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régissant l’utilisation d’insectes pour la sécurité alimentaire

14.2 Cadre LÉgaL et standardIsatIon

Les normes internationales peuvent servir de base utile aux pays pour établir leurs cadres réglementaires pour l’alimentation animale et humaine. Aligner la législation aux normes internationales, particulièrement avec les normes du Codex Alimentarius (Encadré 14.3), facilite leur conformité avec les règles commerciales, permet et favorise le commerce des aliments pour les hommes et pour les animaux.

Les dispositions spécifiques légales sur l’utilisation des insectes dans la production d’aliments pour les hommes et pour les animaux devraient servir à contrôler et réguler l’utilisation des insectes par les transformateurs industriels et devraient garantir l’accès des consommateurs à l’information. Dans ce but, les régulateurs doivent évaluer les risques potentiels de l’utilisation des insectes, en termes à la fois d’espèces et de quantités. Les cadres législatifs les plus protecteurs pour l’intérêt des consommateurs doivent aussi se concentrer sur l’information disponible sur l’emballage des produits alimentaires et sur celle obtenue grâce aux résultats des évaluations des risques dus aux effets des insectes sur la santé humaine.

L’Union européenne promeut l’élevage en plein air des porcs et de la volaille, dans lequel la consommation d’invertébrés n’est pas seulement tolérée, mais vue comme une procédure correcte en termes à la fois de bien-être animal et de prise d’aliments, car la volaille et les porcs libres de circuler, consomment des insectes comme aliments naturels. cependant, ces

«aliments naturels» ne sont pas analysés pour rechercher une éventuelle pollution comme par exemple par des métaux lourds, des PcB/dioxines ou des pesticides.

15 Règlement (CE) n° 999/2001. Annexe IV (modifié par le règlement de la Commission (CE) n° 1292/2005;

règlement (CE) n° 1923/2006 et règlement de la commission (UE) n° 56/2013).

16 Règlement de la commission (UE) n° 142/2011. L’annexe 1(5) définit les protéines animales transformées comme des «protéines animales dérivées entièrement de matériels de catégorie 3, qui ont été traités… afin de les rendre utilisables directement comme matières alimentaires ou tout autre usage, comme l’alimenta-tion des animaux de compagnie, ou comme fertilisants organiques ou en amendement des sols.»

Encadré 14.2 (suite)

Encadré 14.3 Codex alimentarius

En tant que norme de référence internationale pour l’alimentation humaine et animale, une norme du codex alimentarius sur l’utilisation des insectes comme ingrédients alimentaires pourrait servir, pour les législations nationales, de référence sur la production des insectes et leur utilisation dans l’alimentation humaine et animale, des points vue à la fois de la sécurité et de la qualité.

alors que le codex alimentarius ne contient aucune norme spécifique sur les insectes, frais ou transformés, pour leur utilisation dans l’alimentation humaine et animale, «les insectes»

sont cités dans les normes du codex alimentarius en tant «qu’impuretés». Par exemple, la norme du codex 152-1985 stipule que la farine de blé doit être exempte de:

• saveurs anormales, odeurs et insectes vivants;

• débris (impuretés d’origine animale, y compris insectes morts) en quantités qui peuvent représenter un risque sanitaire pour l’homme.

La FAO et l’OMS ont mis en place la Commission du Codex Alimentarius en 1963 avec pour objectifs principaux de protéger la santé des consommateurs et de s’assurer de pratiques com-merciales loyales dans le commerce alimentaire17. actuellement, la commission comporte 185 membres – 184 pays et 1 organisation (l’UE) – et 204 observateurs. La Commission du Codex alimentarius développe des normes alimentaires internationales harmonisées, des directives et des codes de conduite qui contribuent à la sécurité, à la qualité et à la loyauté du commerce international des aliments. Les normes du codex se fondent sur les meilleures connaissances scientifiques disponibles et sont appuyées par des organismes internationaux indépendants d’évaluation des risques et par des consultations ad-hoc organisées par la FAO et l’OMS. Bien que leur application par les membres soit volontaire, les normes du codex sont utilisées dans de nombreux cas comme base pour la législation nationale.

