• Aucun résultat trouvé

Chapitre 3 Nanostructures semiconductrices

3.5 Nanocristaux de Si enfouis dans du SiO 2

3.5.4 Caractérisation électrique dans une grille flottante

Nous exposons ici dans les grandes lignes les résultats obtenus par G. Molas dans le cadre de sa thèse au CEA/LETI [116]. Son travail porte sur l’étude des mémoires à nanocristaux de silicium, c’est-à-dire des nanocristaux intégrés dans la grille flottante d’un transistor de type MOSFET. Ces nanocristaux de silicium sont les mêmes que ceux que nous avons pu caractériser par EFM, ils ont été élaborés dans des conditions identiques. Ces résultats constituent donc pour nous une première caractérisation électrique très interéssante.

Le rapport γ retenu pour la fabrication de nanocristaux est 0,5, l’épaisseur de la couche de SRO

déposée est de 3 nm, elle est ensuite recuite à 1050◦C pendant 10 minutes. Elle est déposée sur l’oxyde tunnel de 25 Å d’épaisseur. Le substrat sous-jacent a été préalablement lithographié de manière à définir la cellule mémoire (source-canal-drain). Le canal a été dessiné pour répondre à des exigences sévères de réduction des dimensions : il ne mesure que 20 par 20 nm2. Cela correspond à quelques nanocristaux

Chapitre 3. Nanostructures semiconductrices

dans la zone active seulement, et permet d’accéder à des effets stochastiques liés à des transferts d’un ou quelques électrons depuis le canal vers la grille flottante, et inversement. L’oxyde de contrôle mesure 20 nm d’épaisseur, il est recouvert de 100 nm de silicium qui fait office de grille de contrôle. La grille est plus large que la zone active : elle mesure 100 nm de côté. Plusieurs échantillons de ce genre ont été préparés, de même que des échantillons de référence pour lesquels la grille flottante ne contient pas de nanocristaux. Une représentation schématique de la mémoire, ainsi qu’une image réalisée au MEB, sont données sur la figure 3.18.

FIG. 3.18: Mémoire à nanocristaux du CEA/LETI. a) : Représentation schématique de la mémoire. b) : Image

MEB du canal de la mémoire, avant déposition de la couche de SRO et des couches supérieures. La grille de contrôle est dessinée pour situer son emplacement fi nal. D’après [115].

Toutes les mesures ont été faites à température ambiante. Une vérification préalable montre qu’en l’absence de nanocristaux, la mémoire n’exhibe aucun effet de chargement. A contrario, en présence de nanocristaux, la caractéristique ID(VG) est décalée selon que la mémoire a été dans un premier temps écrite (application d’une tensionVCG de 1 V pendant 10 secondes) ou effacée (par application deVCG de -1,5 V pendant 10 secondes). Cette caractéristique est représentée sur la figure 3.19. La courbe en pointillés représente la caractéristiqueID(VG) lorsque la mémoire est vierge. Lorsqu’elle a été chargée (écriture) ou déchargée (effaçage), cette caractéristique se trouve décalée de part et d’autre de la courbe pointillée, ce qui est dû aux effets de chargement des nanocristaux de la grille flottante. De plus, on observe des sauts brutaux, provoquant des décalages de tension de 20 à 40 mV. Ces sauts sont attribués au passage d’un nombre discret d’électrons du canal vers les nanocristaux ou inversement. L’expression du décalage en tension provoqué par l’injection deN charges élémentaires q est :

∆Vth= N q · t ǫoxS

, (3.27)

oùt est l’épaisseur de l’oxyde de contrôle, ǫox la constante diélectrique de cet oxyde etS la surface du canal couverte par la grille de contrôle [115]. En prenantt =20 nm, ǫox = ǫ0ǫSiO2 etS =3000 nm2,

3.5. Nanocristaux de Si enfouis dans du SiO2

FIG. 3.19: CaractéristiqueID(VG) d’une mémoire à nanocristaux. La courbe se trouve décalée selon que la mé-

moire a été dans un premier temps chargée (application deVCG =1 V pendant 10 s) ou effacée (application de

VCG =-1,5 V pendant 10 s). Les deux courbes montrent un saut brutal de 20 à 40 mV attribué au passage d’un

nombre discret d’électrons du canal vers les nanocristaux ou inversement. D’après [115].

alors le décalage créé par le passage d’un seul électron dans un nanocristal de silicium vaut 30 mV, soit la valeur mesurée expérimentalement. Les auteurs en concluent que les effets mono-électroniques peuvent être mesurés grâce à cette mémoire.

Cette mémoire est encore loin d’être opérationnelle, car si elle remplit les critères de l’effet mémoire, en revanche son temps de rétention est encore faible : le temps caractéristique de déchargement des nanocristaux (obtenu par une étude statistique du nombre de sauts dans le courant ID en fonction du temps) n’atteint que 85 s. Cependant ces résultats sont essentiels pour la suite de ce travail. Ils soulignent d’une part l’importance de la présence des nanocristaux pour l’effet mémoire, un résultat confirmé par nos propres mesures sur le temps de rétention en présence ou non de nanocristaux. D’autre part, les effets mono-électroniques observés sont un indice du chargement d’un ou quelques électrons seulement par nanocristal, un résultat que nous chercherons également à confirmer dans le chapitre suivant.

Une étude statistique sur l’influence des dimensions de la zone active de la mémoire indique que le décalage de tensionVth dépend de façon inversement proportionnelle de la largeur du canal [117]. Ce phénomène est expliqué par la réduction du nombre de chemins de percolation lorsque la largeur du canal est réduite. En effet, les nanocristaux de silicium chargés émettent un champ électrique qui dévie les électrons de leur trajectoire dans le canal, et est à l’origine du décalage de la caractéristique

ID(VG). Plus le canal est étroit, moins les électrons ont de possibilités de cheminement entre les nano- cristaux chargés. Il suffit alors qu’un nanocristal se décharge pour que le passage source-drain soit rendu beaucoup plus aisé. Bien que non relié exactement à nos expériences, ce résultat trouve son importance

Chapitre 3. Nanostructures semiconductrices

dans la notion de percolation de la charge. Nous reviendrons sur ce phénomène dans le cas d’une nappe infinie de nanocristaux chargée ponctuellement, et étudierons l’étalement de la charge en fonction du temps. Différents types de conduction seront mis en évidence, avec un indice de l’existence d’un seuil de percolation dépendant de la densité de nanocristaux.