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ROXENA HELENA RODRIGUES ROJO

Agir, obéir, parler des actions : le rôle des interactions familiales pour la construction des

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fréquence). Le jeu d'ordonner n'est pas complètement absent, puisqu'il est le troisième par ordre de fréquence dans le 2ème et le 3è.ml! épisodes sous analyse. Dans le premier épisode (02;02), la troisième incidence est celle du jeu de rôles (JRL), dans

lequel on peut voir en fonctionnement les JO, les JN et les JRA

(rapports intra-jeu). Commentons le graphique ci-dessous

60 50 40 N 30 20 1 0 0

Épisodes de H.: Jeux de Langage

02;02 02;07 03;01 Légende :

• JO fi JN D JRA D JRL D JD D JE

JO - jeu d'ordonner ; JN - jeu de nommer ; JRA - jeu de raconter ; JRL - jeu de rôles ; JD - jeu déontique ; JE - jeu épislémique.

Dans l'exemple (4) en annexe, nous pouvons voir que, dans le corpus de H., la plus grande partie de ces jeux de langage a lieu en une situation àe proàuction (famiiiale) très différente. Dans le cas du jeu d'ordonner (JO), H. a déjà une situation de réciprocité très accentuée face à l'adulte. Dans la majorité absolue de ces jeux dans le premier épisode choisi, c'est l'enfant qui donne des ordres et qui demande des objets (" ]'veux X!"), en s'exclamant, et étant, presque toujours, "obéi"

par sa mère.

L'interférence la plus importante de la mère en ce JRL (02;02) ce n'est pas d' ordonner, d'instruire ou d'orienter les actions de l'enfant, mais de le faire parler sur les actions en cours à l'ajde des jeux de raconter (TRA). Dans ces jeux, l'enfant doit soit raconter, soit projeter ses actions et ses expériences. Dans le premier cas, fréquemment, parler à propos de l'action en cours sert à orienter sa propre action, en un "discours planificateur'' (Vygotsky, 1934).

En outre, comme nous pouvons le constater dans l'exemple (5), chez H ., le jeu de nommer est beaucoup moins restreint que chez P., où il apparaît ritualisé dans des situations de "voir-et-nommer'' la parenté dans des photos. O,ez H., le jeu de nommer ou bien négocie la désignation de nouveaux objets inconnus de l'enfant, en étendant par là son vocabulaire, ou bien il guide la reconnaissance des objets nécessaires pour effectuer les actions en cours dans le jeu de rôles. Dans les épisodes de H., nous pouvons trouver la vraie fonction d'apprentissage de ces jeux désignatifs CTN), c'est-à-dire s'approprier de la désignation et de la reconnaissance de nouveaux objets inconnusf tels que tortue, hippopotame ou alpiste. En plus, à la fin de l'épisode, nous pouvons reconnaître une sjtuation presque de réciprocité entre l'enfant et l'adulte pour le jeu de raconter, lorsque 1-1. rapporte l'action du personnage qui figure dans l'illustration du üvre (" L'oiseau dort aussi"). C'est justement ce type d'activité langagière qui transforme le jeu de raconter CT RA) en un deuxième indice de fréquence chez H.

Avec une fréquence mineure, le jeu d'ordonner et les jeux déontiques sont aussi présents, mais ils sont surtout centrés sur l'action de feuilleter le livre et sur sa normalisation (direction correcte, par exemple).

Dans le dernier épisode choisi (03;01), la principale activité langagière téléologique est le jeu de raconter centré sur le récit de contes de fées. Comme résultat, le graphique ci­

dessous montre une très grande incidence de jeux de raconter, qui comportent des jeux de nommer emboîtés désignant les personnages principaux du récit ou bien des objets essentiels, tels que Blanche Neige, le Chasseur, les Petits Nains, le miroir, la Sorcière, etc. Le graphique montre également soit quelques jeux d'ordonner et quelques jeux déontiques, servant à orien­

ter et normaliser l'action de feu illeter le livre ou de raconter correctement le conte, soit des jeux épistémiques (JE) -absents chez P. - qui thématisent le "pouvoir raconter", basés sur "savoir le Jaire" . Examinons le graphique :

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N

50 40 30 20

-1 0 0

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Épisodes de H.: Jeux de Raconter

02;02 02;07 03;01

Légende :

• RAC/adulte m RAC/enfant D OA/adulte D OA/enfant D RCF/adulte D RCF/enfant

RAC - jeu de raconter l'action en cours ;

OA - orienter l'action en cours ; RCF - récits de contes de fées.