dans le cadre de l’accord de l’Organisation mondiale du commerce (OMc) sur l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS), les législations nationales qui se conforment aux normes du codex sont présumées respecter les obligations internationales résultant de l’Accord SPS. Selon l’Accord SPS:

Les Membres doivent fonder leurs mesures sanitaires ou phytosanitaires sur les normes, les directives ou les recommandations internationales… Les mesures sani-taires ou phytosanisani-taires qui se conforment aux normes, directives ou recommanda-tions internationales devraient être… présumées compatibles avec les disposirecommanda-tions concernées de cet accord et de celles du GaTT 1994 (article 3, paragraphes 1 et 2).

ces «normes, directives et recommandations internationales» pour la sécurité des aliments sont elles-mêmes définies comme:

les normes, directives et recommandations établies par la commission du codex alimentarius relatives aux additifs alimentaires, aux médicaments vétérinaires et aux résidus de pesticides, aux contaminants, aux méthodes d’échantillonnage et d’analyse, ainsi qu’aux codes d’usage et aux directives en matière d’hygiène (Accord SPS, Annexe A, Paragraphe 3(a)).

Les Membres de l’OMc qui souhaitent appliquer des mesures plus strictes de sécurité des aliments que celles établies par le codex peuvent se voir demander une justification scientifique de ces mesures (WHO/FaO, 2012).

17 Voir la page d’accueil du codex alimentarius à: www.codexalimentarius.org

En 2010, le Gouvernement de la République démocratique populaire lao a proposé au Comité FAO/OMS de coordination du Codex pour l’Asie que des normes pour le commerce régional et la sécurité des aliments soient développées pour le grillon domestique. Toutefois, cette proposition n’a pas été acceptée, car les données indiquaient que le niveau de commerce de ces insectes n’était pas vérifiable, ce qui ne permettait pas de garantir une telle action (FAO, 2010a).

Des groupes de pression s’activent de plus en plus pour le développement de législations spécifiques sur l’utilisation des insectes dans le secteur de l’alimentation animale. Ces groupes de pression existent au niveau national aux États-Unis (y compris dans le cadre d’actions conduites par des compagnies privées américaines pour obtenir l’approbation par la FDA de l’utilisation d’insectes dans l’alimentation animale) et au niveau européen.

L’élevage des insectes et des arthropodes comestibles pour la consommation humaine, appelé «mini-élevage», apparaît désormais comme une forme d’élevage respectueuse de l’environnement. Récemment, suite à une action intense des groupes de pression du secteur de l’alimentation animale, des initiatives ont commencé à créer un environnement favorable au développement de règles et de normes pour l’utilisation des insectes dans l’alimentation pour l’aquaculture, et à un moindre degré dans l’alimentation humaine.

Au niveau européen, par exemple, les critères de qualité et de sécurité pour les aliments pour animaux, à base d’insectes, sont en cours d’étude.

La production et la consommation d’insectes doivent aussi être analysées du point de vue de leur impact potentiel sur la santé et sur la biodiversité ainsi que sur les risques environnementaux potentiels liés à la production des insectes et à leur diffusion, y compris la dispersion accidentelle d’insectes étrangers à leur zone de production. Des évaluations des risques et des mesures de contention doivent être prises à l’encontre de l’apparition potentielle de maladies dangereuses pour la santé humaine ou animale, et pour la protection des végétaux. D’autres cibles de la législation pourraient inclure la régulation du commerce entre pays, d’insectes vivants destinés à la reproduction.

Comme c’est souvent le cas des industries émergeantes, et comme cela a été identifié par la réunion d’experts sur «l’Évaluation du potentiel des insectes dans l’alimentation animale et humaine et dans le renforcement de la sécurité alimentaire», à Rome, en janvier 2012, en plus du développement de normes publiques nationales et internationales, l’autorégulation par les producteurs/transformateurs d’insectes et autres parties prenantes du secteur, peut être utile pour favoriser l’harmonisation et la reconnaissance mutuelle.

