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Élasticités fixes et stochastiques : un rappel

Marc Gaudry

Annexe 3. Élasticités fixes et stochastiques : un rappel

Deux modèles représentatifs. Les deux formes typiques des modè-

modèles Logit probabilistes ou de parts (e.g. (15)) dont nous souhai- tons discuter des élasticités en prenant en compte l’usage des transfor- mations de Box-Cox.

En nous inspirant de Gaudry (2005), nous nous intéressons donc au modèle de régression classique linéaire et à sa généralisation Box-Cox, respectivement :

(3.1-A)

et

(3.1-B)

où la variable dépendante y est supposée strictement positive, l’indice

k est associé aux variables explicatives et les indices t des observations

ont été conservés.

Nous nous intéressons aussi au modèle Logit Linéaire explicatif de la probabilité de choix ou de la part de marché de l’alternative i, et à sa généralisation Box-Cox Logit Standard, respectivement, comme aux équations (15) et suivantes :

(3.2-A1)

(3.2-A2)

où les variables explicatives utilisées dans la fonction d’utilité repré- sentative d’une alternative Vi sont partagées entre des variables Xn

descriptives de celle-ci et des variables Xscommunes aux alternatives,

et :

(3.2-B)

où nous avons négligé les indices t des observations pour alléger l’écri- ture.

Rappel intuitif de la transformation de Box et Cox. Dans ces deux

formulations (3.1-B) et (3.2-B), la transformation Box-Cox de toute variable dépendante ou explicative Varv

(3.3)

est bien définie de façon usuelle89. On remarque en passant que, dans

cette transformation :

(i) le rôle principal du terme -1/k est d’assurer la continuité de la transformation à 0 : une simple transformation puissance impliquerait que la variable transformée tende vers 1, plutôt que vers son loga- rithme naturel, lorsque son k propre tend90vers 0. À toutes autres fins

utiles, l’interprétation du k est la même que celle d’une simple puis- sance ;

(ii) dans (3.1-B), ou d’ailleurs dans (3.2-B), la dérivée partielle de la variable dépendante par rapport à un Xk explicatif est de forme

bkXk k-1

, ce qui implique que le signe de k n’a pas d’effet sur le signe anticipé du bkparce que Xk

k-1est toujours positif.

Variables explicatives continues et notion simple ou « échantillon- nale ». Si l’on s’intéresse à une variable explicative continue Xk, la

notion simple de l’élasticité est le ratio de la variation en pourcentage de la variable dépendante y et de la variation en pourcentage de la variable explicative d’intérêt, c’est-à-dire :

Élasticité de y par rapport à Xk

(Variation de y / niveau de référence de y) 100 (Variation de Xk/ niveau de référence de Xk) 100

(3.4)

Plus précisément, pour une fonction quelconque :

y←f (X1, ..., Xk, ... XK) + e, (3.5)

89. Nous ignorons donc ici le coefficient m défini dans l’article de Box et Cox (1964) et nous en tenons à la définition commune. Par ailleurs, lorsque la variable dépendante y n’est pas transfor- mée mais que les variables explicatives le sont, on dit parfois Box-Tidwell (1962) plutôt que Box-Cox, mais nous négligerons cette pratique.

90. La démonstration de la limite lorsque l tend vers 0 est faite en utilisant la règle de l’Hospital.

on écrit :

(3.6)

où yret X k

rsont les niveaux de référence de y et de X

k. Mais on préfère

généralement à cette mesure d’arc la mesure en un point :

(3.7)

où la ligne verticale signifie que la dérivée est « évaluée au point y = yr et Xk= Xk

r» pour les variables d’intérêt y et X

ket « au point Xl= Xl

r»

pour les autres variables appartenant à (3.5). En effet, même si cette fonction est linéaire et que la dérivée partielle en (3.7) est égale au coefficient bk, l’élasticité variera selon le ratio des valeurs de référence

choisies.

Cette notion simple est souvent attribuée91 dans la littérature à

Marshall qui l’aurait découverte en 1882 lors d’un séjour à Palerme mais ne l’aurait rendue publique qu’en 1890 dans la première édition des Principles of Economics. Elle a l’avantage d’être un nombre pur (sans unités) et d’être intuitive : on voit immédiatement si une élasti- cité est convaincante.

Dans le cas où l’on estime une fonction, le rapport des valeurs de référence peut être un point particulier de l’échantillon ou un ensem- ble de points, par exemple le point représentatif des valeurs moyennes des variables. Sauf exception, par exemple logarithmique, l’élasticité dans les modèles de régression classique et logistique varie selon le point d’évaluation. On l’évalue souvent au point moyen de l’échan- tillon, ce qui a pour avantage que la valeur moyenne de y correspond à l’espérance mathématique de cette variable si la fonction (3.5) est linéaire.

91. La notion d’élasticité était commune dans les cours à l’ENPC (Sévène, 1877 ; Tavernier, 1889) et utilisée dans sa formulation mathématique par un élève de l’ENPC qui publiait sur les coûts ferroviaires dans les Annales des Ponts et Chaussées (Nördling, 1886) comme l’ont vérifié Ekelund et Hébert (1999) qui laissent entendre qu’elle aurait pu être empruntée par Marshall qui lisait le français et citait même Dupuit sur d’autres points. Caveat indigator !

