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CHAPITRE 3 : MODALITES D’INTERVENTION FACE AUX CHOCS

3.4 Argent contre travail (Cash for Work)

3.4.1 Cash for Work en milieu rural

Les travaux Cash for Work sont en général de courte durée (2 à 3 mois) et permettent d’apporter un revenu d’appoint aux hommes et aux femmes dans les zones à forte insécurité alimentaire tout en investissant dans des biens utiles pour la communauté. Les investissements sont habituellement faits dans le secteur de la gestion des ressources naturelles (CES/DRS, boulis, bassins) et les bas-fonds et contribuent ainsi à renforcer la résilience des communautés aux chocs et la sécurité alimentaire. Lors d’un choc occasionné par la sécheresse, les stratégies des agriculteurs sont au niveau de la parcelle. L’étude FAO sur les risques60 démontre que malgré une large diffusion de ces pratiques depuis des années, seulement 12 % des parcelles des femmes (ce chiffre monte à 21% chez les hommes) bénéficient d’une mesure de protection (cordons pierreux, zai, ou demi-lunes). Cet outil permet aux actifs volontaires, des ménages vulnérables, de trouver un emploi saisonnier qui leur donne un statut social de travailleurs/ses au lieu de

59Selon la Stratégie de travaux publics à haute intensité de main d’œuvre au Burkina (étude BIT) :"Les approches HIMO ont vocation de jumeler deux objectifs distincts : créer de l’emploi et construire des infrastructures productives, sociales, marchandes ou de protection de l’environnement. La typologie des programmes et le cadre institutionnel le plus approprié pour leur mise en œuvre peuvent varier

considérablement." Le cash for Work est une modalité du HIMO d’autres types pouvant être le travail volontaire, ou le travail rémunéré à l’aide de nourriture « Food for Work »

60FAO, 2015. Les analyses faites dans d’autres documents (Bilan de la SCADD, PRP-AGIR) démontrent qu’il reste encore beaucoup d’effort pour couvrir les besoins en matière de conservation des sols.

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bénéficiaires, et donc renforce leur estime de soi. Cet outil peut également être utilisé pour favoriser l’insertion des réfugiés avec les communautés autochtones, tel qu’expérimenté par CRS61 et OCADES62. Ces opérations sont soutenues par des ONGs qui assurent l’animation, la sélection des travailleurs/ses, la gestion des chantiers et des paiements63. Plusieurs investissements CFW (CES-DRS par exemple) l’ont été sur des terres privées, les terres publiques étant plutôt rares.

Ces opérations sont préconisées chaque année dans les Plans de soutien. En 2014 par exemple, le Plan prévoyait des opérations Cash For Work (CFW) et Food for work (FFW) « nourriture contre travail » pour les populations pauvres et très pauvres exposées à l’insécurité alimentaire estimées à 4 796 242 personnes. Les activités à réaliser (l’aménagement de périmètres maraichers, de bas-fonds, la réhabilitation de pistes rurales, la récupération des terres dégradées), réalisées avec l’appui des ONGs, devant permettre la création d’actifs productifs, l’amélioration des revenus et des moyens d’existence des populations bénéficiaires64. Le PAM réalise annuellement plusieurs travaux Cfw qu’il confie à des ONGs appelées à lui soumettre des projets. L’envergure et le nombre des projets dépendent des financements disponibles. Les activités CFW, l’encadrement et la sélection des bénéficiaires sont liés à l’expertise des ONGs qui reçoivent ces appuis pour leur programme d’activités. Les revenus moyens par travailleur sont de l’ordre de 50 000 FCFA pour deux à trois mois de travail.

La rémunération des travailleurs/ses est variable selon les projets, toutefois les intervenants s’accordent à croire que des taux de rémunération basé sur le SMIG risqueraient de perturber le marché du travail au niveau villageois. C’est ainsi que pour les travaux dont les travailleurs sont les principaux bénéficiaires uniquement, certains admettent un taux de rémunération en dessous du SMIG et correspondant aux taux pratiqués en milieu rural dans l’agriculture paysanne et dans l’économie informelle (entre 1200 et 2000 FCFA par jour). Au Niger cependant, le taux de rémunération des projets Cash for work a été harmonisé au niveau du SMIG.

Contraintes :

- Ces programmes répondent aux urgences et ne durent souvent pas assez longtemps pour assurer une dynamique de développement et résilience à plus long termes. Les financements ne sont pas apportés sur une base prévisible.

61CRS a mené en 2015 une expérience pilote de travaux Cash for Work qui a regroupé 332 personnes (hommes, femmes, réfugiés et population locale) sur un même site de 13 ha ou 4,240 demies lunes ont été aménagées. Un accord de sécurisation foncière a été négocié avec les propriétaires fonciers et les autorités locales pour une utilisation pastorale du site avec l’aide d’un comité existant, celui-ci va aussi assurer la gestion du site et prévenir les conflits. Le succès de cette opération a nécessité une animation soutenue de la part des équipes de projet.

