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C’est aux organismes de formation qu’il revient

Dans le document 53-54 : Service public (Page 72-76)

d’affirmer l’inscription

de la bibliothèque dans

le service public, et d’en

décliner les incidences

bibliothéconomiques.

Comment le font-ils ?

La question a été posée

aux CRFCB et à la

commission Formation

de l'ABF.

DOSSIER

JOSETTE GRANJON, CÉCILE TRÉVIAN et ANGEL CLEMARES Sensibiliser au service public dans la formation des bibliothécaires 71 de trouver de quoi s’informer, se former, se cultiver, se dis-

traire.

La formation ABF propose aux stagiaires des outils pour remplir au mieux leurs missions de service public. Mais elle ne peut leur apprendre, quand ils ne les possèdent pas, le savoir- être, la réceptivité à l’autre, l’ouverture d’esprit qui devraient caractériser tous les bibliothécaires.

Josette GRANJON et Cécile TRÉVIAN

2. Les CRFCB et la notion de

service public

Si l’on s’interroge sur ce pour quoi sont faits les centres régio- naux de formation aux carrières des bibliothèques (CRFCB), sur les missions qui les caractérisent indépendamment de leur taille – variable – ou de leur inscription dans un territoire donné – régional pour les uns, interrégional pour les autres –, on constate que l’action des 12 CRFCB 1 se décline sur trois niveaux, et qu’à chaque niveau la notion de service public tient une place qui est loin d’être négligeable :

• Mission 1 : favoriser l’insertion professionnelle par l’or- ganisation de préparations aux concours (interne et externe) de recrutement aux emplois des bibliothèques appartenant à la fonction publique d’État et à la fonction publique ter- ritoriale (pour ces derniers, des partenariats peuvent être mis en place avec les délégations régionales du CNFPT). Tout d’abord, il convient de remarquer que les lieux dans lesquels s’exerce le métier de bibliothécaire en France sont quasi- exclusivement des services publics, puisque aussi bien les bibliothèques territoriales que les services communs de la documentation au sein des universités relèvent du secteur public. Partant de là, la notion de service public est très lar- gement abordée dans les préparations aux concours de la fonction publique, que ce soit dans des enseignements en présentiel ou dans des formations à distance, de même que dans des formations longues de type formation profession- nelle de base ou dans des formations diplômantes de type Diplôme d’Université (DU). Ainsi, les cours relatifs aux ins- titutions, à l’organisation administrative de la France, aux statuts de la fonction publique, sans oublier l’histoire des bibliothèques, insistent sur le sujet, en en soulignant à la caractère obligatoire, sont précisées cependant les responsa-

bilités respectives des différentes collectivités qui l’assurent auprès de la population, et les moyens nécessaires à mettre en œuvre.

C’est alors que, de manière plus implicite, cette notion de service public est abordée dans la formation, tant à travers les cours relatifs à la constitution des collections matérielles qu’à travers les différents services à rendre au public, y com- pris en ligne.

L’ensemble des activités d’une bibliothèque est orienté vers l’utilisateur final, le public. Si les stagiaires s’initient à la politique documentaire – « quelle politique d’acquisition pour quels publics » –, décortiquent le pavé ISBD et planchent sur l’indexation, c’est pour être à même de remplir au mieux leurs missions : que chacun trouve facilement ce qu’il vient chercher dans une bibliothèque.

Mais le contexte dans lequel le métier s’exerce change, et la bibliothèque a cessé d’être ce lieu clos, ce tout cohérent qui se voulait encyclopédique et universel. À l’exemple du codex, qui enferme dans ses plis un contenu autonome, la bibliothèque traditionnelle est aujourd’hui remise en cause par l’informatique, l’internet, les liens. Les ressources numé- riques, le virtuel, ont créé un monde, celui de l’information, dont le centre est partout et la circonférence nulle part : c’est le monde du réseau.

