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Cas du thiaméthoxame, un insecticide de la famille des néonicotinoïdes

3.  Les autres pesticides étudiés lors de ma thèse

3.1.  Cas du thiaméthoxame, un insecticide de la famille des néonicotinoïdes

Les néonicotinoïdes sont des insecticides systémiques, utilisés en enrobage de semences ou trempage des racines, et mis sur le marché dans les années 1990. À l’heure actuelle, sept molécules sont principalement commercialisées et se répartissent en deux groupes : (i) le groupe « nitro » incluant l’imidaclopride, le nitenpyrame, le dinotéfurane, le thiaméthoxame, et la clothianidine (qui est aussi le métabolite principal du thiaméthoxame retrouvé dans les plantes et les insectes) ; (ii) le groupe « cyano » incluant le thiaclopride et l’acétamipride ; le premier groupe étant généralement plus toxique que le second (Pisa et al., 2015).

Le thiaméthoxame (C8H10ClN5O3S), fabriqué par le groupe agrochimique suisse Syngenta, est commercialisé sous le nom de Cruiser®, Actara® ou encore Luzindo™. Tout comme le thiaméthoxame, la clothianidine, commercialisée par Bayer sous le nom de Poncho®, présente également une forte toxicité pour les insectes. En 2013, ces deux molécules ainsi que l’imidaclopride se sont vues partiellement suspendues, la Commission européenne interdisant la vente de semences traitées suite aux analyses de études scientifiques menées sur les abeilles en 2012 par l’EFSA (Commission européenne, 2013). De même, les traitements de semences et du sol sont interdits, hormis pour les cultures sous serres et les céréales d’hiver, tandis que les produits servant aux traitements foliaires ne sont pas interdits sous serres et après la floraison. Cette règlementation quelque peu laxiste sur l’utilisation de ces molécules n’empêche pas la dispersion de ces molécules dans le milieu naturel et par conséquent, la contamination des écosystèmes en raison de leur rémanence.

Neurotoxique pour les insectes, le thiaméthoxame est largement utilisé en agriculture intensive pour lutter contre les insectes suceurs, en bloquant le SNC. Les néonicotinoïdes sont en effet des agonistes non-compétitifs du récepteur nicotinique de l’acétylcholine (nACh-R) (Casida & Durkin,

Chapitre 4 : Effet conjoint de N. ceranae et de pesticides sur le microbiote intestinal de l’abeille

112 2012). En conditions normales, l’acétylcholine fixée au récepteur est dégradée en quelques secondes

par les acétylcholinestérases pour stopper l’influx nerveux, tandis que les néonicotinoïdes vont persister quelques minutes, engendrant une ouverture prolongée du canal ionique, laissant pénétrer une forte quantité d’ions sodium Na+. Cette entrée d’ions permet de dépolariser la membrane du neurone et assure la propagation du message nerveux. Dans ce contexte d’intoxication, les neurones se retrouvent hyperstimulés ce qui entraine la mort de l’organisme

3.1.2. Thiaméthoxame, abeille et Nosema

La toxicité du thiaméthoxame par voie orale sur les abeilles est du même ordre que celle du fipronil puisque sa DL50 en 48h est de 5 ng par abeille. Cependant, sa toxicité par contact est 4 fois plus importante que celle du fipronil, puisque la DL50 est de 24 µg/abeille contre 5,9 (Tableau 4).

Henry et ses collaborateurs ont montré, dans des études menées sur colonies en plein champ, que l’exposition à de faibles doses de thiaméthoxame diminuait la survie des abeilles butineuses. De plus, les butineuses des colonies se trouvant à proximité des champs traités au thiaméthoxame disparaissaient plus rapidement que celles non-exposées, probablement dû à une désorientation des abeilles, même si les colonies parvenaient à compenser ces pertes (Henry et al., 2012, 2015).

De la même façon que pour le fipronil, les conséquences du thiaméthoxame sur les individus sont d’ordre cérébral et musculaire. Il a en effet été montré que le thiaméthoxame entrainait une paralysie des muscles alaires des abeilles exposées à des gouttes de guttation contaminées même si cela n’a pas toujours été confirmé lorsque les abeilles sont exposées à des doses sublétales (Pisa et al., 2015). De plus, une dose de 1 ng par abeille en utilisation topique (correspondant à environ 1/30ème de la DL50 par contact à 24h) engendre une diminution significative des performances d’apprentissage des abeilles, bien que la mémorisation ne soit apparemment pas modifiée (Aliouane et al., 2009).

Enfin, le thiaméthoxame semble avoir des effets délétères sur la survie et le développement des larves et des pupes, entraînant une diminution des abeilles émergeantes. À terme, cela pourrait entraîner une déperdition d’abeilles dans les colonies qui s’en verraient affaiblies (Tavares et al., 2017).

L’effet combiné du thiaméthoxame et du parasite N. ceranae sur les abeilles a notamment été étudié par Gregorc et collaborateurs, en particulier au niveau de l’épithélium intestinal. Ils ont ainsi observé une dégénérescence accrue de celui-ci suite à la co-exposition, pouvant entraîner une diminution de l’absorption des nutriments par l’intestin (Gregorc et al., 2016).

 

 

  Figure  53.  Pesticides  les  plus  quantifiés  dans  les  cours  d'eau  de  France  métropolitaine  en  2013.  13  des  15 

molécules retrouvées étaient des herbicides ou des produits issus de leur dégradation. 1 580 points de mesures  ont été réalisés concernant le fongicide boscalide qui était la 8ème molécule la plus présente en 2013 (SOeS).      Figure 54. Pesticides les plus quantifiés dans les eaux souterraines de France métropolitaine en 2013. Sur les  607 substances pesticides recherchées en 2013 dans les eaux souterraines de France métropolitaine, 220, soit  36 %, ont été retrouvées au moins une fois dans les nappes. Parmi les 15 pesticides les plus quantifiés, 13 sont  des herbicides ou des produits issus de la dégradation d’herbicides et 2 sont des fongicides. Le fongicide boscalide  est donc le 12ème pesticide le plus présent dans les nappes phréatiques sous sa forme non dégradée. Les données  de cette molécule ont été calculées à partir de 1 304 points de mesure. Dans les départements d’outre‐mer, le  boscalide est absent de cette liste (SOeS, 2015). 

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3.2. Cas d’un fongicide : le boscalide