• Aucun résultat trouvé

Canaux de transfert de connaissances

5.4 L ES ENJEUX ORGANISATIONNELS

5.4.1 Canaux de transfert de connaissances

À l’heure actuelle au Québec, ce sont principalement les groupes conseils non liés qui remplissent le vide des études sur la rentabilité aux dires des acteurs rencontrés. Pour pallier en partie au manque d’études sur la rentabilité des nouvelles technologies, et par conséquent soutenir leur démocratisation et leur développement, des producteurs se réunissent pour partager leur expérience, échanger des informations sur les nouveaux procédés, et proposer des pratiques agricoles durables.

Le même constat existe à propos de l’aide à la décision : si le secteur de l’agriculture de précision est en pleine effervescence, c’est l’expertise et le savoir-faire pour exploiter et valoriser ces données qui font défaut. La quantité de données générée et disponible sur une

18 Par exemple, des entreprises québécoises ont développé des outils qui permettent de mieux intégrer les données des producteurs en temps réel. Parmi celles-ci, la Coop Fédérée a développé une application (Agconnection) dont l’objectif est de faciliter l’utilisation de la technologie au quotidien et ce, tout au long de la chaine de valeur de la planification jusqu’à la récolte. Le CEGA (Centre d’expertise en gestion agricole) a également développé un outil (ALEOP) qui permet de regrouper l’ensemble des données nécessaires à la gestion de la ferme, de les exploiter et de les partager.

62

ferme a le potentiel d’augmenter de manière exponentielle, mais les producteurs peuvent ne plus savoir quelles sont les informations pertinentes pour leur entreprise et leur productivité. Une fois encore, le réseau des groupes conseils permet de pallier le manque d’expertise en agglomérant l'expérience de terrain acquise vis-à-vis de nouvelles technologies et leur utilisation optimale. Cependant, il ne serait pas étonnant de retrouver chez les conseillers les mêmes attitudes que les producteurs agricoles face aux technologies numériques. La courbe d’apprentissage est abrupte pour plusieurs ce qui crée d’énorme défis. Entreprendre le virage numérique pour les conseillers des groupes conseils non liés n’est pas une tâche facile selon plusieurs répondants. Tout comme dans le cas de la formation que nous traiterons dans la prochaine sous-section, les compétences requises pour conseiller les producteurs dans le domaine ne sont pas des compétences traditionnelles des techniciens et agronomes. De plus, plusieurs technologies existent sur le marché et il est difficile pour un conseiller de bien maitriser chacune d’entre elles. Pour le moment, ce sont les conseillers qui ont un grand intérêt pour les technologies numériques qui se forment eux-mêmes et qui forment leurs collègues.

Enfin, il n’y a pas de subventions allouées à des services-conseils spécifiquement liés au numérique. Les incitatifs ne sont donc pas en place pour encourager les producteurs à faire faire des évaluations de rentabilité auprès des groupes conseils ni encourager les groupes à faire des exercices de « benchmark ». Le peu d’études sur le potentiel réel et la rentabilité des outils numériques fait en sorte qu’un conseiller ne peut conseiller l’achat de technologies si ces dernières ne sont, ou ne semblent pas rentables.

Recherche universitaire et centres d’expertise

Un autre canal de transfert de connaissances est la recherche réalisée dans les universités et dans les centres d’expertise. Selon les répondants rencontrés issus de ces milieux, la recherche sur le développement et les applications des nouvelles technologies dans le secteur agricole rencontre plusieurs freins. De nombreuses contraintes sont liées à l’accès aux données, essence nécessaire pour conduire toute étude. Outre le problème de l’accès aux informations, c’est le constat d’une recherche fragmentaire et trop spécialisée qui est pointé du doigt.

Actuellement, il manquerait d’interdisciplinarité dans les études, et les chercheurs ne disposent pas de connaissances assez vastes pour mesurer pleinement les changements en cours sur le terrain et conduire les enquêtes adéquates.

L’absence des concepts et du savoir-faire liés aux données massives et à l’analyse de données est un problème, il s’agit donc de trouver soit une manière d’apporter aux agronomes ces connaissances, soit les moyens d’encourager et soutenir la collaboration entre les agronomes et les sciences informatiques. Cette collaboration doit s’effectuer sur le terrain, au plus proche des agriculteurs, d’une part dans le but de participer à un effort de sensibilisation et démocratisation des technologies numériques, et d’autre part dans l’objectif de fournir les études attendues au sujet de la rentabilité de ces outils et vis-à-vis des modèles d’aide à la décision à partir des données collectées.