Ceci pourrait inclure le développement de normes, de codes de pratiques/procédures, de mesures de qualité des produits pour gagner en crédibilité.

Le concept d’«aliment nouveau» conduit au développement de règles et de normes pour les insectes dans l’alimentation humaine. Le terme «aliment nouveau» fait référence aux produits alimentaires qui n’ont aucune référence historique de consommation humaine dans la région ou dans le pays en question. Les exemples de définitions d’aliments nouveaux dans des législations nationales sont:

• «un aliment qui n’a aucune référence historique de consommation humaine en Australie ou en Nouvelle-Zélande» (Australia New Zealand Food Standards Code – Standard 1.5.1);

• «une substance, y compris un micro-organisme, qui ne présente pas d’antécédents d’innocuité comme aliment» (Règlements du Canada sur les aliments et les drogues (C.R.C., c.870) – B.28.001).

Le terme peut comprendre les insectes comestibles, les huiles, les baies et les denrées alimentaires produites par la biotechnologie (y compris les aliments génétiquement modifiés). Les aliments produits par la biotechnologie peuvent être globalement consi-dérés comme nouveaux, mais les denrées alimentaires dérivées de produits naturels, bien que nouvelles dans certains pays, peuvent représenter une part considérable du régime normal dans d’autres pays. Il a été suggéré qu’un «long antécédent d’utilisation humaine» implique que les insectes récoltés intentionnellement pour l’utilisation ou la

consommation humaine ne posent aucun risque significatif (Banjo, Lawal et Songonuga, 2006b). Cependant, dans plusieurs pays développés, comme aux États-Unis, au Canada et dans l’UE, certaines espèces d’insectes comestibles peuvent nécessiter une évaluation d’innocuité avant commercialisation et autorisation de vente en tant qu’aliment ou ingrédient nouveau (Encadré 14.4).

Le concept «aliment nouveau» peut impliquer de lourdes charges administratives et des coûts. Aussi, bien qu’il puisse protéger la santé des consommateurs, il peut être hors d’atteinte des petits éleveurs souhaitant produire une «nouvelle» espèce d’insecte.

Dans l’Union européenne, une proposition courante pour l’utilisation des insectes dans l’alimentation humaine est de considérer tous les insectes comme des aliments nouveaux, à l’exception des 5 ou 10 espèces d’insectes (encore à définir) qui étaient les plus courantes en élevage en Europe avant 1997.

Dans un pays donné, le cas peut se présenter qu’une espèce d’insecte comestible ait des antécédents d’utilisation sans risque. Très probablement, l’autorité de régulation aura à réaliser une évaluation du risque, et des informations complémentaires, telles que les combinaisons insectes/pathogènes, seront nécessaires.

Il y a encore beaucoup de travail à faire et de nombreux sujets doivent être pris en compte lors de l’élaboration de cadres normatifs et de l’adaptation de lois sur les aliments incluant les insectes. Ainsi, lors de la consultation d’experts de janvier 2012, un groupe de travail a fait, pour l’élaboration des cadres réglementaires, les propositions suivantes (FAO, 2012f):

Encadré 14.4

définition des nouveaux aliments et nouveaux ingrédients alimentaires par la Commission européenne

Le règlement (CE) n° 258/97, article 3(1), du Parlement européen et du Conseil du 27 janvier 1997 concernant les aliments nouveaux et les ingrédients alimentaires nouveaux considère que les aliments et les ingrédients alimentaires qui n’ont pas été utilisés en alimentation humaine de façon significative dans l’Union européenne avant le 15 mai 1997, sont des

«aliments nouveaux» ou des «ingrédients alimentaires nouveaux».

Selon ce règlement, de tels aliments nouveaux ou ingrédients alimentaires nouveaux doivent être, entre autres choses (Ec, 1997):

• sûrs pour les consommateurs;

• et correctement étiquetés pour ne pas induire les consommateurs en erreur.

L’Union européenne impose l’évaluation des risques (évaluation d’innocuité avant la mise sur le marché) pour chaque espèce ou produit, avant sa commercialisation, et peut, dans une seconde étape, conduire un processus d’autorisation (conditions d’utilisation, étiquetage et appellation).

