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LES CATEGORIES D'ANALYSE

Les interactions bébé-bébé à la lumière de l'interactionisme socio-discursif

SUJET DATE DE PRESENCE DANS LES NAISSANCE SEANCES (%)

4. LES CATEGORIES D'ANALYSE

Nous avons commencé l'analyse des données par un balayage des 7 séances transcrites afin de déterminer les aspects les plus relevants et leur évolution longitudinale. Une analyse globale des séances a confirmé nos attentes : la plupart des images mettaient en rel ief l'activité motrice des sujets, solitaire ou collective, médiatisée ou non par des objets. Au début du recueil, cette activité consistait surtout en une exploration du corps propre et des objets proches. Au moment où les sujets sont capables de se déplacer dans la salle, ils commencent aussi à interagir entre eux et petit à petit l'exploration des objets est remplacée par des jeux symboliques solitaires et collectifs. Parallèlement à ce processus on peut trouver des productions vocales : au début, des vocalisations et des cris ; ultérieurement, les premiers mots destinés aux camarades.

Ce balayage initial semblait confirmer ce qui est dit dans les théories du développement de l'enfant (Piaget, Vygotsky, Wallon) par rapport aux liens entre I1activité motrice, les objets et l'émergence des productions vocales. En revanche, les spéci­

ficités du développement des enfants qui fréquentent la crèche, c'est-à-dire qui interagissent entre eux la plupart du temps, exigent une investigation plus profonde de ce contexte de développement et de ce qui le détermine.

D'après les 3 théories citées ci-dessus, les premiers rapports que le sujet entame avec le milieu sont d'ordre biolo­

gique, au travers d'une activité réflexe qui se transforme graduellement en interaction sensori-motrice avec le monde extérieur et, plus tard, en pensée consciente. Toujow-s dans cette logique, on pourrait dire qu'il est donc possible d'étudier l'ontogenèse de la connaissance en prenant comme unité d'analyse l'action du sujet. Configurée différemment au cours de l'ontogenèse, l'action se constitue comme le véhicule que le sujet a à sa disposition pour s'approprier le milieu physique et social.

La période de développement étudiée ici est caractérisée par l'action du sujet sur le monde conçue comme un ensemble de comportements typiquement sensoriels et moteurs.

Par conséquent, dans un premier temps on a pu configu­

rer les comportements moteurs des sujets de cette recherche

24 CLAIS SALES CORDEIRO comme une première unité d'analyse, i.e. l'action en tant que mouvement. Ces comportements ont été appelés "actes moteurs".

Si cette unité d'analyse peut apparemment rendre compte de l'ontogenèse de l'action à ce stade, elle ne rend pas possible l'explication des processus interactifs du sujet avec d'autres sujets, également fondamentaux pour le développement cogni­

tif et communicatif. L'enfant n'interagit pas seul avec Je monde puisqu'il est immergé dans l'entourage humain depuis sa naissance. Ce sont Jes interlocuteurs plus habiles, les parents en général, qui introduisent le bébé dans le monde des significa­

tions et attribuent du sens à ses comportements. C'est pourquoi iJ s'est avéré nécessaire d'instituer une unité d'analyse qui rende compte des mécanismes de co-action des sujets.

Nous avons dès lors établi une deuxième unité d'ana1yse afin de rendre compte de l'activité partagée entre sujets de même âge, c'est-à-dire ayant des capacités communicatives et cognitives assez primitives. Nous avons appelé cette unité d'analyse "épisode interactif" et nous l'avons définie comme l'activité motrice et/ ou vocale d'au moins 2 sujets.

A la lumière de tout ce qui a été exposé, l'analyse des données a été organisée comme suit : a) une première étape consacrée à l'analyse quantitative des actes moteurs réalisés par les sujets seuls où en interaction, avec ou sans objets et relativement à leur âge- ; b) une deuxième étape consacrée à l'analyse quantitative des pr ductions vocales réalisées par les sujets seuls où en interaction, avec ou sans objets et relativement à leur âge ; c) une troisième étape où nous avons introduit l'étude des épisodes interactifs établis par au moins 2 sujets, médiatisés ou non par des objets ; d) une quatrième étape où nous avons analysé séparément les constituants des épisodes interactifs et leur évolution ; e) une dernière étape où nous avons analysé le fonctionnement des épisodes interactifs et les articulations entre eux.

Les résultats ont révélé que la catégoTie épisode interactif semble être la plus pertinente du fait qu'elle permet de comprendre que les actions (et leur coordination) ainsi que les interactions pré-langagières des enfants s'inscrivent et se construisent de façon de plus en plus complexe au sein des épisodes.

Pour des raisons de place, dans cet article nous présente­

rons seulement l'analyse des épisodes interactifs et de leurs constituants.

L'épisode interactif, rappelons-le, est caractérisé par l'activité conjointe d'au moins 2 sujets, développée dans une dimension motrice et/ ou au travers de productions vocales.

Pour les repérer dans chacune des 7 séances analysées, il a fallu identifier des marques indiquant :

a) Le début : le moment où un acte moteur et/ ou une produc­

tion vocale d'un sujet engendre la réaction d'un autre sujet, soit spéculaire (imitation), soit complémentaire.

b) Le déroulement : défini par les attitudes responsives de l'interlocuteur sous forme d'acte moteur et/ ou de produc­

tion vocale, suivies d'une nouvelle intervention du sujet qui est à l'origine de l'épisode.

c) La fin : le moment où l'un des sujets quitte l'activité conjointe qui n'est pas reprise par le partenaire, ou encore le moment où intervient une interférence externe provoquée par un autre sujet ou par un adulte.

Une fois repérés, les épisodes interactifs1 ont été classés selon leur structure en

a) Episode potentiel (EP) : proposition d'une interaction qui n'aboutit pas parce que le partenaire ne l'accepte pas ou parce que l'auteur de la proposition commence à dévelop­

per une activité individuelle ou s'oriente vers un épisode développé par d'autres sujets.

b) Episode potentiel d'interférence (EPI) : de l'extérieur, un sujet interfère dans un épisode en cours, mais les agents qui interagissent n'intègrent pas sa proposition.

c) Episode d'interférence (El) : de l'extérieur, un sujet inter­

vient avec succès dans un épisode en cours et l'acceptation de sa proposition par les agents qui interagissent provoque la rupture de l'épisode et produit une altération de sa constitution.

d) Episode consolidé (EC) : proposition d'un sujet acceptée et développée par le(s) partenaire(s).

En outre, l'analyse détaillée du corpus nous a permis d'observer que les conditions de développement et de

dérou-1 Les exemples des épisodes interacl ifs el des consliluants seront présentés dans la rubrique 4.

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