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Caractérisation du mutant S910L et de son effet dominant négatif dépendant

Les travaux présentés dans ce chapitre rentrent dans le cadre d une collaboration entre le CHU de Poitiers et notre équipe. Ce projet a été initié par le Dr. Thomas Pambrun du service de cardiologie du CHU, qui a diagnostiqué une patiente atteinte de deux maladies rares que sont le syndrome de Brugada et la maladie de Steinert. L étude de la famille de la patiente a permis de caractériser une nouvelle mutation du gène

SCN5A aboutissant au mutant S910L du canal Nav1.5, mais également de relier l aggravation des symptômes cardiaques à la maladie à triplet qu est la maladie de Steinert.

Cette étude comporte d une part, un axe de recherche clinique, porté principalement par le C(† de Poitiers, et d autre part, une partie fondamentale dans laquelle notre laboratoire a été plus particulièrement impliqué. Ces travaux font l objet d une publication actuellement soumise et s intitulant « Myotonic dystrophy type 1 mimics and exacerbates Brugada phenotype induced by Nav1.5 sodium channel loss of function mutation ».

La reproduction du manuscrit est présentée après la remise en contexte de l étude et un résumé des principaux résultats.

I – Cadre d’étude

La dystrophie myotonique de type 1 (DM1) ou maladie de Steinert correspond à la forme la plus fréquente des dystrophies musculaires retrouvées chez l adulte. Cette maladie rare se transmet sur un mode autosomique dominant et se caractérise par une atteinte neuromusculaire multisystémique se manifestant principalement par une myotonie, mais également des troubles oculaires, endocriniens, respiratoires et cardiaques. Ces derniers sont retrouvés chez 80% des patients atteints de la maladie de Steinert, qui présentent un risque accru de mort subite, du fait d un défaut de conduction ou d une tachycardie (Nigro et al., 2012). L anomalie moléculaire à l origine

de ces manifestations phénotypiques est une amplification d un trinucléotide CTG n> dans la région non codante du gène DMPK (Dystrophia Myotonica Protein

Kinase) (Brook et al., 1992 ; Melacini et al., 1995).

La protéine DMPK est principalement exprimée au niveau musculaire et cardiaque, o‘ elle interviendrait notamment dans l homéostasie calcique et sodique ainsi que la conduction cardiaque (Kaliman & Llagostera, 2008). Or, les répétitions des triplets CTG entraineraient une extinction, ou du moins une sévère réduction de la transcription du gène DMPK (Carango et al., 1993), laissant supposer des troubles de conduction cardiaque et de contraction musculaire liés à un défaut d expression de la kinase DMPK. Il a été montré que le modèle de souris DMPK-/- présentait un phénotype cardiaque similaire à celui des patients atteints de DM1, à savoir des troubles de conduction de type bloc auriculo-ventriculaire (Berul et al., 2000).

L initiation et la propagation des potentiels d action cardiaques étant directement liées aux canaux Nav1.5, les mutations dans le gène SCN5A qui engendrent des pertes de fonction, peuvent causer différentes pathologies cardiaques dont la cardiomyopathie dilatée, la maladie du sinus, la maladie de Lev-Lenègre ou encore le syndrome de Brugada (Schott et al., 1999 ; Benson et al., 2003 ; McNair et al., 2004 ; Meregalli et al., 2009). Or, des patients peuvent manifester des phénotypes « mixtes » selon la mutation

SCN5A dont ils sont porteurs (Remme et al., 2008). Cette absence de corrélation stricte

entre génotype et phénotype des patients laisse suggérer (i) une multitude de mécanismes cellulaires sous-jacents, ii l existence de gènes modificateurs qui joueraient sur l expressivité variable de ces pathologies.

Ainsi, dans un cas suivi et diagnostiqué au CHU de Poitiers, nous avons eu pour la première fois l occasion d étudier l influence d une pathologie aboutissant à un défaut grave de conduction cardiaque, la DM1, sur une autre, le syndrome de Brugada.

II – Résumé

Cette étude s inscrit dans un contexte familial particulier où le père et la mère sont atteints respectivement de la maladie de Steinert et du syndrome de Brugada, et où l un de leurs enfants, qui combine ces deux pathologies, a développé des épisodes d arythmies graves menant à des arrêts cardiaques répétés.

L objectif de ce travail a été double i d évaluer cliniquement les manifestations cardiaques de ces deux pathologies chez les parents, la patiente ainsi que son frère sain ii d identifier et de caractériser la mutation responsable du syndrome de Brugada chez les membres atteints de cette famille.

Des analyses génétiques ont été menées sur la patiente et a permis de détecter 270 répétitions du triplet CTG au niveau du gène DMPK et également une mutation faux- sens dans le gène SCN5A, aboutissant à la substitution de la sérine en position 910 par une leucine au niveau de la protéine Nav1.5.

En utilisant la technique du patch-clamp en configuration cellule-entière, nous avons pu montrer que cette mutation abolissait totalement le courant transitant par ces canaux dans les cellules HEK293T. De plus, en co-exprimant les canaux Nav1.5 sauvages et mutants, la densité de courant INa a été diminuée de 49% par rapport à celle enregistrée dans des cellules exprimant seulement les canaux sauvages. En complétant notre étude par une approche biochimique, nous avons pu déterminer que le mutant S L présentait un défaut partiel d adressage. En effet, la technique de biotinylation de surface a montré que son taux d expression totale était similaire aux canaux sauvages mais que son expression membranaire était en revanche réduite.

Lors de l évaluation clinique, la mère, porteuse de la mutation S L, a présenté un phénotype Brugada de type provoqué par un test à l ajmaline. La patiente, qui est doublement atteinte Brugada/Steinert, a quant à elle développé une réponse extrêmement sévère et rapide avec défaut de conduction ventriculaire et élargissement du QRS.

Par conséquent, cette étude montre pour la première fois l effet aggravateur de la maladie de Steinert sur la manifestation clinique d une mutation perte-de-fonction dans le gène SCN5A. Ces résultats suggèrent un lien direct entre une maladie à triplet qu est la maladie de Steinert, et une canalopathie sodique dont fait partie le syndrome de Brugada.

III – Reproduction du manuscrit : Myotonic dystrophy type mimics

and exacerbates Brugada phenotype induced by Na

v

1.5 sodium channel