En fait, il est sage de reconnaître d’emblée que l’évaluation peut généralement être faite en n’importe quel point t de l’échantillon et d’incorporer cette information à la formule (3.7) qui devient alors :

(3.8)

En conséquence, il ne faudra pas confondre l’évaluation au point moyen d’un échantillon et la moyenne des évaluations faites chacune en un point de l’échantillon. L’élasticité « à la moyenne » n’est pas l’élasticité moyenne calculée en faisant la moyenne des élasticités ponctuelles.

Reconnaissance du caractère aléatoire de y. En fait l’expression

(3.8) traite implicitement la fonction (3.5) sans reconnaître le caractère aléatoire de y. Puisque cette variable est bien aléatoire, on peut s’inté- resser rigoureusement à tous ses moments. Pour les deux premiers moments, on écrirait, respectivement pour le premier et le second :

(3.9)

(3.10)

Plus généralement, on peut s’intéresser aussi à la médiane de y ou à d’autres moments de y, comme le troisième, mais ces applications sont rarissimes même si, par exemple, l’impact de Xksur le point médian est

souvent d’intérêt pratique en économie. En fait, la mesure elle-même de l’élasticité devient aléatoire puisqu’elle incorpore des variables aléatoires. On peut alors définir des écarts-types pour l’élasticité, mais nous ne développerons pas ici ces idées.

Remarquons en passant que la probabilité de choix dans le modèle Logit est aussi traitée comme une variable déterministe, même si on peut relier la forme (3.2) à des aléas de l’utilité individuelle, dans la

tradition dite « de l’utilité aléatoire ». En effet, personne ne s’intéresse à E(pi), l’espérance de la probabilité de choix, ou à d’autres moments

de cette probabilité comme sa variance92 ou son asymétrie. À notre

connaissance, on ne trouve dans la littérature aucune formulation qui traite des moments de la probabilité ou de la part du modèle (3.2) de manière analogue à (3.9) ou (3.10).

Notion simple dans le cas du modèle Logit. L’application mécani-

que de la notion non aléatoire simple à la probabilité ou à la part de marché produit une expression correspondant exactement à (3.8) :

(3.11)

qui est bien la formule « élasticité-parts » utilisée le plus souvent avec le modèle Logit, sauf pour de rares évaluations de la forme « élasticité- points de pourcentage » dont nous parlerons maintenant.

La notion de points de probabilité ou de pourcentage. Comme une

part ou une probabilité est déjà un pourcentage, il serait préférable, pour retrouver l’intuition première exprimée en (3.4), d’utiliser la notion de « points de pourcentage » (en agrégé) ou de « points de probabilité » (en désagrégé) plutôt que la mesure (3.11) d’élasticité de la part ou de la probabilité. La nouvelle mesure est obtenue en multi- pliant (3.11) par la part de référence (au point t) :

(3.12)

et elle correspond bien à ce que l’on fait quand on discute de valeurs obtenues en appliquant (3.11) puisqu’il est alors nécessaire de se rap- peler du niveau de référence de la part ou de la probabilité pour l’interpréter (3.11) : gagner 5 points donne une forte élasticité si la part de marché du mode considéré représente 10 % du marché mais donne une élasticité faible si elle est de 90%. Il est plus simple et plus clair de calculer le nombre de points, comme le fait (3.12).

92. Ici comme plus haut en (3.1) ou (3.5), il ne faut pas confondre l’intérêt porté à la variance de l’erreur de régression (le problème de l’hétéroscédasticité) avec celui de la variance de la variable dépendante.

Les variables catégoriques dans les deux types de modèles. Même si

la dérivée d’une variable auxiliaire (catégorique ou binaire) Xd

n’existe pas et qu’il est impossible de calculer (3.7), il est toutefois possible de calculer l’élasticité arc (3.6) d’une variable catégorique en utilisant son coefficient de régression (dans (3.8), (3.11) ou (3.12)) et Xd*, la valeur moyenne des observations sur les valeurs positives de

Xd, comme cela est démontré dans Dagenais et al (1987) pour le cas

classique (3.7). Cette méthode donne pour le cas de l’élasticité-points propre (3.12) :

bc•Xd*•(1-pm)•pm (3.13)

Dans le cas ordinaire d’une variable continue affectée d’une trans- formation Box-Cox, on calculerait simplement pour (3.13) :

bv•Xv kv

(1-pm)•pm. (3.14)

où Xvdoit être évalué quelque part, par exemple à la valeur moyenne93

de cette variable.

On peut donc, grâce à (3.13) et (3.14), calculer l’élasticité-point directe (propre) pour toute variable explicative d’un modèle Logit, que cette variable soit continue ou catégorique, comme on peut le faire pour un modèle classique. Cette possibilité de calcul des élasticités de toutes les variables d’un modèle fait de ce filtre un outil complet d’évaluation intuitive des résultats des modèles.

93. En principe, les parts pmà utiliser pour ce calcul sont les parts estimées pm* ; si les parts

observées sont utilisées pour évaluer la fonction, une erreur systématique égale à (pm– pm 2

pm* + pm*

2) est introduite. Pour les cas d’évaluation à la moyenne, l’usage des parts observées

plutôt que des parts calculées introduira une erreur proportionnelle commune aux élasticités calculées pour toutes les variables.

ANALYSE COÛT-BÉNÉFICE DANS