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C ONCLUSION : SUR QUELQUES THÈMES À APPROFONDIR

Marc Gaudry

t 1 et t 2 effectuant un nombre total de déplacements constant.

6. C ONCLUSION : SUR QUELQUES THÈMES À APPROFONDIR

Les taux marginaux de substitution (TMS), des résultats dérivés- clés. Le rapport entre les élasticités de la demande de transport par

rapport aux prix et au temps des services de transport, exprimé sous forme de taux marginaux de substitution (ou valeurs du temps), est au centre de la modélisation du trafic qui fonde tout calcul économique : il vaut donc la peine de préciser l’importance pratique des TMS.

Les TMS révélés par les modèles et utilisés par les gestionnaires de réseaux diffèrent souvent des valorisations tutélaires de référence ou officielles qui guident le choix des investissements en infrastructures de transport. Le fait que, simultanément, la gestion puisse se fonder sur certains arbitrages réels révélés par le comportement local pertinent décrit par les modèles et que l’investissement puisse s’appuyer sur des arbitrages administratifs normatifs différents, pose un problème de cohérence dans tout calcul économique.

Si cette différence est communément constatée s’agissant des valo- risations du temps de transport, elle est présente pour d’autres dimen- sions des services de transport où le TMS tutélaire n’en est pas moins imposé d’en haut. Par exemple, il y a des raisons de penser que les arbitrages faits au volant entre les gravités d’accidents par les conduc- teurs sur la route peuvent révéler une valorisation62de la vie humaine

supérieure à celle qu’utilisent les planificateurs au bénéfice supposé de ces mêmes usagers. Il est trop tôt pour savoir si les partenariats publics privés (PPP) comblent en partie ces écarts en rectifiant l’offre publique pour la rapprocher du marché.

D’autres sujets avancés ? Les types de données utilisées et les

caractéristiques des méthodes de quantification nécessaires à l’obten- tion de résultats sur les divers paramètres sont des aspects sur lesquels nous n’avons guère été diserts mais dont il faut dire un mot en conclu- sion, ne serait-ce que pour souligner la structure de ce qui aurait pu être pris en considération au-delà d’un travail de niveau initiatique. Quels sujets spéciaux feraient partie d’un tel approfondissement ? Distinguons réconciliation des sensibilités mesurées dans le temps et

dans l’espace de la question des aléas.

Évolutions temporelles et spatiales des agrégats. Notre présenta-

tion des modèles de trafic a volontairement mis l’accent sur les coupes

62. Pour un exemple canadien d’une telle différence entre les valeurs déduites du comporte- ment de conduite et les valeurs officielles, exemple rédigé pour le Groupe de travail Boiteux II, voir Gaudry (2006).

transversales spatialisées et négligé les séries chronologiques, en parti- culier celles qui visent à expliquer l’évolution des grands agrégats urbains, régionaux ou nationaux du nombre total de déplacements des personnes ou des marchandises représentés par T = 2 175 au Tableau 3 mais souvent conservés sous forme de Tonnes-km ou Voyageurs-km dans les chroniques. L’évolution de ces agrégats fait aussi appel à d’autres élasticités que celles qui définissent les TMS : les élasticités de la demande par rapport aux niveaux des activités économiques et du revenu, tant à court qu’à long terme.

Si ces modèles en séries chronologiques portant sur des totaux non spatialisés font à juste titre partie de la grande famille des modèles de trafic, ils sont mal reliés au calcul économique appliqué aux projets, sauf pour l’établissement nécessaire des prévisions à long terme et l’étude de leurs fluctuations. Traités comme exogènes aux scénarii économiques déjà donnés, ces composants du calcul mériterait de voir leur rattachement au cadre de calcul être l’objet d’une étude spécifique qui traiterait alors naturellement des erreurs de prévision dans le temps. Quels seraient les chapitres d’un travail de ce genre ?

i) Court terme et long terme. Il est naturel que l’effort de modélisa-

tion dont notre analyse rend compte se porte avant tout sur la réparti- tion modale parce que la vitesse d’ajustement des reports entre modes et itinéraires est élevée par rapport à celle des modifications d’activité : dans un calcul de valeur actualisée nette (VAN) où les bénéfices futurs sont escomptés à 8 ou 10%, voire davantage, les effets nets de report dominent normalement les effets nets d’induction. Ces derniers inté- ressent généralement plus les « politiciens régionaux » et les promo- teurs de l’équité spatiale63que les prévisionistes. En effet, les rétroac-

tions semblent généralement imputables à des relocalisations plutôt qu’à de nouvelles activités dans les pays avancés où dominent de nos jours les théories sur l’inéluctable convergence régionale, dont les 100 dernières années ont récemment été documentées de manière excep- tionnelle pour ces pays avancés (Polèse et Shearmur, 2005).

ii) Temps et espace. La réconciliation des élasticités obtenues à

partir des modèles à séries longues sur les agrégats par grande région et celles qui ont été dérivées de coupes transversales spatialisées ferait naturellement partie de cette nouvelle étude des dimensions temporel- les des modèles de trafic à unités diverses (tonnes, kilomètres). La

63. Un concept bizarre puisqu’il ne vise pas explicitement des personnes, d’ailleurs mobiles et libres de leur localisation, mais des espaces géographiques ou zones dans notre terminologie. On trouve donc des gens pour lesquels désenclaver les Vosges du Nord ou le Grand Nord du Canada est une question d’équité spatiale sans obligations en retour.

France est un pays favorable à cet égard car on y trouve des séries sur les marchandises-km depuis 1845 (Sauvant, 2002) et sur les voyageurs-km et l’usage des modes de communication depuis 1800 (Grübler, 1990).

Le rôle des aléas. Notre description sommaire des modèles de trafic

pourrait porter à croire que toutes les variables y sont prédéterminées, au sens statistique de ce mot qu’on oppose à aléatoire64, mais cela n’est

pas le cas dans la pratique de la modélisation même si nous en avons minoré les considérations statistiques. Pour donner généralement une idée juste des modèles et rendre compte de leur comportement, en particulier en prévision, il est certes utile d’expliciter cette dimension de l’aléatoire, tant dans la pratique courante que dans les travaux plus pointus

A. L’aléatoire et les variables expliquées : erreurs d’observation et