En dernier lieu, les entités rencontrées issues du milieu universitaire et des centres d’excellence ont décrit des problèmes de moyens pour faire face aux changements rapides des technologies

et des logiciels utilisés dans ces domaines. Elles expliquent qu’il existe un décalage entre les besoins des chercheurs et les moyens alloués ou les politiques mises en place. Plusieurs anecdotes ont illustré ces propos, comme par exemple l’impossibilité d’installer certains logiciels libres ou ouverts sur des postes de recherche, ou bien les délais entre des demandes de financement pour s’équiper de logiciels et les réponses favorables qui arrivent tardivement après une évolution des logiciels. Le maintien à jour est donc difficile dans un environnement changeant rapidement.

Classement des canaux de transfert de connaissances en fonction de leur utilisation par les producteurs

Nous avons posé aux producteurs des trois secteurs sondés deux questions légèrement différentes pour connaître leur canal de transfert privilégié des connaissances et de l’information 1) Comment apprenez-vous l'existence de nouveaux produits / de nouveaux procédés / de nouvelles pratiques (dans le domaine des technologies numériques appliquées à l’agriculture ? 2) Comment vous renseignez-vous pour avoir de l’information sur comment utiliser les nouvelles technologies numériques ?

Les figures suivantes font état des résultats obtenus. Il est important de noter que certaines sources d’informations sont propres à un seul secteur agricole ce qui explique que toutes les sources ne se retrouvent pas nécessairement sur chaque figure.

SP!

Figure 26 : Sources d’informations utilisées pour apprendre l'existence de nouveaux produits / de nouveaux procédés / de nouvelles pratiques chez les producteurs au Québec (selon les résultats de nos trois enquêtes)

Comment apprenez-vous l'existence de nouveaux produits / de nouveaux procédés / de nouvelles pratiques (dans le domaine des technologies numériques appliquées à

l’agriculture)?

=>" <=>" ?=>" @=>" D=>" A=>" C=>" B=>"

`,%F+('%38'"

PRODUCTEURS DE GRAINS (n = 35)

Les producteurs sondés toutes catégories confondues utilisent essentiellement Internet pour s’informer des nouveautés dans les technologies numériques agricoles. Les producteurs laitiers sont 75 % à citer cette réponse, suivi des producteurs en serre (73 %) et des producteurs de grains (69 %).

Les producteurs de lait prennent davantage renseignement dans les magazines et journaux professionnels. 70 % des répondants citent cette réponse pour cette catégorie de producteurs, que les producteurs en serre et de grains qui sont un peu moins de 60 % à y avoir recours. On peut aussi observer que les producteurs laitiers ont plus recours aux médias sociaux que les autres catégories de producteurs.

L’information recueillie auprès des autres producteurs constitue aussi une ressource importante pour eux, puisqu’ils sont 73 % chez les producteurs de lait, 63 % chez les producteurs de grain et 58 % chez les producteurs en serre à citer cette réponse.

À l’opposé, on peut voir que les producteurs pensent moins aux centres de recherches et universités pour s’informer des nouvelles pratiques.

La seconde question était formulée comme suit : Comment vous renseignez-vous pour avoir de l’information sur comment utiliser les nouvelles technologies numériques ? Les figures suivantes font état des résultats obtenus pour cette question.

F>&

SS!

Figure 27 : Sources d’informations utilisées par les producteurs pour savoir comment utiliser les nouvelles technologies numériques

Comment vous renseignez-vous pour avoir de l'information sur comment utiliser les nouvelles technologies numériques ?

Les producteurs ont essentiellement recours à Internet et à leurs fournisseurs d’équipements pour s’informer sur comment utiliser les nouvelles technologies numériques. Il s’agit des deux réponses les plus communément citées par l’ensemble des répondants, tous types de production confondus.

L’information recueillie auprès des autres producteurs constitue aussi une ressource importante pour eux, puisqu’ils sont 49 % chez les producteurs de lait et de grain et 46 % chez les producteurs en serre à citer cette réponse.

Les producteurs laitiers et en serres effectuent davantage de recherches personnelles que les producteurs de grains, puisque ces derniers ne sont que 23 % à citer cette réponse comparativement aux 51 % et 42 % observés respectivement chez les deux premiers.

On note aussi que les producteurs en serre sont très peu à recourir aux médias sociaux (4 %), contrairement aux producteurs de lait (33 %) et de grains (29 %).

Lors de nos entretiens, il nous a été confié que pour pallier certaines lacunes au niveau du transfert de connaissances par exemple, des initiatives spontanées de groupe sur Facebook s’organisent afin de constituer un lieu d’échanges entre producteurs sur les technologies disponibles, leur intérêt et leur rentabilité approximative. Selon notre enquête auprès des producteurs, c’est surtout le cas dans le secteur laitier et des grains.

=>"

=>" <=>" ?=>" @=>" D=>" A=>" C=>" B=>"

`,%F+('%38'"

68

5.4.2 Accès à la formation aux nouveaux outils et aux nouvelles pratiques numériques