Ce changement de paradigme infléchit naturellement les pratiques des bibliothécaires. Les acquisitions ne se font plus à partir des seules collections physiques, mais prennent en compte les ressources numériques, gratuites ou payantes ainsi que des paramètres logistiques tels que le prêt inter- bibliothèques. Le catalogage disparaît au profit de la récu- pération de notices. La formation a intégré ces changements et les stagiaires sont invités à naviguer sur internet pour se familiariser avec les outils professionnels et les ressources de la toile et vivre la bibliothèque comme le maillon d’un réseau qu’ils ont la charge de rendre accessible à tous. Ils suivent pour ce faire un module autour des services en ligne – informations pratiques, démarches, accès à des fonds spé- cifiques –, découvrent les incroyables richesses des outils col- laboratifs et intègrent les sites internet dans leurs démarches de recherches documentaires.

Mais les ressources, qu’elles soient physiques ou vir- tuelles, nécessitent souvent une médiation. Et c’est là sans doute le cœur de métier de bibliothécaire : savoir faire venir tout un chacun dans un lieu d’accueil, d’écoute, d’échange, l’accompagner dans ses recherches, l’aider à s’approprier les codes d’une société qui se complexifie, lui permettre

1. Les douze centres régionaux de formation aux carrières des bibliothèques qui fonctionnent en réseau sont implantés dans les villes suivantes : Bordeaux (Médiaquitaine), Caen, Clermont-Ferrand, Dijon (Bibliest), Grenoble-Lyon (Médiat), Lille (MédiaLille), Marseille, Nancy (Médial), Paris (Médiadix), Poitiers (Média Centre-Ouest), Rennes et Toulouse.

qu’on est en droit d’exiger d’un candidat à un concours des bibliothèques quel qu’il soit ; ce thème est également présent dans les programmes des formations longues proposés aux personnes qui souhaitent être sensibilisées au métier et dési- rent en acquérir les compétences essentielles.

• Mission 2 : s’inscrire dans un processus de formation tout au long de la vie dans un domaine à forte innovation, par la mise en place d’actions de formation continue auprès des personnels des bibliothèques et de la documentation de fois l’origine lointaine 2 et son acception moderne telle qu’elle

a pu être élaborée à l’époque contemporaine, notamment sous la IIIe République 3. Le thème du service public fait donc

partie intégrante du socle de connaissances et de savoirs

MODIFICATION DÈS 2011 DU FINANCEMENT DES CENTRES RÉGIONAUX DE FORMATION AUX CARRIÈRES DE BIBLIOTHÈQUES (CRFCB)

La Mission pour l’Information Scientifique et Technique et le Réseau Documentaire (MISTRD) du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR) a annoncé aux Centres Régionaux de Formation aux Carrières des Bibliothèques un chan- gement brutal et immédiat concernant leur financement.

Les structures des CRFCB et leur subvention de fonctionnement sont maintenues en 2011 mais les subventions pédagogiques sont supprimées. Ces subventions pédagogiques permettent aux CRFCB d’organiser, à titre gratuit pour les personnels de bibliothèques de l’Enseignement supérieur, des préparations aux concours des bibliothèques et des stages de formation continue au plus près des besoins exprimés par les services communs de la documentation des universités. Cette suppression d’une subvention versée au titre des « actions spécifiques » est due à la volonté du MESR de « mettre fin au double financement de la formation continue des personnels de bibliothèques dans le cadre de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) et du passage aux responsabilités et compétences élargies (RCE) ». Or, la dotation globale que reçoivent les universités de la part du MESR ne tient pas compte de critères concernant les personnels de bibliothèques, a priori par pour leur formation continue. On se trouve en présence d’un transfert de charges sans transfert de crédits ; en effet, il a été tout simplement demandé aux CRFCB de facturer leurs prestations aux universités qui devront désormais acheter leurs formations aux CRFCB (ou à un autre opérateur). En conséquence, le CRFCB, de partenaire privilégié qu’il était dans la définition et la reformulation des besoins exprimés par les professionnels, est mis au rang de simple prestataire.

Les personnels de bibliothèques des universités risquent de se voir proposer des stages moins nombreux et moins bien ciblés par rapport aux problématiques du métier. Or, à l’heure où de nombreux projets de bibliothèques d’un type nouveau, tels que les learning centers, apparaissent et où de nouvelles compétences, en particulier dans le domaine du numérique, sont attendues de la part de toutes les catégories de personnels, notamment des personnels de catégorie B et C, les besoins en formation sont particulièrement importants. Soulignons ici que les personnels de catégorie B et C sont le public privilégié des CRFCB. De plus, cette mesure qui conduit à un affaiblissement des CRFCB risque de les fragiliser vis-à-vis de leurs partenaires impli- qués dans le réseau de lecture publique : DRAC et CNFPT, et de remettre en cause les synergies pourtant particulièrement positives existant entre les formations des bibliothèques des collectivités territoriales et celles des services communs de la documentation des universités.

