiques indiens. Au XVIIe siècle, Pītāmbar emploiera cette métaphore dans une version modernisée en comparant la connaissance à une balle (golī) sortie du pistolet (bandūka) qu’est la bouche d’un maître… (voir infra Partie 3 § 1.1).

83 Le connaisseur qui doit être perçu par le discernement est, du point de vue absolu, le moi. Les états psychiques qui restent doivent être compris comme différents du moi.

ko ṇāma bhaṇijja buho ṇāuṃ savve paroyaye bhāve /

majjham iṇaṃ ti ya vayaṇaṃ jāṇanto appayaṃ suddhaṃ // SS_300 //

Après avoir compris l’ensemble des états psychiques résultant de la manifestation du non-soi, et sachant que le soi est pur, quel sage peut prononcer l’affirmation : « Ceci est à moi » ?

theyāī avarāhe jo kuvvai so u saṃkido bhamai* /

mā vajjhe ‘haṃ keṇa vi coro tti jaṇammi viyaranto // SS_301 //

Celui qui commet des offenses tels que le vol, se déplace, anxieux, circulant dans la foule en pensant : « Puissè-je ne pas être condamné par quelqu’un pour vol ».

* ZMK : « sasaṃkido hodi ».

jo ṇa kuṇai avarāhe so ṇissaṅko u jaṇa-vae bhamai / ṇa vi tassa vajjhiduṃ je cintā uppajjai kayā vi // SS_302 //

Celui qui ne commet pas d’offense se déplace dans la foule sans anxiété, car aucun souci d’être condamné ne prend naissance en lui.

evaṃ hi sāvarāho vajjhāmi ahaṃ tu saṃkido ceyā /

jai puṇa ṇiravarāho ṇissaṅko ‘haṃ ṇa vajjhāmi // SS_303 //

De la même manière, l’être conscient est anxieux en pensant : « Je vais être condamné pour mes offenses ». Mais s’il n’a pas commis d’offense, il est serein : « Je ne vais pas être condamné ».

saṃsiddhi-rādha-siddhaṃ sādhiyam ārādhiyaṃ ca eyaṭṭhaṃ / avagaya-rādho jo khalu ceyā so hoi avarāho // SS_304 //

Accomplissement, dévotion [pour le soi]150, réalisation, incantation et adoration sont synonymes. L’être conscient dépourvu de dévotion [pour le soi] est certainement coupable.

150 rādha est à prendre ici comme l’équivant du terme āhāraṇā de la strophe suivante (sk. ārādhana), « qui gagne à soi, qui se rend favorable, hommage, mise en œuvre, obtention », glosé par Jayasena « nija-śuddhātmārādhanaṃ sevanaṃ rādha iti ».

84 jo puṇa ṇiravarāho ceyā ṇissaṃkio u so hoi /

ārāhaṇāe ṇiccaṃ vaṭṭai aham idi jāṇanto // SS_305 //

Par contre, l’être conscient qui est libre de culpabilité est aussi libre d’anxiété. Il est toujours engagé dans la dévotion [pour le soi] en connaissance de ce qu’il est.

paḍikamaṇaṃ paḍisaraṇaṃ parihāro dhāraṇā niyattī ya / ṇindā garuhā sohī aṭṭha-viho hoi visa-kumbho // SS_306 //

Le repentir des fautes, la recherche des vertus, l’abandon des attachements, la méditation, le détachement, l’auto-censure, la confession et la purification constituent un flacon de poison à huit faces151.

apaḍikkamaṇam apaḍisaraṇam aparihāro adhāraṇā ceva / aṇiyattī ya aṇindā agaruhāsohī amaya-kumbho // SS_307 //

L’absence de repentir, l’absence de recherche des vertus, l’absence d’abandon des attachements, l’absence de méditation, l’absence de détachement, l’absence d’auto-censure, l’absence de confession et l’absence de purification constituent un flacon d’ambroisie.