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Cas visqueux

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 183-187)

2.2.1 Résultats expérimentaux

Rc,v

¿p

Figure 7.7: Évolution de τp en fonction de R. La solution utilisée est une huile silicone, de viscosité égale à6.4Pa.s. Les droites servent de guide pour les yeux afin de mieux distinguer les deux régimes identifiés expérimentalement.

Procédons de la même façon avec une huile siliconée, dont la viscosité est 6400 fois plus grande que celle de l’eau à température ambiante. La possibilité de créer des demi-caténoïdes symétriques visqueuses à l’équilibre est non triviale et vaut la peine d’être soulignée ici : bien que les interfaces soient nues en surfactants, la grande viscosité ralentit considérablement le drainage dufilm, lui conférant ainsi une certaine stabilité. La tension de surface liquide/air, de l’ordre de 20 mN.m1, est par ailleurs inférieure à celle de l’eau savonneuse. En lien avec d’autres travaux issus de la littérature portant sur lesfilms visqueux [157, 158], il est intéressant d’étudier la dynamique d’effondrement de telles structures. Dans le cas présent, les échelles 2. EFFONDREMENT QUASI-STATIQUE : TEMPS DE PINCEMENT 171

2.2.2 Grands cadres : R≥Rc,v

Le ralentissement du processus de pincement au cours de l’effondrement d’une demi-caténoïde visqueuse suggère d’introduire de la dissipation dans le bilan éner-gétique. Nous pouvons postuler que l’énergie élastique est entièrement dissipée sous forme visqueuse dans le liquide. Les bas nombres de Reynolds impliqués ici justifient le choix d’une force de frottement fluide de type Stokes : ηlRv. Cette dernière tra-vaillant sur une distance de l’ordre deR, l’énergie dissipée s’estimefinalement comme ηlR2v. Équilibrons comme précédemment les deux contributions énergétiques :

γR2 ∼ ηlR3

τp , (7.7)

τp ∼ ηlR

γ . (7.8)

Ce nouveau temps visco-capillaire décrit assez bien les résultats expérimentaux obte-nus pour des cadres assez grands, tant en termes de tendance linéaire que de préfac-teur. La tendance tracée sur le graphe de la figure 7.7 a pour équationτp �0.83R, alors que l’équation 7.8 prédit la loi τp ∼ 3.2R. D’autres données expérimentales prises avec des huiles plus ou moins visqueuses s’apparentent juste à des transla-tions du jeu de données présenté sur la figure 7.7, en conformité avec l’équation 7.8.

2.2.3 Petits cadres : R ≤Rc,v

t

2r(t)

t=0

t=51 s

Figure 7.8: Effondrement quasi-statique d’une demi-caténoïde symétrique vis-queuse, pour un cadre de rayon R = 3 mm.

La décroissance deτp pour les petits cadres résulte encore d’un autre mécanisme.

On pourrait imaginer que la substitution de la tailleRpar la longueur capillaireκ1

CHAPITRE 7. ÉTUDE DYNAMIQUE D’UNE DEMI-CATÉNOÏDE SYMÉTRIQUE EN MONTÉE dans le bilan énergétique établi pour les grands cadres fasse à nouveau apparaître un plateau atteint enτp ∼ηlκ1/γ �0.46s pour des cadres suffisamment petits. Ce raisonnement est en complète contradiction avec les résultats expérimentaux, tant en termes de variation que d’ordre de grandeur. La figure 7.8 illustre la dynamique de pincement obtenue avec un cadre de taille millimétrique. Cette taille étant com-parable à la taille typique du ménisque liquide, nous observons la formation d’une colonne liquide, qui s’amincit ensuite au cours du temps sous l’effet de la gravité.

Cet amincissement est à nouveau ralenti par la dissipation visqueuse au sein de la colonne liquide. Évaluons le temps nécessaire à cet amincissement par un bilan de forces. Le poids de cette colonne liquide varie typiquement commeρlgR3, alors que la force de friction visqueuse, encore de type Stokes, peut s’écrireηlRv, avecv ∼R/τp. De fait :

Il apparaît que τp admet une dépendance hyperbolique avec le rayon R du cadre.