L’ABF regrette qu’une telle mesure ait été prise. Elle s’étonne même d’une telle décision qui va à l’encontre des préconisations du rapport de l’inspection générale des bibliothèques sur la formation continue et qui contredit l’annexe au projet de loi des finances de 2011 concernant les actions spécifiques de l’action « Documentation et bibliothèques ».

L’ABF tient à exprimer son attachement à un réseau de centres de formation qui œuvre depuis plus de 20 ans pour l’évolution du métier de bibliothécaire et la transmission de ses valeurs professionnelles.

L’ABF demande donc instamment au MESR de revoir sa position vis-à-vis du financement des CRFCB.

Communiqué de l’ABF du 22 novembre 2010

2. Citons le traité de Gabriel Naudé de 1644 : Advis pour dresser une biblio- thèque, où celui qui fut le bibliothécaire de Mazarin écrit : « Une bibliothèque est ouverte à chacun et de facile entrée et fondée dans le but de n’en dénier jamais la communication au moindre des hommes qui pourra en avoir besoin. » 3. Voir à ce propos l’entretien accordé par le sociologue Luc Rouban au Nouvel Observateur, n° 2401, 11-17/11/2010, notamment le rôle éminent joué par le radical-socialiste Léon Bourgeois et sa doctrine solidariste.

DOSSIER

JOSETTE GRANJON, CÉCILE TRÉVIAN et ANGEL CLEMARES Sensibiliser au service public dans la formation des bibliothécaires 73

• Mission 3 : conseiller, informer et orienter sur l’en- semble des métiers et des carrières des bibliothèques et de la documentation en mettant à disposition, le cas échéant, une documentation spécialisée et à jour sur les métiers, les accès à la profession et l’environnement culturel de celle-ci ; parallèlement, les centres constituent de véritables lieux d’échanges et de partage d’expérience entre les profession- nels des différentes bibliothèques et centres de documenta- tion. À ce niveau, on se situe en amont de l’activité de forma- tion proprement dite ; en effet, il n’est plus question ici de délivrer des connaissances et des savoirs, ou bien de former à l’acquisition et/ou la consolidation de savoir-faire ou de compétences opérationnelles. Il s’agira plutôt, à la faveur d’un entretien avec une personne désireuse d’embrasser la profession, de travailler sur les représentations que celle-ci s’en fait et de les mettre en correspondance avec la réalité du métier. Eu égard au sujet qui nous occupe, il ne s’agira pas de transmettre, d’enseigner ou tout simplement de for- mer, mais plutôt de pointer la notion de service public en tant que valeur 6 capitale de la culture professionnelle dont nous

sommes les dépositaires.

Or, à l’heure où pèse sur le réseau des CRFCB des menaces dont l’ABF s’est d’ailleurs fait l’écho (voir encadré) 7, on peut

craindre pour la transmission de cette valeur fondamentale. La suppression des crédits pédagogiques des CRFCB par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche risque en effet de les obliger à instaurer avec leurs parte- naires des relations de plus en plus marchandes ce qui, à terme, pourrait conduire à sortir la formation continue des professionnels des bibliothèques du secteur public. Dans une telle hypothèse, on peut s’interroger légitimement sur la façon dont la notion de service public serait traitée dans les formations.