L’Autorité européenne de sécurité des aliments (ESFA), dont les fonctions sont de garan-tir au consommateur protection et maintien de la sécurité des aliments en Europe, réalise des évaluations des risques pour les futurs aliments nouveaux. En 2011, l’EFSA a commencé à identifier les agences de communication qui traitent des insectes comestibles pour s’en servir comme d’un premier filtre pour l’autorité, qui réalise des analyses de données et la détection des signaux. Lors de ce processus l’EFSA a récolté davantage d’informations sur ce sujet. L’UE finance un projet pour étudier les insectes comme source potentielle de protéines pour l’alimentation animale (KBBE 2012.2.3-05, voir chapitre 13) et elle est aussi impliquée dans un réseau de parties prenantes de ce secteur. Pour inclure les insectes dans le régime alimentaire comme aliment nouveau, une évaluation d’innocuité avant commercialisation doit être réalisée et l’EFSA sera requise pour effectuer une évaluation des risques.

• Les chercheurs, les industriels et les régulateurs doivent collaborer de façon proactive et contribuer à l’autorégulation du secteur. Une analyse des politiques existantes et des règlements concernant l’alimentation humaine et animale est nécessaire et elle peut être complétée en:

- communiquant avec les organismes de régulation concernés et leurs contacts clefs;

- identifiant les obstacles et les points où les cadres existants doivent être améliorés.

• Le développement de nouvelles politiques est inévitable. Il sera nécessaire d’écouter les régulateurs pour savoir à quoi s’attendre, être attentif aux consommateurs qui peuvent souhaiter des règlements particuliers, et collaborer avec les détaillants.

L’initiative Global Good Initiative Practices est un exemple intéressant de modèle pour faciliter une telle consultation. Les exemples de nouveaux règlements pouvant être envisagés comprennent les normes de qualité, le contrôle de qualité et les directives d’assurance de la qualité sur les contaminants et sur la composition nutritionnelle;

les exigences d’étiquetage, les évaluations d’impacts sur l’environnement; et les exigences concernant les aliments pour animaux (par exemple, le fumier peut-il être utilisé?).

• Les cadres réglementaires des secteurs publics et privés devront être standardisés aux niveaux national et international.

Un degré déterminé de sécurité garantie est nécessaire pour tout produit. Des pratiques de production possibles (y compris les mesures sanitaires) doivent être développées, et pour lesquelles les autres industries peuvent servir d’exemples. Les normes publiques et privées peuvent servir de base à des pratiques réglementaires harmonisées pour l’utilisation des insectes dans l’alimentation humaine et animale. Des cadres législatifs devront être développés pour établir et renforcer des dispositions contraignantes et pour assurer la mise en œuvre et l’application de ces dispositions dans tout le secteur. L’harmonisation internationale grâce aux normes privées ou publiques sera bénéfique au secteur, mais difficile à atteindre en raison de la diversité des espèces d’insectes et des méthodes de transformation. Néanmoins, ce dilemme doit être résolu.

Les recommandations pour le cadre réglementaire sur les insectes comestibles sont les suivantes:

• Promouvoir la standardisation publique et privée aux niveaux national et international pour les insectes dans l’alimentation humaine et animale, accompagnée d’une évaluation d’innocuité avant mise sur le marché (suivant les normes du Codex Alimentarius, ou d’autres organismes établissant des normes).

• Promouvoir l’établissement de normes nationales et internationales appropriées et de cadres législatifs pour faciliter l’utilisation des insectes dans l’alimentation humaine et animale, le développement et la formalisation du secteur.

• Prendre en considération les effets potentiels de la production et de l’élevage des insectes sur l’environnement, et les implications environnementales et commerciales du transport international des insectes, lors de l’élaboration et de la mise en œuvre des cadres réglementaires pour la production et l’utilisation des insectes. Ceci doit contraindre les régulateurs à faire attention à une grande diversité de domaines réglementaires, y compris la législation phytosanitaire, la biodiversité, la lutte contre les maladies et l’environnement.