Cette décroissance de nature visco-gravitaire est en accord qualitatif avec les ré-sultats expérimentaux. La comparaison des préfacteurs entre l’expérience et cette prédiction est en revanche assez éloignée : le préfacteur expérimental est environ 10 fois trop grand. Cet écart, également rencontré dans d’autres expériences mettant en jeu desfilaments visqueux [159, 160], pourrait être attribué à des effets non new-toniens, c’est-à-dire à la nature de la viscosité mise en jeu. La géométrie très effilée de la colonne liquide (Fig. 7.8) peut faire penser à des effets de viscosité élongation-nelle qui, dans le cas des huiles siliconées de forte masse molaire, est susceptible de devenir bien plus grande que la viscosité mesurée classiquement avec un rhéomètre.

Cette hypothèse semble en tout cas aller dans le sens des expériences.

En guise de piste de réflexion, et en conservant un caractère newtonien pour l’huile utilisée, tentons de décrire ce régime de drainage visco-gravitaire de manière plus quantitative : aux temps longs, le filament visqueux épouse la forme d’un cylindre de longueur L fixée et de rayon r(t)(Fig. 7.8). Cette géométrie suggère de pouvoir décrire l’écoulement à l’aide d’une loi de Poiseuille reliant le débit volumique q aux forces volumiques de gravité ρlgL par l’intermédiaire de la résistance hydrodyna-mique Rh, avec une condition de non-glissement aux bords :

q= ρlgL Rh

= πr4

llgL. (7.11)

Le volume de fluide présent dans le filament à l’instant t vaut V(t) = πr2(t)L.

Par différentiation, pendant un court instant dt, le rayon diminue d’une quantité dr, le volume diminue donc d’une quantité dV = 2πrLdr. Par définition du débit, dV =−qdt implique :

−dr

r3 = ρlg

16ηlLdt. (7.12)

Cette équation différentielle s’intègre de la façon suivante : 1

r2 = 1

r02 + ρlgt

lL, (7.13)

2. EFFONDREMENT QUASI-STATIQUE : TEMPS DE PINCEMENT 173

taux4.

2.2.4 Transition entre les deux régimes

Rc,v

¿pl (Pa )-1

Figure 7.9: Évolution de la quantité τpl en fonction de R. Chaque jeu de sym-boles correspond à une solution visqueuse donnée : huiles siliconées de viscosités ηl=6.4 Pa.s (�) et 35 Pa.s (�) ; glycérol de viscosité ηl= 1.1 Pa.s (•).

La transition entre les deux mécanismes présentés ci-dessus est atteinte lorsque : ηlRc,v

γ ∼ ηl

ρlgRc,v

, (7.15)

Rc,v ∼κ1. (7.16)

Cette taille de coupure est à présent de l’ordre de la longueur capillaire. Du fait de l’écart de préfacteur dans le régime des petits cadres, cette prédiction sous-estime la valeur expérimentale, d’un facteur 6 environ. Mais notons néanmoins que la taille de coupure mesurée est bien inférieure à celle obtenue dans le cas inviscide, confor-mément aux prédictions proposées.

Afin de tester expérimentalement l’influence de la viscosité sur le temps de pin-cement, nous renouvelons l’expérience avec d’autres solutions visqueuses. Au vu des expressions obtenues pour les grands cadres (Éq. 7.8) et les petits cadres (Éq. 7.10), la figure 7.9 représente la quantité τpl en fonction de R. Comme attendu, les

4. Une analyse plus poussée de ce problème d’écoulement defilament visqueux peut être trouvée dans la thèse de Jacopo Seiwert [160].

CHAPITRE 7. ÉTUDE DYNAMIQUE D’UNE DEMI-CATÉNOÏDE SYMÉTRIQUE EN MONTÉE différentes séries expérimentales semblent se superposer selon une seule et même tendance, et font apparaître une unique taille de coupure Rc,v en assez bon accord avec l’équation 7.16.

Nous pouvons résumer l’ensemble de ces résultats dans le tableau suivant : Mécanismes en compétition Petits cadres Grands cadres

Cas inviscide capillarité

inertie liquide capillarité inertie gazeuse

Cas visqueux gravité

viscosité capillarité viscosité

3 Formation d’une bulle interfaciale à la surface du

bain

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