Bret tandis que, chez P., les principaux objets en train de se construire sont l'action, sa normalisation et la matrice interactive ordonner/ obéir, chez H., on travaille surtout sur les formes pour parler des actions, à travers des jeux de raconter centrés sur rapporter, projeter ou raconter des actions en cours et des expériences (RAC) ou bien centrés sur raconter (" lire") des histoires ou des contes de fées déjà connus de l'enfant (RCF). Les jeux de raconter servant à rapporter l'action en cours ont une double fonction : soit on raconte simplement l'action en cours dans la vie réelle ou bien dans les illustrations du livre (RAC), construisant par là des façons pour parler de l'action ; soit, à travers le rapport, on oriente l'action en cours (OA) d'une manière hétéro ou auto-régulée (" discours planificateur'').

Donc, en ce qui concerne la construction des façons de parler des actions, nous pouvons reconnaître deux mouvements contraires dans les histoires interactionelles de P.

et de H. Le rapport des actions en cours et des expériences diminue d'une manière accentuée chez P. Inversement, dans les interactions de H., il est employé pour raconter les illustrations des livres et façonne la manière de raconter des contes des fées déjà entendus par l'enfant, constituant ainsi le premier exercice sur des genres seconds du discours.

Ce dernier aspect des données est particulièrement significatif ; il montre la manière dont les activités langagières dialogiques1 seront transformées et deviendront effectivement opérationnelles pour la construction des activités langagières façonnées par des genres seconds du discours, déjà monologi­

sées - tels que les contes de fées -, exactement comme le prédi­

saient les travaux bakhtiniens.

Finalement, en ce qui concerne la construction du système langagier et grammatical, ces activités justement déterminent le progrès de l'enfant, parce que la construction et la négociation de la transitivité et, donc, des rôles thématiques s'emboîtent dans ces pratiques nouvelles du genre second.

Pour mieux illustrer ce processus, nous avons choisi un dernier épisode de H., quand elle avait 02;03;13, très clarifiant :

(5) Contexte : La mère (M.), l'enfant (H.) et sa sœur (].) sont à la chambre avec beaucoup de livres autour d'elles (02;03, 13):

M.: (Pointe l'illustration dans le livre). Qu'est-ce que c'est ?

H.: C'est... Le ... petit ours.

M.: Il va manger.

H.: Il va manger ... Lui.

M.: Hum ... Il est assis pour manger... Qu'est-ce qu'il va manger ? Ça. Qu'est-ce que c'est que ça ?

(Pointe l'illustration dans le livre)

H.: Il va manger. (Pointe l'illustration dans le livre) M.: Et ça ? Qu'est-ce que c'est que ça ? (Pointe

l'illustration dans le livre)

H.: C'est... c'est... c'est... Une veste.

M.: Non! C'est un œuf ! H.: C'est un œuf.

M.: Un œuf. Il va manger un œuf. Huuummm ...

Quel œuf délicieux ! ... (Tourne la page). Et puis ? Qu'est-ce qu'il fait ? (Pointe l'illustration dans le livre)

H.: J'ai vu lui.

1 Bas�es �ur des ge�rns prem/e�s quotidi:ns .:,amihers, le.ls que les i:ux de nommer , les ieux de iaconter 1 action en coui., (s01l pour la rappm ter, soit pour l'orienter) ; les jeux d'ordonner ; les jeux déontiques servant à normaliser les aclions ; etc.

72 ROXENA HELENA RODRIGUES ROJO M.: Non ! Il boit de l'eau. Il boit du jus. (Tourne la

page). Est-ce qu'il mange ? (Pointe l'illustration dans le livre)

H.: Il mange.

M.: Quoi ? Qu'est-ce que c'est ? (Pointe l'illustration dans le livre)