62Caritas, Austria, Rapport final d’évaluation, programme “Appui aux réfugiés et communautés hôtes de la région du Sahel/Burkina Faso », octobre 2013

63Dans le cas des projets cas for Work/filets sociaux soutenus par la Banque mondiale, les paiements sont effectués par une structure tierce (une institution de micro crédit).

64Le Plan 2014 prévoyait une dotation moyenne de 50000 FCFA par personne pour une prévision budgétaire de 29,97 milliards FCFA.

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- Les investissements créés demandent un suivi qui ne correspond pas toujours aux capacités locales des collectivités décentralisées et des services techniques déconcentrés.

- Les normes techniques, la rémunération des travailleurs, le ciblage des bénéficiaires, ne sont pas toujours harmonisés et dans certains cas, le fait de rémunérer les travailleurs/ses peut démotiver le travail bénévole effectué par des communautés voisines.

- Dans certains cas (notamment les sites miniers), il est difficile de trouver de la main d’œuvre nécessaire aux chantiers.

- La sécurisation foncière des sites demande un processus laborieux avec des risques d’échec (faibles) car les instances prévues par la loi N° 034-2009/AN portant régime foncier rural au Burkina Faso ne sont pas toutes en place.

- Des partenariats doivent être envisagés pour une valorisation maximale et une pérennité des investissements. L’aménagement de bas-fonds demande des ressources pour la mise en valeur, l’encadrement et le suivi. Les agriculteurs/trices doivent respecter des cahiers des charges et payer des redevances pour l’eau. Les services déconcentrés du Ministère de l’Agriculture ne disposent pas toujours des ressources financières suffisantes pour le suivi des aménagements après intervention.

Opportunités :

- Ce type d’appui apporte une contribution à l’économie nationale65et créent un double impact.

- Ce type d’appui est apprécié des bénéficiaires, les femmes constituent souvent plus que 50%

des travailleurs; les bénéfices permettent de combler les besoins alimentaires à court terme, régler les dettes et les dépense urgentes de santé et d’éducation, de limiter l’exode rural, et, quelque fois effectuer un petit investissement (petit commerce, petit élevage).

- Plusieurs outils sont disponibles pour assurer un ciblage géographique des zones d’intervention et une concertation des intervenants (cadre harmonisé, plans de réponse annuels, carte de vulnérabilité, enquêtes VAM) à travers les cadres de concertation existants66.

- Aussi, des outils de ciblage des ménages vulnérables existent et sont en voie d’harmonisation avec une possibilité de mieux suivre les travailleurs/ses.

- Plusieurs ONGs ont développé de l’expertise et des outils sont disponibles67 pour l’harmonisation des normes.

- Des expériences de sécurisation foncière sont disponibles, notamment celles du MCA dans quelques provinces du Burkina (une centaine de communes sur les 350). Un effort important

65Le Plan de soutien (CNSA, 2014) mentionne qu’en 2012 plus de 3,6 milliards de FCFA ont été injectés dans l’économie locale grâce aux dons d’argent contre travail et d’argent non conditionnel.

66Il existe un groupe de concertation informel de partenaires spécifique sur les travaux CFW qui réfléchit sur l’harmonisation des méthodologies et des normes.

67 Le PAM par exemple a développé des normes techniques pour le CFW qui ont été utilisées par les ONGs partenaires. Africare a aussi revu les normes en fonction des changements climatiques et a publié un petit guide sur les travaux CES-DRS.

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est cependant en cours par le Gouvernement et ses partenaires pour renforcer les capacités de mise en œuvre de la loi foncière en milieu agricole et pastoral68.

- Ces travaux permettent la reconstruction de moyens d’existence notamment avec la réalisation des bas-fonds. Les aménagements de bas-fonds permettent l’accès des femmes vulnérables au foncier et contribuent à la dynamique nationale de sécurisation alimentaire face aux aléas climatiques69.

- Bien coordonnés et encadrés dans une vision à long terme, ces travaux peuvent contribuer à restaurer des bassin-versants complets70.

- Les travaux Cfw peuvent constituer un outil financier supplémentaire pour permettre aux communes de réaliser leur Plan Communal de Développement (PCD). Ils peuvent permettre d’appuyer le secteur éducatif (construction de classes, de bissongo (classes de maternelle) , de cour d’école, de jardins, bosquets et champs scolaires, magasins de stockage des vivres des cantines, latrines, en particuliers celles des filles), la sécurité alimentaire (bas-fonds, magasins de stockage de proximité, CES/DRS), la protection contre l’inondation (protection des berges, traitement des ravines, reconstruction).

- Les groupes de travailleurs/ses du Cfw encadrés pour une période d’au moins deux années, peuvent constituer un ancrage pour développer d’autres activités de développement qui contribuent à diminuer la vulnérabilité (AGRs, sensibilisation aux pratiques familiales essentielles, nutrition).