Angel CLEMARES toutes origines (personnels des bibliothèques et structures

documentaires académiques et/ou personnels travaillant dans les collectivités territoriales) ; ces actions de formation prennent la forme soit de stages, qui vont de l’initiation au perfectionnement, soit de journées d’étude autour de thèmes prégnants et de problématiques émergentes au sein de la profession. Pour simplifier, les formations qui ressortissent à la formation continue 4 se distribuent dans cinq grands

domaines, à savoir « Bibliothèque et son environnement », « Organisation-Management », « Collections et politiques documentaires », « Technologies de l’information et de la communication » et « Publics ». On le pressent à la lecture de l’intitulé, cette dernière catégorie regroupe nombre de forma- tions où il va être question de service public, et plus précisé- ment de services aux publics, principalement dans des stages dédiés à l’accueil ; en parcourant les catalogues de stages des 12 CRFCB, on retiendra, entre autres exemples, des for- mations sur l’accueil des publics handicapés, sur la produc- tion d’un guide d’accueil ou d’un référentiel accueil, sur les aménagements de la bibliothèque en tant que lieu physique, sur la signalétique ou encore sur la démarche qualité. Mais à y regarder de plus près, la notion de services aux publics va se retrouver dans des stages autour des politiques documen- taires – quelle politique documentaire digne de ce nom peut faire l’impasse sur une très bonne connaissance des publics et des usages de ces publics afin de pouvoir proposer une offre documentaire pertinente, et ainsi de jouer pleinement le rôle dévolu à un service public ? – mais également dans des stages qui relèvent du domaine des « Technologies de l’information et de la communication » : réfléchir à la mise en place d’un portail documentaire, d’un catalogue enrichi de type web 2.0 ou encore d’un blog événementiel se doit d’intégrer les évolutions des pratiques des usagers afin d’adapter une offre de service à l’environnement numérique. Là encore, il ne s’agit pas de céder à un quelconque effet de mode, mais bien de faire vivre un des trois grands principes du service public, à savoir le principe de mutabilité qui enjoint les organismes publics à suivre de très près les évolutions sociétales majeures, principe qui, soit dit en passant, fait écho dans le monde des bibliothèques à la cinquième loi 5 de Ranganathan, laquelle stipule qu’une bibliothèque est un organisme en développement.

6. Bertrand, Anne-Marie, « La transmission de l’implicite ou comment la culture professionnelle vient aux bibliothécaires », BBF, 2003, n° 1, p. 10-15. 7. En ligne : www.abf.asso.fr/pages/interieur-contenu.php?categorieTOP=2&c

ategorie=22&id_contenu=140. 4. Rappelons qu’en 2009, les 12 CRFCB ont mis en place pas moins de 508

stages et 36 journées d’étude, soit un nombre de personnes formées qui dépasse les 11 000.

5. Les quatre autres lois de Ranganathan sont : 1. Les livres sont faits pour être utilisés. – 2. À chaque lecteur son livre. – 3. À chaque livre son lecteur. – 4. Épargnons le temps du lecteur.

En bref

Aurélie Bosc, après plusieurs années de disponibilité en Asie du Sud-Est, est depuis le 1er septembre la directrice-adjointe- patrimoine et numérisation de la Cité du Livre d’Aix-en-Provence.

Ségolène Chambon, ex-trésorière du groupe ABF-Lorraine, a quitté la BM de Toul pour prendre la responsabilité du pôle politique documentaire à la médiathèque de Colomiers (31).

Denis Cordazzo prend la responsabilité des collections de sciences politiques à la Bpi en janvier 2011. Il avait été directeur de la BM de Saint-Cloud avant de passer au SLL en 2003 où il gérait la base statistique des bibliothèques territoriales. Jean-Claude Hanol a remplacé Noëlle de Vallavieille à la direction du réseau des bibliothèques municipales de Courbevoie le 1er octobre. Il était auparavant directeur-adjoint de la médiathèque de Neuilly-sur-Seine. Pierre-Yves Renard a pris la direction de la BDP de Maine-et-Loire le 1er octobre 2010. Il était auparavant responsable de la bibliothèque de l’Insee. Il y remplace Bruno Dartiguenave.

Yann Sordet prend la direction de la bibliothèque Mazarine au mois de janvier, succédant ainsi à Christian Péligry, parti à la retraite. Il dirigeait jusque-là le département de la Réserve de la bibliothèque Sainte-Geneviève. Valérie Travier a pris le 1er septembre la direction de la BU de Nîmes. Elle dirigeait depuis 2000 le SCD de la bibliothèque universitaire du Maine (devenue la bibliothèque Vercors au Mans).

Dans le document 53-54 : Service public (Page 72-76)

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